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Or pour cela ne faut tant de détour }
Suffit de peindre en un portrait fidele
L'attachement, & l'ardeur & le zele,
Et le respect, dont mon cœur lui fait vœu
Ajoûtez-y reconnoiffance entiere
Pour fes bontez; bref, fur cette matiere
N'apprehendez que d'en dire trop peu.
A fa faveur recommandez ma Muse,
Elle a befoin d'un femblable fupport,
Si quelquefois au moins elle l'amuse,
Je fuis content, & me voilà trop
fort.
Qu'après cela déformais on la fronde,
Fier d'un honneur qui releve fes droits,
J'oferois dire, elle a plû toutefois
A la prémiere Eminence du monde.

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'Allois cueillir des fleurs, pour vous faire un bou

J'AL

quet;

Elles s'offroient en abondance.

Et demandoient toutes la préference,
Jufqu'au moindre pétit muguet ;
Quand un gros chêne à fiere contenance,
Prit la parole en arbre d'importance,
Et par ces mots rabatit leur caquet:
Canailles, taifez-vous, leur dit-il en colere,
C'est bien à vous de vous offrir ici;

Votre beauté fragile eft courte & paffagere, Un gratecu fur pied vaut mieux, fans vous déplaire Que tout autant que vous voici,

Dès que vous n'êtes plus au sein de votre mere.

Quant à moi, Chêne, il n'en eft pas ainfi.
Vivant, ou mort, je fuis toûjours d'ufage,
On fçait me mettre en œuvre poliment.

Sous le nom de lambris, ou bien de parquetage
Je ne fuis pas d'un petit ornement.

Las du fardeau de la vieilleffe,
Je veux m'immoler galamment,

Pour une illuftre & fage Abbeffe:

Qu'elle me foule aux pieds dans fon appartement;
Mon fort fera plus beau, que quand jufques aux cieux
J'élevois ma fuperbe tête ;

Et j'afpire au moment que tiré de ces lieux,
J'aille en Parquet changé me montrer à ses yeux,
Et fervir de bouquet à sa nouvelle fête.

Ainfi fut fait, comm'il l'avoit reglé;

Un Chêne de Dodone auroit-il mieux parlé a

EPITRE V.

A Mme L. M. DE M....

Qui avoit demandé à l'Auteur les Vers precedens, pour accompagner le Parquet dont elle faifoit prefent à Madame l' Abbeffe de Preaux.

P

Our bien chanter l'Abbeffe de Preaux, Et le prefent que votre cœur lui donne, Il eût fallu du moins un Defpreaux,

bonne.

La piece encor n'auroit été trop
Mais quand du Ciel je pourrois obtenir
De devenir Defpreaux tout à l'heure,
Je vous le dis bonnement, que je meure,
Si je voudrois Defpreaux devenir;
Non qu'il n'ait rang parmi les plus illuftres
Qu'on voit briller dans le facré Vallon;
Mais il faudroit vieillir de quelques luftres;
Et n'en déplaife au feigneur Apollon,
Au bon Pégafe, aux Mufes que j'honore,
Tout compaffé, j'aime bien mieux encore,
Malgré la gloire & tous les partifans,

Rimer plus mal, & vivre plus longtems.

Vous en ferez un peu moins bien fervie,
J'en ai regret, & pourtant n'ai
pas tort;
Vers bien rimez nous les prisons tous fort,
Mais nous prisons encor bien plus la vie.
Vaille que vaille, il faut prendre ceux-ci,
Ils m'ont coûté plus que je ne puis dire,
Depuis trois jours je fouffre le martyre,
L'efprit bouché, la cervelle en fouci,
A tout * Auxois enfin je fuis en butte
Point de quartier, j'ai beau crier merci
L'Epoux, l'Epoufe, & tout le monde ici,
Jufqu'au Papa Parfait me perfécute.
J'ai dit, pourquoi me charger du paquer,
Et que peut-on dire fur un Parquet ?

Dans une chambre un Parquet fait merveille,

Mais dans des Vers il ne fait pas trop

pas trop bien;

En vain j'écris, je griffonne, je veille,
C'eft tems perdu, l'efprit ne fournit rien.
Si l'on parloit de vanter la sagesse,

Et la vertu de votre illuftre Abbeffe:

S'il ne falloit dans un pompeux écrit,

Que mettre en Vers tout ce qu'en bonne profe,

* Auxois la Ferriere en Bric.

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