pas l'entrée & le terme de leur carriere, entre voient la route fans la mesurer, la quittent fans la connoître, veulent tout apprendre à la fois, croient dans un moment tout favoir, & n'ont pas même appris à favoir douter. Ce font ces talents nobles & défintéreffés qu'animent l'amour de la gloire & celui de la patrie; ces talents laborieux d'autant plus appliqués à tout genre d'étude, qu'elle femble leur être moins néceffaire pour arriver à tout genre de connoiffances; ces talents féconds & inépuisables, dont la richeffe, qu'ils poffédent, croît à mesure de celle qu'ils répandent; ces talents enfin enrichis du tribut de toutes les fciences. Non pas pas de cette science légere & fuperficielle que tout attire, que rien ne fixe; qui voltigeant d'objets en objets, fans goût comme fans régle, fans fruit comme fans choix, fans fuccès comme fans méthode, pense fans réfléchir, & étudie fans apprendre. Non pas de cette science frivole qui orne fans embellir; qui brille fans éclairer ; qui plaît fans inftruire; qui ayant commencé par la curiofité finit par l'ignorance; & n'eft pas moins à craindre fa fauffe lueur, que celle-ci par fes ténèbres par véritables. Non pas de cette science superbe & ambiticuse cherche, & qui entretient la e à connoître que pour être rifiant fes forces & fa fanté à e vaine & fugitive, ruine les fans obtenir l'objet de fon attente cette science intrigante & artifinonce avec éclat, qui s'étale avec ouvant fe faire des admirateurs par fait des partifans par fon manége; loges pour en recevoir à fon tour; frage à intérêt; place, fi j'ose ainfi time à ufure; &, dans cette espèce hete une réputation par ce qu'il lui our en faire une aux autres. -je de plus ! Non pas de cette science in amas fombre & faftueux de conaines & ftériles, fouvent auffi pernir le cœur, qu'agréables à l'efprit; qui u au mérite que l'on veut avoir, avoir, ôtent aucoup de celui que l'on a, ne font e qu'un honneur médiocre, & font ent une plaie dangereuse au chrétien. z cette réflexion, Meffieurs, je me la mife, même dans une Affemblée aca; & je connois affez vos cœurs pour ne ndre d'en être défavoué. Les talents que nous demandons sont ceux qui, appliqués par goût & avec choix, fe livrent par attrait & de préférence, à la recherche des objets folides & intéreffants; qui fervent encore plus la fociété qu'ils ne lui plaifent; ou plutôt qui employés par des efprits fages & éclairés, luj plaifent également, & la fervent. Telle eft, ce me femble, la deftination de ces affemblées, où la littérature dirigée par la fageffe, ne dirige ellemême fes études qu'à fon agrément, & à l'utilité des autres. Ces traits ne fuffifent-ils pas pour indiquer au moins le caractere de l'Esprit acadé mique ? Efprits d'étude fans doute, puisqu'ils doivent enrichir les autres efprits par le tréfor de leurs recherches & de leurs connoiffances. Mais Efprits pliés au ton de l'agrément, dans qui l'aménité des Lettres fixe l'égalité du caractere, & adoucit l'auftérité de la science; qui transportés du commerce des Mufes à celui des hommes, y portent avec eux la décence & la liberté, ajoutent la pensée qui plaît au fentiment qui touche ; dérident la fageffe, mais n'effacent point fes traits; parent la vérité, mais ne déguifent pas fes loix; laiffent aux vertus la fainteté qui nous commande le refpect, & versent fur elles un agrément qui leur concilie notre amour. Efprits de réflexion, puisqu'ils doivent rappeller ou foumettre les autres Efprits à l'empire du goût & de la raison; mais Esprits foumis euxmêmes à la loi des égards qu'exige la fociété civile de tous ceux qui la fréquentent; qui n'attaquent les défauts dont ils font frappés,qu'avec réserve, & fij'ofe le dire, qu'avec une forte de refpect fouvent plus impérieux que l'autorité elle-même; qui mettent moins leur gloire à être les cenfeurs & les juges des autres, que leurs maîtres & leurs modeles; qui réforment un ouvrage fans forcer l'auteur à rougir; qui attentifs à préfenter les qualités dont l'humanité s'honore, l'éloignent, par la feule comparaison, des défauts dont elle gémit ; & n'apprennent aux autres ce qu'ils doivent être, qu'en montrant eux-mêmes ce qu'ils font. Efprits laborieux & féconds, qui fe reproduifent fans ceffe avec les fujets qu'ils traitent ; portent dans chacun d'eux, une variété de couleurs qui les diftingue & les multiplie; s'étendent avec les uns, fe renferment dans les autres; ne font qu'effleurer ceux qui n'ont qu'une fuperficie d'agréments; entrent dans la profondeur de ceux qui contiennent les tréfors précieux de la vérité; & embraffent tellement tous les rapports de chaque fujet qui doit être approfondi, que dans fa fingularité même il acquiert une espèce d'univer falité. Efprits amis de la vérité, qui ayant commencé à reconnoître les droits qu'elle a fur eux, se font un plaifir de la produire, & unhonneur de la fuivre dans tout; ont le mérite de l'orner, regarderoient comme un crime de la déguiser ; qui fachant d'ailleurs que l'efprit le plus étendu eft celui qui voit de plus près fes bornes, s'efforcent pour les étendre, mais craignent de les paffer; fe livrent aux effors où leur nature les porte, mais fans fortir des réserves où le devoir les retient; & fages jufques dans leurs écarts, craintifs jufques dans leur hardieffe, ne s'élevent qu'avec l'aveu de la raison, & reviennent à fon ordre. Esprits dociles à la loi du goût, qui tantôt renfermés dans les bornes qui leur font préscrites, se contentent de les nuancer & de les embellir; tantôt affervis aux précisions de la vérité, ne marchent dans les routes qui y conduifent, que fous la direction de la méthode ; & fij'ose le dire, que le compas & la régle à la main ; qui tantôt enfin livrés au génie qui les maîtrise, vont plus loin que la loi, mais n'entreprennent jamais contre elle. Efprits fociables, avides de tout favoir, mais |