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EPISTRE.

A VIGNALS TOULOUSAN.

QUAND Dieu m'auroit aussi bien présenté Le bon loysir, et l'entière santé,"

Que le vouloir, ta responce alongée

Seroit du tiers, et beaucoup mieulx songée :
Ce néanmoins, Vignals, je pense bien

Que tu cognois que le souuerain bien
De l'amitié ne gist en longues lettres,
En mots exquis, en grand nombre de mètres,
En riche rithme, ou belle inuention,
Ains en bon coeur, et vraye intention.

DONC ie m'attends, qu'excusé ie seray
De ton bon sens. Or à tant cesseray;
Ma muse foible à peine peult chanter :
Mais pour le moins tu te peux bien vanter
Que de Marot tu as à ta commande
Petite Épistre, et amitié bien grande.

BALLADE

DE LA NAISSANCE DU FEU MONSEIGNEUR

LE DAULPHIN FRANÇOIS.

QUAND Neptunus, puissant Dicu de la mer,
Cessa d'armer Carraques, et Galées,
Les Gallicans bien le deurent aymer,
Et réclamer ses grans vndes salées;
Car il voulut en ses basses vallées
Rendre la mer de la Gaulle hautaine
Calme, et paisible, ainsi qu'vne fontaine :
Et pour oster mathelotz de souffrance,
Faire nager en ceste eau claire et saine
Le beau Daulphin tant désiré en France.

NYMPHES des bois, pour son nom sublimer,
Et estimer, sur la mer sont allées :
Si furent lors, comme on peut présumer.
Sans escumer, les vagues ravallées :
Car les fortz ventz eurent gorges hallées,
Et ne souffloient sinon à douce alaine,
Dont mariniers vogoyent en la mer plaine,
Sans craindre en rien des orages l'outrance;
Bien preuoyans la paix que leur ameine
Le beau Daulphin tant désiré en France.

MONSTRES marins veit-on lors assommez,
Et consumer tempestes de vallées,

Si que les nefz, sans craindre d'abysmer,
Nageoient en mer à voiles auallées.

Les grands poissons faisoient saultz et hullées,
Et les petits d'vne voix fort seraine
Doulcettement auecques la Seraine,
Chantoient au iour de sa noblé naissance :
Bien soit venu en la mer souueraine
Le beau Daulphin tant désiré en France.

ENUOY.

PRINCE marin fuyant œuvre vilaine,
Ie te supply, garde que la balaine
Au celerin plus ne face nuisance,
Afin qu'on aime en ceste mer mondaine
Le beau Daulphin tant désiré en France.

CHANT DE MAY.

VOLUNTIERS
OLUNTIERS en ce mois icy

La terre mue, et renouuelle;
Maintz amoureux en font ainsi,
Subietz à faire amour nouuelle
Par légèreté de ceruelle,

Ou pour estre ailleurs plus contens.
Ma façon d'aymer n'est pas telle;
Mes amours durent en tous temps.

N'r a si belle dame aussi De qui la beauté ne chancelle; Par temps, maladie ou soucy, 1 Laydeur les tire en sa nasselle : Mais rien ne peut enlaydir celle Que seruir sans fin ie prétens : Et pource qu'elle est tousiours belle, Mes amours durent en tout temps.

CELLE dont ie dy tout cecy,
C'est Vertu, la Nymphe éternelle
Qui au mont d'honneur esclercy
Tous les vrais amoureux appelle:
Venez amans, venez (dit elle),
Venez, à moy ie vous attens:
Venez (ce dict la jouvencelle)
Mes amours durent en tout temps.

ENUOY.

PRINCE, fais amye immortelle,
Et à la bien aymer entens :
Lors pourras dire sans cautelle,
Mes amours durent en tout temps.

RONDEAUX.

RESPONCE A UN RONDEAU,

QUI SE COMMENÇOIT, «MAITRE CLÉMENT MON BON AMI.»

EN un rondeau sur le commencement
En vocatif, comme maistre Clément
Ne peut faillir r'entrer par huis, ou porte!
Aux plus scauans poetes ie m'en raporte,
Qui d'en vser se gardent sagement.
BIEN inuenter vous fault premièrement,
L'inuention deschiffrer proprement,
Si que raison, et rithme ne soit morte,
En un rondeau.

VSEZ de motz receuz communément :
Rien superflu n'y soit aucunement,
Et de la fin quelque bon propos sorte:
Clouez tout court, rentrez de bonne sorte,
Maistre passé serez certainement

En un rondeau.

A VN POETE IGNORANT.

Qu'on meine aux champs ce coquardeau,
Lequel gaste, quand il compose,
Raison, mesure, texte, et glose :
Soit en ballade ou bien rondeau.

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