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(1) De Bell.

(2) L. 1. c. 8.

qu'ils n'ayent joint les Dieux animés, à ceux qu'on appelle naturels : l'exemple des deux Philenes en eft une preuve. Ces deux freres, au rapport de Sallufte (1), de Pomponius MeJug. c. 79. la (2), & de Valere Maxime (3), ayant été envoyés par les (3) L. 5. c. 6. Carthaginois pour faire la paix avec les Cyrenéens qui leur faifoient la guerre, fe facrifierent pour leur Patrie, qui en reconnoiffance leur éleva des Autels, & leur rendit les honneurs divins.

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(8) En. L. 1.

Pour Neptune, les Carthaginois en avoient reçu le culte des Libyens, auffi bien que les Grecs & les Romains; car ce Dieu, ainfi que nous l'apprenons d'Herodote (4) dont nous avons rapporté ailleurs le paffage, étoit originaire d'Afrique. Appien dit (5) que le même Peuple adoroit Apollon, qui avoit un Temple à Carthage, & Plutarque ajoute (6) que la Statue de ce Dieu fut portée à Rome.

Junon & Venus étoient deux des plus grandes Divinités des Carthaginois. S. Auguftin (7) parlant de la derniere de ces deux Déeffes, dit que Carthage étoit le lieu où elle avoit établi fon Regne, & Virgile nous apprend que Junon préferoit cette ville à toutes les autres, & à Samos même :

Quam Juno fertur terris magis omnibus unam
Pofthabita coluiffe Samo (8).

Pour ce qui regarde Mars, nous avons le temoignage de Silius (9) Pun. L. 1. Italicus (9), qui dit qu'Annibal l'invoquoit. On sçait aussi

que

les Carthaginois honoroient Mercure fous le nom de Sumes. Ce Peuple dont le commerce étoit la plus grande reffource, auroit-il negligé le culte du Dieu des Marchands & des Voleurs? Nous avons deux autorités qui prouvent qu'ils honoroient (10) Ibidem. auffi Cerès & Proferpine. Le Poëte que je viens de citer (10) dit que les Statues de ces deux Déeffes étoient dans le Temple de Didon, & Virgile affûre que cette Princeffe facrifioit à Cerès (11).

(11) Æneid.

Liv. 2.

Didon,

Rien n'eft plus celebre dans l'Hiftoire ancienne que l'Hercule de Tyr, dont le culte fut porté à Carthage par & se repandit enfuite fur toutes les Côtes d'Afrique, & juf (12) Diod. de qu'à Gadès, ou Cadis, où il avoit un Temple magnifique (12):

Sic. Liv. 4.

mais

1

mais comme je dois parler au long de ce Dieu dans le Tome
III. je n'en dirai rien ici.

Silius Italicus (1) met auffi Dis, ou Pluton, ou l'Erebe,
parmi les Dieux des Carthaginois, & Polybe nous apprend (2)
qu'ils l'invoquoient comme le Dieu des Enfers. Efculape, au
rapport de Strabon (3), d'Apulée (4), & d'Appien (5), étoit
auffi en grande veneration à Carthage, & y avoit un Temple
magnifique. Voffius (6) prouve par de bonnes autorités que le
culte de ce Dieu leur venoit de Tyr; mais je ne garantirois
pas qu'ils n'euffent auffi connu l'Efculape Grec, ou le Mef-
fenien.

(:) Loc. cit.

(2) Liv. 7.

(3) Liv. 17. In Libycis. (4) In Flor. (5)In (6) De Ídol. L.1.c.32.

Tels étoient les Dieux dont les Carthaginois avoient reçu le culte, d'abord des Pheniciens, enfuite des Grecs & des Romains. Peu contents de la Religion de leurs Peres, ils voulurent imiter les autres Peuples, en faifant l'Apotheofe de leurs grands Hommes. Didon leur fondatrice reçut cet honneur, qu'elle avoit elle-même rendu, felon Ovide (7), à Si- (7) Heroid. 7. chée son mari, & devint une des grandes Divinités de Carthage (8). Anne, felon le même Poëte, partagea les honneurs divins avec fa foeur (9), ainfi qu'Amilcar, comme nous venons de le dire après Herodote (10): car fi cet Auteur ne dit pas (10) Liv. 7. pofitivement qu'il fut mis au rang des Dieux, du moins fut-il, felon lui, honoré comme un Heros, puifqu'il rapporte qu'on établit des Sacrifices en fon honneur, & de ces fortes de monumens qu'il nomme un'ara, confacrés aux Heros, comme nous le dirons au commencement du troifiéme Tome.

(8) V. Son Hift. T. III. (9) Faft. L. 3.

Libyens.

Si après avoir parlé des Dieux des Carthaginois nous paf-, Dieux des fons aux autres parties de l'Afrique, nous trouverons qu'Ammon étoit honoré par les Libyens, dans le lieu où étoit ce fameux Oracle, dont nous avons parlé au Livre IV. Les Sçavans, ont recherché quel étoit cet Ammon, & ils conviennent tous que c'étoit Cham lui-même, dont le nom adouci par le retranchement de la premiere lettre se prononçoit Ham, ou Ammon, fur quoi on peut confulter Voffius (11). (11) De Idol. En effet, il eft certain que Cham, ou du moins Mifraim L. 1. c. 32. fon fils, alla s'établir en Egypte ; & fi l'Ecriture Sainte l'appelle prefque toujours la terre de Mefraïm, elle fait quelquefois mention du nom de Cham ou Ammon, comme on peut Tome I. Yyy

le voir dans ces paroles du Prophete Nahum, qui apoftrophe ainfi la ville de Ninive: ferez-vous mieux traitée que la ville (1) C. 3. v. 8. d'Ammon (1)? Je fçais que la Vulgate a entendu ce paffage, de la ville d'Alexandrie: Etes-vous meilleure que la ville d'Ale(2) In 3. Cap. xandrie? & que S. Jerôme (2) rapporte que celui qui lui avoit appris l'Hebreu, lui avoit dit que ce paffage pouvoit s'interpreter ainfi ; mais toujours eft-il für, que dans le texte original, il y a no-Amon.

Nahum.

(3) Liv. 2.

Les Egyptiens, felon Herodote (3), avoient donné à Ammon le nom de Jupiter : Αμμον Αιγύπτοι καλέεσι τὸν Δία; ce qui ne doit point nous étonner, puisque la plupart des anciens Princes, ou des Dieux, ont porté le même nom. Si (4) Liv. 2. nous nous en rapportons à Diodore de Sicile (4), Ammon avoit été Roi d'une partie de la Libye, & il avoit épousé Rhea, fille d'Uranus & fœur de Chronos, ou Saturne; mais, ́(5) Loc. cit. comme le remarque judicieusement Voffius (5), tout cela convient à Cham: car fi le jeune Saturne eft le même que Noé, on peut dire que fes brus étoient fes foeurs puifqu'elles defcendoient comme lui du vieux Saturne, qui eft le même qu'Adam. Que fi l'Hiftorien Grec ne fait regner Ammon que dans la Libye, quoique fon Empire ait compris le pays de Chanaan, l'Arabie, l'Egypte, l'Ethiopie, & une partie de la Libye, c'eft qu'il a cru qu'il n'avoit regné que dans la contrée où fut établi fon Oracle.

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Concluons donc avec Voffius, qu'Ammon étoit le même que Cham, qui fut mis après fa mort au nombre des Dieux, & adoré fous le nom de Jupiter Ammon.

Les Augiles, ou plûtôt les Augilites, peuples fitués entre les Garamantes & les Troglodytes, n'avoient au rapport de Pomponius Mela (6), point d'autres Dieux que les Manes. C'étoit par eux qu'ils juroient; ils les confultoient comme leurs Oracles, & recevoient leurs reponfes en dormant près de leurs tombeaux: Augila Manes tantùm Deos putant ; per eos dejerant; eos ut Oracula confulunt; precatique quæ volunt, ubi tumulis incubuere, pro refponfis ferunt fomnia.

Pline (7) ne differe de Mela qu'en ce qu'il nomme Dieux infernaux, ceux que le Geographe avoit appellés dieux Manes: Augila inferos tantùm colunt ; & l'un & l'autre n'ont fait

Nafamones &

que copier Herodote; avec cette difference, qu'ils attribuent aux Augilites ce que l'Hiftorien Grec avoit dit des Nafamo- Dieux des nes; mais ces Peuples étoient fi voisins les uns des autres, des Catabathqu'il a été aifé de les confondre (a); ou peut-être que les uns mes. & les autres avoient les mêmes Dieux, c'est-à-dire, les Ames de leurs ancêtres. Pomponius Mela parle dans le même Chapitre de la Religion des Catabathmes, petite Nation située entre la Libye & l'Egypte ; mais comme il dit feulement que ce Peuple adoroit les Dieux de fon pays à la maniere de ses Peres, Et cultu Deum quos patrios fervant ex patrio more venerantur (1), il n'eft pas poffible de deviner fi ces Dieux étoient(1) Edit. de les Dieux naturels, tels que les Aftres, & les autres parties de l'Univers, ou les Ames de leurs ancêtres, comme nous venons de le dire des Augilites & des Nafamones.

Gronovius.

Dieux des

Nous apprenons d'Herodote que les habitans de la Cyre- Habitans de la naïque rendoient les honneurs divins à Battus, à qui on avoit Cyrenaïque. bâti des Temples. On fçait que Battus forti de l'Ifle de Thera, avoit emmené une Colonie dans cette partie de l'Afrique, & y avoit fondé le Royaume de Cyrene. Ce fut Demonax qui à l'occafion d'un Oracle de Delphes avoit été envoyé à Cyrene par les Mantinéens fes Compatriotes, qui y établit le culte de Battus.

Le Devin Mopfus étoit auffi honoré comme un Dieu, dans Dieux del'Afrique proprement dite, ou dans cette partie de ce Conti- quelques autres Peuples nent qui s'étend du côté du couchant, depuis la Cyrenaïque d'Afrique. jufqu'à la Mauritanie. Il y a eu deux perfonnes de ce nom, l'un fils de Manto, & petit-fils de Tirefias, l'autre fils d'Ampycus. Le premier avoit un Oracle, & étoit honoré dans la Cilicie; le fecond étoit un celebre Argonaute qui mourut en Afrique, & y reçut les honneurs divins, comme nous l'apprenons d'Apulée qui étoit né en Afrique : Pro numine pofteà ab hominibus proditi, fanis & ceremoniis vulgò advertuntur ; ut in Baotiâ Amphiaraus, in Africa Mopfus, &c. Mais comme j'aurai occafion de parler de ce Mopfus dans l'Hiftoire des Argonautes, Tome III. je n'en dirai rien ici davantage.

(a) Ceux qui feront curieux de voir l'erreur de Pomponius Mela & de Pline dans tout fon jour, pourront confulter la fçavante Remarque d'Abraham Gronovius, fur le Chapitre VIII. du premier Livre de Pomponius Mela.

Yÿy ij

L'Empereur Severe, fi nous en croyons Spartien, reçut auffi les honneurs divins dans cette même partie de l'Afrique où il avoit reçu le jour : Horum igitur tantorum, & tam illuf trium virorum interfector, ab Afris ut Deus habetur.

Les Afriquains avoient encore Neptune, dont le culte, felon Herodote, avoit paffé de la Libye dans la Grece; Minerve Tritonienne; Hercule qui se rendit fi fameux dans la Mauritanie Tingitane, & fut fi honoré à Gadès; fans parler des Princes Titans, mis au rang des Dieux par les mêmes Peuples; mais nous avons affez parlé de ces derniers dans la (1) Liv. 2. Theogonie des Atlantides (1); pour les trois premiers, j'en donnerai l'hiftoire dans le fecond Volume.

Les Maures, fi nous en croyons les Anciens, n'avoient point d'autres Dieux que leurs Rois; c'eft ce que nous apprennent Lactance, Tertullien, & S. Cyprien : & comme ces deux derniers étoient Afriquains, leur temoignage doit être d'un grand poids. Voici comme le premier s'exprime à ce fujet : C'est pour cette raifon, dit il, que les Maures mirent leurs Rois au rang des Dieux; Hac fcilicet ratione confecrave(2) Lactance, runt, ut Mauri, Reges fuos (2). Tertullien foutenoit aux Payens que chaque Pays & chaque Ville avoit fes Dieux particuliers: la Syrie, leur dit-il, a fon Aftarté, l'Arabie, fon Difarès ; les Peuples de la Norique, leur Belenus; les Africains, leur Celefte; & les Maures, leurs Rois (a). Parmi ces Rois mis au nombre des Dieux, étoit le celebre Juba, ainfi que nous l'apprend Minutius Felix (b).

L. 1. C. 15.

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Tertullien met auffi au nombre des Divinités des Maures, la Déesse Verfotina, qui eft totalement inconnue : c'étoit ap paremment une de leurs Reines, ou quelqu'autre femme devenue celebre par fes belles actions. Pour ce qui regarde cette Celeste, dont parle cet Auteur, c'étoit la Venus Uranie, fi connue en Syrie; c'eft-à-dire, la Planette de ce nom : car il eft certain que prefque tous les Peuples ont adorés les Aftres, & ont eu des Dieux naturels & des Dieux animés.

(a) Unicuique etiam Provincia & Civitati, fuus Deus eft; ut Syria Affartes, t Arabia Difares ut Noricis Belenus ut Africa Cæleftis, ut Mauritania Reguli fui. Apolog. C. 24.

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(b) Nifi fortè poft mortem Deos fingitis, & pejerante populo Deus Romulus, & Jubl Mauris volentibus Deus eft. In Odav.

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