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des corps en repos. Cependant qu'on repaffe fur ces preuves; leur évidence en fera furmonter ce que le prejugé contraire à la conclufion y oppole d'abord.

Chaque quantité eft la mesure précife de foi même, & par là chaque mouvement eft la mesure à lui-même, fa fucceffion eft précilement telle qu'elle eft: Mais. quand il s'agit de comparer des quantités, pour en connoître au jutte le rapport, on leur cherche une mesure commune du même genre. Pour comparer deux mouvemens & établir leur rapport, il faut donc en chercher un qui ait ce qu'il faut pour être leur mefure commune. Et comme on peut comprendre que la mefure commune de deux étenduës doit être une étenduë qui fe trouve précilement un certain nombre de fois dans l'une, & un certain nombre de fois dans l'autre, fans favoir pour cela comment il faut s'y prendre pour trouver une telle mesure, on peut de même comprendre quel doit être un mouvement pour fervir à la mesure des autres, fans favoir par où on s'affurera qu'un mouvement a les conditions qu'on demande.

On comprend qu'un mouvement feroit propre à mefarer les autres, quand il feroit uniforme, & fans avoir besoin de faire attention au temps, on conçoit qu'un mouvement meriteroit le nom d'uniforme, quand il feroit toûjours également fucceffif, quand l'application fucceffive dans laquelle il confifteroit n'iroit jamais ni en croiffant ni en diminuant ; mais par où s'aflurer qu'on, a un tel mouvement?

On eft ailément venu à croire que les mouvemens des aftres & furtout celui du Soleil, fe faifoient avec cette regularité; la fuppofition étoit commode, & on n'y remarquoit pas d'erreur. Cependant on s'eft convaincu du contraire, & il a fallu s'affurer de quelques autres mouvemens pour fervir de regle univerfelle. La raison même les a fait trouver, On a obfervé (& on en a découvert les raisons) que de certains pendules quand

ils étoient d'égale longueur & qu'ils partoient enfemble, achevoient & recommençoient enfemble toutes leurs vibrations, fans que l'un devançât l'autre de quoi que ce foit.

Mais comme ces vibrations n'étoient pas toutes d'égale longueur, & que les arcs décrits par ces pendules alloient en diminuant,on a attendu d'en lâcher un qu'un autre eût fait un certain nombre de vibrations, so par exemple, & alors quoique le fecond dans chaque vibration, decrivît des arcs plus longs que les arcs décrits par les vibrations de l'autre, ces vibrations ne laiffoient pas de recommencer & de finir toûjours ensemble.

Ces experiences foûtenuës par des demonstrations ont parû mettre en droit de regarder la regularité de. ces mouvemens comme propre à en faire la mesure des autres ; car quoi qu'ils ne foient pas uniformes à tous égards, & que l'aplication fucceffive varie dans les differentes portions des mêmes arcs, cependant il y reste toûjours une uniformité fuffifante. Ces vibrations qui recommencent toûjours & finiffent toûjours ensemble, ont à cet égard une uniformité qui prouve que les petites durent précifement autant que les grandes, & prefentent dans cette égalité de durées quelque chofe d'affés fixe, pour en faire des mefures juftes & certaines. Un mobile dont l'application feroit toûjours également fucceffive, ne fourniroit rien de plus commode dans les efpaces égaux qu'il parcourroit également ; & des vibrations d'égale durée font équivalentes pour Pufage à des mouvemens uniformes en tout fens. On a donc là des mouvemens, on a des temps dont les fommes font égales.

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O

De la communication du Mouvement.

Etat de

Na vû qu'un corps en mouvement qui en rencontroit un autre en repos, le poutfoit devant Question. lui: De là on a aifément conclu que le premier donnoit du mouvement au fecond. En même temps on a remarqué que le premier alloit moins vîte & avançoit moins qu'auparavant, & de là on a encore conclu avec la même facilité, qu'il avoit perdu de fon mouvement. De ces deux confequences on en a tiré une troifiéme, c'est que le corps frapant avoit donné au corps frapé une partie de fon mouvement, & s'étoit confervé l'autre. Mais ces trois conclufions fi vîte tirées donnent lieu à une très grande difficulté, la troifiéme furtout: Le mouvement n'eft autre chose qu'un état du mobile, une maniere d'être du corps qui fe meut ; ou fi vous voulés, le mouvement d'un corps eft ce corps même exiftant d'une certaine façon, & appliquant fucceffivement fa furface. Or comment la maniere d'être d'une portion d'étenduë, peut-elle devenir la maniere d'être d'une autre portion? C'est comme fi on difoit qu'un › morceau d'étendue exiftant d'une certaine façon, devient un autre morceau existant d'une façon fembla

ble.

Premiere

Effaïons fi la premiere naiffance du mouvement ne nous pourroit point donner quelque lumiere là deffus. hypothefe Quand la fuprême intelligence a voulu qu'une certaine portion d'étendue fût en mouvement, infiniment fage & infiniment d'accord avec elle, il ne fe peut qu'elle n'ait voulu en même temps, tout ce fans quoi ce mou vement ne pouvoit le faire. Par conféquent elle a voulu que les corps rencontrés par le mobile lui fiffent place & avançaffent pour le laiffer avancer. Cette volonté a cu neceffairement fon effet,& comme il a voulu que

le mouvement continuât dans l'Univers, il a voulu par confequent que le deplacement, ou le mouvement des corps rencontrés & choqués par ceux qui en auroient continuât à fe faire dans toute la fuite des temps. Sa volonté toute puiffante eft executée, & cela arrive comme il l'a ordonné.

pour

Mais fi un mobile après avoir frapé le corps qu'il rencontre, continuoit à le mouvoir avec autant de vîtelle qu'auparavant, celui qu'il poufferoit avant lui avanceroit aufli vîte que lui lui faire chemin ; le mou. vement doubleroit donc dès le premier choc: Ces deux maffes en poufferoient une troifiéme égale à leur fomme, & le mouvement deviendroit quadruple; de forte que fi cela avoit eû lieu, une certaine doze de mouvement, que la fageffe du Createur avoit trouvé à propos d'établir dans l'Univers pour en faire la beauté, feroit parvenuë dans peu de momens aux plus grands excès, & auroit tout derangé. Voila pourquoi la Sageffe fuprême qui vouloit que l'Univers fubfiftât dans 'état où elle l'avoit d'abord mis, a trouvé à propos qu'un corps qui en rencontre un autre & qui est cause du mouvement où il fe met, en perdît autant que l'autre en reçoit de nouveau. Il a fallu que la manière d'être du premier devint d'autant moins fucceffive que celle du fecond le devient plus. A proprement parler, il ne fe fait pas un partage; mais les mêmes effets arrivent, que fi le mouvement étoit une fubftance qui fe partageât proportionellement. C'eft ce qui a donné lieu à des expreffions tellement établies par l'ufage qu'il n'y a pas moïen de les quitter: Elles font moins juftes, mais elles font plus commodes que des circonlocutions continuelles, & quand on les a une fois expliquées, il n'est plus à craindre qu'elles jettent dans Ferreur.

On ne se formeroit pas des idées affés juftes de ce fyftême, fi l'on concevoit l'Etre fuprême continuelle

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ment attentif à tous les chocs, pour créer une certaine
quantité de mouvement dans le corps frapé, & en dé-
truire precifément autant dans le frapant, ou pour faire
que le corps frapé exiftât en appliquant fucceffivement
fa furface dans un certain degré, & que le frapant ap-
pliquât la fienne moins fucceffivement qu'il ne faifoit,
precilément dans le même degré : Mais il fuffit de
concevoir qu'en faitant naître le premier mouvement
il a voulu que les chofes allaffent ainfi, & il l'a voulu
pour toujours. Cette volonté ne s'eft pas évanoüie ;
elle eft permanente en lui, & elle eft conftamment lui-
vie des effets qu'elle a ordonné.

la conftan

ce de Dieu.

Ce fera dans la fuite qu'on aura lieu d'examiner fi les chocs des corps à reflort font exception à cette loi, ou fi en remontant aux fecrettes & premieres caufes des effets du reffort, les chocs qu'il modifie fe trouvent affujettis à la loi commune, non à la verité dans ce qui le prefente aux fens, mais dans ce qui leur échape. Pour donner plus de poids à ces loix du mouvement Si elle eft. établies par la Sageffe fuprême pour toute la fuite des une fuite de temps, & pour mettre dans une plus grande neceffité de les reconnoître, on a pretendu qu'elles étoient des fuites de la conftance effentielle à Dieu. Je doute de la force de ce railonnement. Dieu eft un Etre libre & toujours très bon & très fage: Il a établi une très grande varieté dans les ouvrages de la Nature, & dans ceux de la Grace. Nous n'avons pas des idées affés exactes, affés complettes, affés determinées des perfections divines pour nous hazarder d'en tirer des confequences determinées. Peut-être même que les impreflions caufées par les chocs, les ébranlemens qui en font les effets, feroient toujours les mêmes, encore que la quantité abfoluë de mouvement changeât dans l'Univers, pourvû que la même quantité relative y fubfiftat. Un corps par exemple, qui s'avance avec deux degrés de mouvement, reçoit la même impreffion

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