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bonnes graces du veillard riche & Tans enfans dont il veut devenir l'héritier? il en obferve tous les coups d'oeil, il eft fans ceffe à fes côtés, il le loüe, il le flatte, il lui fait des préfens, il execute fes ordres avec une promptitude incroyable, enfin' il ne parle qu'à propos, & toûjours dans le deffein de lui plaire: ces lâches complaifances, ne font-t'elles pas d'un vil efclave, plûtôt que d'un homme libre?

Que dirai-je maintenant de ces ambitieux qui n'afpirent qu'aux premie res charges, au gouvernementdesProvinces, & au commandement des armées?la paffion qui les domineparoît à la verité, avoir quelque chofe de noble; mais elle ne laiffe pas d'être bien dure & bien impérieufe, c'eft elle qui forcoit un fi grand nombre de citoiens, qui fe croyoient les plus illuftres de la République à ramper fous Cethegus, quoique fa réputa

vices &de débauches, & qui s'étoit acquis sant d'autorité parmi

le peuple, qu'il dif pofoit de tout dans Rome

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eft, fi hæc libertas exiftimari poteft?

Quid cùm cupiditatum do? minatus exceffit, & alius eft dominus exortus ex confcientiâ peccatorum,timor Quam eft illa miest fera, quàm dura fervitus! Adoles centibus paulò loquacioribus eft ferviendum. Omnes qui aliquid fcire videntur, tanquam domini timentur. Judex verò quantum habet dominatum? quo timore no

a ils craignent to jours que les jeunes gens qui aiment à parler en public, &c. Les Romains pour

donner de l'émula tion aux jeunes gens, qui avoient du talent pour l'éloquence,leur permettoientde veniz

tion fut fort équivoque c'eft elle qui les forçoit encore à le combler de préfens, à venir implorer fa protection, & fon crédit, & à lui faire inceffamnrent leur Cour:fi après tou tes ces démarches, on les regarde comme des gens libres, que fera-ce donc que des efclaves ?

Mais lorsque les hommes vicieux fe font délivrés de la tirannie de leurs paffions, en les fatisfaifant,ne rentrentils pas dans une autre fervitude; car enfin n'en est-ce pas une que cette crainte où les jettent les remords de leur confcience? que leur fort est: trifte & malheureux la ils craignent 3 toûjours que les jeunes gens qui aiment à parler en public, & qui s'en acquitent un peu mieux que les autres ne viennent les accufer: tous ceux qui ont la réputation d'être habiles, & éclairés leur font redoutables

Carbon & fe fit admirer de tout le mon

accafer en public les l'âge de dix-fept-ans mechans. Craffus, cet orateur dont Ciceron parle à la fin de ce Paradoxe, accufa à

de.

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Paradoxe cinquiéme

centes afficit? an non eft omnis metus, fervitus?

Quid valet igitur illa eloquentiffimi viri L. Craffi copiofa magis, quàm fapiens oratio? Eripe nos ex fervitute. Quæ eft ifta fervitus, tam claro homini, tamque nobili: Omnis enim animi debilitati & humilis & fracti timiditas, fervitus eft. Nolite finere nos cuiquam fervire. In libertatem vindicari vult? Minimè. Quid enim adjungit? Nifi vobis univerfis, quibus & poffumus, & debemus? Dominum mutare, non liber effe vult. Nos verò fi quidem animo excelfo, & alto, & virturibus exaggerato fumus, nec debemus, nec poffumus. Tu poffe te dicito, quandoquidem potes: debere ne dixeris: quoniam nihil quifquam debet, nifi quod eft turpe non reddere. Sed hæc hactenus.

& comme ils fe fentent chargés d'une infinité de crimes, ils tremblent au feul afpect d'un juge.

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A quoi penfoit donc Craffus, cet Orateur fi habile, lorfque dans un difcours plus rempli de traits brillans que de penfées folides, il s'écrioit, tirés-nous de la fervitude? mais fi l'ef clavage n'eft autre chofe qu'une dépendance qui rend l'homme lache & timide, & qui le tient fous un joug honteux & humiliant, comment fe pourroit-il faire, qu'un homme d'un fi grand mérite & d'une fi haute naiffance, y fut affervi? ne permettés pas pourfuivoit-il, que nous vivions fous: d'autres loix que les vôtres puifque nous pouvons & nous devons dépendre de vous? à l'entendre d'abord on auroit cru que la liberté étoit l'objet de fes défirs: mais ce qu'il ajoutoit fait bien voir qu'il ne cherchoit qu'à changer de maître. Pour moi je penfe tout autrement que lui, je croirai toûjours que la dépendance eft indigne d'un homme vertueux, & qui a des fentimens nobles & élevés. Dites tant

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