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Grecs le nom feul d'Hercule, fans jamais avoir rien oui dire des autres Dieux des Grecs »?

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Herodote qui paroît avoir été particulierement curieux de ce qui regarde ce Dieu, dit que pour mieux s'en éclaircir il étoit allé à Tyr, ville de Phenicie, parce qu'il avoit appris qu'Hercule avoit un Temple celebre dans cette ville; qu'il trouva en effet ce Temple orné de magnifiques prefens, & qu'il y avoit deux Statues de ce Dieu, une d'or, & l'autre d'une pierre precieuse, qui jettoit pendant la nuit un grand éclat; qu'il avoit demandé aux Prêtres fi ce Temple étoit ancien ; & qu'ils lui avoient repondu, qu'il l'étoit autant que la ville, qui avoit été bâtie depuis deux mille trois cens ans; époque plus ancienne que les Grecs. Il ajoute qu'il y avoit dans la même ville un autre Temple, dedié à Hercule Thafius, & que s'étant tranfporté à Thase, il y avoit vû un Temple bâti en l'honneur de ce Dieu, par ceux qui enleverent Europe, évenement qui précéde de cinq generations la naisfance de l'Hercule Grec d'où il conclut qu'Hercule eft une ancienne Divinité, & que les Grecs font bien d'en honorer deux, l'un comme un Dieu immortel (a), l'autre comme un Heros (b.

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Ce même Hiftorien ajoute encore plufieurs chofes concernant la Religion des Egyptiens, leurs Fêtes & leurs Sacrifices, que je rapporterai dans la fuite.

l'Ido

Je fuis très perfuadé, comme je l'ai dit ailleurs, que lâtrie fut moins groffiere & moins chargée de ceremonies dans fes commencemens qu'elle ne le fut dans la fuite, & que le Peuple dont je parle, n'admit d'abord qu'un petit nombre de Dieux, c'est-à-dire, les Aftres & les Elemens. Si nous en croyons même Plutarque, il ne faut pas confondre avec le refte de l'Egypte, les Thebains, dont la Religion étoit beaucoup plus pure que celle des autres Egyptiens. Les habitans de la Thebaïde, dit cet Auteur, fuivant la correction de Voffius, font exempts de ces fuperftitions, puifqu'ils ne reconnoiffent aucun Dieu mortel, n'admettant pour premier principe que le Dieu Cneph, qui n'a point de commencement, & qui n'est

(a) Surnommé l'Olympiea.

(b) Voyez Tome III. T'Article des Heros.

point

Deor.

point fujet à la mort (a). On ne doit pas même douter que tant de figures monftrueufes fous lefquelles les Egyptiens reprefentoient leurs Dieux, ne fuffent l'ouvrage, ou de l'impofture des Prêtres, ou des rêveries de ceux de leurs Philofophes qui admettoient la Metempsycofe, ou le fruit de l'imagination des Peintres & des Sculpteurs. Ciceron le difoit des Dieux Romains: les Dieux prefentent les figures qu'il a plu aux Peintres & aux Sculpteurs de leur donner, Nos Deos omnes eâ facie novimus, quâ pictores fictoresque voluerunt (1). Cette licence ne re- (1) De Nat. garde pas les premiers temps, où peut-être même les Egyp tiens n'avoient pas encore fongé à reprefenter leurs Dieux fous les figures des hommes ou des animaux. J'ajoute que cette derniere forte de reprefentation doit fon origine à l'opinion de la Metempsycofe, qui enfeignoit que l'ame paffoit après la mort dans le corps des animaux. De-là ces figures monftrueuses de tant de Divinités Egyptiennes, dont les unes paroiffoient avec des têtes de chat, de finge, d'épervier, d'ibis, de chien, &c. telles qu'on les voit dans les Cabinets des curieux mais j'expliquerai dans un Chapitre de ce Livre, cette partie de la Mythologie des Egyptiens.

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Herodote parle en plufieurs endroits, tantôt des huit grands Dieux, puis de douze autres adorés des Egyptiens; mais il ne les nomme pas exactement.

Quoique Ifis & Ofiris fuffent, fuivant cet Auteur & tous les Anciens, les Dieux les plus refpectables de l'Egypte, & qu'ils fuffent honorés dans tout le pays, au lieu que les autres ne l'étoient que dans des Nomes (b) particuliers, cependant je crois qu'ils n'ont pas été les premiers ni les plus anciens: voici l'ordre dans lequel les placent les Mythologues. Ils mettent à la tête de leur lifte Vulcain & Vefta, c'est-à dire le feu; puis viennent Saturne, Rhea, Cerès, Neith ou Minerve, le Nil, ou plûtôt l'Ocean; car ce fleuve anciennement s'appelloit ainfi ; Jupiter, Junon, Mars, Hammon, confondu dans la fuite avec Jupiter, & enfin un troifiéme Jupiter furnommé Uranius, ou le celefte. Après ces douze grands Dieux

(a) Voyez ce qu'on dira de ce Dieu dans la fuite.

(b) Ce mot fignifie les differentes Préfectures, ou les differens Gouverneurs de L'Egypte.

Tome I.

Mmm

(1) Recher. Crit

venoient Ofiris, Ifis, Typhon, qu'ils nommoient auffi Seth; Bebon ou Smyt, fuivant Plutarque, Nephté fa femme, Venus, Orus fils d'Ifis, Arueris, plus ancien qu'Orus & le modele de l'Apollon des Grecs. Canopus, Bubaftis ou Diane, Harpocrote, Anubis, d'où eft venu le Mercure Grec. Macedo fils d'Ofiris, Pan ou Mendès, Maro, Triptoleme, Hercule, Mercure Trifmegifte, Antée, Bufiris, & Promethée, enfin Serapis, que quelques Auteurs confondent avec Ofiris.

Je devois mettre à la tête de ce Catalogue, Cneph, le Dieu `des Thebains, Etre éternel & immortel, qu'on regardoit comme l'auteur de toutes chofes. C'est ce premier Principe qu'on reprefentoit à Diofpolis fous la figure d'un homme, qui avoit une plume fur la tête, & qui tenoit de la main un Sceptre & une Ceinture. De fa bouche fortoit un œuf d'où émanoit Phta ou le monde, comme nous l'avons expliqué plus au long dans l'Article de la Theogonie Egyptienne.

La grande Chronique, citée par M. Fourmont (1), donne une Lifte differente, & femble n'admettre en Egypte que huit Dieux & neuf Demi-Dieux. Les premiers font Memnon, Vulcain, le Soleil, Agathodamon, Chronos, Ifis, Ofiris, un autre qu'elle ne nomme pas, enfin Typhon. Les Demi-Dieux font Orus, Mars, Anubis, Hercule, Apollon, Ammon, Tithois, Sofus, Jupiter : fur quoi je ferai trois remarques. La premiere, qu'il faut que cette Chronique ne foit pas de la premiere Antiquité; car Herodote, parlant des Dieux adorés en Egypte, ne fait aucune mention de leurs Demi-Dieux. Il dit même positivement que les Egyptiens ne connoiffoient aucun Heros, c'eft-à-dire, aucuns Demi-Dieux. La feconde, eft que cette Chronique contredit la plus faine Antiquité, puifqu'elle met au rang des Demi-Dieux Jupiter, Apollon, &c. qui certainement étoient au nombre des Grands Dieux parmi les Egyptiens. Mais 3°. il eft neceffaire pour entendre l'Hiftoire de toutes les Religions que le Paganisme enfanta, d'obferver qu'il leur arrivoit bien des changemens; qu'on y ajoutoit de nouveaux Dieux; & que le culte des anciens s'aboliffoit même quelquefois entierement. Ainfi il n'eft pas étonnant que les Liftes qu'on donne des Dieux de quelques Peuples, & le rang qu'ils y tiennent, foient fi differens.

On ne finiroit pas fi on vouloit ajouter à ces deux Liftes, un nombre infini d'autres Dieux que chacun choififfoit à fon gré, pour être l'objet de fon culte ; ou ceux que l'opinion de la Metempsycofe avoit enfantés, en enfeignant que l'ame des grands Hommes paffoit dans les Aftres, quelquefois même dans les animaux, ou dans de fimples plantes. C'étoit fur ce fondement qu'on publioit que celle d'Ifis habitoit dans l'étoile de la Canicule, qu'on nommoit Sothis; celle d'Orus, dans Orion; celle d'Ofiris, dans les boeufs Apis & Mnevis ; celle de Typhon, dans la Conftellation de l'Ourfe; celles de Mercure de Diane, d'Apollon, de Venus, & de Saturne ou Chronos, dans les Planetes de leur nom.

Après avoir ainfi expofé le fond de l'ancienne Religion des Egyptiens, il faut entrer dans quelque détail fur les Dieux que nous venons de nommer, & expliquer enfuite de quelle nature étoit le culte qu'on leur rendoit. Mais je dois avertir auparavant, que je ne parlerai dans ce Livre, que de ceux dont le culte fut toujours renfermé dans l'Egypte, ou qui ne fut admis que fort tard dans la Grece & dans l'Italie : l'Hiftoire des autres, dont la connoiffance fut portée chez les Grecs par les anciennes Colonies, & qui formerent la Religion de ce Peuple, fera la matiere du fecond Volume, où j'aurai foin d'avertir du temps de leur tranfport.

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SUIVANT Herodote & tous les Anciens, Ofiris & Ifis étoient les deux grandes Divinités des Egyptiens, & les plus generalement honorées dans tout le pays; & prefque toute la Mythologie de cet ancien Peuple fe trouve renfermée dans ce que leurs Prêtres debitoient à leur fujet. Ce qui jette une grande obfcurité fur leur hiftoire, c'eft que quelquefois ils les regardoient comme des perfonnes qui avoient autrefois gouverné l'Egypte avec beaucoup de fageffe & de prudence; quelquefois comme des Etres immortels de leur nature, qui avoient formé le monde, & arrangé la matiere dans la forme qu'elle conferve encore aujourd'hui.

Ceux qui humanisent Ofiris & Ifis, conviennent tous qu'ils étoient frere & fœur ; mais ils ne font pas d'accord fur leurs parents. L'opinion la plus commune eft celle que rap(1) Liv. 1. porte Diodore de Sicile (1). Le Soleil, felon cet Hiftorien, fut le premier qui regna en Egypte, Vulcain lui fucceda, puis Saturne, qui ayant époufé Rhea fa foeur, en eut Ifis & Ofiris. Pour jetter quelque lumiere fur un fujet si embrouillé, je dois, 1o. rapporter la Mythologie Egyptienne d'Ifis, d'Ofiris, & de Typhon, 2°. expliquer les fables que les Grecs y ont mêlées, 3°. rechercher ce qu'il peut y avoir d'hiftorique dans ce fujet, 4°. enfin parler du culte qu'on rendoit à ces Divinités.

Mythologie

fujet d'Ifis &

d'Ofir's.

Les Egyptiens qui voyoient le bien & le mal regner égaleEgyptienne au ment dans le monde, & qui ne pouvoient concevoir qu'un Etre effentiellement bon eût pu permettre le mal, encore moins en être l'auteur, furent les premiers qui inventerent deux Principes, l'un bon, & l'autre mauvais ; & qui introduisirent cette erreur, qui dans la fuite a fait tant de progrès (a). Ils defignerent le bon Principe fous le nom d'Ofiris, & le mauvais fous celui de Typhon. De là les guerres & les perfecutions de ce dernier contre fon frere, à qui enfin il ôta la vie. Comme ils attribuoient tous les maux qui regnoient dans le monde à Typhon, ils regardoient Ofiris comme l'auteur de tous les biens. La création du monde, long-temps difputée & reculée par les intrigues du mauvais Principe; l'ordre & l'arrangement qui y regnent, étoient l'ouvrage d'Ofiris le trouble, l'horreur, les guerres, en un mot tous les maux qui defolent l'univers, venoient de Typhon.

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Plutarque, qui dans fon Traité d'Ifis & d'Ofiris, nous a confervé d'anciennes traditions qu'on chercheroit vainement. ailleurs, dit qu'on reconnoiffoit dans le bon Principe trois qualités, dont l'une faifoit l'office de pere, & c'étoit Ofiris ; l'autre celui de mere, c'étoit Ifis; enfin celui de fils, & voilà leur Orus, premiere production du pere & de la mere. Les Egyptiens, fuivant ce même Auteur, debitoient mille autres fables fur ce même fujet, que l'on peut voir dans le Traité.

(a) Voyez ce qui en a été dit dans le Traité de l'Idolâtrie.

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