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convient qu'à Dieu feul, de n'être obligé de rendre raifon à perfone de fa conduite. A N. 1383

La troifiéme voïc eft celle du concile general qui felon la forme du droit, ne devroit être compofé que de prélats: mais puifque à nôtre honte plufieurs aujourd'hui font ignorans, & plusieurs pafionez pour l'un ou l'autre parti, on y pouPoit mêler un pareil nombre de docteurs en theologie & en droit des univerfitez fameufes de l'un & de l'autre parti, ou même joindre des deputez des chapitres de cathedrales & des principaux" Ordres religieux. Il montre enfuite que le concile ne fera pas feulement utile pour l'extinction du fchifmc, mais encore pour le retablissement de la difcipline & des meurs, Enfuite il ajoûte : Nous difons hardiment, que fi un des contendans refufe opiniâtrement ces trois voïes fans en propofer une autre fufifante, il doit être jugé fchifmatique obftiné, & par confequent heretique. Loin d'être le pafteur du troupeau de J. C, c'est un trompeur & un tyran: il ne faut plus lui obéir, ni lui laiffer aucun gouvernement ni aucun ufage du patrimoine de l'églife. Il doit être chaffé du troupeau comme un loup dangereux, & puni des plus rigoureufes peines. des fchifmatiques: puifqu'il ne fe met point en peine de la diffipation & de la perte du troupeau, & ne fonge qu'à fatisfaire fon avidité infatiable.

Voici la peinture que fait l'auteur du triste état de l'églife pendant le fchifme. Elle eft tombée dans la fervitude, la pauvreté, le mépris: elle eft exposée au pillage on éleve aux prelatures des homes indignes & corompus, qui n'ont aucun fentiment de juftice ni d'honêteté, & ne fongent qu'à affouvir leurs paffions brutales. Ils dépouillent les églifes & les monafteres : le facré & le profane tour leur eft indiférent, pourvû

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qu'ils en tirent de l'argent : ils chargent les pauAN. 1394. vres miniftres de l'églife d'exactions intolérables, & les font lever par des homes inhumains, qui n'épagnent perfone, & ne laiffent pas de quoi vivre on voit par tout des prêtres mandians & réduits aux fervices les plus bas. On vend en plufieurs lieux les reliques, les croix, les calices & tous les vales facrez pourvû qu'ils foient d'or ou d'argent on voit les églifes tomber en ruine.

Que dirons-nous de la fimonie qui domine telement dans l'églife que prefque tout lui eft foûmis ? Sans argent peu de gens obtienent des graces & très-dificilement: celui qui en a, peut dormir en repos, il n'a rien à craindre. C'eft la fimonie qui diftribue aux plus corompus, pourvû qu'ils foient riches, les benefices qui font de quelque profit, principalement les cures: elle meprife les pauvres quelques doctes qu'ils foient; au contraire plus les clercs font favans, plus elle les hait, parce qu'ils la condanent plus librement, & ne veulent point employer fon fe cours pour obtenir des benefices. Ce qui eft de plus déplorable, c'est qu'on vend jufqu'aux facremens, principalement l'ordination & la penitence; on éleve ainfi aux dignitez ecclefiaftiques des perfones très-incapables & très-viles.

Que dirons-nous du fervice divin diminué par

tout,

& en quelques lieux entierement abando né? Que dirons-nous des mœurs & des vertus de l'anciene église telement oubliées, que files peres revenoient,à peine pouroient-ils croire que ce fût la même églife qu'ils ont autrefois gouvernée ?Enfin ce malheureux fchifme expofe nôtre fainte religion à la rifée des Egyptiens & des autres infideles qui croyent avoir trouvé l'ocafion favorable de nous infulter: ce fchifme enhardit les héretiques, qui comencent à lever la

te impunement & à femer leurs erreurs, du moins en cachete; en forte que la foi eft ataquée AN. 1394. de toutes parts.

content,

Cette lettre ayant été lûë au roi il en parut Labour. p. & la fit traduire en François pour être 267. examinée plus à loifir: car elle étoit écrite en Latin fuivant l'ufage de l'univerfité. Il dona jour aux députez pour recevoir fa réponse. Mais pendant l'intervale le cardinal de Lune fe dona tant Id. ibid. de mouvement qu'il fit changer la difpofition de la cour, & le jour de l'audiance étant venu, le chancelier Arnaud de Corbie dit aux députez de l'univerfité : Le roi ne veut plus entendre parler de cette afaire, il vous défend abfolument de la pourfuivre, ni de recevoir aucunes lettres fur ce fujet, que vous ne les lui aportiez fans les ouvrir. L'univerfité après avoir infifté inutilement fit ceffer les leçons, les prédications & les autres exercices de fa profeffion jufqu'à ce qu'on lui fit justice.

Cependant l'univerfité de Cologne écrivit à Spicil. to: celle de Paris, loüant beaucoup fon zée pour 6. p. 102. l'extinction du fchifme, & les pourfuites qu'elle faifoit auprès du roi, & la lettre ajoûte : Nous ne doutons point du bon droit du pape Boniface; &quoi que nous fachions que vous êtes d'un autre avis, nous ne laiffons pas de vous fuplier que fi Dieu vous infpire quelque bon moïen pour parvenir à l'union de l'églife, vous vouliez bien nous en faire part. La lettre eft du cinquième de Juillet 13 9 4. & l'univerfité de Paris y répondit loüant les bones intentions de celle de Cologne, mais l'exhortant à quiter Boniface & reconoître, Clement.

Dubonlai

La lettre de l'univerfité au roi fut envoyée Spicil. p. par fon ordre au pape Clement, auquel l'univer- 199 ité elle-même écrivit enfuite, le priant d'y avoirégard & aux trois, voies d'union qui y font pro

pofées. Elle fé plaint amerement du cardinal de AN. 1394. Lune fans le nomer. Il a tenté premierenient, dit-elle,' d'empêcher que nous n'euffions audiance du roi,& n'y aïant pas réussi, il s'est éforcé de nous faire impofer un perpetuel filence: mais on le lui a refufé. L'univerfité demande juftice au pape & l'exhorte à travailler ferieusement à l'union, puis elle ajoûte: Le mal est venu à ce point, que plufieurs difent tout haut: Il n'importe qu'il y ait plufieurs papes non-feulement deux ou trois, mais dix ou douze : on en póuroit mettre un en chaque roïaume qui fuffent tous égaux en autorité.

11.

Mort de

Le pape Clement aïant reçû ces lettres, les lut en prefence de ceux qui étoient avec lui: puis fe levant en grande colere, il dit tout haut: Ces lettres font empoifonées & tendent à diffa 10. 1. p.536. mer le faint fiege. Il n'y fit point d'autre réponse;

Clement

VII.

Vita PP.

1396.

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& ceux qui les avoient aportées, craignant pour leurs perfones, fe retirerent promptement. Depuis ce jour Clement demeura trifte & penfif; & peu après il lui vint une maladie qui parut legere & ne lui fit point garder le lit: mais le mercredi feiziéme Septembre 1394. après avoir oui la meffe étant rentré dans fa chambre, il fut ataqué d'apoplexie, comme il étoit affis, & en mourut. Il avoit tenu le faint ficge près de seize ans, & il n'y eut que onze jours de vacance.

Avant que la nouvele de cette mort fût arivée à Paris, les envoïez de l'univerfité étoient revenus, & avoient raporté coment le pape avoit reçû leur lettre & l'avoit traitée de mauvaise & d'empoifonée fur quoi l'univerfité le croïant encore vivant, lui écrivit une autre lettre où elle fe plaint fortement de la dureté de cette expreffion, & prie le pape de lui envoïer une réponse plus favorable. Mais quand on fut la mort de Clement dès le lendemain mercredi vingt-tioitié

me de Septembre; l'univerfité envoya au roi une deputation de docteurs en petit nombre, qui le AN. 1394. prierent de mander aux cardinaux d'Avignon qu'ils retardaffent l'élection jufqu'à ce qu'il eût plus amplement deliberé fur l'affaire de l'union: Ils le prierent encore d'affembler les prélats & les barons du roiaume, les membres les plus fameux des univerfitez & quelques notables bourgeois qui donaffent leur avís fur la maniere de proceder en cette affaire fi dificile. En troifiéme lieu ils le prierent d'écrire au pape Boniface & aux feigneurs qui tenoient fon parti; & de permettre à l'univerfité de Paris d'écrire aux autres univerfitez fur ce fujet. Enfin de faire faire dans fon royaume des proceffions & des prieres publiques pour la paix de l'églife.

Le roi trouva ces demandes fi raisonables qu'il les accorda toutes, & fit aux députez une douce réprimande d'avoir ceffé fi long-tems leurs leçons & les autres exercices, leur oidonant de les reprendre ce qu'ils promirent de bon cœur, & s'en retournerent pleins de joye.

Le même jour après dîné le roi Charles VI. affembla fon confeil où étoient fon frere le duc d'Orleans, fes oncles le duc de Berri & le duc de Bourbon, l'évêque du Pui & quelques autres feigneurs, entre autres Jean le Maingre dit Bou cicaut. Le chancelier leur dit de la part du roi la réponse qu'il avoit faite à l'univerfité, puis il ajoûta: L'intention du roi eft après avoir écrit aux cardinaux d'Avignon de leur envoyer le patriarche Simon Cramaud, maître Pierre d'Ailli fou aumônier & le Vicomte de Melun, pourtravailler à l'union de l'églife. Alors le duc de Berri dit: Je conois bien les difpofitions de ces cardinaux, ils recevront plus volontiers des laïques. qui n'auront autre chofe à negocier que d'expliquer la volonté du roi, qu'ils ne recevroient

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