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Marche plus ferme de moitié.
Mais j'aime mieux un fage à pié,
Content de fon indépendance
Qu'un riche indignement noyé
Dans une fervile opulence;

Qui facrifiant tout, honneur, joie, amitié,
Au foin d'augmenter fa finance,

Eft lui-même facrifié

'A des biens, dont jamais il n'a la jouissance. Nourri par Apollon, cultivé par tes foins, Cher Abbé, ne crains pas que je me timpanise · Par l'odieufe convoitife

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D'un bien plus grand que mes befoins.
Une ame libre & dégagée

Des préjugés contagieux,
Une fortune un peu rangée

Un corps fain, un efprit joyeux.
Et quelque profe mêlangée
De Vers badins ou férieux,
Me feront trouver l'apogée
De la félicité des dieux.

C'est par fes maximes, qu'ignore
Tout riche, Juif, Arabe ou More,
Que j'ai fçû plaire dès long-tems
A des protecteurs que j'honore:
Et c'est ainsi que je prétens
Trouver l'art de leur plaire encore.
C'eft dans ce bon efprit Gaulois,
Que le gentil maître François
Appelle Pantag uélifme,

Qu'à Neuilli La Fare & Sonnin
Puifent cet enjoûment benin
Qui compofe leur Atticifme.
Abbé, c'eft-là le catéchifme
Que les Mufes m'ont enfeigné :
Et voilà le vrai Quiétifme
Que Rome n'a point condamné.

IDYLLE

Pour les Demoiselles de Saint-Cyr.

FUyez loin de ces lieux, profanes voluptés.

Malheureux à jamais ceux que vous foumetteż,
A votre funeste puissance!

Ne nous étalez point vos charmes dangereux.
Ce féjour est l'afyle heureux
Du repos & de l'innocence.

Ici les frivoles defirs

Ne mêlent point à nos plaifirs
L'impatience & la trifteffe.
Nous ne redoutons point l'ennui;
Et chaque jour voit avec lui.
Reffufciter notre allégreffe.

Quelle main nous a fait ces jours délicieux?

Quelle divinité nous raffemble auprès d'elle?

J'en reconnois les rayons glorieux,

Tout eft ici guidé par cct astre fidelle.

C'eft la vertu qui fe montre à nos yeux
Sous les traits d'une humble mortelle.

D'un feul de fes regards elle embellit ces lieux.
Sa bonté chaque jour pour nous fe renouvelle,

Célébrons à jamais ses bienfaits précieux.

Peut-on lui refufer une amour éternelle?

Chantons. C'eft la vertu qui fe montre à nos yeux. Sous les traits d'une humble mortelle.

L'aftre du jour fortant de l'onde,

Répand également fa lumiére féconde
Sur les palais des rois & les toîts des bergers,
Telle du fein brillant d'une Cour qu'elle éclaire;
Elle vient tous les jours dans ce lieu folitaire
Eclairer nos humbles vergers.

Elle foutient notre jeuneffe.
Dans les routes de la fageffe
Nos pas font par elle affermis.

Des vices enchanteurs elle confond l'adresse;
Et fon exemple inftruit notre foibleffe
A triompher de leurs traits ennemis.

Sans elle, quelle main eût conduit notre enfance? Nous ferions des troupeaux fans guide & fans défence

Au milieu des loups furieux.

Le monde eût infecté notre foible innocence
De fon venin contagieux.

Peut-être qu'aujourd'hui le menfonge odieux,
L'orgueil ou l'aveugle licence,

De notre pureté feroient victorieux.
O vertu, de qui la tendreffe

Prend foin du bonheur de nos jours,
Conduifez-nous fans ceffe,
Protégez-nous toujours,

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Faffe le jufte Ciel qu'avec des traits de flame
Dans tous les cœurs votre nom foit écrit !
Puiffent tous les mortels vous chérir dans leur ame
Autant que le Ciel vous chérit!

Qu'à jamais le fouverain Etre
Vous faffe un deftin glorieux !

Et puiffe le foleil à nos yeux difparaître,
Avant que vous ceffiez de paroître à nos yeux!

Nous béniffons votre présence.

Nous chériffons votre affistance.

Jans vous, nos plus beaux jours feroient de triftes nuits.

Vous changez en plaisirs nos plus mortels ennuis.

O vertu de qui la tendreffe
Prend foin du bonhenr de nos jours,
Conduifez-nous fans ceffe,

Protégez-nous toujours.

FIN.

APPROBATION.

"Ai lû par ordre de Monfeigneur le Chancelier un Manufcrit intitulé: Choix des Poëfies morales Chrétienne, depuis Malherbe jufqu'aux Paëtes de nos jours. A Paris, le 15 Août 1738.

DE MONCRIF.

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