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fa patrie, & Dieu le terme de fon pelerinage; il eft fujet à la mort, & Dieu eft la vie par fon effence, & c'est lui qui communique l'être à toutes les creatures. Il s'écrie donc, ô Seigneur mon Dieu, je viens faire hommage à vôtre infinie grandeur, en m'humiliant en vôtre prefence, & en reconnoiffant devant vous mon propre neant. Je fuis foible & infirme, &c'eft pour cela que j'ai recours à vous, que j'implore la toute puissance de vôtre bras, & que je vous prie de me fortifier &de me foûtenir. Ma mifere eft extrême, je le fçai, & j'en fuis tres-perfuadé; mais vous pouvez, Seigneur; y mettre fin vous qui êtes fouverainement heureux, & qui faites tout notre bonheur. Je fuis perfecuté par mes paffions, je fens en moimême une guerre interieure, & je gemis fous le poids de mes pechez. Venez, Seigneur, m'en délivrer. Vous n'avez qu'à commander à mes paffions de fe calmer &elles vous obéiront auffi-tôt. Il vous eft facile d'amollir la dureté de mon cœur,

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vôtre mifericorde eft plus grande que toutes mes iniquitez. Fe languis dans ce monde, parce que je m'y regarde comme un captif& comme un exilé; je foûpire fans ceffe vers vous, ô mon Dieu; je vous attens avec impatience; & je vous fupplic

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de ne differer pas davantage de m'introduire dans la ferufalem celefte qui eft ma veritable patrie. Ma vie n'est à proprement parler qu'une mort continuelle, je déperis à chaque moment, & tous les pas que je fais, me conduisent au tombeau mais je trouverai dans vous une vie mille fois plus heureufe que celle que je perds, vous me refufciterez un jour à venir, & vous me communiquerez une glorieufe immortalité. Je m'adresse donc à vous, gneur mon Dieu, je me prefente devant vous comme un pauvre & comme un mendiant; je vous expofe tous mes befoins; j'éleve ma voix pour vous appeller à mon fecours; & du plus profond abime de mes miferes j'invoque l'abîme de vos misericordes.

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Verfet 11. Le Seigneur recommande fa mifericorde durant le jour, & les cantiques d'actions de graces durant la nuit.

Verfet 12. J'offre en moi ma priere au Dieu de ma vie : Je dirai à Dien, vous êtes mon refuge.

La profperité & l'adverfité font également dangereuses aux impies & à tous ceux qui font attachez au monde. Car la profperité contribue fouvent i entretenir leurs paffions, fortifie leur amour propre, les rend vains & orgueilleux,

& leur fait prefque toûjours oublier Dieu qui eft neanmoins l'auteur de toute leur felicité & l'adverfité les porte à former des plaintes & des murmures, & les jette ordinairement dans le defefpoir. Mais les juftes qui vivent fur la terre comme des étrangers, ne font point expofez à de tels inconveniens. Marchentils durant le jour, c'eft à-dire, font ils dans la profperité? ils reconnoiffent qu'ils tiennent tout de la mifericorde de Dieu, & ils fe fervent de leurs biens pour l'honorer,pour le fervir, & pour accomplir fa loi & fes preceptes. Sont ils furpris de la nuit, c'eft-à dire, tombent-ils dans l'adverfité? ils continuent encore à le loüer, ils lui offrent leurs prieres, ils lui chantent des cantiques d'actions de graces, & ils lui difent: Vous êtes nôtre refuge. Ainfi c'eft à leur égard que s'accomplit cette parole du Prophete dans un autre pleaume: Le Soleil ne vous brûlera point Pfal 110 pendant le jour, ni la Lune ne vous nuira". point pendant la nuit.

Il faut même obferver que c'eft principalement dans le tems des tribulations & de l'adverfité, que l'on reconnoît fi les fideles ont une pieté folide, & s'ils font veritablement détachez du monde. Car ils loüent affez Dieu pendant qu'ils font

riches, heureux, & en parfaite fanté ; ils parlent volontiers de la pauvreté ; & ils difent inceffamment qu'il faut poffeder les biens de la terre fans attache, en fouffrir avec conftance la privation, lorsque la providence l'ordonne ainfi, & ne les point regretter aprés qu'on les a effectivement perdus. Mais toutes ces bonnes refolutions s'évanouiffent dès qu'ils ont quelque chofe à fouffrir. On les voit triftes, chagrins, impatiens; ils fe plaignent inceffamment de leurs difgraces; & quelquefois même ils s'en prennent au Dieu de l'Univers, & ils accufent fa bonté & fa juftice. L'on reconnoît alors que leur piété n'étoit qu'apparente, qu'ils ne fe regardoient pas fur la terre comme des étrangers & des voïageurs, & qu'ils aimoient avec paffion les biens temporels. Car il eft conftant que les étrangers & les voïageurs ne s'affligent point de s'éloigner des châteaux & des heritages qu'ils rencontrent dans les campagnes, & qu'au contraire ils les quittent volontiers pour continuer leur route & pour tendre à leur patrie.Et S. Gregoire nous enfeigne que la douleur que l'on témoigne en perLib. 4. dant les biens temporels, eft une marque certaine qu'on y avoit de l'attache. C. 4. Comme il arrive ordinairement, dit-il,

Moral.

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en parlant de Job, que les grandes pertes «< caufent une grande affliction à ceux qui les fouffrent; l'Ecriture voulant faire con- «< noître combien la vertu de ce faint 66 perfonnage a été folide, elle ne manque pas « de parler de la grandeur des biens qu'il a perdus avec tant de patience. Car c'eft " une verité conftante qu'on ne perd fans " douleur que ce qu'on a poffedé fans “

amour.

L'on peut dire que ce font les tribulations & les adverfitez de cette vie qui manifeftent le fecret des cœurs des chrétiens & leur difpofition interieure. S'ils s'en affligent extraordinairement, & s'ils en témoignent trop d'impatience, c'est une marque qu'ils aiment le monde, & qu'ils y ont de l'attache: mais s'ils les fouffrent avec patience & même avec joïe, on a droit de conclure qu'ils ne confiderent toute la terre que comme une hôtellerie & un lieu de paffage, & qu'ils cherchent le ciel qui eft leur veritable patrie.

Verfet 13. Pourquoi m'avez-vous onblié, & pourquoi marchai-je avec un vifage trifte dans l'affliction que je reçois de

mon ennemi ?

Ces paroles font une vive expreffion des fentimens d'un jufte qui vivant à

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