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Philopator Roy d'Egypte, avoit fait élever ; la maçonnerie en eft fort épaifle, & revêtuë de briques. Suivant les apparences, ce quartier étoit un des plus beaux de la ville; nous y découvrîmes deux colonnes de granit, de dix-huit pieds de long: on voit encore affez près de la, plufieurs piedeftaux, efpacez également deux à deux fur la même ligne, pour foutenir les colonnes du frontispice de quelque temple, on ne découvre de tous côtez que chapiteaux & architraves : peut-être que ce font des débris de ce temple de Diane,dont on vient de parler, ou de celui de a Jupiter, à qui Menelaus facrifia après qu'il eût appris l'enlévement de fa femme Heléne, comme le rapporte Ptolemée Epheftion, dont Photius nous a confervé quelques extraits. Pour le temple d'Apollon dont Etienne le Géographe fait mention, il étoit au milieu de la ville, & par conféquent éloib gné de l'endroit que nous décrivons parmi les colonnes de ces ruines, il y en a d'une grande. beauté, cilindriques, & canelées en fpire, les plus groffes n'ont que deux pieds quatre pouces de diamètre: il eft vrai que les Turcs en ont emporté les plus belles, & même il y a un village à deux portées de moufquet de ces mafures, dont les portes des jardins font à deux colonnes antiques; au travers defquelles on met une claye de bois pour les fermer.

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Ce lieu s'appelloit Alone : il fut nommé le village des dix Saints, depuis que dix illuftres Chrétiens natifs de l'Ifle, y curent fouffert le martyre durant la perfécution de l'Empereur Déce. d Ils fe

Jupiter Hecatombée dans
Photius Biblict. lib.5.
Dans le Pythium,

CA Ang. Village des dix Saints.

d Surius.

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nommoient Théodule, Saturnin, Eupore, Gelafe, Eunicien, Zetique, Cléomene, Agathope, Bafilide, Evariste. La Chapelle de ce village eft encore toute remplie de colonnes antiques; mais on n'y voit plus le tombeau des martyrs, dont parle le a Continuateur de Conftantin Porphyrogenete. Ces martyrs font représentez dans le tableau principal, en deux rangs, dans la même attitude & fur la même ligne, droits & roides comme des pieux. Les Grecs en font la fête le 23. Décembre, & les Latins les ont fuivis.

On trouve dans les ruines de Gortyne, des colonnes de jafpe rouge & blanc, femblable au jafpe de Cofne en Languedoc: nous en vîmes d'autre tout à fait femblable au Campan, que l'on a employé à Versailles : à l'égard des figures, il en refte peu; les Vénitiens en ont enlevé les plus belles. La ftatuë qui eft fur la fontaine de Candie, auprès de la mofquée au delà du marché, à été tirée de ces ruines; la draperie en eft belle, mais la figure eft fans tête, les Turcs ne fçauroient fouffrir fans horreur la représentation des têtes des chofes animées, fi ce n'eft fur la monnoye, dont ils font amoureux plus que gens du monde. En fouillant dans un champ, nous découvrîmes la moitié d'une figure de marbre bien drapée : la jambe étoit articulée avec fcience, & le bout du pied étoit fort beau.

A l'extremité de la ville, entre le feptentrion & le couchant, tout près d'un ruiffeau qui fans doute eft le fleuve Léthé, lequel au rapport de

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namn amnis Lethæus præterfluit,quo Europam Tauri dorfo Gortynii ferunt vectitatam. Sulin- Polyhift. cap. 11.

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Strabon & de Solin, fe répandoit dans les rues de Gortyne, fe voyent d'affez beaux reftes d'une ancienne Eglife, dans le quartier appellé Metropolis. Quoique cette Eglife foit de bonne architecture, il y a pourtant fur la gauche, un morceau de peinture à moitié effacée; mais tout à fait dans le goût gothique c'étoit apparemment la représentation de quelque hiftoire de la Vierge; on y lit encore en gros caractére a MP. Y. Nous ne fçûmes déchifrer une grande infcription gréque, qui eft dans le presbytere: elle eft trop haute & trop maltraitée. Nous crûmes pourtant y entrevoir le nom de Cyrille, ce qui paroît affez probable

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ΘΥ.

car on fait mention de deux Cyrilles Evêques de Gortyne, dont l'un fut martyrifé au commencement du troifiéme fiécle fous l'Empereur Déce, & l'autre par les Sarrafins dans le neuviéme fiécle fous Michel le Begue. Nous demandâmes des nouvelles de ces faints Evêques à des Papas du quartier ; mais ils n'en connoiffent aucun. Il y en eut un d'entre eux qui nous dît que Tite à qui faint Paul a écrit une Epitre, étoit neveu d'un Evêque de Gortyne; en quoi il fe trompoit fort. Tite que faint Paul appelle fon fils bien aimé, fut lui-même le premier Evêque de Créte, & fuivant toutes les apparences, fon fiége étoit à Gortyne : c'étoit alors la premiere ville du pays, & dans la fuite elle fut toujours honorée du premier Evêché de l'Ifle,

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Auprès des ruines de l'Eglife Métropolitaine, nous en vîmes d'autres qui nous parurent les retes de quelque monaftére les bergers y ont

a Mater Dei.

Η ΚΥΡΙΛΛΟΣ

Ο Προς Τίτον ο Κρήτων εκ

κλησίας πρῶτον Επίσκοπ όπου χειροτονηθένθος, &ς. Ερίβ. Pauli ad Titum.

Gi

bâti de miferables retraites, avec de groffes piéces de marbre antique, parmi lefquelles fe trouve un chapiteau orné de deux rofettes, & d'une croix de faint Jean de Jerufalem. Sans doute que la ville n'a été détruite qu'après l'établissement des Chevaliers Hofpitaliers, qui font à présent à Malte. Leur institution commença en 1099. par rard Tenque du Martigues en Provence. Tout proche de ces ruines, fur le bord du ruiffeau, font les reftes d'un aqueduc dont la voute a 6. ou 7. pieds de haut : il y a une belle cave à côté, voutée par bandes, & qui femble avoir fervi de refervoir pour fournir à un autre aqueduç, qui eft fur le chemin du village des dix Saints; le canal de cet aqueduc n'avoit guéres plus d'un pied de large.

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Théophrafte, Varron, & Pline, parlent d'un Platane qui se voyoit à Gortyne, & qui ne perdoit fes feuilles qu'à mefure que les nouvelles pouffoient peut-être en trouveroit-on encore quelqu'un de cette efpéce, parmi ceux qui naiffent en grand nombre le long du ruiffeau Léthé qu'Europe remonta jufques à Gortyne, fur le dos d'un Taureau. Ce Platane toûjours vert, parut autrefois fi fingulier aux Grecs, qu'ils publiérent que les premiéres amours de Jupiter & d'Europe, s'étoient paffées fous ces feuillages. Cette avanture quoique fabuleufe, donna apparemment occafion aux habitans de Gortyne de frapper une belle f médaille, qui est dans le cabinet du Roy: on y voit d'un côté Europe affez triste, affife fur un ἐμιγηλῇ Εὐρώπη ο Ζεύς. Theoph. ibid.

Hift. Plant. lib.1.cap.15.

De Re Ruftic. lib.

b

с

Hift. nat. lib.12. cap. I.

d Solin. Polyhift. ibid.

* Μυθολογούσι ἢ ὡς ἐπὶ ταύτῃ

f Legende,

ΓΟΡΤΥΝΙΩΝ.

arbre moitié Platane & moitié Palmier, au picd duquel est une Aigle à qui elle tourne le dos la même Princeffe eft reprefentée de l'autre côté, affife fur un Taureau entouré d'une bordure de feuilles de Laurier. a Antoine Auguftin Archevêque de Tarragone, parle d'un femblable type. Pline dit que l'on tâcha de multiplier dans l'Ifle l'efpèce de ce Platane: mais qu'elle dégénera, c'est à dire que les nouveaux pieds perdirent leurs feuilles en hiver, de même que les communs.

Il nous reste encore des médailles de Gortyne, frappées aux têtes de Germanicus, de Caligula, de Trajan, d'Adrien; dont la plus belle fe voit dans le cabinet du Roy : elle marque qu'on s'affembloit à Gortyne pour y celebrer les jeux, en l'honneur d'Adrien.

Outre les infcriptions de Gortyne rapportées par Gruter, que Honorio Belli auteur de quelques lettres adreffées à Clufius, fur les plantes de Créte, avoit communiquées à Pigafeta, nous en copiâmes deux, qui étoient échapées aux recherches de Belli.

a Dialog. 1.

ΚΟΙΝΟΝ

b Legende.

ΚΡΗΤΩΝ

ΓΟΡΤΥΣ.

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