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forte que fi tout fe füt joint enfemble, cette armée formidable difparoiffoit comme une ombre, & le maffacre eût été d'autant plus affreux, que la retraite devenoit impoffible, ou très-difficile..

Cette difpofition convenoit parfaitement au terrain & à la pofition des ennemis; on s'étoit très-bien expliqué dans le projet, on l'avoit accompagné d'un plan de l'ordre de bataille, la Cour en avoit même reçû une copie, il falloit fatisfaire à tout ;. c'étoit un nouveau fyftême de tactique, & pour faire recevoir les chofes nouvelles, il est befoin de beaucoup d'adouciffemens, de temperamens, & même de tours étudiez. Le projet ne fut point approuvé, on avoit d'autres vûes. D'ailleurs dans la guerre comme dans la médecine, la nouveauté fouléve & déplaît. Le Médecin aime mieux voir périr fes malades, que de les guérir par les remédes des autres, outre qu'on n'ofe guéres les prendre les premiers. Sans entrer davantage dans les raifons qui nous obligérent à changer de réfolution à la vûe des objets, ou à ne rien faire de ce que le Maréchal vouloit indépendamment de mon projet, ni dans celles qu'avoient les Alliez de ne pas profiter de leurs avantages, toutes raifons dont le Prince Eugéne a donné la folution, on ne laiffera pas d'appliquer aux Chefs des deux partis ce qu'Antigonus difoit de Pyrrhus, qu'il étoit comme les joueurs, à qui le hazard fait venir beau jeu, mais qui ne favent pas

s'en fervir.

L

§. VI.

Entreprises fur les camps. Qualitez néceffaires dans un Général pour

ces fortes d'actions.

'Art des furprises d'armées eft une des parties de la fcience militaire, auffi rare dans la pratique, que facile & aifée dans l'éxécution. Ce que les Anciens en ont écrit n'eft pas parvenu jufqu'à nous : & quant aux Modernes, il eft aifé de voir qu'ils ont à peine effleuré la matiére. Cette partie de la guerre eft uniquement renfermée dans les éxemples & dans les faits, de forte que je me crois obligé de les tourner en préceptes & en méthode, & par là de réduire en art ce qui ne rouloit auparavant que fur quelques maximes incertaines & peu fûres, fouvent vraies par un effet du hazard, & dans un Général imprudent & téméraire; fouvent fauffes dans un autre plus habile, qui n'a qu'elles pour fe conduire dans les mêmes deffeins.

Ces fortes d'entreprises demandent un grand courage, beaucoup de hardieffe & de promptitude dans l'éxécution, un efprit fin & rufé, un grand fens, une connoiffance éxacte du païs, une prévoiance précautionnée: en un mot une grande intelligence de la guerre: car ces fortes de deffeins font fujets à mille cas fortuits, à mille incidens qu'on peut détourner par la bonne conduite, par le fecret & la célérité d'une marche inopinée & bien concertée, qui prévienne les avis des efpions, des transfuges, ou des partis que l'ennemi peut avoir en campagne. Il faut qu'il fache qu'on eft venu, & qu'il ignore qu'on doit venir. Prius veniffe, quam venturum fciant hoftes. Il faut qu'il fe trouve dans le piége, fans l'avoir craint ni foupçonné.

Ce que nous allons traiter ici ne regarde pas les furprifes d'un petit corps de troupes, ou l'enlèvement d'un quartier; il n'y a rien de moins rare que cela à la guerre. Undétachement fuffit pour ces fortes d'avantures, elles font toujours promptes & fubites.. Une armée entiére ne fe meut pas avec la même viteffe qu'un corps de deux ou trois mille hommes. Il y a peu de Généraux qui ofent entreprendre fur toute une armée, & qui veuillent même écouter les perfonnes qui propofent des coups de cette nature, ils les croient trop hazardeux & d'un trop grand détail. Il faut beaucoup d'intelligence, une grande.

net-

netteté & un grand ordre dans la marche, une difpofition de combat très-méditée, toujours différente de celle de l'ennemi, & par conféquent plus rufée & plus fûre. On doit de plus avoir égard à la nature de fes forces, au tems, aux lieux, aux conjonctures, à l'heure que l'on part autant qu'au tems que l'on arrive. Il faut aller encore au-devant des accidens qui peuvent arriver, & cela n'eft pas au deffus de la prévoiance humaine. Le plus embaraffant de l'éxécution, eft de s'empêcher d'être découvert. Les espions, les donneurs d'avis, les partis en campagne, & les transfuges, font ce qu'il y a de plus à craindre. Nous fournirons des moiens pour empêcher qu'on n'échoue ni par cet endroit ni par les autres. Il eft certain que de telles entreprises font hériffées de mille difficultez: mais il faut avouer auffr, que les pointes s'en émouffent aifément, par l'ordre, le fecret & la bonne conduite. Ceux qui ont concerté de longue main ce qu'ils doivent faire, ne tardent point à éxécuter ce qu'ils ont réfolu, & prennent leurs ennemis au dépourvû, mais les autres ne favent où ils en font lorfque les malheurs arrivent. En effet comme les furprises des camps & des armées font de tous les événemens de la guerre les plus imprévûs, les plus rares, & les moins attendus, on voit rarement qu'on foit fur fes gardes, & qu'on s'y trouve préparé. Les grandes armées font ordinairement celles qui éprouvent les plus grandes infortunes contre les petites bien conduites & bien menées: la trop grande opinion où l'on eft de ses forces, produit le mépris qui naît de la difproportion, & ce mépris eft un des plus grands dangers qu'on puisse cou rir à la guerre.

Les Généraux qui manquent d'expérience, de capacité & de hardieffe, ne font pas ceux qui goûtent ces fortes de deffeins. Ils les envisagent d'abord comme téméraires, quoique dans le fond ils ne foient que hardis: comme le nombre de ces gens-là n'est pas petit, il ne faut pas s'étonner fi ces maniéres de penfer font fi ordinaires; ce qui fait que ces fortes d'entreprises font prefque toujours heureuses. M. de Turenne, le plus grand Capitaine qu'on ait vû depuis les Anciens, ne fut-il pas furpris lui-même, battu & diffipé par des forces très-inférieures, & par les débris même d'une armée qu'il venoit de battre? Si un auffi grand Chef de guerre que celui-là s'eft vû furpris & en velopé dans un tel piége, que ne doit-on pas efpérer d'un autre tout femblable que l'on tend à un ennemi, qu'on fait moins habile & moins éclairé? Je dis moins habile & moins éclairé, car depuis un tel homme jufqu'à aujourd'hui, & d'aujourd'hui en trois fiécles, je doute qu'il en paroiffe jamais un qu'on puiffe lui égaler.

On furprend une armée dans fon camp, dans fes quartiers, dans fa marche, & fous le canon d'une place. Nous ne traiterons dans ces obfervations que des entreprises qui regardent les camps, pour ne pas nous écarter de notre fujet.

§. VII.

Se retrancher dans son camp, ufage des Anciens que nous avons laissé pour un autre

L

beaucoup moins avantageux.

Es Anciens étoient moins expofez à ces fortes de furprifes que ne font les Modernes. Les premiers fuivirent toujours conftamment l'éxcellente maxime de fe retrancher dans leurs camps, lors même qu'ils n'avoient rien à craindre de l'ennemi, euffent-ils dû n'y refter qu'une nuit: moins par crainte, que par des raifons très-fages. Nous fuivons une autre méthode bien moins par raifon que par coûtume: car ce que nous faifons pour nous garantir des infultes de l'ennemi, eft mille fois plus ruineux & plus fatiguant à une armée, que fi nous imitions les Anciens. Cette multitude de gardes de cavalerie & d'infanterie, dont nous formons comme une chaîne au loin, & Q3

fur

fur tout le front d'une armée, ces poftes avancez, outre les partis qu'on envoie à la guerre pour ajouter à ces précautions, ne fervent dans le fond que pour nous avertig quand l'ennemi n'est qu'à deux pas de nous. Lorfqu'on peut éluder les détachemens que l'on envoie aux nouvelles, comme j'en ferai voir la facilité, le refte ne fert de rien pour retarder d'un moment le fuccez de fes entreprises. Ces grandes gardes, qui fe replient fur l'armée, lorfque l'ennemi, que l'on croioit bien loin, paroît tout d'un coup, y portent bien plus l'épouvante & la confufion qu'ils ne la raffurent. Une armée n'étant pas retranchée, & ne fe trouvant pas préparée à une attaque, ne la foupçonnant pas même, fi l'ennemi furvient tout à coup, elle n'a rien de plus que lui à l'égard du terrain, & il a une infinité d'autres avantages: s'il eft plus fort, il nous déborde: s'il eft plus foible, nous ne pouvons nous imaginer qu'il le foit; car qu'est-ce que l'opinion ne fait pas à la guerre? Tous font ce raifonnement, viendroit-il nous attaquer, s'il ne nous furpaffoit en nombre, & s'il n'étoit même plus brave? Ajoutez à cela l'ae vantage de la furprife, & celui d'être le premier à attaquer.

Ces grandes gardes de cavalerie, qu'on avance pendant le jour fur tout le front d'une armée, & qui fe retirent la nuit aux petites gardes du camp, étoient inconnues aux Anciens, dont la cavalerie étoit en petit nombre; & quand ils en auroient eu tout autant que nous en avons, ils n'euffent pas moins méprifé ces fortes de précautions inutiles. On n'entreprend jamais fur une armée dans le plein jour, lorfqu'il s'agit d'une furprife, à moins que l'on n'ait affaire à un Général imbécille, ignorant & fans précautions. On choifit toujours la nuit, & dans les bonnes régles on doit attaquer une heure avant le jour: ces grandes gardes font donc inutiles, fi elles ne fervent que pour le jour. Les Anciens n'ufoient d'autres précautions contre les furprifes, que de fe retrancher, d'envoier à la guerre pour avoir des nouvelles, & la cavalerie en très-petit nombre battoit fans ceffe l'eftrade. Trois cens chevaux partagez par petites troupes, ne font pas moins d'effet que cette enchaînûre de gardes, qui occupent un dixiéme de la cavalerie d'une armée, qui ne fatigue pas moins dans ces gardes que fi elle couroit la campagne, & ces précautions ne tiennent pas moins un Général en inquiétude & ne divifent pas moins fon attention. Il craint toujours qu'on ne les enléve en quelque endroit, comme cela arrive affez fouvent: rien ne lui fait plus de peine, il n'eft jamais bien tranquille, & fon inquiétude redouble la nuit; ce qui fait qu'il n'a jamais l'efprit bien libre: il faut cependant l'avoir pour imaginer de bons coups.

Une armée bien retranchée dans un camp, effuie beaucoup moins de fatigues; à peine en faut-il un vingtiéme pour les gardes, & l'on conferve fa cavalerie. Le Général fait fes fourages fans crainte. S'il en a peu de fon côté, & l'ennemi beaucoup du fien, celui-ci n'ira que peu fouvent, & l'autre fe verra obligé d'y courir fans cesse. Si le dernier connoît bien fes avantages, il ne manquera pas de marcher à l'autre, & de l'attaquer pendant qu'il eft dénué d'une partie de fa cavalerie. Lorfqu'on eft retranché, on fe tient tranquille dans fon camp; malgré cette diftraction de forces, on n'eft jamais furpris: & fi l'ennemi veut tenter quelque entreprise, on eft en état de fe défendre, & celui-ci ne peut attaquer qu'à force ouverte.

Un Général habile, hardi, ferme & réfolu, à la tête d'une armée beaucoup inféricure à celle qui lui eft oppofée, peut par fon courage, par fon adreffe, & par fa bonne conduite, mener auffi haut à la main fon antagonifte, que s'il en avoit une bien forte. Les petites armées, qui ont de tels Généraux à leur tête, font celles qui font le plus à redouter, & les plus propres aux entreprises extraordinaires. Celui qui ne peut vaincre par la force ouverte, & tambour battant, ou s'oppofer aux deffeins d'un ennemi fupérieur par le nombre de fes troupes, trouve toujours des reffources dans la rufe & dans l'artifice: rien de plus aifé, & pourtant rien de moins commun; mais il

ne

ne doit jamais oublier cette maxime, que dans tout ce qu'on entreprend de grand & de hardi à la guerre, il faut moins confidérer la difficulté que l'utilité. Or il eft certain que dans les furprifes des camps & des armées il y a peu de l'une, & beaucoup de

l'autre.

I'

y

§. VIIL

Connoiffainces que doit avoir le Général. Le fecret.

bien des chofes à obferver dans ces fortes de deffeins, & fans lesquelles on ne fauroit fe déterminer à rien d'affuré. Le Général doit avoir une connoiffance éxacte des forces de l'ennemi, en quoi elles confiftent, & fur lefquelles il compte le plus. La fituation & la difpofition de fon camp, les gardes, où elles fe retirent la nuit, celles qui font fixes dans certains poftes avancez, la route des patrouilles, la nature du païs pour aller à l'ennemi, les villages, les maifons, & les défilez qui font fur tout le front de fon camp. Si fes aîles font appuiées à un village, à une riviére, à un bois, &c. s'il y a des ruiffeaux, des ravins, des marais des champs clos, des bois, des fonds, des hauteurs, des foffez, des défilez aux environs de fon camp, ou qui coupent la communication des brigades, ou quelque partie de fon armée, &c. c'est fur ces connoiffances néceffaires qu'un habile Chef de guerre établit & concerte fon projet, qu'il s'y détermine, ou qu'il le rejette.

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Dans toutes fortes d'entreprises tout dépend du fecret & de la diligence. Les furprifes d'armées font à mon fens les plus aifées dans l'éxécution, & les moins fujettes aux accidens inopinez. Une marche précautionnée, intelligente & forcée, mais pourtant ferrée & unie, en fait tout le miftére; car à l'égard des préparatifs, comme elles n'en éxigent aucun, le fecret peut être couvert d'un voile impénétrable, & jufqu'au moment de l'éxécution. Il eft très-difficile que l'ennemi en puiffe avoir la moindre nouvelle, ni foupçonner une furprife, fi l'on ne néglige aucun des moiens dont je parlerai bientôt. Quelque dépenfe qu'il faffe en efpions, on peut fort aifément échaper à leur vigilance. Les plus fâcheux font les transfuges qui peuvent s'échaper dans la marche; mais que diront-ils, s'ils ignorent où l'on va, & ce que l'on veut faire? Le fecret que l'on eft obligé de communiquer à plufieurs perfonnes, eft rarement un fecret gardé: mais ici on peut, fi le Général le juge à propos, n'en faire part à perfonne; & c'eft toujours le mieux, qu'il puiffe faire, au moins le plus tard qu'il lui foit poffible.

On fait que les deffeins les plus aifez, comme les plus difficiles, & fur tout ceux qui font hardis & peu communs, trouvent toujours des contradicteurs. On vous paffera les efpions, mais on épuifera tous les fophifmes militaires à l'égard des déferteurs. S'ils ne difent rien du deffein que vous avez, parce qu'ils l'ignorent, dira-t-on, du moins l'ennemi faura que vous marchez, il foupçonnera quelque chofe, s'il ne le devine; le foupçon produit les précautions, & l'on fe tient fur fes gardes. On alléguera encore les partis que l'ennemi peut avoir en campagne, autre fujet de défiance, & de martel en tête: Suppofons, dira un autre trembleur, que nous échapions aux efpions & aux déferteurs, nous avons une marche à faire, & des villages à traverfer; qui peut nous af furer que quelqu'un n'en fortira pas, & qu'il ne donnera pas avis de notre marche? Ne feroit-ce pas une efpéce de prodige, fi cela n'arrivoit pas dans un païs tout ennemi ? Voi-. là fans doute bien des obftacles, des difficultez très-grandes, & des fujets de douter dur fuccez d'une entreprise fi délicate: il eft rare qu'un Général ne trouve pas de telles gens dans un Confeil de guerre. Ce qu'il y a de plus fâcheux, c'eft que ces fortes d'ef

prits

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prits timides, fans être fort habiles ni fort braves, font toujours les plus éloquens & les plus écoutez à la Cour & dans les armées, au préjudice même des deffeins les mieux fondez & les plus falutaires. J'en fournirois de bons éxemples fi je voulois, mais il faut une poftérité plus reculée pour les citer: ou tout au moins il faudroit que quel ques-uns de ces gens-là, qui vivent encore, me permiffent, fans fe fâcher, de faire voir la fubtilité de leur efprit & la force de leur éloquence, à diffuader & à combattre par des raisonnemens fpécieux & peu folides, les deffeins les plus importans, & les plus faciles dans l'éxécution; ceux qui font douez des mêmes talens, apprendroient par qu'ils doivent les emploier à tout autre ufage; car à peine l'occafion de faire un coup d'éclat & décifif eft-elle manquée & rejettée, qu'on reconnoît l'illufion de tous ces beaux raisonnemens: & après nous être acquis la réputation d'efprit fubtil, qui nous demeure, nous perdrons celle d'un homme véritablement courageux. L'on ne connoît jamais mieux le caractére d'un homme de guerre, que dans les Confeils, où il s'agit d'une entreprise importante, hardie & périlleuse, telles que font les furprifes d'armées, qu'on regarde ordinairement comme téméraires, lorfqu'il y a difproportion de forces dans celui qui les entreprend: on va voir bientôt qu'il s'en faut bien qu'elles ne foient telles que la plûpart fe l'imaginent fauffement, & qu'elles font au contraire très-aifées & très-fûres dans l'éxécution. Un Général qui roule un tel deffein dans fa tête, doit débuter par fe retrancher de telle forte, que l'ennemi s'imagine qu'il a bien peur; cette peur artificiele, le rend moins circonfpect & plus négligent.

Ole compaffe encore à la

§. IX.

Précautions à prendre.

N concerte l'heure & le tems qu'on doit partir au chemin que l'on a à faire, on le compasse encore à la nature du païs, aux obftacles qu'on peut rencontrer, & au nombre des colonnes que l'on peut former dans la marche. Les défilez la retardent infiniment, & felon le nombre qu'il y en a, on part plutôt ou plus tard. On doit obferver toutes ces chofes avec tout le foin & l'éxactitude poffible, & régler fi bien fon tems, qu'on puiffe être en état d'attaquer deux heures avant le jour, & difpofer les colonnes dans la marche felon la difpofition, fur laquelle l'on veut combattre; car c'est la nature du terrain d'un champ de bataille qui doit fervir de régle à la compofition des colonnes, pour éviter la confufion & la multitude des mouvemens qu'il eft néceffaire de faire lorfque l'on eft arrivé, & qui ne font que trop dangereux lorfque les armées font en préfence. Je m'en rapporte à M. de Puifegur, qui eft un de nos Maîtres fur cette profonde partie de la guerre il n'aura garde d'en difconvenir. Il y a des précautions à prendre avant que de fe mettre en marche pour aller à l'ennemi, il est bon d'en être informé.

On donnera l'ordre à l'ordinaire, fans aucune apparence de deffein ni de campement. Deux heures avant la nuit, & d'un jour fans Lune, on détachera deux cens chevaux, autant de dragons, cent Huffars, & huit compagnies de grenadiers complettes. Ce détachement, auquel on diftribuera de la poudre, s'affemblera à la tête du camp & fans aucun égard au tour du rôle. Il fera compofé d'Officiers & de Sergens choifis, & d'un Chef de grande expérience, fans aucun égard au rang par rapport au nombre des troupes, mais feulement à l'habileté, qui dans toutes fortes entreprises doit régler le choix d'un Général d'armée: c'étoit la pratique de M. de Turenne. On fera en même tems courir le bruit, que la deftination de ce détachement eft contre les efpions & les déferteurs, & pour occuper toutes les routes par où l'on peut aller à l'ennemi; ce

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