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DEMONSTRATION

DES LOIX

DU CHOC DES CORPS.

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SECTION I.

Où l'on expofe les Axiomes & Principes qui ne font
point conteftez touchant le mouvement des Corps.

I.

1,

OUT Corps en repos refte dans cet état Į, jufques à ce que quelque caufe étrangere le mette en mouvement ; & tout Corps en mouvement continue à fe mouvoir dans une ligne droite, fans changer fa vîteffe, auffi long-tems qu'aucune cause étrangere n'agit point fur ce Corps.

II.

Le changement de force, c'eft-à-dire, fon augmen- 2, tation ou diminution, eft toûjours proportionnel à la

3.

force imprimée, & fe fait dans la direction de cette force. On entend par force imprimée, celle qui fe confume entierement en augmentant ou diminuant le mouvement du Corps.

III.

L'action & la réaction font toûjours égales, & ont leurs directions contraires ; c'est-à-dire, que l'action & la réaction produisent dans les Corps d'égaux changemens de

mouvement.

Ces trois principes font démontrez par une infinité d'experiences. On les appelle ordinairement les Loix da

mouvement.

IV.

4. Les efpaces parcourus par deux Corps, dont les mouvemens font uniformes, font toujours dans la raifon compotée de celles de leurs vîteffes, & des tems qu'ils font en mouvement.

5.

6.

V.

Les forces des Corps dont les vîteffes font égales, font proportionnelles à leurs maffes.

V I.

La force produite dans un Corps ne peut jamais être plus grande que celle qu'avoit l'agent, qui lui commuque fon mouvement, s'il n'entre point de reffort dans leur action.

VII.

Tous les mouvemens, les forces & les chocs des Corps 7. fe font dans un efpace qui s'avance avec une vitelle uniforme, de même que fi cet efpace étoit abfolument en repos. On eft d'accord que les mouvemens & les chocs des Corps fe font tout de même à prefent que la Terre tourne fur fon axe, que fi elle étoit immobile, comme dans le Systême de Ptolomée. Les chocs des Corps fur

3.

un vaiffeau qui s'avance avec uu mouvement égal, font les mêmes que fi le vaiffeau n'avoit point de mouvement.

SECTION II.

Qù l'on démontre que les forces des Corps font comme les produits de leurs masses multipliées par leurs vîteffes; où l'on examine le fentiment de ceux qui prétendent que les forces font comme les masses multipliées par les quarrez de leurs vifteffes.

Comme il eft abfolument neceffaire de fçavoir com- 8. ment déterminer les proportions des forces des Corps en mouvement, avant que de chercher les Loix de leurs chocs, & qu'il eft contesté que les forces des Corps font comme les rectangles ou produits de leurs maffes par leurs vîteffes, il me paroît effentiel d'éclaircir cette matiere, & d'examiner avec attention le fentiment de M. Leibnitz, expliqué & foûtenu depuis peu d'une maniere affez fuivie par M. Sgravezande, dans un Effai qu'il a publié fur le Choc des Corps. C'eft la question la plus fondamentale que l'on puiffe traiter à l'occafion des chocs des Corps; c'est pourquoi je m'étendrai plus particulierement fur la difcuffion.

1. Meffieurs Leibnitz & Sgravezande prétendent que 9. les forces des Corps font .comme les produits de leurs maffes par les quarrez de leurs vîteffes, & que les forces des Corps égaux font comme les quarrez de leurs viteffes. Par exemple, fi les vîteffes des deux Corps égaux font comme 10 & 8, leurs forces doivent être comme 100 & 64.

Suppofons donc que deux personnes, l'une fur un vaiffeau, qui s'avance avec un mouvement uniforme, & une vîteffe comme 2 ; l'autre en repos fur le bord de la mer, jettent deux Corps égaux A & B avec des efforts égaux dans la direction du mouvement du vaiffeau, & que le

IO.

II.

Corps B qui étoit en repos gagne une vitesse comme & Il eft clair par le feptiéme Principe, que le Corps A sa vancera dans le vaiffeau avec une vireffe comme 8 auffi, & dans l'air avec une virelle comme 10, fomme de la vîteffe du vaiffeau, & de fa vîteffe refpective dans le vaiffeau. La force du Corps A, avant qu'il eût cette aug mentation, étoit comme 4, felon M. Leibnitz, fa vîtelle | ayant été comme 2. L'augmentation de force qu'il reço eft égale à celle du Corps B par le feptiéme principe, c'eftà-dire, à 64: donc fa force totale fera 64+4=6,8. Mais parce que fa viteffe eft comme 10, fa force doit être comme 100, & ces deux forces font contradicto res. Ainfi leurs forces ne peuvent pas être, comme la quarrez de leurs vîteffes.

Si l'on fuppofe que l'on jette encore un autre Corps égal aux Corps A & B dans la même direction, &, avec le même effort fur un vaiffeau qui s'avance avec un vîteffe comme 4 ; la vîteffe totale du Corps C fera com me 12, & fa force dans l'air comme 12×12—144 D'où ôtant 16, qui étoit fa force avant l'augmentatio qu'il a reçûë, le refte 128 eft la force ajoutée au Corp Ĉ par le même effort qui avoit ajoûté 96 degrez de for C ce au Corps A, & 64 au Corps B, felon le Systême de M. Leibnitz. Cependant il eft clair que ces augment tions devroient être égales, tant par le fecond que par feptiéme Principe.

Pour donner encore un plus grand jour à ce raisonne ment, fuppofons que les deux Corps A & B viennen frapper contre quelques obftacles invincibles pofez, l' dans le vaiffeau, l'autre fur le bord de la mer, & quele Corps n'ayent point de reffort: il eft clair qu'ils perdro des quantitez égales des forces, & que les chocs feron: les mêmes par le feptiéme principe. Mais le Corps B peri dra 64 degrez de force, qui eft tout ce qu'il avoit requ Le Corps A en perdant 64, aura donc le refte 100 -64-36. Mais comme A perd toute la vîteffe, except les deux degrez qu'il avoit en commun avec le vailleau

du

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du commencement, il ne lui refte que quatre degrez de
force; & ces deux forces font encore contradictoires.

Enfin file fyftême de ces Auteurs étoit veritable, les mouvemens & les chocs des Corps contenus dans un efpace qui s'avance uniformement, feroient bien differens des mouvemens & des chocs des mêmes Corps, l'efpace reftant en repos. Dans leur fyftême il auroit été toûjours aifé de diftinguer les mouvemens relatifs des mouvemens abfolus ; ce qu'on a regardé comme ce qu'il y a de plus difficile dans la Phyfique en plufieurs occasions.

On tire un femblable argument du mouvement des 12. Corps élastiques. Soient deux Corps élastiques égaux A & B, qui vont du même côté avec des vîteffes comme 10 & 5, il eft connu que s'ils n'avoient point de reffort; ils auroient eu après leur choc une vîteffe commune comme 7: mais qu'étant parfaitement élastiques, ils changeront leurs vîteffes, & le Corps A aura 5 & B 10 degrez de vîteffe. M. SgraveZande convient dans fi Prop. 25. que le reffort agit fur les Corps de même que s'ils étoient en repos : & parce que le reffort les fepare avec 5 degrez de vîteffe, il faut qu'il imprime 2 degrez de vîtesse à chaque Corps, c'est-à-dire, de degrez de force. Sans l'action du reffort la force du Corps A auroit été le quarré de 7, c'est-à-dire, 225; le reffort lui ôte de degrez: ainfi il lui doit rester 225-25 degrez de force, c'est-à-dire, 50 degrez ; mais comme sa vîteffe n'est que 5, fa force ne peut être que 2 5. Ces deux forces font contradictoires : d'où il faut conclure qu'il est impoffible d'accorder leur principe avec les experiences. On pourroit s'étendre plus fur les argumens qu'on pourroit tirer des mouvemens des Corps élaítiques, mais paffons plûtôt à ce qui prouve plus directement que la force eft comme la maffe multipliée par la vîteffe.

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II. On eft d'accord que deux Corps, dont les vîteffes 13. font en raifon inverfe des maffes, & dont les directions

· B

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