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& fans doute encore ailleurs. Ainfi abufoient des Prêtres fce lerats, de la crédulité du peuple, faisant paffer les enfans qui naiffoient de ce commerce inceftueux, pour les enfans des

Dieux.

4°. Ceux qui furent les imitateurs des belles actions des Dieux, & qui excellerent dans les mêmes Arts, passerent pour leurs fils, comme Esculape, Orphée, Linus, & quelques autres.

5°. Ceux qu'on trouvoit expofés dans les Temples ou dans les Bois Sacrés : ainfi Ericthonius passa pour être fils de Minerve & de Vulcain, comme S. Auguftin l'a remarqué.

6o. Ceux qui fe rendoient fameux fur la mer, étoient regar dés comme les enfans de Neptune.

7o. Ceux dont le caractere reffembloit à celui de quelque Dieu, paffoient pour leurs fils. Etoit on éloquent ? on avoit Apollon pour pere: fin ou rusé? on paffoit pour fils de Mercure. Ainfi on a dit que Chione, Chione, fille de Dedalion, avoit été maîtreffe d'Apollon & de Mercure, parce qu'elle eut deux enfans, dont l'un ( c'étoit Philamon étoit éloquent; & l'autre, qui s'appelloit Autolycus, un habile filou. De même, ceux qui étoient braves, reconnoiffoient Mars pour pour leur pere, comme Enomaüs, Terée, Romulus, &c. On doit dire à peu près la même chofe de ceux que les Poëtes difoient être fils ou des Fleuves, ou des Montagnes, comme Daphné, fille du fleuve Penée; Enone, du Cebrene, Aventinus, Tyberinus, Inachus, & tant d'autres : ce qu'on doit entendre, ainfi que Lactance l'explique, des enfans de ceux qui ont porté le nom de ces Fleuves, ou de ces Montagnes.

8°. Ceux dont l'origine étoit obfcure étoient reputés enfans de la Terre, comme Tagès, ce celebre Etrurien, qui fut regardé comme l'inventeur de la Divination Etrufque, & des ceremonies religieufes pratiquées dans les Augures. Les Geants dans l'Histoire fabuleufe, étoient auffi regardés pour la même raifon comme les enfans de la Terre.

9°. Quand quelque Prince avoit interêt de cacher un com merce fcandaleux, on ne manquoit pas de donner un Dieu pour pere à l'enfant qui en naiffoit. Ainfi Protus étant entré dans la tour où Acrife Roi d'Argos, effrayé de la prédiction

d'un Oracle, avoit enfermé fa fille Danaé, on publia que Jupiter s'étoit métamorphofé en pluie d'or, pour feduire cette Princeffe, & Perfée paffa pour être le fils de ce Dieu. De même Amulius ayant trouvé le fecret de s'introduire dans la prifon où Numitor avoit fait enfermer Rhea Sylvia fa fille, on fit paffer pour enfans de Mars, Romulus & Remus, nés du commerce de ce Prince avec fa niece. L'Amant fecret d'Alcmene fut pris pour Jupiter, & Hercule fut toujours regardé comme le fils de ce Dieu. Enée fut redevable de fa qualité de fils de Venus, tant vantée par les Romains, au foin que prit fon pere Anchife de publier qu'il l'avoit eu de cette Déeffe, dans les forêts du mont Ida. On doit penser la même chose de Caftor & de Pollux, fils de Leda; ainfi d'une infinité d'autres, qu'il feroit trop long de nommer. Olympias fit tous fes efforts pour perfuader que Jupiter étoit le pere d'Alexandre fon fils, mais au temps où vivoit cette Princeffe, on n'étoit plus fi crédule, & cette défaite ne fit taire la medifance.

que

pas

10°. Enfin, prefque tous les Heros de l'Antiquité avoient du moins des Dieux pour ancêtres, & ils paffoient pour en être les fils ou les petits-fils, car pour peu qu'on fuive leurs Genealogies, elles fe terminent ordinairement à quelque Dieu.

Voila ce que j'avois à dire fur la Nature des Dieux que le Paganisme avoit introduits; comme ils n'étoient pas tous égaux, on les divifoit en plufieurs Claffes, c'est ce qui fera la matiere du Chapitre suivant.

(1) Liv. 2. ch. 145.

CHAPITRE V.

Divifion des Dieux du Paganisme en plufieurs Classes.

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OMME le nombre des Dieux adorés par les Payens étoit prefque infini, il faut pour en parler avec quelque ordre, les divifer en plusieurs Classes; c'est ce qu'ont fait les Mythologues anciens & modernes, lorsqu'il a été question de reduire en une espece de Syftême fuivi, une Theologie auffi mons trueufe que l'étoit celie du Paganisme.

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Herodote (1) diftingue, d'après les Egyptiens, trois fortes de Claffes de Dieux; voici comme il s'exprime à l'occafion d'Hercule. » Parmi les Grecs, dit-il, Hercule, & Pan, font les derniers des Dieux, νεώτατοι τῶν θεῶν ; mais chez les Egyptiens, Pan est un Dieu très-ancien, & du nombre de » huit qui font les premiers de tous: Hercule eft dans la Classe » des feconds, qui font au nombre de douze ; & Bacchus dans celle des troifiémes, qui ont été engendrés des douze grands Dieux ».

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Il eft fâcheux que cet Auteur ne nous ait pas appris les noms des Dieux qui compofoient ces trois Claffes; nous aurions une connoiffance exacte de la Mythologie Egyptienne. Les Sçavans, pour suppléer à ce défaut, ont partagé les Dieux en plufieurs Claffes.

On les divifoit en Grands Dieux, Dii majorum Gentium, ou Dieux du Confeil, Dii Confuentes ou Confulentes; & en Dieux des moindres Nations, minorum Gentium. Les premiers étoient les Grands Dieux, reconnus par-tout, furtout dans la Grece & dans l'Italie. Les feconds étoient ceux qui avoient été ajou tés & affociés aux anciens ; & ils étoient particuliers à certains Peuples. I el étoit le Quirinus des Romains, le Semo-Sancus des Etruriens, &c. Les Grecs reconnoiffoient douze de ces Grands Dieux, dont Ennius nous a confervé les noms; Junon, Vefta, Minerve, Cerès, Diane, Venus, Mars, cure, Jupiter, Neptune, Vulcain, & Apollon.

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Juno, Vefta, Minerva, Ceres, Diana, Venus, Mars,
Mercurius, Jovis, Neptunus, Vulcanus, Apollo.

Chacun de ces Dieux prefidoit à un mois de l'année; Junon
au mois de Janvier, Neptune à celui de Fevrier, ainfi des
autres : ou bien à chacun des Signes du Zodiaque, comme
nous l'apprend Manilius (1); ce qui revient au même. Une (1) Aftr. 20.
des folies d'Alexandre étoit, au rapport d'Arrien, d'être mis
au nombre de ces Grands Dieux, & de faire le treiziéme de
cette premiere Claffe.

2. Les Romains y en joignirent huit autres ; c'étoient les Dieux choifis, Selecti, Janus, Saturne, le Genie, le Soleil, la Lune, Pluton, Bacchus, & l'ancienne Vefta, ou la Terre. Ces Dieux, à l'exclufion des autres, avoient le privilege d'être representés en or, en argent & en yvoire : ce qui doit s'entendre des derniers temps; car dans les commencemens, comme nous l'avons déja remarqué, on n'employoit aux figures des Dieux que du bois, ou quelque pierre informe. Potius lignea, dit Pline (2), aut fictilia Deorum fimulachra, in (2) Liv. 34. delubris dedicata, ufque ad devictam Afiam, unde irrepfit luxu

ria.

3. Enfuite venoient les Dieux Semones, ou Semi-homines ou Semi-Dii, qu'on ne croyoit pas affez grands pour habiter dans le ciel, mais qui meritoient quelque chofe de plus que la terre; comme Priape, Hyppone, Vertumne, & en particulier tous les Heros.

4. Il y avoit des Dieux communs, qui étoient ceux qui favorifoient tous les partis; comme Mars, Rellone, la Victoire, la Fortune ou qui étoient adorés dans tous les lieux & parmi toutes les Nations; comme Vefta, ou la grande-mere des Dieux; & c'eft ainfi que ceux-là étoient differens des Dieux Topiques, qui n'étoient adorés qu'en certains lieux (a), comme Aftarte dans la Syrie, Derceto & Semiramis chez les Affyriens, Quirinus à Rome, Faunus parmi les Latins Tagès chez les Tofcans, & Sancus parmi les Sabins. Ainsi adoroient encore les Egyptiens Ifis & Ofiris, les Maures Juba, les Carthaginois Uranus, les Siciliens Adramus, les (a) Ce mot vient du grec τόπω.

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Atheniens Minerve, le Peuple de Delphes Apollon, celui de Naxe Bacchus, celui de Cos Ariftée, celui de Lemnos Vulcain, celui de Paphos Venus. Tel étoit encore dans les Gaules Theutat, chez les Iberiens Endovellicus, Mars chez les Thraces, Adad chez les Affyriens, Taraxippus chez les Eléens, Coronis chez les Sicyoniens, Zamolxis chez les Thraces, fans parler d'une infinité d'autres, dont les noms font moins connus (a).

5. Il y avoit encore en chaque pays les Dieux Indigetes, ainfi nommés, ou parce qu'ils étoient attachés à de certains lieux, quafi in loco degentes; ou parce qu'ils étoient prêts à écouter ceux qui avoient befoin de leur fecours, quia faciles invocari; ou pour marquer qu'ils étoient du pays où on les invoquoit, quafi indigena; ou parce qu'il n'étoit pas permis de les appeller par leur propre nom, quia indigetari nefas; car les Sçavans donnent toutes ces étymologies au nom des Dieux Indigetes (b).

6. Il y avoit encore des Dieux Cabires, comme qui diroit affociés, tels qu'étoient Proferpine, Pluton, &c. & on plaçoit dans le même rang, les Corybantes, les Curetes, & les Dactyles Idéens.

7. Des Dieux Palices, dont le culte étoit celebre, fur-tout dans la Sicile; & des Pataïques, dont les figures fervoient à orner les proües des Vaiffeaux, dont ils étoient les Patrons.

8. On adoroit auffi des Dieux Penates & des Dieux Lares; les maisons des particuliers leur fervoient de Temple & d'Asyle, comme les Carrefours étoient les lieux où l'on honoroit les Dieux Compitales.

9. On reconnoiffoit des Dieux des bois, des fontaines, des fleuves & de la mer ; tels qu'étoient les Satyres, les Nymphes, les Naïades, les Sirenes, les Neréïdes, &c.

(a) Voyez Lylio Geraldi, Synt. 10.

(b) Servius, fur le douzième Livre de l'Eneide parle ainfi du nom de ces Dieux, Indigetes duplici ratione dicuntur ; vel fecundum Lucretium quòd nullius rei egeant:

Ipfa fuis pollens opibus, nil indiga noftri.

Vel quòd nos eorum indigeamus, undè quidam Deos omnes Indigetes appellari voluns. Ali Patrios Deos Indigetes dici debere tradunt, alii ab invocatione dictos uolunt, quòd indegiro eft precor & invoco, vel certè Indigetes funt Dii ex hominibus facti, & Dii Indigetes, quafi in Diis agentes,

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