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portés fur les Athéniens & les » Carthaginois, tantôt ceux que vous » avez remportés fur nous; & que » Syracufe, mife pour toujours fous » la protection des Marcellus, foit un » monument perpétuel & fubfiftant » du courage & de la clémence de » celui qui l'aura prife & confervée. » Il ne feroit pas jufte que le fouvenir » d'Hiéronyme fit plus d'impreffion >>fur vos efprits, que celui d'Hiéron. » Celui-ci a été votre ami bien plus » lontems, que l'autre votre ennemi. » Vous avez reffenti, qu'il me foit » permis de le dire, les effets de l'a» mitié d'Hiéron: mais les folles entreprises d'Hiéronyme ne font re» tombées que fur lui.

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La difficulté n'étoit pas d'obtenir de Marcellus ce qu'ils demandoient, mais de conferver la tranquillité & le concert entre eux dans la ville. Les transfuges, perfuadés qu'on les li vroit aux Romains, infpirérent la même crainte aux foldats étrangers. Aiant donc pris les uns & les autres fubitement les armes pendant que les Députés étoient encore dans le camp de Marcellus, ils commencent par égorger les Magiftrats nouvellement

élus, & courant de tous côtés dans la ville font main-baffe fur ceux qu'ils rencontrent, & pillent tout ce qui tombe fous leurs mains. Pour ne point être fans chefs, ils nomment fix Officiers, trois pour commander dans l'Achradine, & trois dans l'Ile. Le tumulte étant enfin appaifé, les foldats étrangers reconnurent par tout ce qu'ils apprirent qui s'étoit conclu avec les Romains, que leur cause étoit toute féparée de celle des transfuges. Dans le moment arrivent les Députés qu'on avoit envoiés à Marcellus, qui achevent de les détromper.

Parmi ceux qui commandoient dans Syracufe, il y avoit un Espagnol, nommé Méric: on trouva le moien de le gagner. Il livra de nuit la porte qui étoit près de la fontaine d'Aréthufe, & reçut les foldats que Marcellus y envoia. Le lendemain au point du jour, Marcellus fit une fauffe attaque à l'Achradine, pour attirer de ce côté-là toutes les forces de la Citadelle & de l'Ile qui y étoit jointe, & afin de faciliter à quelques vaiffeaux qu'il avoit prépatés le moien de jetter des troupes dans

l'Ile

I'lle qui feroit dégarnie. Tout réuffic comme il l'avoit projetté. Les foldats, que ces vaiffeaux jettérent dans l'Ile, trouvant les poftes prefque tous dégarnis, & les portes par lefquelles étoient fortis les foldats de la Citadelle pour aller contre Marcellus encore ouvertes, s'en emparérent après un léger combat. Marcellus, averti qu'il étoit maître de l'Ile, & d'un quartier de l'Achradine, & que Méric avec le corps qu'il commandoit s'étoit joint à fes troupes, fait fonner la retraite, afin que les richefes des Rois ne fuffent point pillées. Elles ne montoient pas fi haut qu'on le penfoit.

Les déferteurs s'étant échapés & on leur avoit laiffé exprès la fortie libre, les Syracufains ouvrirent à Marcellus toutes les portes de l'Achradine, & lui envoièrent des Députés, qui avoient ordre de ne lui demander autre chofe finon qu'il lui plût de leur conferver la vie à eux & à leurs enfans. Marcellus, aiant af femblé fon Confeil & quelques Syracusains qui étoient dans fon camp, répondit à ces Députés en leur préfence, » Qu'Hiéron, pendant cin» quante ans, n'avoit Tome X.

pas

fait plus

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» de bien au peuple Romain, que » ceux qui depuis quelques années » étoient maîtres de Syracuse n'a>> voient voulu lui faire de mal: mais » que leur mauvaise volonté étoit re» tombée fur eux, & qu'ils s'étoient punis eux-mêmes du violement des » Traités d'une maniére plus cruelle » que n'auroient fouhaité les Ro» mains. Qu'il tenoit Syracuse affiégée depuis trois ans, non afin que » le peuple Romain la réduisît en efclavage, mais pour empêcher que » des Chefs de transfuges ne la tinf» fent dans l'oppreffion. Qu'il avoit » effuié beaucoup de fatigues & de dangers pendant un fi long fiége: » mais qu'il s'en croioit avantageu » fement dédommagé par la gloire » d'avoir pris cette ville, & par le

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plaifir de l'avoir fauvée de la ruine » entiére qu'elle fembloit mériter. Après avoir mis des gardes au Tréfor, & placé auffi des fauve-gardes dans les maisons des Syracufains qui s'étoient retirés dans fon camp, il abandonna la ville au pillage. On prétend que les richeffes qui furent pillées à ce fac de Syracufe, furpafférent celles qu'on eût pu espérer de la prise de Carthage.

Un funefte accident troubla la joie de Marcellus, & lut caufa une fenfible douleur. Archimède, dans le tems que tout étoit en mouvement à Syracufe, enfermé dans fon cabinet comme un homme d'un autre monde qui ne prend point de part à ce qui le paffe dans celui-ci, étoit appliqué à confidérer quelque figure de Géométrie, & il donnoit à cette contemplation, non feulement tous les yeux, mais encore tout fon efprit, de maniére qu'il n'avoit entendu ni le tumulte des Romains qui couroient par tout, ni le bruit de la ville prife. Tout d'un coup un foldat se présente à lui, & lui ordonne de le fuivre pour venir parler à Marcellus. Archiméde le prie d'attendre un moment, jufqu'à ce que fon problême fût réfolu, & qu'il en eût fait la démonftration. Le foldat qui ne fe foucioit ni de fon problême ni de fa démonftration, irrité de ce délai, tire son épée, & le tue. Marcellus fut vivement affligé, quand il apprit la nouvelle de fa mort. Ne pouvant lui rendre la vie comme il l'auroit fouhaité, il s'appliqua, autant qu'il fut en lui, à honorer fa mémoire. Il fit une recherche exacte

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