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1518.

Sleidan, L.

num.

l'Electeur de Saxe le couvroit d'une protection refpectée dans tout l'Empire, & impofante pour Rome même. Sur fa recommandation & fur celle de l'Univerfité de Vittemberg, le Pape délégua un Juge en Allemagne, ce Juge fut le Cardinal Cajetan (Thomas de Vio) Légat à Aufbourg. C'étoit, difoit-on, un homme de beaucoup de mérite, & le P. Maimbourg l'appelle un grand homme. Mais il y avoit encore là un refte d'irrégularité; ce Cardinal avoit été Jacobin, & Luther prétendit depuis l'avoir trouvé très-Jacobin dans les fentimens & très-Cardinal dans les manières.

Luther, forcé par fon Protecteur même de comparoître devant ce JuAda Luth. ge, vint à Aufbourg fans autre fûreap. Caïeta- té que des Lettres de recommandation de l'Electeur, mais quelques jours après il prit un fauf-conduit de Empereur Maximilien; un pareil fauf conduit de l'Empereur Sigifmond n'avoit pas fauvé Jean Hus du bucher, mais cette infidélité bar

bare avoit eu des fuites funeftes, &

ne valoit rien à répéter. Luther donc 1518. comparut, difputa, protefta, afficha de nuit fon appel (car il affichoit volontiers) & s'enfuit fecrettement à Vittemberg, feignant de craindre ou craignant réellement qu'on ne l'arrêtât. En effet, il paroît certain que les inftructions du Légat étoient de l'obliger à fe rétracter ou de le faire arréter (1).

(1) Erafme, Sadolet, Sponde & Florimond de Remond lui-même ont trouvé un peu trop de précipitation & de hauteur dans la conduite de Léon X. & du Cardinal Cajetan à l'égard de Luther. Th. Hayne (vie de Luther) & Durand, (Hift. da feiziéme fiécle) Auteurs Proteftans, rapportent une converfation entre Luther & un Sécrétaire du Légat, où tout l'avantage eft du côté du premier. Le Sécrétaire venoit preffer Luther de fe rendre chez le Légat, Luther n'avoit point encore de fauf conduit.

LUTHER.

» Je n'irai point, que je n'aye obtenu un fauf » conduit de l'Empereur.

LE SECRETAIRE.

» Un fauf-conduit! Eh! qu'en voulez-vous » faire? Quand vous l'auriez obtenu, & qu'on n'y auroit en aucun égard, pensiez-vous donc que le » Prince Frédéric voulût prendre les armes pour » l'amour de vous ?

LUTHER,
J'en fero is bien fâché.

1.

Sleidan. L.

1518.

La fuite de Luther paroiffant dépofer contre lui, le Légat écrivit à Î'Electeur de Saxe pour le prier d'abandonner un hérétique que les foudres de l'Eglife alloient frapper mais l'Electeur prévenu par Georges Spalatin, fon Secrétaire, & par le Vicaire-Général Stupitz, crut fans peine que le Légat, ou avoit craint prudemment, ou avoit dédaigné infolemment de fe commettre avec un homme tel que Luther; il répondit u'il ne priveroit point fon Univerfité d'un pareil ornement.

L'Empereur Maximilien mourut, & l'Electeur de Saxe, l'un des deux Vicaires de l'Empire pendant l'in

LE SECRETAIRE.

"Et où vous cacheriez-vous donc, fi l'on vouloit vous arrêter ?

*

LUTHER.

»Je me cacherois fous la voute des Cieux.

LE SECRETA FRE.

Et vous, fi vous aviez le Pape & tous les » Cardinaux en votre puiflance, qu'en feriez-vous? LUTHER feuriant.

» Je tâcherois de leur rendre toute forte d'hon»neurs & de refpects. Hayne, p, 19. Durand L. s. n. 28.

2

theran. L. 1.

terregne, devint pour Luther un protecteur encore plus puiffant: l'au 1519. tre Vicaire de l'Empire, l'Electeur Palatin, ne s'étoit pas déclaré moins hautement en fa faveur; Rome elle- Maimbourg même parut refpecter le crédit de Hift. du Luce Moine; le Nonce Miltiz, Gentilhomme Saxon, que le Pape avoit choisi exprès pour l'envoyer à l'Electeur de Saxe, comme un homme qui devoit lui être agréable, Miltiz prit avec Luther le parti de la douceur, c'eft à-dire, felon Palavicin de la baffeffe 1), il careffa & flatta Hit. du Con. Luther, qui, fier de voir fon parti 1. 6. 14. groffir à chaque pas, daignoit à peine l'écouter. Miltiz poufla la come plaifance jufqu'à lui facrifier fes ennemis, il accabla en fa préfence le Dominicain Tetzel de reproches. fi

(1) Durand, I. 6. no. 8. dit que Miltiz fur fa route, interrogeoit jufqu'aux fervantes de cabaret fur ce qu'elles penfoient du S. Siege , ce qui lui attiroit des réponses burlesques; il ajoute que Miltiz dit à Luther: quand je ferous à la tête de vingtcinq mille hommes, je ne pourrois vous muer à Rome, Pai trouvé par tout fur ma vonte trois ennemis du Pape pour un ami.

Palavic.

de Trente L.

durs, que ce malheureux en mourut 1519. de douleur, & mérita la pitié de Luther même. Quel fut le fruit de ces ménagemens? Luther n'avoit été que fier & opiniâtre, il devint infolent & infléxible.

Du 9Novembre 1518.

Charles-Quint l'emporta fur François I.; il dut l'Empire à l'Electeur de Saxe, nouveau triomphe pour Luther, qui efpéra que l'Empereur ne pourroit se dispenser de lui être favorable, & qui se hâta de lui écrire comme il écrivoit au Pape, aux Nonces, aux Princes, à tout le monde, & fur-tout à François I. avec un mé→ lange de foupleffe & d'audace, qui annonçoit beaucoup d'orgueil & un peu d'inquiétude.

Son fort étoit encore incertain.Léon X. fur le rapport du Légat Cajetan, avoit couru d'abord au danger qu'il avoit jugé le plus preflant; les déclamations de Luther avoient porté coup aux Indulgences; la confiance étoit détruite, les Jacobins avoient beau prêcher, on n'écoutoit point, on payoit encore moins; Léon par

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