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L'AMI
ΜΙ

DE

LA NATURE.

QUAND je vois dans le tumulte

du monde, tant d'hommes esclaves des préjugés, vils jouets de la fortune & de l'ambition,

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se tourmenter pour des objets frivoles; je m'éloigne de la tourbe insensée, et je viens dans des lieux écartés, chercher le calme et la paix qu'elle fuit. J'y viens écouter, contempler la Nature, et me A

livrer aux douces émotions, aux

ravissantes pensées, qu'elle réserve à ceux qui l'aiment.

Mon cœur oppressé se dilate à la vue des champs, à l'air libre et pur qu'on y respire. Les rayons brillans du soleil, la fraîcheur de l'ombre, les moissons, la verdure, tout enchante mes sens.

TANTÔT, errant à l'aventure, j'admire la fécondité de la terre, la variété de ses productions. Un orme spacieux, un arbre chargé de fruits, une épaisse bruyere, attirent tour-à-tour mes regards. Je vois la fraîcheur et la vie, briller dans les bourgeons, dans les feuilles tremblantes. Une séve

animée circule dans les racines profondes, s'élève dans mille canaux, et par mille routes secrètes, parcourt les branches, les rameaux; verse un suc nourricier, dans les germes naissans que l'œil découvre à peine, et que le tems ne sauroit épuiser; se répand dans les fleurs, dans les fruits, les parfume, les colore, et s'exhale en odeurs suaves, à travers les fibres de leurs réseaux.

Les plantes, les arbrisseaux, entrelacés dans la bruyere, préparent dans leurs boutons, les riantes couleurs, les festons des fleurs qui vont éclore, et le frêle organe de leur fécondité, qui s'élève du

fond de leur calice, et recueille

dans leur sein parfumé, comme dans le tabernacle de la Nature,

les élémens de l'existence

élémens de la beauté.

les

TANTÔT, assis sur une rive émaillée, je m'amuse à considérer les insectes qui l'habitent. L'un fait sortir ses antennes, les pousse, les allonge, et les retire au moindre choc; l'autre secoue son panache couvert de rosée, et va sur le bord d'une feuille, s'exposer au soleil. La chenille se traîne lentement dans l'herbe: la sauterelle bondit du trefle au sainfoin: les fourmis passent en longues files, tenant dans leurs pinces, leur petit butin.

Ic deux limaçons se rencontrent, se donnent le signal de l'amour, et vont sous une campanette, s'unir d'un double lien.

LA mouche importune voltige, pique, bourdonne, et s'étourdit elle-même du vain bruit qu'elle fait, puis elle passe, repasse ses pieds crochus, sur l'oripeau de sa tête mouvante; tandis qu'à côté d'elle, l'araignée tend le filet fatal. C'est ainsi qu'entouré des piéges de la mort l'homme frivole emploie la vie.

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Là, d'une coque légère, où s'ensevelit un insecte rampant, je vois fortir un papillon, étonné de fa forme nouvelle.

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