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C. 18. V. 12. j

fentimens, en difant que Moloch étoit une de ces Divinités que les Grecs ont nommées Panthées, & qu'il reprefentoit parmi les Ammonites les fept Planetes. La preuve de mon opinion eft tirée des fept Cellules qu'on avoit mênagées dans fa Statue, & des fept fortes de Sacrifices qu'on lui offroit. En effet s'il n'avoit été que le Soleil ou Saturne, à quel deffein auroit-on pratiqué ces fept petites chambres, & pourquoi lui auroit-on offert tant de fortes de Victimes? C'étoit donc les fept Planetes qu'on honoroit parmi les Ammonites, dans la feule Idole de Moloch, & on offroit à chacune les victimes que la fuperftition lui avoit confacrées.

Le culte impie de Moloch fe repandit dans plufieurs pays, & les Hebreux mêmes l'adopterent dès le temps de Moyfe, puifque ce faint Legiflateur leur défend de confacrer leurs enfans à cette Divinité: De femine tuo non dabis ut confecretur (1) Levit. Idolo Moloch (1) ; & que Dieu menace d'exterminer toute la (2) Ibid. c. 20. race de ceux qui auroient commis cette abomination (2). Il falloit que les Ifraelites fuffent adonnés à cette cruelle fuperfti(3) Verf 26. tion avant leur fortie d'Egypte, puifque le Prophete Amos (3), (4) Act. 7.43. & après lui faint Etienne (4) leur reprochent d'avoir porté dans le defert le tabernacle de ce Dieu, comme nous l'avons déjà dit.

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ARTICLE III.

Baal on Bel, Baal-pekor on Baal-phegor.

J'AI avancé dans l'Article precedent, que l'Ecriture Sainte femble confondre Bel ou Baal, avec Moloch, & il s'agit maintenant de le prouver. Jeremie reproche à la Tribu de Juda & aux habitans de Jerufalem, d'avoir bâti un Temple à Baal pour y brûler leurs enfans dans le feu; & ce Prophete ajoute enfuite: C'est pourquoi le temps vient que ce lieu ne fera plus appellé Tophet, ni la Vallée des fils d'Ennon, mais la Vallée du Carnage. C'étoit à Moloch qu'on offroit ces innocentes Victimes, & c'étoit dans la Vallée des fils d'Ennon que se commettoit cette abomination: donc Bel ou Baal, étoit le même Dieu que Moloch. On peut tirer la même conclusion de la reffemblance de leurs noms, qui fignifient l'un & l'autre,

le Roi, le Seigneur, comme je l'ai déjà dit; titres qui conviennent au Soleil, adoré également fous le nom de Baal, ou de Moloch.

Pour bien comprendre cette ancienne Mythologie, il eft neceffaire d'obferver, 1°. Que le même Dieu étoit souvent honoré par differens Peuples, mais prefque toujours fous des noms differens & avec des ceremonies differentes ; & c'eft ce qui a jetté une grande obscurité fur la matiere que je traite. Il eft für, par exemple, que la grande Divinité des Peuples d'Orient, étoit le Soleil: cependant fous combien de noms ne l'a-t'on pas adoré?

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2o. Que comme plufieurs Princes ont porté le nom de Belus, les Mythologues font embarraffés à déterminer quel a été le premier de tous qui a reçû les honneurs divins. Si on vouloit fuivre le fentiment de Berofe, que le Syncelle, fur l'autorité de Polyhiftor, nous a confervé, nous trouverions des Princes & des Dieux de ce nom, même avant le Deluge, mais fans nous arrêter à cette opinion, que je crois n'avoir aucun fondement, il eft für que la plupart des Peuples de Syrie & de Phenicie reconnurent une Divinité de ce nom. Les Syriens l'adoroient fous le nom de Baal-Peor; les Moabites fous celui de Baal-Phegor, c'eft-à-dire, Baal adoré fur le mont Phegor, comme le remarque Theodoret (a); les Affyriens fous celui de Baal-Gad. Le culte de ce Dieu paffa meme jufqu'en Afrique, apparemment avec la Colonie de Didon, & les Carthaginois le nommoient Bal ou Bel, comme nous l'apprenons de Servius (b); c'eft de-là fans doute que leur étoit' venue la coutume d'ajouter par Honneur le titre de Bal aux noms de leurs grands hommes, comme dans ceux d'AnniBal, d'Afdru-Bal, & de quelques autres.

Le culte de cette fauffe Divinité a été fouvent défendu au Peuple Juif par les Prophetes. L'impie Achab lui fit élever un

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(a) Phegor quidem fimulachi locus vocabatur, Beel verà Idolum. Theodoret. In Pfalm. 105.

(b) Lingua Punicâ Bal, Deus dicitur ; apud Affyrios autem Bel dicitur, dit Servius fur ces Vers de Virgile:

Impleviique mero pateram, quam Belus & omnes
A Belo foliti, &c. Æneid. Lib. I.

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Temple à Samarie, & le Prophete Elie fit mourir quatre cens cinquante de fes Prêtres, ce qui fait voir la magnificence du culte de cette fauffe Divinité, devant laquelle prefque toute la terre, avoit fléchi le genouil, comme il eft dit dans l'Ecriture Sainte. Parmi les Ceremonies du culte de ce Dieu, on remarque celle de fervir tous les jours des viandes devant fon Idole, que les Prêtres avoient foin d'enlever, en entrant dans le Temple par des chemins foûterrains, comme le Prophete Daniel le découvrit au Roi de Babylone, à la confusion de (1) Dan. c. 2. ces fcelerars (1).

Ceux qui ont voulu rechercher l'origine de cette Divinité, fe font jettés dans differentes opinions. Servius, Eufebe, Theophile d'Antioche, & quelques autres ont cru que c'étoit Saturne. Voffius & Selden, comme on l'a dit, ont pensé que c'étoit le Soleil ; & ce dernier confirme fon fentiment par plufieurs raifons très-plaufibles, entre lefquelles celle qu'il ure du nom d'Heliogabal, Prêtre du Soleil, n'est pas la moindre, puifque cet Empereur fembloit avoir joint les deux noms que les Grecs & les Syriens donnoient à cet Aftre, appellé par les Grecs Exos, & Bel ou Belus par les Syriens. D'autres fe font imaginé que Baal étoit le même que Jupiter-Stygien, ou Pluton; & ils appuyent leur fentiment d'un paffage de l'Ecriture, où l'Efprit faint appelle les Sacrifices. de Beel Phegor, des Sacrifices des morts (a). Car, comme (2)Ia PL. 106. le remarque S. Auguftin (2), par les Sacrifices des morts on doit entendre ceux qui étoient offerts aux Dieux Manes, ou des Enfers.

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On trouve des Auteurs, & Eusebe eft de ce nombre, qui confondent Baal avec Belus, premier Roi des Affyriens, qui fut mis au rang des Dieux après fa mort; mais il y a apparence. que le culte de cette Divinité étoit plus ancien que ce Prince, à qui on donna auffi par honneur le nom de Belus, qui veut dire, Seigneur ; nom que les Juifs, comme le remarque judicieusement Grotius, ne voulurent jamais donner au. Dieu d'Ifraël, parce qu'il étoit profané par l'application qu'en faifoient les Idolâtres à leurs fauffes Divinités.

(a) Et copulati funt Beel-Phegor, & comederunt facrificia mortuorum, Pfalm

106.

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Comme S. Jerôme, Rufin, & quelques autres, ont cru que Beel-Phegor veut dire un Dieu nud, ou une Idole de dure pierre, ce qui a un rapport effentiel avec Priape; ils ont confondu ces deux Divinités, pour les raifons que je vais rapporter. La fornication, comme on le voit dans le Livre des Nombres, étoit confacrée à Beel-Phegor; n'eft-ce pas le caractere de l'infame Divinité de Lampfaque? La Vulgate traduit le mot de Mipheletzeth, qui eft le même que celui de Beel-Phegor, par celui de Priape; & comme ce mot Hebreu fignifie, terreur, rien ne convient mieux à ce Dieu, dont la figure étoit mife dans les Jardins pour fervir d'épouvantail, comme nous l'apprenons d'Horace & de Tibulle. Ces Auteurs ajoutent plufieurs autres raifons pour confirmer ce fentiment, qu'on peut voir dans Voffius (i); mais il vaudroit mieux dire, pour parler avec jufteffe, que le Priape des Grecs & des Romains étoit une copie de cette ancienne Divinité de Syrie, dont le culte abominable fut adopté par les Grecs. Car je dois avertir une fois pour toutes, que lorfque dans la fuite on dira que les Auteurs confondent un tel Dieu de Phenicie ou d'Egypte, avec Jupiter ou avec quelqu'autre Divinité Grecque, cela veut dire que ce Dieu des Grecs a été formé fur le modele du Dieu des Egyptiens ou des Pheniciens.

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J'ai dit que la Vulgate traduit le mot Mipheletzeth, qui eft dans le texte Hebreu, par celui de Priape. C'eft au fujet de Maaca, mere d'Afa, qui honoroit d'un culte particulier ce Dieu dont elle étoit Prêtreffe, & à laquelle ce fage Prince ota l'autorité dont elle jouiffoit. Sed & Maacham matrem Afa Regis ex augufto imperio depofuit, eo quod feciffet in luco fimulachrum Priapi: quod omne contrivit, & in frufta comminuens, combuffit in torrente Cedron (2). Le même fait eft rap- (2) Paral. 11. porté dans les Livres des Rois..

C. 15. & 16.

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(1) Sur le Ch. 51. d'Ifaie.

ARTICLE IV.
V...

Chamos.

SELON faint Jerôme (1) Chamos, dont le nom vient de la racine d'un mot Arabe qui fignifie, fe hâter, aller vîte, étoit le même que Beel-Phegor ; & les Moabites l'honoroient quelquefois fous ce nom, comme on peut le voir dans le (2) Reg. 3. Livre des Rois (2), où cette Idole dont Salomon établit le culte, eft appellée l'abomination des Moabites, que l'Ecriture nomme le Peuple de Chamos: Malheur à toi, Moab, tu es perdu, peuple de Chamos; Chamos a mis fes enfans en fuite ; dir le Seigneur par la bouche de Moyfe (a).

C. II.

Je dis que Salomon établit le culte de ce Dieu, Tunc adificavit Salomon Fanum Chamos Idolo Moab, in monte qui eft (3) 3. Reg. contra Jerufalem (3). Ce Temple que ce Prince avoit fait conftruire pour plaire à une de fes femmes, fut détruit dans la

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fuite.

Les Ammonites adoroient auffi cette Divinité, comme il paroît par les paroles de Jephté au Roi de ce Peuple : ce que votre Dieu Chamos, dit ce Juge d'Ifraël, vous a donné, vous appartient pourquoi ne voulez-vous pas que nous poffcdions ce (4) Judic. que notre Dieu nous a donné (4)?

C. 11.

C. 21.

De fçavoir maintenant quel étoit ce Dieu des Moabites; c'eft ce qu'il n'eft pas aifé de deviner. La reffemblance de fon nom avec celui d'Ammon, a porté plusieurs Sçavans à croire qu'ils étoient le même; & comme ce dernier, felon (5) Sat. L. 1. Macrobe (5), étoit le Soleil, Chamos doit avoir auffi reprefenté cet Aftre, puifque fon culte s'étoit répandu de l'Egypte & de la Libye, dans l'Arabie où habitoient les Moabites (¿). Certainement le nom de Chamos, qui fignifie, comme je viens de le dire, fe háter, aller vite, convient parfaitement an Soleil, duquel l'Ecriture dit: Exultavit ut Gigas ad currendam viam. J'adopte l'opinion de S. Jerôme qui dit, comme on vient

(a) Væ tibi, Moab, perifti popule Chamos; dedit filios ejus in fugam, & filias in captivitatem Regi Amorrheorum Sehon. Num. Cap. 21. v. 29.

(b) Quamvis Ethiopum populis, Arabumque beatis

Gentibus, atque Indis unus fit Jupiter Ammon. Pharf. L. 9.

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