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XIX.

Photius.

B.

AN. 862. qu'elle vienne à la connoiffance de tout le monde. Photius loin d'avoir égard à la lettre du pape, Artifices de en fuppofa une contraire, par cet artifice. Un étranNic. vita ger nommé Euftrate, portant l'habit de moine & Ign. p. 1215. jufques alors inconnu à C. P. entra un jour dans le palais patriarcal, & en prefence de tout le monde dit à Photius, qu'il avoit été envoyé à Rome par Ignace, dont il lui rendit une prétendue lettre adreffee au pape Nicolas, où il expliquoit clairement la perfecution qu'il avoit foufferte. Mais le pape, disoit Euftrate, n'a pas daigné feulement la regarder, ce qui m'a obligé de la rapporter. En même temps il ren-· dità Photius une autre lettre écrite au nom du pape Nicolas, qui lui faifoit des excufes de la mefintelligence qui avoit été entr'eux; & établissoit avec lui pour l'avenir une communion & une amitié invio

lable. Photius porta auffi-tôt ces lettres à l'empereur & au cefar Bardas: pour les animer contre Ignace, comme les décriant chez les étrangers. Alors on donna des gardes à Ignace, & on commença à s'informer comment la chofe s'étoit passée. On interrogea Euftrate, & on lui demanda, qui lui avoit donné la lettre d'Ignace au pape. Il dit que c'étoit Cyprien difciple d'Ignace. On le preffa pendant prés d'un mois de l'indiquer; & enfin il fe trouva, qu'il ne connoiffoit ni Cyprien, ni aucun des gens d'Ignace. L'impofture étant ainfi découverte, Bardas fit foüetter rudement Euftrate, nonobftant les preffantes follicitations de Photius : qui pour le confoler, lui procura une charge qui le mettoit à la tête des miniftres de juftice. Il fut averé depuis que Pho

tius avoit lui-même fabriqué les lettres & conduit AN. 862. toute la fourberie.

Quelque temps aprés Photius fut averti, qu'Igna

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ce avoit rétabli un autel, que les Ruffes avoient renverfé dans l'Ifle où étoit fon monaftere. Il en fit fes p. 1218. D. plaintes à l'empereur, comme d'un grand crime prétendant qu'étant dépofé il ne pouvoit plus faire aucune fonction épifcopale. On envoya fur les lieux deux métropolitains avec un fenateur, qui firent arracher l'autel, le porterent fur le bord de la mer, l'y laverent quarante fois & le remirent. Cependant Photius diflimuloit les impietez de l'empereur, qui continuoit de se jouer des ceremonies de la religion, & Sup. liv. de les contrefaire avec les compagnons de fes dé- XLIX. n. 17. bauches. Bafile archevêque de Theffalonique vieillard venerable, eut le courage de l'en reprendre, à l'occafion d'un tremblement de terre, qui arriva à C. P. le jour de l'Afcenfion 860. difant que ces impietez attiroient la colere de D.eu. Mais l'empereur irrité, lui fit donner des fouffléts, dont les dents lui tomberent, & déchirer le dos à coups de foüet, en forte qu'il en penfa mourir. Photius au contraire faifoit affiduëment fa cour à l'empereur, & mangeoit à fa table avec fes bouffons facrileges. L'empereur en railloit lui-même, & difoit : Theophile eft P.1214 E. mon patriarche, c'étoit le chef de ces plaifans, Photius eft celui du cefar, & Ignace celui des Chrétiens. En France le roi Charles le Chauve tint un concile la même année 862, indiction dixième, où com- Concile de mençoit la vingt-troifiéme année de fon faifoit fortifier un lieu nommé Piftes fur la Seine,

Tome XI.

XX.

regne.

Il

Pistes,tom.8.

P. 755. 776.

à

G

An Bert.

862.

A N. 862.

C. I.

C. 2.

C. 3°

l'embouchure de l'Andelle: où les Normans s'étoient retranchez pendant quelque temps. A l'occafion de ces travaux il tint un parlement, que l'on compte entre les conciles, & où il fe trouva des évêques de quatre provinces. On y publia un capitulaire de quatre grands articles, pour reprimer les pillages. D'abord le roi & les autres qui affiftoient à ce parlement, reconnoiffent que les calamitez prefentes, particulierement les ravages des Normans, font la jufte punition de leurs pechez. Enfuite il eft ordonné, que chaque évêque dans fon diocéfe, les commiffaires du roi dans leurs départemens, & les comtes dans leurs comtez, auront grand foin d'obliger les pillards à satisfaire felon les loix ; & que les évêques impoferont les penitences convenables à ceux qui feront convaincus de ce crime.

On donne terme jufques à la faint Remy premier jour d'octobre, à ceux qui ont commis ces crimes publiquement, pour fatisfaire à Dieu & aux parties intereffées : fous peine de faifie de tous les biens & d'excommunication. On renouvelle les peines portées par les capitulaires précedens; on rend les feigneurs refponfables des defordres commis par leurs vaffaux & leurs domeftiques; & on ordonne aux évêques de les excommunier, jufques à ce qu'ils reparent le dommage, & obligent leurs fujets à fubir la penitence. L'évêque qui ne fera pas fon devoir à l'égard des feigneurs & des autres coupables, fera retranché de la communion de fes confreres. Tous ces reglemens s'executoient fi peu, qu'ils fervoient plus à montrer la grandeur du mal, qu'à y remedier.

mal

XXI. Affaire de

862.

Coint. an.

831. n. 29.

Libelle.

Roth. tom 8. conc. p. 787.

Rothade évêque de Soiffons fe plaignit à ce concile de la fentence rendue contre lui l'année precedente Rothade de par Hincmar fon métropolitain. Il y avoit plus de Soiffons. trente ans que Rothade étoit évêque de Soiffons, An. Bertin. ayant fuccedé à un autre Rothade dés l'an 831. Vers l'an 858. un curé du diocéfe ayant été furpris en crime avec une femme, & mutilé honteusement en cette occasion:Rothade le jugea dans un concile de trentetrois évêques, le dépofa & en mit un autre en fa place. Mais l'archevêque Hincmar, depuis long temps content de Rothade, voulut trois ans aprés rétablir ce prêtre. Il fit enlever le fucceffeur dans l'église, un dimanche, comme il étoit prêt à celebrer la messe pour le peuple, fe le fit amener, l'excommunia, le mit en prifon, & remit en poffeffion l'ancien curé: prétendant que Rothade l'avoit dépofé injustement. Rothade s'en plaignit, & Hincmar dans un concile provincial tenu à S. Crefpin de Soiffons l'an 861. le An. Bertin. priva comme défobéïffant de la communion épifco- 861. tom. 8. pale, jufques à ce qu'il obéït.

conc. p.736.

tom. 8. conc.

C'eft de ce jugement que Rothade fe plaignoit à Piftes; & comme Hincmar au contraire en deman- Libell. Roth doit la confirmation, Rothade appella au faint fiége. Tout le concile defera à l'appel; & Hincmar obli- P. 785. gé d'y confentir, fit marquer un jour précis à Rothade pour fon départ. Il fe preffa de retourner à Soiffons,& ayant tout difpofé pour fon voyage de Rome, il écrivit au roi Charles fon maître & à Hincmar fon métropolitain, leur recommandant fon église pendant son absence. Il écrivit auffi au prêtre, dont la dépofition lui avoit attiré cette affaire, afin qu'il vint à

A N. 862.

Rome

pour y être jugé avec lui. Il envoya par le même porteur à un évêque de fes amis un memoire, contenant ce qu'il devoit reprefenter aux évêques, qui ne vouloient point participer à fa condamnation, afin qu'ils fuffent prêts à la défendre.

L'évêque ami de Rothade ne fe trouva point auprés du roi : mais Hincmar, qui y étoit, eut avis que le prêtre porteur des lettres avoit un memoire pour les évêques; & perfuada au roi d'assembler ce qui reftoit d'évêques auprés de lui, & en leur presence preffa ce prêtre de montrer les lettres, qu'il avoit pour le concile. Il eut beau dire, qu'il n'étoit point envoyé au concile, le roi l'obligea à montrer le memoire. Hincmar prétendit que par là Rothade renonçoit à fon appel, & fe foûmettoit de nouveau au jugement des évêques. C'eft pourquoi il perfuada au roi d'envoyer à Soiffons Trafulfe abbé de Corbie: qui fit telle diligence qu'il arriva avant que Rothade fut parti pour Rome. Il vint dans le parvis de l'églife, & défendit publiquement de la part du roi & de l'archevêque, que perfonne fuivît Rothade en ce voyage. Rothade ne voyant point la cause de ce changement, proteftoit qu'il vouloit partir & poursuivre fon appel. Mais on l'arrêta, & on lui donna des gardes. Auffi-tôt on affembla un concile à S. Medard de Soiffons & le roi y vint lui-même. Hincmar envoya trois évêques ordonner à Rothade de fe prefenter au concile. Il répondit, qu'il n'ofoit le faire au préjudice du faint fiége, auquel il avoit appellé & appelloit encore. Les évêques ayant rapporté fa réponse au concile, furent renvoyez le citer tout de

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