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AN.

1347.

XLIII.

Avignon ac-
quis par le
pape.

Sup. n. 18.
J. Vill. x11.

C. 114.

re à être déclaré chef de l'entreprise que le pape & les princes d'Occident préparoient contre les infideles, prétendant y contribuer beaucoup en donnant à l'armée un paffage libre en Afie, & en

paffant lui même. Car il se vantoit de ne céder à aucun de fes prédéceffeurs en zéle pour la défenfe de la Chrétienté. Le pape reçut fort bien cette ambaffade, & promit d'envoyer des nonces qui porteroient fa réponse. La lettre eft du quinziéme d'Avril 1348.

En même-tems la reine Jeanne de Naples étoit à Avignon où elle s'étoit réfugiée pour éviter les pourfuites de Louis roi de Hongrie, qui la prétendoit complice de la mort du roi André fon mari, dont il étoit frere & fucceffeur. En vertu de ce droit Louis vint à Naples, où il entra le vingt-troifiéme de Janvier 1348, & envoya des ambafladeurs au pape le prier de donner au cardinal Bertrand légat dans le royaume, la com miffion de le couronner roi de Sicile, ou lui permettre d'aller lui-même à Avignon recevoir la Rain. an. couronne des mains de fa fainteté. Le pape écri 1348. n. 3. vit au légat une grande lettre où il dit en subftance: Vous répondrez au roi de Hongrie, que nous ne pouvons en confcience lui accorder le couronnement au préjudice de la reine Jeanne dont nous avons reçu l'hommage pour le royaume de Sicile, & qui fe plaint d'en avoir été fpoliée par ce prince. Elle n'eft ni condamnée ni convaincue de la mort du roi André fon mari; & nous avons donné commiffion d'en informer à vous, lorfqu'elle étoit fur les lieux, & à trois autres cardinaux depuis qu'elle eft ici. C'est à nous feul qu'appartient la punition de ce crime, & le jugement des droits fur ce royaume; & fi le roi de Hongrie croit y en avoir, il ne devoit pas commencer par s'en mettre en poffeffion, mais nous demander justice, que nous offrons de lui

rendre prompte & favorable. La lettre eft du feptiéme de Mai.

'AN. 1347.

Mais à la fin du même mois le roi Louis quitta Matth. Vrfubitement l'Italie, & s'étant embarqué à Barle- lani lib. 1.6. te, il retourna en Hongrie : ce que la reine Jean- 14. 18. ne ayant appris, elle réfolut de retourner à Naples avec Louis fon coufin, fils de Philippe, prince de Tarente, qu'elle époufa avec dispense du pape, & qui prit le titre de roi de Jérusalem`, n'ayant pû encore obtenir du pape celui de roi de Sicile. Ce prince & la reine fa femme manquant d'argent pour leur voyage de Naples, demanderent du fecours au pape & aux cardinaux, mais -ils n'en obtinrent pas ainfi la néceffité les obligea de vendre à l'églife Romaine la jurifdiction que la reine Jeanne comteffe de Provence avoit fur la ville d'Avignon, moyennant quatre-vingt

mille florins d'or. Le contrat daté du dix-neu- Gall.Chr.Ed. vième de Juin 1348, porte vente de la cité d'A-1725, 10. 1. vignon avec tous les fauxbourgs, tout fon terri- P. 22. Bal. vita PP. toire & fes confins. Et comme elle étoit tenue en to. 1. p. 23. fief de l'empire, la vente fut approuvée & autorifée par l'empereur Charles IV, qui accorda que les papes tiendroient cette ville en franc-aleu. & comme terre entierement libre.

a

XLIV.

Pefte géné

M. Vill. c.

Quelques-uns regarderent le prompt départ du roi de Hongrie comme une fage précaution contre la pefte qui commençoit à s'étendre en rale Italie, & qui cette année y fit des ravages effroya- 14. bles. Les marchands l'avoient apportée du Levant en Sicile & dans les ports de Tofcane. A Florence elle emporta entr'autres, Jean Villani qui a écrit en Italien l'hiftoire de cette république depuis fon commencement jufqu'à cette année, avec un caractere de fincérité & de probité qui le rend recommandable. L'ouvrage fut continué par Mathieu Villani fon frere,qui dit que la pefte commença à Florence à l'entrée du mois d'Avril,

c. 1. 2.
Rain. 1348.

n. 30.
Gefta pont.
Leod. v. 3. p.

44.

& dura jufqu'au commencement de Septembre, AN. 1348. & qu'il mourut les trois cinquièmes des habitans. Elle paffa enfuite d'Italie en France & en Efpagne, & les deux années fuivantes en Angleterre, en Allemagne & dans le Nord.

Rain. n. 32. Cant. Nang. 10. 1. Spicil. p. Sog.

Pour confoler les fideles dans cette calamité publique, le pape Clément accorda à tous les prêtres la faculté d'abfoudre de toutes fortes de péchés ceux qui étoient attaqués de ce mal, & leur donner indulgence pleniere; & il donna certaines indulgences aux prêtres qui adminiftroient les facremens aux peftiférés, & à tous ceux qui leur rendoient quelque office de charité, ou les enfeveliffoient après leur mort. La bulle est du Vita p. 265. dix-neuviéme de Mai. A Avignon en particulier

S. Ant. Chr. 20. 3. p. 253. edit. 1586,

il commit des médecins pour visiter les pauvres, & d'autres perfonnes pour les affifter pendant la maladie, & prendre foin de leur fépulture ; & comme les cimetiéres ordinaires ne pouvoient les contenir, il acheta un grand champ qu'il fit bénir pour cet effet, & que l'on nomma le Champ-fleuri. L'indulgence encourageoit les malades à mourir, & plufieurs ayant vû leurs héritiers mourir devant eux, donnoient leurs biens aux églifes & aux religieux.

Plufieurs prêtres timides abandonnoient leurs troupeaux, & en laiffoient le foin à des religieux plus hardis. A l'hôtel-Dieu de Paris la mortalité fut telle, que pendant long-tems on portoit tous les jours au cimetière des faints Innocens plus de cinq cens corps dans des charettes : nombre prodigieux vu le peu d'étendue qu'avoit alors Paris. Les religieufes fervoient les malades fans crainte avec leur charité & leur humilité ordinaire; plufieurs d'entre elles moururent; mais on les renouvelloit fouvent. Cette maladie emporta grand nombre de religieux & les couvents demeurerent prefque déferts; à quoi l'on attribua

le relâchement qui fuivit particuliérement chez les religieux mendians. Car cette pefte emporta AN. 1348 les meilleurs fujets qui foutenoient les communautés par leur doctrine & leurs exemples: la maladie fut une occafion de relâcher la rigueur de l'observance dans la nourriture & dans le refte; & l'on ne put y revenir quand la maladie fut paffée, par la tiédeur des freres & même des fupérieurs. Entre les religieux illuftres qui moururent de cette contagion on remarque Gérard Eude autrefois général des freres mineurs, que le pape Clément avoit fait patriarche titulaire d'Antioche en 1342, à la place d'Ifnard, & peu Vading. fups après lui avoit donné l'administration de l'églife 1341.7. 4. de Catane en Sicile où il mourut. Bernard de 1348. n. 2. Siene inftituteur de l'ordre du mont Olivet, Ferrar. 22, mourut auffi de cette maladie dont il fut frappé Aug. Sup.live en fervant fes moines qui en étoient infectés; ack, # 48il les avoit gouvernés vingt- fept ans, & mourut à Siene le vingt-deuxième d'Août 1348.

S. Ant. ibid

Cette pefte emporta Jean André fameux docteur de droit canonique à Bologne, dont on a des glofes & des commentaires plus amples fur les décrétales. A Florence la mortalité étant ralen- M. Vill. x3. tie, & les citoyens un peu raffurés,ceux qui gou- . 8. vernoient la république, chercherent à y attirer des habitans, & augmenter fa réputation ; & pour cet effet ils réfolurent d'y établis une univerfité où l'on enfeignât le droit & toutes les fciences. Ils firent publier leur deffein dans route Italie, il leur vint des profefleurs en toutes les facultés, qui commenceremt kurs leçons le fixiéme de Novembre de la même année. Les Florentins envoyerent auffi à avignon,& obtinrent dir pape Clément une bulle en date du dernier jour de Mai 1349, par laquelle ilaccorda à leur ville le pouvoir de faire des docteurs en théologie & en toutes les facultés, avec les priviléges de

Dy

AN. 1348.
XLV.

Evêques étrangers. Rain. 1348.

n. 14.

Sup. liv.

X11.

20.

n. 25. 2. conc.

P. 505. D.

XLVI.

Vita PP.

Paris, de Bologne & des autres univerfités. Alfonfe roi de Caftille fe plaignit au pape de ce qu'il avoit donné à un étranger l'évêché de Coria fuffragant de Compoftelle. Le pape répondit : Les apôtres dont les évêques font les fucceffeurs, n'ont-ils pas reçu du Seigneur la miflion pour aller hors de leur pays prêcher aux autres nations? Et S. Jacques par qui l'Efpagne a reçu la lumiere de l'évangile étoit-il né en Efpagne? Faut-il donc s'étonner file pape fuit l'exemple de celui dont il tient la place fur la terre, & devant lequel il n'y a ni diftinction de nations, ni acception de perfonnes : & s'il choifit des perfonnes capables quoiqu'étrangeres pour conduire le troupeau de N. S.? La lettre eft du dix-huitiéme d'Octobre.

Ce n'eft pas ainfi que raifonnoit le pape S. Jules I, lorfqu'il reprochoit aux orientaux l'irrégularité de l'ordination de Grégoire intrus à la place de S. Athanafe. A Anthioche,dit-il,à trente-fix journées de distance, on a donné le nom d'évêque à un étranger, & on l'a envoyé à Alexandrie; & enfuite: On y envoie Grégoire, qui n'y a point éré baptifé, qui n'y étoit point connu, qui n'a été demandé ni par les prêtres, ni par les évéques, ni par le peuple; & encore: Quand même Athanafe auroit été coupable, l'ordination ne fe devoit pas faire ainfi contre les canons & les regles dé l'églife. Il falloit que les évêques de la province ordonnaffent un homme de la même églife d'entre fes prêtres ou les clercs. Ainfi parloit ce faint pape, mais c'étoit mille ans avant Clément VI.

Le peuple vint à s'imaginer que les Juifs Juifs per- avoient procuré la pefte en jettant du poifon dans fécutés. les fontaines & les puits ; & ce bruit s'étant rép. 254. 882. pandu, plufieurs Juifs furent brûlés & tués fans autre examen. Ce qui les jetta dans un tel défefpoir, que les meres craignant qu'après leur mort Alb. Arg. p. on ne baptisât leurs enfans, les jettoient dans le

Cant. Nang.

P. 809.

147.

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