Sur ces griefs l'univerfité dreffa un acte d'a AN. 1396. pel fous le nom de Jean de Craon maître ès arts, & prêtre du diocese de Laon, qu'elle avoit conftitué fon procureur. L'acte d'apel eft trèslong & contient toutes les raifons de part & d'autre ou plûtôt les prétextes fous lefquels on entretenoit le fchifme. La conclufion eft que l'uni

Spicil. 143.

Duboulai verfité apele au pape futur, unique & veritable

803.

8.820.

de toutes les cenfures faites ou à faire par le pape Benoît; & l'acte lui fut auffi-tôt fignifié.

Il fut extrêmement irrité & publia une bulle qui porte en fubftance: Nous avons apris mê me par la voie publique que Jean de Craon for difant procureur de l'univerfité de Paris a eu la témérité d'interjeter appel au nom de cette compagnie contre nous & l'églife Romaine, sous prétexte de quelques prétendus griefs dont elle difoit que nous l'avions menacée, ou que nous pourions lui faire à l'avenir. Or les gens les plus mal-intentionez n'ont jamais formé de telle appellation, contraire à la plenitude de la puiffance que faint Pierre & fes fucceffeurs ont reçûë de J. C & aux facrez canons qui défendent d'apeler du faint fiege ou du pape. C'est pourquoi nous declarons cette appellation nulle & de nut éfet fans préjudice de proceder contre cet ap pelant & fes adherans, felon que meritera leur infolence. La date eft d'Avignon le trentiéme de Mai 1396.

:

L'univerfité aïant apris par la comune reiomée le contenu de cette bulle, écrivit aux cardinaux d Avignon, pour s'en plaindre, & les prier de s'apliquer plus que jamais à l'extinction du fchifme. La lettre eft du dixiéme de Juillet 822 I 396. Enfuite ils publierent un fecond acte d'apel contenant comme les autres pieces du tems beaucoup de paroles & peu de raifons. Ils alleguent les exemples des papes depofez, comme

LVI. n. 10.

Benoît V. au concile de Rome en 964. la pourfuite de l'empereur Otton I. Benoît VI. or- AN. 1396. doné en 972. mais peu après en prifoné & é- Sup. liv. tranglé par Centius. Et Benoît IX. chaffé par n. 36. les Romains en 1044. mais ces deux derniers exemples furent de pures violences. Ils citent Sup. liv. auffi le fait du pape Anaftafe II. abandoné par une partie de fon clergé mais c'eft une fable tirée de Gratien après Anaftafe bibliotécaire.

LIX. n. 47

V. conc. to.

4. p. 1277.

de C. P.

XCVIII. n.

42.

Cette année les Turcs remporterent en Hon- D. grie une victoire fignalée fur les Chrétiens. Ba- XV. Empereure jazet ou Abou Jezid quarriéme des Sultans Ottomans avoit fuccedé à fon pere Amurat en Bibl. 791. de l'Hégire 1388. de J. C. il fut furnomé Orient. p. Ilderim, c'est-à-dire le Foudre, à caufe de la 175. rapidité de fes conquêtes. Il affiégea C. P. en Sup. liv. 1395. & obligea l'empereur Manuel Palcologue à lui payer un tribut de dix mille florins Rain. 1394. d'or, & doner aux Turcs un quartier & une n. 23. mofquée dans la ville; & comme les Grecs curent recours au pape Boniface pour avoir du Lecours des princes Latins, il fit prêcher la Croifade contre les Turcs dans les païs de fon obedience les plus voifins d'eux: comme il paroît par trois bulles de l'année 1 3 9 4. Ma is pour bien entendre ceci il faut reprendre la fuite des empe

reurs Grecs de C. P.

La retraite de Jean Cantacuzene & le retabliffe- Sup. liei ment de Jean Paleologue ariverent en 1355.Palco xcvi. n. 27. logue étoit alors âgé de vingt-trois ans. Il eut Ducas hift. trois fils, Andronic, Manuel & Theodore, dont l'aî- c. 12. né furpaffoit tous les jeunes gens de fon âge par fa force, fa belle taille & fa beauté. Le fultan Amurat avoit auffi trois fils dont le fecond nomé Countouzes étoit de l'âge d'Andronic. Ces deux jeunes princes étant un jour en débauche conjurerent de faire mourir chacun fon pere, & vivre enfuite comme freres. Amurat en étant bien in

formé, fit arracher les yeux à fon fils; & man AN. 1396. da à l'empereur Jean d'en faire de même à Andranic, finon qu'ils auroient une guerre irréconciliable.

L'empereur fuivit ce mauvais confeil, foit parce qu'il fe fentoit trop foible pour foûteuir la guerre contre Amurat, foit par fa legereté naturele qui lui faifoit traiter fuperficielement toutes les affaires, excepté l'amour des femmes. Il fit donc aveugler Andronic avec du vinaigre bouillant, & non feulement Andronic, mais fon fils Jean, enfant qui començoit à peine à parler. Il les fit enfermer tous deux avec la femme d'Andronic dans une tour de C. P. où ils demeurerent deux ans : au bout defquels ils en fortirent à la faveur d'une fédition excitée par les Latins de Galata; & les Genois fe fervant du nom d'Andronic combatirent quelques jours contre les Grecs qui tenoient pour l'empereur fon perc; & enfin Andronic fuivi de quatre mille chevaux que Bajazet lui avoit prêtez entra dans C. P. & fut declaré empereur.

Alors il enferma dans la même tour fon pere & fes deux freres, Manuel & Theodore; & ils y furent auffi deux ans, après lefquels ils s'en fauverent & pafferent à Scutari. Andronic l'aïant apris & fe repentant de fa mauvaife conduite, les rapela à C. P. remit fon pere fur le trône & fe jeta à fes pieds lui demandant pardon de fest crimes. L'empereur Jean fe laiffa fléchir & pardona à Andronic, puis l'envoya avec fa femme & fon fils à Selivrée qu'il lui dona avec quelques autres places. Andronic & fon fils n'étoient pas aveugles: le pere étoit feulement borgne & le fils très-louche. A la place d'Andronic Jean Paleologue fit courouer empereur Manuel fon fecond fils le vingt-cinquiéme de Septembre 137 3. & on en tira l'horofcope; tant les Grecs croyoient à l'aftrologic.

Bajazet avoit tellement pris le deffus fur ces empereurs, qu'il les traitoit quafi comme fes AN. 1396, efclaves. Jean Paleologue voyant combien ce Bouliand fultan étoit hardi & entreprenant comença à for- not. p. 2266 tifier un quartier de C. P. nomé la porte dorée, Ducus c. z pour avoir une retraite en cas de befoin. Bajazet l'ayant apris lui manda de razer cette citadele: autrement ajoûta-t-il, je ferai aracher les yeux à ton fils Manuel & te le renvoïerai aveugle. C'eft que Manuel étoit allé par ordre de fon pere mener à l'ordinaire quelque fecours au fultan. L'empereur Jean étoit au lit ayant la goute & demi-mort des autres effets de fes débauches il n'avoit point d'autre fucceffeur que Manuel, & ne pouvoit réfifier à la puiffance des Turcs 1 fit donc abattre la citadele & mourut peu après l'an 1391. cinquante ans depuis la mort de fon pere Andronic le jeune.

Manuel qui etoit à Burce à la porte de Baja zet ayant apris la mort de fon pere s'enfuit de nuit & vint à C. de quoi Bajazet irrité, lui envoya dire: Je veux qu'il y ait un Cadi à C. P. pour rendre juftice aux Mufulmans qui y tra fiquent, fi tu ne le veux pas, ferme les portes de ta ville & regne dedans, tout le dehors eft à moi. Enfuite il paffa de Bithynie eu Thrace, ruï na tous les places à l'entour de C. P. & en tranfporta les habitans. Il prit même Theffalonique le vingt-cinquiéme de Mai la même année 1391. Pour C.P. il fe contenta de la bloquer fans l'afficger en forme: mais le pays d'alentour étoit tellement défolé, que la famine fut bien-tôt grande dans la vile. En cette extrêmité l'empereur E Manuel écrivit au pape, c'eft-à-dire à Boniface, au roi de France & au roi de Hongrie, demandant un prompt fecours.

XVI.

Sigifmond roi de Hongrie envoya un évêque Bataille d & deux chevaliers en ambaffade au roi Charles Nicopoli,

Froiff. iv.

c. 67. Juven. p. 224.

VI. avec des lettres portant que Bajazet le meAN. 1396. naçoit de le venir attaquer jufqu'en Hongrie, le priant de lui envoyer du fecours. Grand nom bre de nob efle Francoife s'y offrit, & le roi leur dona pour chef fon coufin-germain Jean comte de Nevers fils aîné du duc de Bourgogue. Etant arrivez en Hongrie, ils fe hâterent de chercher les ennemis, fans écouter les avis du roi Sigifmond; & d'ailleurs ils s'abandonerent à toutes fortes d'excès, le vin, la table, le jeu & les femmes ; nonobftant les remontrances des ecclefiaftiques qui les exhortoient à fe mettre en bon état, vù les périls où ils s'expofoient. Ils prirent un château dont ils tuerent tous les habitans; puis ils affiegerent la ville de Nicopoli mais Bajazet vint au fecours, il y eut une grande bataille, où les François qui avoient vouIu être à l'avant-garde furent défaits & tous pris ou tuez. C'étoit le jeudi vingt-huitiéme de Septembre 1396.

XVII. Affaires du fchifme.

p. 416.

:

Pendant ce mois de Septembre plufieurs envoyez vinrent à Rome de la part de divers princes de l'obedience du pape Benoît; favoir, des S. Ant. to. rois de France, d'Angleterre, de Caftille, de Navarre & d'Aragon. Ils exhorterent Boniface, & le prierent que pour faire ceffer le fchifme, il voulût bien renoncer à tout le droit qu'il prétendoit avoir au pontificat; affûrant que Benoît en feroit autant. Boniface répondit qu'il étoit vrai pape & indubitable, qu'il n'y en avoit point d'autre, & qu'il ne prétendoit renoncer en façon du monde. Ainfi les envoyez s'en retournerent vers leurs maîtres fans avoir rien obtenu.

b. Niem.

Au mois d'Avril de l'année fuivante 1397. ...33. les princes d'Allemagne tinrent à Francort une dicte où fe trouverent des députez de l'univerfité de Paris & des envoyez de plufieurs rois &

autres