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quatre chanoines et quatre chapelains pour le service de cette chapelle. Dès le 22 janvier 1521, le Roi avoit envoyé à la chambre des comptes Guillaume Petit, son confesseur, pour faire part de son projet à cette Hist. de la compagnie, et la charger d'indiquer quelques chaville de Paris, 1. 2. p. 940. pelles de fondation royale tombées en ruine, dont il Preuves, t. 2, pût réunir les revenus à la chapelle de son collége. P. 577, 578. Le 19 décembre 1359, le Roi adresse de Villers-Cotterets à Guillaume Prud-homme, trésorier de l'épargne, des lettres qui contiennent tous les arrangemens nécessaires pour la construction du collége des trois Langues à l'hôtel de Nesle. D'après ces lettres (1), où tout est prévu et ordonné, il semble qu'il n'y avoit plus qu'à jeter les fondemens du collége. Cependant François I est mort huit ans après, sans que l'exécution de ce projet fût même ébauchée; peut-être le défaut d'argent et la guerre qui ne fut qu'à peine interrompue sous ce règne, en furent-elles les seules causes, mais Petr. Gal- Galland en accuse beaucoup plus la malignité de Poyet et sa basse envie contre les gens de lettres; il soutient que ce magistrat ne cessa de mettre des obstacles à la bonne volonté du Roi. Sadolet, son ami et Postel son protégé, lui rendent un autre témoignage; mais les voix désintéressées s'élèvent contre lui. Ni Duprat, ni Poyet, quoiqu'ils dussent leur élévation aux talens de l'esprit, ne favorisèrent les lettres; ils imitèrent à cet égard l'ingrate indifférence d'Adrien VI,

land. vit.Cas

tellani.

(1) Le Roi y nomme Audebert Catin pour tenir les comptes et faire les paiemens; Nicolas de Neuville-Villeroy, secrétaire des finances, et Jean Grollier, trésorier de France, pour régler les prix et arrêter les marchés; il leur adjoint pour contrôleur Pierre Des Hôtels, son valet-de-chambre.

dont ils n'imitèrent point les vertus. Adrien, que les lettres avoient fait précepteur de Charles-Quint eť pape, ne fit rien pour elles. Duprat et Poyet allèrent plus loin; ils tâchèrent de nuire aux gens de lettres qui les primoient dans l'esprit du public et dans la faveur du Roi. La supériorité des gens de lettres est enviée, même lorsqu'elle ne procure ni rang ni fortune, et elle procuroit alors l'un et l'autre. Aussi que d'ennemis ou secrets ou déclarés ! Les hommes ne pardonnent guère plus sincèrement les succès de l'esprit que les femmes ceux de la figure; mais ce qui alors excitoit surtout l'envie, c'est qu'il s'opéroit une révolution sensible. La noblesse, qui dans son orgueilleuse ignorance aimoit à croire que tout lui étoit dû, voyoit prodiguer à des savans qu'elle dédaignoit, les plus hautes dignités, les plus importans emplois, les ambassades les plus délicates, et cette faveur plus désirée sous certains rois que le crédit même. Les moines, les théologiens, qui, avec des mots sans idée et de la barbarie savante avoient gouverné le monde, voyoient percer de toutes parts une lumière odieuse, dont le foyer étoit autour du trône. Heureusement pour la noblesse, le Roi aimoit la guerre ; heureuse-ment pour les moines il craignoit l'hérésie: ni les accusations d'hérésie, ni les occasions de guerre ne manquèrent sous ce règne. On ne pouvoit empêcher le Roi de vouloir du bien aux lettres, on tâcha de l'empêcher d'en faire, et l'on y réussit en partie. Le collége des trois Langues ne fut point élevé à l'hôtel de Nesle; mais les professeurs furent nommés et dotés. On en nomma deux pour l'Hébreu et deux pour le Grec, et cet établissement porta dès-lors le nom de

Collége royal. Il fut formé dans l'Université (dont il se sépara depuis), et mis sous la direction du grandaumônier, qui paroît avoir nommé aux chaires, jusque vers l'an 1661. Il n'y eut point alors d'inspecteur nommé; mais Jacques Colin, qui n'étoit point encore disgrâcié, fut chargé du détail de cet établissement.

Quoique le Collége royal eût été fondé dans l'Université comme un nouvel ornement pour ce grand corps, il n'y excita d'abord que de la jalousie et des soulèvemens, j'en ai dit la raison; les nouveaux professeurs étoient dotés (1), ils donnoient des leçons gratuites; les anciens vivoient du produit de leurs leçons, ils craignoient que leurs écoles ne fussent abandonnées pour les nouvelles. Par cette raison l'on avoit eu l'attention de ne point fonder d'abord de chaires pour le Latin dans le Collége royal, afin que les leçons de l'Université fussent toujours nécessaires; mais ce n'étoit pas assez, on pouvoit encore négliger des leçons de Latin, qu'il falloit payer, pour des leçons de Grec et d'Hébreu qui ne coûtoient rien. Les rois font la guerre pour des provinces, les particuliers plaident pour de moindres possessions, des professeurs se disputent cent écus d'appointement; c'est partout le même principe de cupidité, c'est partout

(1) Il paroît que leurs appointemens furent d'abord de 450 liv., somme alors suffisante. Nous apprenons par la préface d'un des livres de Ramus, adressée à Catherine de Médicis, que François I, outre ces appointemens, avoit donné à tous ses lecteurs ou professeurs ensemble une bonne abbaye; mais, dit Ramus, je ne sais quel écornifleur empêcha que l'abbaye ne fút affectée à leur compagnie; il en départit à chacun autant qu'il lui plut, et ne s'en fit pas la pire part; or avec la vie éteinte de tous ces lecteurs d'alors, le bienfait du Roi s'est éteint aussi.

aussi la même méthode de couvrir les petites vues d'intérêt particulier des grandes considérations de l'intérêt général. L'Université cita les professeurs royaux au Parlement, et demanda qu'ils fussent soumis à l'examen de l'Université même, et obligés d'obtenir sa permission pour enseigner. Un motif de jalousie, qu'on avouoit encore moins que le motif d'intérêt, venoit s'y joindre et le redoubler. Les professeurs royaux étoient des hommes choisis, que la voix publique avoit seule indiqués au Roi; les professeurs de l'Université avoient quelquefois été pris au hasard, comme il arrive dans les corps nombreux. Le fameux Béda reparoît ici sur la scène; c'est lui qui D'Argentré, soulève l'Université contre le Collége royal; c'est lui qui, joignant aux motifs d'intérêt et de jalousie la haine du savoir et le besoin de persécuter, excite les murmures et invente les prétextes; c'est lui qui veut plaider lui-même au Parlement la cause de l'Université. « La religion étoit perdue, si l'on enseignoit le Histoire de << Grec et l'Hébreu; l'autorité de la Vulgate alloit Paris, t. 2, «< être détruite; déjà l'on entendoit de toutes parts ces paroles si suspectes: Ainsi porte le texte hébreu ; c'est ainsi qu'on lit dans le Grec des Septante. Mais «< ces gens étoient-ils théologiens pour oser expliquer « la Bible? D'ailleurs les Bibles dont ils se servoient, << étoient pour la plupart imprimées en Allemagne, « pays d'hérésie, ou bien elles nous venoient des « Juifs.

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« Non, répondoient les professeurs royaux par l'organe de Marillac, leur avocat, nous ne sommes « point théologiens; ce n'est que comme grammai

Collect. JuErrorib. t. 2, p. 101, 102.

dic. de Nov.

Du Boullay, t. 6, p. 222,

224.

p. 882.

<< riens que nous expliquons les Bibles hébraïques et << grecques. Mais vous, qui êtes théologiens, entendez« vous le Grec et l'Hébreu? Si vous les entendez, venez <«< à nos leçons, et quand vous nous surprendrez à << enseigner quelque hérésie, dénoncez-nous, c'est « un métier que vous savez faire. Que si vous n'en« tendez ni le Grec ni l'Hébreu, comment pouvez<< vous demander à nous examiner, et sur quel fonde«ment nous défendrez-vous ou nous permettrez-vous d'enseigner? Osez-vous bien étaler votre mépris « barbare pour des connoissances que vous n'avez «< point acquises? Instituteurs publics, vous sied-il << de combattre l'instruction, de résister aux efforts << que fait un grand Roi pour chasser l'ignorance de «ses Etats? Quant aux livres que nous expliquons, « nous avons à la vérité le choix des livres grecs, «<et si quelques-uns parmi nous donnent la préfé«< rence à la Bible, c'est par un motif que vous devez << approuver mais quel autre livre hébreu que la « Bible, voulez-vous que nous expliquions »?

Soit que ces raisons aient fait impression sur les juges, soit que l'autorité, jalouse de conserver son ouvrage, soit venue au secours des professeurs royaux, il paroît que le Parlement ne prononça rien, et le Collége royal subsista et s'agrandit. Gabriel de Marillac (1), qui avoit plaidé la cause des professeurs royaux, fut depuis avocat-général au Parlement. L'é

(1) C'étoit le frère du fameux Charles de Marillac, archevêque de Vienne, employé en diverses ambassades à Constantinople, en Angleterre, en Allemagne, etc. Tous deux étoient oncles du maréchal décapité en 1632, et du garde des sceaux.

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