Garris in aurem, &c. 1. Liv. 90.

Cinna toûjours plein d'embarras

S'approche à votre oreille, & vous parlant tout bas, Vous confie avec grand myftere

Des chofes que n'ignore pas

La populace & le vulgaire.

Il vous prend à quartier pour vous dire en fecret, Et quoi? qu'il fait beau tems, ou bien chofe pareille, Et c'est ce qu'il appelle être fage & difcret.

Sage & difcret Cinna, pour moi je vous confeille De nous venir louer Alexandre à l'oreille.

O mihi poft nullos, &c. 1. Liv. 16. Tout paffe, cher ami, chaque chose a son cours, Tu touches de bien près à ton douziéme lustre i Mets à profit ce peu qui te refte de jours, La mort n'épargne pas le fang le plus illuftre. Croi moi, ne compte point fur un faux avenir; Que fçavons-nous helas! ami ce qu'il nous garde, Rappellons les plaifirs, que rien ne les retarde, Nous voudrons, mais en vain, un jour les retenir. Il ne fera plus tems, ou la mort ou l'envie

Nous les aura peut-être arrachez de la main: ce jour à jouir de la vie,

Commençons dès ce

C'est attendre trop tard, que d'attendre à demain,

XI V.

LE CONVIVE DILIGENT,
Horas quinque puer. Liv. 8. Ep, 67.
Lorsque Damis eft prié d'un festin
Il ne fe fait jamais attendre,

Il s'y prend dès le grand matin

Tant il a peur de manquer à s'y rendre,
Il frape & trouve encor les valets endormis,
Enfin le Portier ouvre en gratant fon oreille :
Eh bien, lui dit Damis, le couvert est-il mis?
Au bruit qu'il fait, le Maître en furfaut se réveille;
Qu'est-ce ? C'est moi, répond Damís,

Je fuis, vous le voyez, diligent à merveille,
Et je ne manque point lorfque je l'ai promis.
Faites mieux, répond l'autre, & venez dès la veille,

C'E

LE POETE INTERESSE.

'Eft en vain qu'un Auteur déguisant sa foiblesse Veut paffer quelquefois pour defintereffé; i Heros, il n'en eft rien, & quand on vous caresse, C'eft toûjours à coup fûr pour être careffé.

LE REMORS TROP LENT.

Quel vain enchantement nous trompe & nous abuse, Quand le crime est à faire il nous paroît permis; Infidele remors, ta voix ne nous accuse,

Qu'après qu'il eft commis.

CONTRE UN MENTEUR.

Cleon, c'est un avis qu'il faut que je vous donne Vous avez beau habler avec autorité, Vos difcours deformais n'impofent à perfonne, Et vous mentez fans nulle utilité. Mais, Cleon, voulez-vous apprendre Le vrai fecret de nous furprendre, Une fois pour le moins dites la verité.

CONTRE LE MESME.

J'ai dit

que Cleon eft menteur Cleon s'en plaint avec hauteur

s'il ment, ce n'est

Dit que pas mon affaire, Qu'il veut quand il lui plaît mentir en liberté ;

Mentez, Cleon, fi cela peut vous plaire,

Mais il me plaît de dire, à moi, la verité.

Mariage eft mauvais lien,

Par Dien & par faint Julien, Dit quelque part l'Auteur du Roman de la Rose. Sçavoir s'il dit mal, s'il dit bien, Je n'entreprendrai point de décider la chose. Il est vrai que c'est un discours

Que l'on tient à toute rencontre;

Mais l'hymen pour cela n'en a pas moins de cours: Si tous les jours on pefte contre,

On prend femme auffi tous les jours.

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RONDEAU

SUR UN BORGNE

Q

Ui n'en a qu'un, ne fût-ce qu'un moineau, S'il le cherit & s'il le trouve beau, Doit le choyer comme fait une mere Son fils unique, ou comme fait un pere Craignant toûjours pour fon cher jouvenceau.

Si c'eft un œil, le jour, fous le chapeau,
Qu'il foit la nuit gardé fous le bandeau;
Mais je le plains & c'eft grande mifere
Qui n'en a qu'un.

Vous me direz qu'il fuffit d'un flambeau,
Qu'on ferme un œil pour prendre le niveau
Et que trop voir met fouvent en colere ;
Je vous entends, mais alte-là compere ;
Et croyez-en le pauvre Robineau

Qui n'en a qu'un.