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« sence seule est capable d'exciter; je ne « murmure plus contre la Fortune, puis<< qu'elle vous rend à mes vœux.... Mais où « m'emporte une joie immodérée ? J'oublie « que vous êtes dans les fers. Par quel nou« veau caprice du sort y êtes-vous tombée? « Comment avez-vous pu vous sauver de la « téméraire ardeur de don Alvar? Ah! « qu'elle m'a causé d'alarmes, et que je «< crains d'apprendre que le ciel n'ait pas assez protégé la vertu !

«Le ciel, dit dona Théodora, m'a ven«gée d'Alvaro Ponce. Si j'avais le temps « de vous raconter........... → Vous en avez tout « le loisir, interrompit don Juan: le dey << me permet d'être avec vous, et, ce qui doit « vous surprendre, de vous entretenir sans « témoins. Profitons de ces heureux mo<<<ments instruisez-moi de tout ce qui « vous est arrivé depuis votre enlèvement « jusqu'ici. - Eh! qui vous a dit, reprit« elle, que c'est par don Alvar que j'ai été << enlevée ? Je ne le sais que trop bien, « répartit don Juan. » Alors il lui conta succinctement de quelle manière il l'avait appris, et comme, Mendoce et lui s'étant embarqués pour aller chercher son ravisseur, ils avaient été pris par des corsaires. Dès qu'il eût achevé son récit, Théodora commença le sien dans ces termes:

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« Il n'est pas besoin de vous dire que je << fus fort étonnée de me voir saisie par une a troupe de gens masqués: je m'évanouis « entre les bras de celui qui me portait, et « quand je revins de mon évanouissement, « qui fut sans doute très-long, je me trouvai « seule avec Inès, une de mes femmes, en « pleine mer, dans la chambre de poupe « d'un vaisseau qui avait les voiles au

<< vent.

« La malheureuse Inès se mit à m'exhor«ter à prendre patience, et j'eus lieu de a juger par ses discours qu'elle était d'intel«ligence avec mon ravisseur. Il osa se « montrer devant moi, et, venant se jeter « à mes pieds: Madame, me dit-il, pardon« nez à don Alvar le moyen dont il se sert << pour vous posséder: vous savez quels << soins je vous ai rendus, et par quel atta«< chement j'ai disputé votre cœur à don << Fadrique jusqu'au jour que vous lui avez « donné la préférence. Si je n'avais eu pour « vous qu'une passion ordinaire, je l'aurais << vaincue, et je me serais consolé de mon

malheur; mais mon sort est d'adorer vos «< charmes tout méprisé que je suis, je ne <«< saurais m'affranchir de leur pouvoir. Ne <«< craignez rien pourtant de la violence de << mon amour: je n'ai point attenté à votre << liberté pour effrayer votre vertu par d'in

« dignes efforts, et je prétends que, dans la <«< retraite où je vous conduis, un nœud << éternel et sacré unisse nos cœurs.

« Il me tint encore d'autres discours « dont je ne puis bien me ressouvenir; mais, « à l'entendre, il semblait qu'en me forçant a à l'épouser il ne me tyrannisait pas, et « que je devais moins le regarder comme <«< un ravisseur insolent que comme un « amant passionné. Pendant qu'il parla, je « ne fis que pleurer et me désespérer; c'est « pourquoi il me quitta sans perdre le temps « à me persuader; mais en se retirant il fit << un signe à Inès, et je compris que c'était « pour qu'elle appuyât adroitement les <<< raisons dont il avait voulu m'éblouir.

« Elle n'y manqua point; elle me repré<< senta même qu'après l'éclat d'un enlève«ment je ne pourrais guère me dispenser << d'accepter la main d'Alvaro Ponce, quel« que aversion que j'eusse pour lui: que « ma réputation ordonnait ce sacrifice à « mon cœur. Ce n'était pas le moyen d'es« suyer mes larmes, que de me faire voir la « nécessité de ce mariage affreux aussi « étais-je inconsolable. Inès ne savait plus « que me dire, lorsque tout à coup nous << entendîmes sur le tillac un grand bruit « qui attira toute notre attention.

« Ce bruit que faisaient les gens de don

« Alvar était causé par la vue d'un gros « vaisseau qui venait fondre sur nous à « voiles déployées : comme le nôtre n'était « pas si bon voilier que celui-là, il nous fut a impossible de l'éviter. Il s'approcha de << nous, et bientôt nous entendîmes crier: « Arrive, arrive! Mais Alvaro Ponce et « ses gens, aimant mieux mourir que de se « rendre, furent assez hardis pour vouloir « combattre. L'action fut très-vive: je ne « vous en ferai point le détail ; je vous dirai << seulement que don Alvar et tous les siens « y périrent, après s'être battus comme des « désespérés. Pour nous, l'on nous fit « passer dans le gros vaisseau, qui appar< tenait à Mezomorto, et que commandait «Aby Aly Osman, un de ses officiers.

<< Aby Aly me regarda longtemps avec « quelque surprise, et, connaissant à mes « habits que j'étais Espagnole, il me dit en « langue castillane: Modérez votre afflic<tion: consolez-vous d'être tombée dans << l'esclavage; ce malheur était inévitable « pour vous; mais, que dis-je, ce malheur! « C'est un avantage dont vous devez vous « applaudir. Vous êtes trop belle pour vous << borner aux hommages des chrétiens. Le << ciel ne vous a point fait naître pour ces « misérables mortels; vous méritez les vœux « des premiers hommes du monde : les seuls

« Musulmans sont dignes de vous posséder. « Je vais, ajouta-t-il, reprendre la route « d'Alger: quoique je n'aie point fait d'au<< tre prise, je suis persuadé que le dey, « mon maître, sera satisfait de ma course. « Je ne crains pas qu'il condamne l'impa« tience que j'aurai eue de remettre entre « ses mains une beauté qui va faire ses déli<< ces et tout l'ornement de son sérail.

« A ce discours qui me faisait connaître « ce que j'avais à redouter, je redoublai mes. « pleurs. Aby Aly, qui voyait d'un autre. « œil que moi le sujet de ma frayeur, n'en « fit que rire, et cingla vers Alger, tandis « que je m'affligeais sans modération. Tan<«< tôt j'adressais mes soupirs au ciel, et << j'implorais son secours; tantôt je souhai«tais que quelques vaisseaux chrétiens. << vinssent nous attaquer, ou que les flots « nous engloutissent. Après cela, je sou<< haitaisque mes larmes et ma douleur me a rendissent si effroyable, que ma vue pût « faire horreur au dey. Vains souhaits que << ma pudeur alarmée me faisait former! « Nous arrivâmes au port: on me conduisit « dans ce palais je parus devant Mezo

<<< morto.

« Je ne sais point ce que dit Aby Aly en << me présentant à son maître, ni ce que « son maître lui répondit, parce qu'ils se

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