Imágenes de páginas
PDF
EPUB

VII.

Ce fluide qui fort & qui rentre, n'eft pas Air.

fluide (quel qu'il puiffe être) qui par fa fortie & fa rentrée, produit les refforts, ou au moins que ce fluide les facilite, & contribue à leur production? Mais je vais m'expliquer plus clairement.

J'Ai confideré dans les Loix du choc, les parties de l'Air comme de petites lames fpirales, ou comme de petits floccons de laine ; & maintenant, après des Auteurs celebres, je les confidere comme des petits ballons ; car *Art. 15. qu'importe içi de quelle maniere on les confidere?

de

Si délicates que puiffent être les pellicules de ces petits ballons, ce ne font pas elles qui traversent fi facilement les pores de la peau du ballon (a). C'est fans doute la matiere fluide qui les remplit & qui les inonde de toute part. Ainfi cette matiere plus fluide que l'Air, eft au moins neceffaire à la production du reffort. Mais elle ne le produit pas par cette raifon feule, qu'elle eft plus fluide que l'Air. Ni l'Air, ni ce fluide plus parfait que l'Air, ne rentreroient pas dans un ballon, par cette rai fon feule, qu'ils font affez fluides pour y rentrer.

Car lorfque la reftitution va commencer, la matiere fluide qui eft dans le ballon, eft plus comprimée que celle qui l'environne. Mais les corps les plus fluides, comme tous les autres, ne doivent pas aller vers le côté où ils feroient plus preffez. Il eft donc neceffaire que la matiere qui produit le reffort (celle qui refte dans le ballon à la fin de la compreffion) ait pour le produire une force (4) propre à cet effet ; mais une force qu'elle n'emprunte d'aucun autre fluide. Car fi elle l'empruntoit d'un autre fluide, ce ne feroit pas elle, mais cet autre fluide qui

(a) LA'ir n'entre pas dans un ballon, s'il n'y eft contraint par une force exterieure: l'eau y entre plus facilement que l'Air. Voyez fur cette matiere les experiences de M. de Reaumur, dans les Memoires de l'Academie 1714. P. 55. 、

(b) Il ne s'agit pas encore ici d'expliquer en quoi confifte cette force. Cet examen regarde les trois derniers Chapitres de ce Traité.

feroit

[ocr errors]

feroit la caufe phyfique de la force élastique.

Or dans le ballon que je confidere ici, je ne vois que des pellicules & de la matiere subtile. La matiere fubtile emprunte-t-elle fon mouvement des pellicules ? N'est-ce pas elle au contraire qui leur communique le fien ? C'est donc elle qui eft la caufe phyfique du reffort d'un ballon, & à plus forte raifon de tous les autres corps qui ont plus de confiftance, & dont les refforts font plus parFaits.

VIII.

C'est une mas

tiere dont l'Air

[ocr errors]

IL eft donc au moins très-vraisemblable, que ce fluide
qui produit le reffort des corps durs, par exemple, de
deux boules de verre, qui en fort dans le premier tems
emprunte fa
du choc, & qui y rentre dans le fecond; eft le même fluidité & fa
que celui qui paffe avec tant de facilité par les pores du force; c'eft la
recipient de la machine Pneumatique, lequel eft auffi de matiere fubti-
verre; qui entre fous le recipient lorfque l'Air en fort,
& qui en fort lorfque l'Air y rentre: Que ce fluide est
le même que celui qui par des efpaces immenfes tranf
met prefque dans un moment l'action de la lumiere,
depuis les Aftres jufqu'à nous : Que c'eft cette matiere *
que le commun des hommes regarde peut-être comme chimeri- que s'exprime
que ; mais
que la plus faine partie des Philofophes admet au-
jourd hui, comme la fource de tous les mouvemens, & par là
de tous les changemens, & de toutes les varietez de la Na-
ture i en un mot comme le reffort de la machine du Monde.

Mais j'ai promis de laiffer dans ce Traité toutes ces
vrai-femblances, qui font tirées de confiderations étran-
geres aux effets naturels du choc. Si je les ai employées
dans les premieres propofitions des Loix du choc, ce n'é-
toit que comme en paffant, & pour faire entrer insen,
fiblement les Lecteurs dans mes penfées,

Je veux ignorer ici tout ce que les Phyficiens modernes ont écrit de la matiere fubtile ou de l'Ether. La matiere fubtile eft un fluide dont l'Air emprunte & fa fluidité &fa force ou mieux encore, c'est un fluide qui fort des corps élastiques dans le premier tems du choc, & qui y rentre

B

* C'est ainfi

M. de Mairan

dans fa Differtation fur la Glace. P. 3. fe conde édition.

dans le fecond; & qui par cette double action produit le bandement & le débandement des refforts. C'est l'idée sous laquelle je me la reprefente, pour me renfermer dans les bornes que je me fuis prefcrites.

Les effets de la force élastique qui nous font affez connus, nous conduiront beaucoup mieux que des conjectures hazardées, & des fuppofitions arbitraires, à une connoiffance affez distincte de la matiere qui les produit, & de la mechanique très-délicate qu'elle employe pour les produire.

choc. Art. 17.

18. 19. 20. 21.

[blocks in formation]

V. Loix du I. Preuve de la très-grande fluidité de la matiere fubtile, tirée des promptes vibrations des corps durs. II. Un reffort infiniment prompt, ne pourroit étre produit que par une matiere infiniment fluide. III. Les refforts qui font dans la Nature, font produits par un fluide que fluide que l'on peut Suppofer parfait. IV. La matiere fubtile eft homogene, & également fluide dans tous les corps, quoiqu'elle n'y produife pas des refforts également prompts. V. Elle ne doit laiffer aucun vuide dans l'Univers, ni faire aucune réfiftance. VI. Elle eft compofée de corpufcules indéfiniment petits, & divifibles à l'infini.

I. Preuve de la très-grande flui

dité de la ma

Es vibrations réïterées que j'ai fait confiderer * dans un bloc de marbre, lorfqu'on vient à le frapper, pourroient fuffire pour donner au Lecteur qui veut refléchir, une idée affez jufte de tiere fubtile, ti- la fluidité de la matiere qui produit le reffort. Mais rée des promptes pour nous reprefenter ici les vibrations des corps durs vibrations des d'une maniere plus fenfible, imaginons les dans quelque V. Loix du corps élastique qui foit fonore, par exemple, dans une boc. Art. Cloche.

corps durs.

1.7.

Un feul coup de Cloche fe fait entendre dans toute l'étendue d'une grande Ville, & au delà. Lorsque jo l'entends, mes oreilles font frappées ; & elles ne peuvent être frappées que par les petits corps qui les touchent immédiatement. C'eft-à-dire, que la maffe de l'Air, à l'occafion d'un feul coup de Cloche, est agitée dans une fphere qui pouroit comprendre toute une grande Ville. Ĉette agitation de l'Air eft l'effet des frémissemens imperceptibles, ou des vibrations très-promptes de toutes les parties de la Cloche. Enfin chaque vibration eft l'effet de l'action très-prompte de la matiere qui produit le resfort.

Lorfque la Cloche eft choquée par fon battant, il en fort de la matiere fubtile ; & il n'en fort à chaque demivibration, qu'une quantité infenfible. Cette petite quantité de matiere fubtile qui fort fucceffivement, eft la fomme d'un nombre indéfini de corpufcules, qui dans chaque inftant fortent de chaque pore de la Cloche. Plufieurs millions de millions de ces corpufcules réunis tous enfemble, égaleroient-ils un feul petit grain de fable égale roient-ils un de ces petits animaux (a) que nos yeux armez des meilleurs Microscopes, apperçoivent dans des liqueurs préparées ?

Dès que le battant ceffe de toucher la Cloche, les corpufcules qui étoient fortis de chaque pore, commencent à y rentrer ; & y rentrent tous, ou prefque tous fucceffivement dans un tems très-court. Cette premiere vibration caufée par la fortie & la rentrée des corpufcules

а

(a) Ces petits animaux ne font pas des corpufcules durs. Ils ont des membres très-flexibles, des pieds, des yeux, des membranes transparentes qui laiffent fouvent voir des inteftins, & quelquefois même un cœur qui par de fréquentes vibrations, entretient les mouvemens de ces petites machines vivantes. Ces vibrations & ces mouvemens ne fuppofentpas dans ces animaux comme dans les hommes, des arterès, une liqueur qui coule dans ces arteres, &c. Cette liqueur qui eft de la fubftance de l'animal, n'emprunte-t-elle pas fa fluidité de la matiere fubtile? Que de reflexions je laiffe ici à faire au Lecteur, pour ne pas perdre de vie mon fujet !

ils

f

11.

de la matiere fubtile, eft (comme je l'ai expliqué dans la Piece) fuivie d'une feconde vibration, d'une troifiéme, & ainfi de fuite à l'indéfini.

A chaque vibration les corpufcules fortent & rentrent. Mais avec quelle facilité! Avec quelle promptitude! Toutes ces vibrations fans nombre, ne font occafionnées que par un feul coup du battant de la Cloche ; & l'on diroit que toutes enfemble commencent & finiffent en

même tems.

L'efprit humain ofera-t-il donner des bornes à la fluidité d'une matiere qui produit tous ces effets? Et ne me fera-t-il pas permis de fuppofer dans un Traité Phyfique, que cette fluidité tient de l'infini, ou qu'elle eft parfaite Ce n'eft pas une fuppofition arbitraire. Je demande qu'elle me foit accordée.

*

Mais d'ailleurs pouvois-je réfoudre la Question proQu'un reffort inpofée par l'Academie, fans être forcé de faire cette fupfiniment prompt ne pourroit être pofition. L'Academie demande, qu'elle eft la cause phyproduit que par fique des refforts parfaits? Elle les fuppofe tels; & elle a une matiere in- foin d'infinuer, que l'on ne doit pas s'embarrasffer s'ils exiffiniment fluide. tent. Ne devois-je pas répondre, comme je l'ai fait, que *Dans l'Aver. la caufe d'un reffort parfait, feroit un fluide parfait ; ou tiffement de la bien pour ôter toute ambiguité, que la fluidité parfaite Piece qui a feroit une des proprietez de la matiere qui produiroit des remporté le refforts parfaits?

Prix en 1724.

On pourra fe convaincre que cette réponse est celle que je devois faire à la queftion propofée ; fi l'on fait attention que la perfection des refforts confifte non-feulement dans leurs forces, mais encore dans leur promptitude. Les refforts font parfaits en force, lorfqu'ils fe débandent avec des forces égales à celles qui les ont bandez; & ils ne font parfaits en promptitude, que lorfqu'ils fe bandent en un feul inftant, & qu'ils fe débandent dans un autre. Il eft impoffible qu'ils puiffent fe bander & fe débander dans le même inftant; parce qu'il cft impoffible que dans le même instant les parties des

« AnteriorContinuar »