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foit, quand j'eus vû que fon départ n'avoit pas entraîné les plus furieux je ne m'occupai jour & nuit qu'à épier leurs démarches, pour avoir de quoi vous convaincre que leur attentat, dont l'énormité, vous empêchoit d'ajouter foi à mes paroles, n'étoit que trop certain ; & pour vous obliger, par l'évidence du péril, à prendre vos furetez.

Ayant enfin appris que les Envoyez des Allobroges avoient été follicitez par Lentulus à foulever les Gaules contre nous ; qu'en y allant ils devoient avoir une conférence

avec Catilina , pour qui lettres & in-
ftructions leurs avoient été données ;
& que Vulturcius, qui lui en por-
toit auffi, étoit nommé pour les ac-
compagner; je crus avoir trouvé
l'occafion, qu'à toute heure je de-
mandois aux Dieux immortels, non
feulement d'approfondir moi-même
les mystéres de la Conjuration, maist
de pouvoir les dévoiler au Sénat
& au Peuple.

Hier donc je fis venir chez moi deux hommes d'un grand courage,

:

d'un zèle admirable, les Préteurs (2) Flaccus & Pontinus. Je leur expofai le fait. Je leur donnai mes ordres. Eux, avec une ardeur infinie pour le bien public, ils fe chargerent de l'exécution: fur le foir fe rendirent fecrettement au Pont (3) Milvius fe poftèrent dans les villages voisins, l'un deçà, l'autre delà le Tibre. Ils avoient mené avec fans que perfonne pût s'en douter, un bon nombre de braves gens; & j'y fis trouver auffi plufieurs jeunes hommes de Réate, bien choifis, & bien armez, qui font ceux que tous les jours j'emploie dans les befoins du gouvernement. Vers les trois heures (4) du matin, les En

eux,

voyez

(2) L. Flaccus, pour qui Cicéron, quatre ans après, fit une Oraifon que nous avons & où il parle fort des fervices que ce Flaccus avoit rendus en cette occafion.

A l'égard de Pontinus, que d'autres écrivent Pontinius, c'eft le même qui dans la fuite fut l'un des Lieutenans de Cicéron en Cilicie. (3) Aujourd'hui Ponte Molle, à deux milles de Rome, fur le chemin de Viterbe.

(4) Anciennement on divifoit la nuit en

voyez des Allobroges paroiffent fur le pont avec une fuite nombreuse. Vulturcius en étoit : à l'inftant ils font attaquez on tire l'épée de part & d'autre. Les Préteurs avoient le fecret eux feuls. Ils fe montrent le choc finit : toutes les lettres, bien cachetées, leur font remifes: les Envoyez avec leur fuite, faits prifonniers, & à la pointe du jour amenez chez moi.

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J'ai d'abord envoyé chercher le déteftable artifan de toute cette intrigue, Gabinius, avant qu'il pût foupçonner que j'en fuffe inftruit. Enfuite, j'ai fait venir Statilius, Céthégus, & Lentulus. Pour celui-ci il est arrivé un peu tard: apparemment, parce qu'il avoit paffé, contre fa coutume, une partie de la nuit à écrire des lettres.

Plufieurs perfonnes, & qui font du premier rang, ayant accouru chez moi fur cette nouvelle dès le

matin ,

quatre parties, deux avant minuit, deux après. Chaque partie de trois heures. Ainfi tertia ferè vigilia exacta, c'eft à-dire, fur les trois heures après minuit.

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matin, me confeilloient d'ouvrir ces lettres, afin de ne pas m'expofer à donner l'alarme mal à propos, fi elles ne contenoient rien d'important. Mais je leur ai remontré que le danger étant public, il falloit que le Confeil public vît le premier de quoi il s'agiffoit. Les avis que j'avois reçus, fe füffent-ils trouvez faux, on ne pouvoit, dans une affaire de cette nature, me reprocher trop de circonfpection.

comme

A l'heure même j'ai convoqué le Sénat il s'eft affemblé vous avez vû, en grand nombre : pendant que, fur l'avis des Allobroges, j'ai envoyé le Préteur Sulpicius dans la maifon de Céthégus, prendre tout ce qu'il y trouveroit d'armes ; & il y a trouvé quantité de poignards & d'épées.

J'ai fait entrer au Sénat Vulturcius, fans les (5) Gaulois. Je lui ai promis fûreté par l'ordre du Sénat

&

(5) Les Allobroges étoient ce que nous appelons les Dauphinois & les Savoyards, ou du moins la plus grande partie du pays qui fait

Cc

& je l'ai exhorté à nous dire fans crainte tout ce qu'il favoit. Revenu à peine de fa frayeur, il nous a dit que par les inftructions & par les lettres, dont Lentulus l'avoit chargé Catilina étoit averti d'armer les ef claves, & d'avancer inceffamment avec fon armée, afin que le moment étant venu de mettre le feu à tous les quartiers de la ville felon le plan qu'ils en avoient dreffé, & d'égorger tout ce qu'ils pourroient de citoyens, il fe trouvât fur le chemin, à portée de faifir ceux qui prendroient la fuite, & de rejoindre fes affociez dans Rome.

Aprés lui font entrez les Allobro ges, qui nous ont appris ces autres circonftances. Que Lentulus, Céthégus, & Statilius leur avoient juré une foi inviolable, en leur don nant des lettres pour leur Nation. Qu'ils leur avoient fort recomman dé,

aujourd'hui ces deux provinces. Et comme ils faifoient partie de la Gaule Tranfalpine, Cicéron les appelle indifféremment, ou Allobroges, ou Gaulois,

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