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thras, & qui font en très-grand nombre, ont tous été faits
en Italie, & nous n'avons aucune figure Perfane de ce Dieu :
car je ne crois pas qu'on le trouve dans celles
que Chardin
& après lui Corneille le Brun ont copiées à Chilminear, qu'on
croit avoir été l'ancienne Perfepolis. Cependant quelques An-
tiquaires ont cru le voir dans trois de ces Figures, qui re-
présentent trois hommes de bout avec de longues barbes
ayant fur la tête une efpece de bonnet, semblable à un Tur-
ban applati par le haut. Ces trois Prêtres enfoncent un poignard
dans le ventre de trois animaux, qu'on croit être un lion, un
griffon & un cheval; le fait eft inconteftable
pour les deux
premiers: pour le troisième, il paroît bien par la tête & par
les pieds que c'est un cheval, mais la queue eft differente de
celle de cet animal.

Si le Dieu Mithras étoit ainfi représenté par les Perfes, il faut que les Romains qui en reçurent le culte & les mysteres, euffent bien changé la maniere de le peindre; car il nous reste: plufieurs Monumens de cette Divinité, qui ne reffemblent guéres à celui que nous venons de décrire. Ces Monumens ont été pour la plupart dererrés à Antium, aujourd'hui Net-tuno, & expliqués fçavamment par Mr. della Torré, depuis, Evêque d'Hadria (1) On en trouve quelques autres dans la (1) Monum. Galerie Juftinienne & dans d'autres Antiquaires; avec cela vet. Antii.Roquelques Infcriptions dans Gruter. Toutes ces images fe ref- me 1700. in: femblent, à cette difference près, que les unes font plus chargées de figures que les autres.

La premiere, & en même temps celle qui paroît la plus compofée, étoit dans la maison d'Octavio Zeno. Elle repréfente un jeune homme avec un bonnet Phrygien, une tunique, & un manteau qui fort en voltigeant de l'épaule gauche. Ce jeune-homme tient le genou fur un Taureau atterré, & pendant qu'il lui tient le muffle de la main gauche, il lui plonge de la droite un poignard dans le cou (a). Au côté droit de ce Monument font deux jeunes garçons, dont les habits & les bonnets font femblables à celui de Mithras, qui eft fur le Taureau Chacun de ces deux jeunes hommes tient un

(a) Voyez cette figure & les autres dans l'Antiquité Expliquée du Pere de Mont faucon. Tome I. p. 373. & dans l'ouvrage de M. della Torré.

flambeau, l'un élevé, l'autre baiffé en terre par le bout allu mé. Un chien s'avance vers le cou du Taureau, comme pour lécher le fang qui fort de la playe. Auprès du chien eft un ferpent étendu & fans action. Un lion couché auprès du ferpent, y paroît auffi fans aucune action marquée. Sous le ventre du Taureau eft un Scorpion qui de fes deux pinces tient les parties du Taureau. Devant la tête de cet animal eft un arbre, où eft attachée une torche allumée, & d'où pend une tête de boeuf. Derriere Mithras eft un arbre avec un Scorpion, & un flambeau, dont le bout allumé eft tourné en bas. Plus haut, vis-à-vis la tête de Mithras, eft un corbeau.

Le couronnement de ce Bas-relief, eft encore fort fingu lier. C'est une fuite de figures fur la même ligne, dont la premiere eft un Soleil rayonnant, avec des ailes, & monté fur un char tiré par quatre chevaux, qui paroiffent extréme ment agités, & regardent les quatre parties du monde. Près du char eft un homme nud, qu'un ferpent entortille à quatre replis depuis les pieds jufqu'à la tête. On voit après, trois Autels flamboyants, & entre ces Autels trois grandes phioles quarrées; puis un autre homme nud, entortillé, comme le premier, d'un ferpent: ce dernier a des ailes, & une Pique à la main gauche. On trouve enfuite quatre Autels, avec autant de phioles. La Lune fur fon char trainé par deux chevaux, qui paroiffent extrémement fatigués, termine ces figu res. Elle eft debout fur fon char, avec des ailes, & ayant fa tête la figure d'un croiffant.

fur

J'ai décrit dans le dernier détail ce Bas-relief, parce qu'il contient prefque tout ce qui eft fur les autres. C'eft toûjours un jeune-homme, qui égorge un Taureau, toûjours les mê mes Symboles, quoique en moindre quantité; à la feule dif ference près, que fur l'un des autres Bas-reliefs, qui eft celui de la Vigne-Borghefe, on lit fur la cuiffe de l'animal l'Infcription de Soli Deo invicto Mithra, & près de l'endroit où Mithras lui enfonce le poignard, ces mots barbares Nama Sebezio. Ainsi, en expliquant cette figure, nous aurons une connoiffance exacte de ce qui eft représenté fur les autres; que l'on peut voir dans les Antiquaires.

La

La fimple defcription des figures, qui repréfentent Mithras, annonce évidemment qu'il s'agit du Soleil, de fa puiffance, & de fes influences. Stace, dans une invocation qu'il fait à cet Aftre, & fon fçavant Commentateur, ont bien compris cette Mythologie. tung ob diman

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Adfis, & memor officii, Junoniaque arva
Dexter ames; feu té rofeum Titana vocari
Gentis Achemeniæ ritu, feu præflat. Ofrim
Frugiferum feu Persei sub rupibus antri,
Indignata fequi torquentem cornua Mithram (1).

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(1) Theb. L 1. in fine.

1. Th.

Soleil, foyez-moi favorable .. foit que je vous invoque > fous le nom de Titan, ou fous celui d'Ofiris, ou fous celui de Mithras, lorfque dans les antres de la Perfe, vous preffez les cornes d'un Taureau rebelle, & qui fait tous » les efforts pour ne pas vous suivredning oct 201 Luctatius (2) interprétant ce paffage, dit que ce font les (3) In lib. Perfes qui les premiers ont honoré le Soleil dans des caver nes & dans des antres, & cela pour marquer que cet Aftre s'éclipfe quelquefois: que le Taureau dont Mithras tient les cornes avec une main (ce qui est auffi dans quelques Mo numens, non dans celui que nous venons de décrire) marque la Lune, laquelle, indignée de fuivre fon frere, va au devanc de lui, & cache fa lumiere; mais le Soleil par cette action violente fait voir fa fuperiorité fur cette Planete. Quelques Anciens ont cru que le Taureau fignifioit la terre, & que le poignard que Mithras lui enfonce dans le cour, marquort le Soleil par fes rayons perçoit la fuperficie de la terres & la rendroit feconde. Que le Soleil ait été regardé par les Anciens comme le maître, & le dominateur de tous les Aftres, & qu'on ait cru qu'il en regloit de cours, c'eft une chofe inconteftable, comme nous le prouverons dans la fuite, par les témoignages de Ciceron & de Macrobe, fi toutefois il eft neceffaire de le prouver. Mais que la Lune, à caufe de fon Croiffant, ait été reprefentée par les cornes du Taureau, c'eft ce qu'on ne fçauroit prouver; encore moins que le Taureau ait figuré la terre, & que l'action du Soleil, qui lui enfonce le poignard, foit le Symbolé de ces rayons qui par Tome I.

que

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tent partout la fécondité. Če font des Allegories trop forcées, & qui n'ont nul fondement. Je fçais tout ce que Thomas Hyde, M. della Torre, & quelques Antiquaires ont dit fur ce fujet, & on me difpenfera de les copier; mais tout bien confideré, voici ce que je pense de tous ces Monumens de Mithras, lequel inconteftablement étoit le même que le Soleil, non seulement chez les Perfes, mais aussi chezles Grecs & chez les Romains.

Ces derniers, qui porterent plus loin que les autres le culte de ce Dieu, avoient établi des myfteres en fon honneur comme nous le dirons dans la fuite; & c'étoit dans la célebration de ces myfteres, que Mithras étoit honoré fous les differens Symboles que les Monumens representent. Il n'eft pas douteux qu'ils n'ayent voulu y marquer le cours de cet Aftre, fa puiffance & fes autres operations. Je regarde donc les Monumens qui nous reftent de ce Dieu, non comme les reprefentations du Sacrifice réel d'un Taureau qu'on lui avoit immolé, mais comme une espece de Planifphere céleste, par lequel on vouloit marquer la force du Soleil, en le peignant dans l'attitude d'un jeune-homme, qui enfonce un poignard dans le cou d'un des plus forts & des plus fiers animaux. Voilà, fans doute, la raifon pour laquelle on a gravé fur les Bas-reliefs les fignes & les conftellations. On voit dans l'Ouvrage de Mr. Hyde fur un de ces Monumens, le Cancer, le Scorpion, le Serpent, le Chien, le Dauphin, la Fléche, & le Dragon, plufieurs étoiles très-bien marquées,& encore le Lion', & plufieurs autres fignes du Zodiaque, comme auffi les Planetes, du moins leurs Symboles.

En effet, la Fleche y peut représenter Mars; le Caducée; Mercure; la foudre & l'Aigle, Jupiter; la faulx, quoiqu'un peu moins reconnoiffable, Saturne; & l'oifeau qui ressemble à une colombe, Venus. Ces cinq Planetes, jointes au Soleil & à la Lune, qui font au haut du Bas-relief, forment les fept Planetes; & il eft évident en effet, qu'on a voulu les reprefenter fur ce Planifphere, avec les Signes du Zodiaque & quelques-unes des conftellations. C'étoit donc le Ciel, fur lequel le Soleil domine, par rapport à nous, qu'on a you lu reprefenter, dans les Bas-reliefs que j'explique.

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vet. Perf. 113.

Mais que fignifie l'action de Mithras, lequel, fous la figure d'un jeune-homme fort & robufte, égorge le Taureau, comme il paroît dans tous ces Monumens; ou qui, dans un autre rapporté par Mr. Hyde (1), eft debout fur cet animal tenant un poignard de la main droite, & un globe de l'autre ? (1) De Rel. Voici ce que j'en penfe. Le Soleil, après avoir parcouru prefque fans force & fans chaleur les Signes meridionaux pendant l'hiver, reprend une nouvelle vigueur lorfqu'il approche de notre Tropique, au commencement du Printemps, parcourt le Belier; & entrant dans le Signe du Taureau, il marque fa force en l'égorgeant. C'eft alors en effet que la nature prend une nouvelle vigueur; car, felon Macrobe le veritable Printemps eft lorfque, comme le rapporte Virgile', le Soleil entre dans le Signe du Taureau : Vernum tempus jam obtinet, cùm dicente Virgilio,

Candidus auratis aperit cum cornibus annum

Taurus, &c.

Voilà, pour le dire en paffant, ce qui fit mettre fur la jambe de ce même Taureau, l'Infcription, Deo Soli, invicto Mithra; Infcription repettée fur les Autels de ce Dieu, & fur d'autres Monumens qui le reprefentent, avec peu de changemens, comme, Soli invicto Mithra, Numini invicto Soli Mithra ara, &c. Tout cela marquoit que le Soleil vainqueur de ce Signe, alloit deformais porter partout la chaleur & la fécondité, & faifoit efperer une abondante recolte, comme le dit Jacques Gronovius en expliquant ces mêmes figures. Cette fécondité eft defignée encore plus clairement fur un de ces marbres, où la queue du Taureau a à fon extrémité des épics de bled. Les autres figures qui accompagnent ces Monumens de Mithras, font aifées à expliquer. Le Cancre qui ronge les parties du Taureau, marque fon empreffement à chaffer ce Signe, le Soleil devant le parcourir bien tôt après. Le Serpent étendu au bas de la figure du Lion, eft le Serpentaire, qui occupe une fi grande partie dans le Ciel. Les autres Signes du Zodiaque font là pour marquer que le Soleil doit les parcourir pendant l'Eté. Le Lion qui étoit un des Symboles particuliers de Mithras comme il paroît LIII ij

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