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SECTION VIII

Du Coin.

E Coi. étant beaucoup moins propre à mouvoir qu'à fendre des corps durs, & le Principe que j'expofai en 1687. au jugement des Connoiffeurs dans le Projet de cette Mécanique-ci me paroiffant applicable fans peine à cette Machine de la maniere que je l'appliquois aux autres, pour en donner un effai, & dans une aufli grande un-verfalité que celle à laquelle je les élevai; je négligeai de parler de celle-ci dans ce Projet. Cependant comme il s'agit de l'executer, & de rendre cette Mécanique ou Statique complete, le rang que l'on donne d'ordinaire aut Coin parmi les Machines élementaires, propres à faciliter les mouvemens, peut-être à caufe de ceux de féparation : qu'il facilite entre les parties des corps à fendre, m'enga ge à traiter pareillement ici de cette Machine.

DEFINITION XX X.

J'appelle en general Coin un corps dur de figure quel conque, propre à entrer par force dans un autre corps dur, & à le fendre ainfi en deux. On fait d'ordinaire le Coin en Prifme triangulaire, tel que ABEFCD (Fig.247.) F102473 dont les bafes paralleles oppofées AEB, DFC, font deux triangles fofceles égaux & femblables; defquels un, par exemple, AEB, mu parallelement à lui-même fuivant AD perpendiculaire à fon plan, décriroit ou traceroit ce Coin. Le parallelogramme ABCD en eft appellé la Téte ou la Base; la droite EF en eft appellée le Tranchant, lequel y eft parallele à cette bafe ou tête; & les deux parallelogrammes opposez BEFC, AEFD, dont ce tran chant eft la fection commune, s'appellent les Faces ou les Côtez du Coin.

D'ordinaire on n'exprime ce Coin qu'en profil par fon triangle générateur AEB, dont la pointe E en exprime le tranchant; fa bafe AB exprime celle du Coin ou fa tête; les côtez AE, BE, de triangle expriment ceux de ce Coin cu fes faces; & la hauteur de ce triangle, c'est-àdire, la diftance de fa pointe E à sa base AB, eft elle-même la hauteur de ce Coin. C'eft pour cela qu'il s'appellera ici ifofcelle comme ce triangle, pour le diftinguer des autres Coins de figures quelconques, dont nous allons parler, & que nous ne reprefenterons ainfi qu'en profil, pour moins d'embarras de lignes dans les Figures.

DEFINIT 1.0 N XXXI.

On appellera ici Réfiftance abfolue d'un corps à rompre, à caffer, ou à fendre en quelqu'endroit que ce foit, ce que les fibres de ce corps en feroient à fe caffer ou à fe détacher toutes à la fois en cet endroit: mais parce qu'on peut douter qu'il y ait aucun corps dont les fibres caffent ou fe détachent ainfi toutes à la fois à l'endroit où il fe romproit, de quelque maniere qu'on le rompît, même en le tirant fuivant la longueur; nous appellerons en general Réfiftance de Tenacité, ou Réfistance totale des fibres d'un corps, ce que celles qui s'oppofent à fa rupture, en font toutes enfemble à la force qui tend à le tend à le rompre, ou à le fendre, foit que vaincues par cette force, elles caffent ou fe détachent toutes à la fois, ou feulement les unes après les autres, en prêtant fucceffivement jufqu'à certaines longueurs avant que de fe caffer ou de fe détacher, en quelque proportion de longueurs qu'elles prêtent jufqu'à ce terme d'alongement. Enfin nous appellerons Réfiftances des cótez de la fente d'un corps à fendre par le moyen d'un Coin, ce que ces côtez de la fente, retenus enfemble par la réfiftance des fibres qui s'oppofent à leur féparation, en font aux efforts des côtez du Coin contr'eux pour les écarter malgré ces fibres, & les forcer ainfi de permettre à ce Coin d'entrer plus avant dans le corps à fendre.

REMARQUE.

Je ne fçais point d'Auteur qui ait recherché la forcedu Coin fur d'autre que fur l'ifofcelle; je n'en fçais non plus aucun qui avant M. Defcartes l'ait confideré indépendamment de toute autre Machine: de tous ceux qui ont parlé des proprietez du Coin avant cet Auteur, je n'en fçais point qui n'ayent rapporté la force de cette Machine à celle du Levier, ou à la résistance du plan incliné, en prenant la force du Coin pour celle d'un coup dont il feroit frappé perpendiculairement à fa bafe, ou (ce qui revient au même ) pour celle dont il tend à s'enfoncer dans le corps à fendre..

I. Les premiers ont regardé les côtez du Coin-comme des Leviers, dont les uns ont mis les appuis à la pointe de ce Coin, & les autres à l'entrée de la fente qu'il fait dans le corps à divifer: mais ne fçachant à quelles diftances de chacun de ces appuis fuppofez, ils devoient confiderer la force employée pour enfoncer le Coin & la résistance du corps à fendre, ils n'en ont pû conclure aucun rapport entre cette réfiftance & cette force.

H. Quant à ceux qui ont regardé les côtez du Coin* comme des plans inclinez, ils ne nous ont donné guéres plus de lumiere: la plupart fe contentent auffi d'expliquer la queftion fans la décider; & les autres, en la décidant, fe partagent en deux fentimens. Il y en a parmi eux qui difent qu'à l'inftant d'équilibre entre la force dont on frappe le Coin perpendiculairement à fa tête, & la réfiftance du corps à fendre, cette force du Coin eft toûjours à cette réfiftance, comme la demi-bafe de ce Coin eft à fa hauteur ; d'autres prétendent que c'eft comme fa demibafe à un de fes côtez.

III. Enfin ceux qui ont confideré le Coin indépendam ment de toute autre Machine, fe trouvent encore de deuxfentimens differens : les uns croyent qu'à l'instant d'équi-libre entre la force du Coin & la réfiftance du corps à fen-dre, cette force eft toûjours à cette réfiftance comme la

bafe du Coin eft à la hauteur; & d'autres foûtiennent que c'eft comme la plus grande largeur de la fente à fa profondeur. Ce qui eft encore tout different; puifque ceuxci ne veulent pas que la pointe, ou le tranchant du Coin aille jufqu'au fond de la fente, ni par confequent que la bafe du Coin foit à fa hauteur comme la largeur de la fente est à sa profondeur.

IV. Outre ces Auteurs, il y en a encore qui confiderant d'abord le Coin indépendamment de toute autre Machine, & le faifant enfuite dépendre du Levier, difent que fuivant chacune de ces deux manieres, la force du Coin eft à la réfiftance du corps à fendre comme la base de ce Coin eft à la fomme de fes côtez; ce qui s'accorde avec le fecond des fentimens du précedent art. 2.

V. La diverfité de tous ces fentimens fait déja voir qu'il y a là du paralogifme, de quelque côté qu'il foit, & en quelque fens (Déf. 30.) que le mot de Résistance y foit employé: on en jugera par les Th. 39. 40. qui tant pour les réfistances rélatives ( Déf. 1. 22. 31.) que pour les abfolues, comprendront en general tous les cas poffibles de cette queftion, c'est-à-dire, toutes les configurations poffibles des Coins avec toutes les directions imaginables de la force qui les frappe ou les pouffe, foit que ces côtez enfoncent, ou non, jufqu'au fond de la fente du corps à divifer. On va commencer par le rapport de cette force abfolue( Déf. 31.) aux réfiftances rélatives ( Déf. 22.) des parties du corps à fendre, que le Coin tend à écarter l'une de l'autre ; parce que de la connoiffance de ce rapport dépend celle de cette force abfolue ( Déf. 1. 22. 3 1.) aux réfiftances rélatives des parties du corps à fendre, que le Coin tend à écarter Pune de l'autre ; parce que de la connoiffance de ce rapport dépend celle du rapport de cette force abfolue du Coin à la réfiflance abfolue du corps à fendre, & auffi pour voir en quel fens les fentimens précedens font vrais ou faux.

Ne craignant rien tant que d'offenfer qui que ce foit, je n'ai mommé jufqu'ici aucun des Auteurs que j'ai fait voir s'étre

mépris.

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