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ACTE V.

SCENE PREMIERE. LEONIDAS, STRATOCLE.

STRATO CLE.

E fon deftin, Seigneur, je n'ai pû rien favoir,
Et malgré tous mes foins j je n'ai pu le revoir.

DE

LEONID A S.

N'en doutons point, Stratocle, Entigesne est sans vie,
La fureur du Tyran n'eft que trop bien fervie :
Cleon depuis long-tems s'en eft fait une loi,
Et pour le crime feul, il fçait garder la foi.
Puis-je fans defefpoir fonger qu'en ma prefence,
Aux yeux de mes amis venus pour fa deffense,
Clearque impunément ordenne fon trépas ?
Quoi nous fommes armez, & ne le fauvons pas
STRATO CLE.
Vous n'avez point, Seigneur, de reproche à vous faire,
Clearque a tout conduit avec tant de mistere,
Il a fi bien caché fes projets inhumains,
Que je n'aurois jamais penfé qu'en d'autres mains
Il auroit confié le deftin d'Entigefne.

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Je n'ai rien épargné pour fufpendre fa haine
Mais loin de l'adoucir, irrité contre moi,
J'ai connu qu'en fecret, il foupçonnoit ma foi.
Cependant quel que foit le courroux qui l'anime,
Je ne fçaurois penfer qu'il commette ce crime,

!

Il veut d'Ariftophile intimider le cœur,
Et je crois fon amour plus fort que fa fureur.
LEONIDAS.

N'importe, il faut, ami, hâter notre vengeance,
S'il voit encor le jour volons à fa défense.
As-tu fait àffembler tes fideles amis?
Tiendront-ils cette nuit tout ce qu'ils t'ont promis?
La liberté pour eux a-t-elle encor des charmes,
Et font-ils refolus de fe joindre à nos armes ?
STRATO CLE.

Ils font tous prêts, Seigneur, à marcher fur vos pas;
Torax a fçû gagner nos plus braves Soldats.
Laffez de ne fe voir employez qu'à des crimes,
Ils brûlent de fervir des haines legitimes,

Et les vôtres, Seigneur, n'attendent plus que moi
Pour porter en ces lieux la terreur & l'éfroi.

LEONID A S.

Et bien hâtes-toi donc d'achever ton ouvrage,
N'attendons pas encore quelque nouvel orage.
Clearque eft retiré dans fon appartement:

Va cours à mes foldats en ce même moment,
Et rends - les par tes foins les maîtres de la Ville.
Par Cephife tantôt la trifte Ariftophile

M'a fait prier, ami, de me rendre en ces lieux,
Auffi-tôt que la nuit obfcurciroit les Cieux ;
Pour elle en ce Palais ma flamme a tout à craindre.
Permets que je l'attende; & j'irai te rejoindre,
Lorfque par fa prefence, elle aura fçú calmer
Les funeftes foupçons qui viennent m'allarmer.
STRATOCLE.

S'il ne faut que mon zele & que mon entremise
Pour faire réuffir cette grande entreprise,
Je puis vous affurer d'un fuccès glorieux.

LEONIDA S.

Va, j'attens tout, ami, de ton zele & des Dieux.

鮮海鮮鮮

***COXXXII

SCENE II.

LEONIDAS.

Ue malgré tant d'espoir mon ame eft peu tran quile,

Q

Que je crains! mais hélas! je vois Ariftophile.

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SCENE

III.

ARISTOPHILE, LEONIDAS.

LEONID A S.

Adame, s'il fe peut, calmez votre douleur,
L'heureux moment s'aproche où ma juste fu¬

Mi

reur

Vengera mon Pays du Tyran qui l'oprime.

ARISTOPHILE.

De votre main, Seigneur, j'attens cette victime;
Mon pere ne vit plus, ou tout prêt d'expirer,
Je n'ai plus pour les jours nul fujet d'efperer.
Vengez-le donc, Seigneur, rempliffez mon attente,
J'ofe vous en prier par cette ardeur conftante
Qui fçut des mêmes feux embrafer nos deux cœurs.
LEONIDAS.

Oni, je vais pour jamais finir tous vos malheurs,
J'en fais ma feule gloire aimable Ariftophile;
Mais du moins un moment, devenez plus tran»
quile,

Songez que d'Entigefne on ignore le fort,
Et que rien en ces lieux n'affure de fa mort.
Stratocle avec les miens dans la Ville s'avance,
Plufieurs des citoyens font de l'intelligence,
Et me joignant à lui nous forçons ce Palais;
Le fidele Torax inftruit de nos projets ;
Des Gardes du Tyran craignant la refiftance,
Doit engager les fiens à prendre ma défence,
Et für que Mitridate amene du fecours...

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ARISTOPHILE.
Jufte Ciel! puis-je entendre un femblable difcours ?
Eft ce ainfi que tu dois & veux fervir ma haine
Et que ton bras bien-tôt doit venger Entigefne
Si tu m'aimois cruel, attendrois-tu toujours
Que Mitridate ici t'amenât du secours ?
Te faut-il des Soldats, te faut-il une Armée
Pour arracher une ame au meurtre accoutumée?
Le barbare Cléarque attendit-il jamais

Qu'on le vint fecourir pour finir fes forfaits?
Ne crois pas m'abufer d'une efperance vaine :
Je fuis trop fûre hélas! du trépas d'Entigefne.
Je connois du Tyran l'implacable fureur,
Et tout m'annonce l'excès de mon malheur.
Cependant en perdant l'auteur de ma naiffance;
Tu faifois aujourd'hui mon unique efperance.
Je croyois que ce pere expirant à tes yeux,
Dont le fang comme à moi doit t'être précieux;
Ce pere qui t'aimoit d'une tendreffe extrême,
Et qui m'étoit moins cher par un Decret fuprême;
Par tous les nœuds du fang fi puiffans & fi doux,
Que parce qu'il t'avoit choifi pour mon époux,
Trouveroit dans ton bras une promte vengeance;
Mais tu veux du fecours, fans lui ton cœur balance,
LEONIDAS.
Quoy vous pouvez penser . .
ARISTOPHILE.

Il faut venger mon pere?

Oui je crois tout ingrat & non fauver l'Etat.

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Qu'ai-je affaire en ces lieux que ta valeur éclate
De quoi me ferviront Stratocle & Mitridate
Si malgré leurs efforts le Tyran eft vainqueur,
Et qu'on me laiffe en proie à toute fa fureur?
Tant de précautions deviennent inutiles,

Quand il ne s'agit point de foumettre des villes.
Tu n'as rien en ces lieux à ranger fous ta loi,
Tu n'as à fecourir, à délivrer
que moi >
Et pour y parvenir tu n'as rien à combattre
Qu'un homme que ta main d'un feul coup peut
abattre.

Voles-y donc, cruel & fans retardement,
Prouve-moi ton amour par ton empreffement.
Laiffe-là tes projets de fecours, de batailles,
Va plonger ton épée au fond de fes entrailles,
Qui te retient?

LEONID A S.

L'horreur d'un tel affaffinat ;

Et de ternir mon nom par un lâche attentat.

ARISTOPHILE.

Quand on veut fe venger, prend - on foin de fa gloire ?

Clearque craignit-il de ternir fa memoire?
Et peux-tu regarder comme un crime odieux
De punir l'ennemi des hommes & des Dieux ?
Ah! tu l'avois vû dans cette nuit horrible,
Qui caufa les malheurs où je fuis fi fenfible;
Si comme moi tes yeux avo ent vû fes forfaits,
Si tu l'avois trouvé courant dans ce Palais,
De fa barbare fuite animant la furie,
Donnant à l'un des fers, à l'autre ôtant la vie,

Tu n'apellerois pas du nom d'affaffinat

Ce moyen glorieux de délivrer l'Etat.

Mais fur toi ces récits ont trop peu de puissance,
Pour te faire approuver une telle vengeance
Et te faire fentir l'horreur de nos tourmens ;
Il te faut des objets fenfibles & prefens.

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