Imágenes de páginas
PDF
EPUB

pour lesquelles ils ne témoignoient dans le fonds que du mépris.

En effet les veritables biens peuvent-ils nuire à ceux qui les poffe1 dent, & ne doit-on pas être bon, quand on en eft pourvû abondamment? Ne voit-on pas cependant tous les jours, que les richeffes de la terre font entre les mains des méchans, & qu'elles font pernicieuses

bles de fatisfaire pleinement le cœur de l'homme,qu'ellesfont fragiles & paffageres, & qu'elles ne meritent pas qu'il en faffe l'unique objet de fes vœux, ni qu'il les regarde comme le fouverain bien : mais

vouloient en faire un
bon ufage; bien-loin
de leur être funeftes,
elles contribueroient
à les rendre plus par-
faits, & leur fourni-
toient même le moïen
de pratiquer mille
vertus.L'abus quel'on
fait des richeffes ne
prouve donc pas qu'il ne s'enfuit pas de-
elles ne foient pas des
biens tout ce qu'a
dit Ciceron jufqu'ici
fait voir à la verité,
qu'elles font incapa-

là qu'elles foient inutiles,& qu'on ne puiffe pas les mettre au rang des biens.

R

me tamen vera ratio valebit, quàm vulgi opinio. Neque ego unquam illum bona perdidiffe dicam, fi quis pecus, aut fupellectilem amiferit. Nec non fæpè laudabo fapientem illum Biantem, ut opinor qui annumeratur inter feptem: cujus cùm patriam Prienem cepiffet hoftis, cæterique ita fugerent, ut multa de fuis rebus fecum afportarent, cùm effet admonitus à quodam, ut idem ipfe faceret: Ego verò, inquit; facio: nam omnia mea mecum porto. Ille hæc ludibria fortunæ, neque fua quidem putavit

a Cela fait voir que ce Philofophe que l'on comptoit fije ne me trompe, parmi les fept fages de la Grece.

Il n'y a point de Contrée qui ait été plùs feconde en Philofophes, que la Grece: parmi le grand

aux gens de bien. Ainfi, qu'on en rie tant qu'on voudra, la droite raifon fera toûjours plus d'impreffion fur mon efprit que les opinions populaires : on ne m'entendra point dire qu'un homme aura perdu fes biens parce qu'il aura perdu fes troupeaux, ou fes meubles, & je ne cefferai jamais d'admirer la belle réponse que fit Bias après la prife de Priene fa Patrie. Lorfque les ennemis fe furent rendus maîtres de cette Ville, tous les habitans prirent en foule la fuite, & fe munirent auparavant de tout ce qu'ils pouvoient emporter avec eux. Bias fut averti par un de fes compatriotes, de prendre les mêmes pré cautions que les autres; je les ai profes, lui répondit-il car j'emporte avec moi tous mes trésors: cela fait voir a que ce Philofophe, que l'on comptoit fi je ne me trompe, parmi les fept Sages de la Grece, ne metnombre de ceux qui s'y font rendus célébres, il y en avoit fept que l'on nommoitSages par diftin

[ocr errors]

&tion. Bias en etoit

un,
il étoit de Prie-
ne Ville de l'lonie
Province de l'Afe
mineure.

que nos appellamus etiam Bona,

Quid eft igitur (quæret aliquis) bonum? Si quid rectè fit, & honeftè, & cum virtute; id benè fieri vere dicitur. Et quod rectum, & honeftum, & cum virtute eft, id folum opinor bonum. Sed hæc videri poffunt obfcuriora, cùm fine appofitione exemplorum lentiùs difputantur. Vitâ atque factis illuftranda funt fummorum virorum hæc, quæ verbis fubtiliùs, quàm fatis eft, difputari videntur.

Quæro enim à vobis num ullam cogitationem habuiffe videantur ii, qui hanc Rempublicam tam præclarè fundatam nobis reliquerunt, aut auri aut argenti ad avaritiam, aut amoenitatum ad delectationem, aut fupellectilis ad de

toit pas comme nous au rang de fes biens, les richeffes fragiles & paffa geres, que la fortune donne & re prend felon fes caprices.

Apprenés-nous donc ce que c'eft que le bien me dira quelqu'un ? c'est tout ce qui eft conforme à la raison, à l'honnêteté & à la vertu, & tout ce qui en eft éloigné ne merite. pas le nom de bien. Mais comme il pourroit refter quelque obfcurité dans ce que je viens de dire, & que les raifonnemens fubtils ne fuffifent pas quelquefois pour bien éclaircir ces fortes de verités, je crois qu'il eft à propos de les confirmer, par la conduite & les actions des grands hommes; car les exemples font bien plus d'im Preffion que les difcours recherchés.

3

Les illuftres Fondateurs de cette République, qu'ils nous ont laiffée dans un état fi floriffant, ont-ils jamais eû pour objet, l'or & l'argent comme les avares ? les a-t-on vû rechercher les délices & les plaifirs comme les voluptueux ? a-t-on remarqué qu'ils aimaffent le luxe & la bonne

« AnteriorContinuar »