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rai les Arts & les Sciences qui ont plus de raport à l'efprit: la Gram maire la Poétique, l'Hiftoire, la Rhétorique, & la Philofophie, avec toutes les parties qui en dépendent, ou qui y ont quelque raport.

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Je dois avertir par avance, avec la franchise dont j'ai fait profession jusqu'ici, que j'entreprends de traiter une matiére, dont plufieurs parties me font prefque entiérement inconnues. J'ai befoin, par cette raison, d'une nouvelle indulgence. Je demande qu'il me foit permis d'ufer librement, comme j'ai toujours fait, (& j'y fuis forcé plus que jamais) de tous les fecours que je trouverai à ma rencontre. Je courrai rifque de perdre la gloire d'être Auteur & Inventeur. J'y renonce volontiers pourvû que je puiffe avoir celle de plaire à mes Lecteurs, & de leur être de quelque utilité. On ne doit point s'attendre à trouver ici une érudition profonde, comme la matiére femble le comporter. Je ne prétends point inftruire les Savans, mais choi, fir ce qu'il y a dans tous les Arts plus à la portée du commun des Lecteurs,

CHAPITRE PREMIER.

DE L'AGRICULTURE.

ARTICLE

I.

Antiquité de l'Agriculture. Son utilités Quelle estime on en faifoit dans les anciens tems, Combien il eft important de la mettre en honneur, & dangereux d'en négliger le foin.

J

E PU s bien avec justice mettre à la tête des Arts PAgriculture, qui a certainement fur tous les autres l'avantage & de l'antiquité & de l'utilité. On peut dire qu'elle eft aufsi ancienne que le monde, puifque c'est dans le Paradis terreftre même qu'elle a pris naissance, lorfqu'Adam, forti tout récemment des mains de fon Créateur, poffédoit encore le précieux mais fragile tréfor de fon innocence. Dieu l'aiant placé dans ce jardin de délices, lui en ordonna la culture, ut operaretur illum: non une Gen. 2. 15ì culture pénible & laborieuse, mais facile & agréable, qui devoit lui tenir lieu d'amufement, & lui faire contempler de plus près dans les pro

ductions de la terre la fageffe & la libéralité de fon Maître.

Le péché d'Adam aiant renversé tout cet ordre, & lui aiant attiré le funefte arrêt qui le condanna à manger fon pain à la fueur de fon visage, Dieu changea fon plaifir en châti– ment, & l'affujettit à un dur travail qu'il n'auroit jamais connu, s'il avoit toujours ignoré le mal. La terre, devenue fourde & rebelle à fes ordres en punition de fa revolte contre Dieu, fe couvrit de ronces & d'épines. Il falut lui faire violence pour la contraindre de paier à l'homme un tribut, dont fon ingratitude l'avoit rendu indigne, & la forcer par le labourage à lui fournir tous les ans une nourriture qui lui étoit auparavant donnée gratuitement & fans peine.

On voit par là jufqu'où remonte l'origine de l'Agriculture, qui, de punition qu'elle étoit, eft devenue, par un fingulier bienfait de Dieu comme la mere & la nourricière du genre humain. Elle eft en effet la fource des véritables biens, & des richeffes qui ont un prix réel, & qui ne dépendent pas de l'opinion des hommes: qui fuffifent à la néceffité, &

même aux délices: qui font qu'une nation n'a pas befoin des étrangers, & qu'elle leur eft néceffaire; qui font le principal revenu d'un Etat, & qui lui tiennent lieu de tous les autres s'ils viennent à lui manquer. Quand les mines d'or & d'argent feroient épuifées, & que l'efpéce en feroit perdue; quand les perles & les diamans demeureroient cachées dans le fein de la mer & de la terre ; quand le commerce feroit interdit avec les voifins ; quand tous les arts qui n'ont d'autre objet que l'embelliffement & la parure feroient abolis: la fécondité feule de la terre tiendroit lieu de tout; elle fourniroit une ressource abondante aux befoins publics; & elle ferviroit à nourrir & le peuple, & les armées qui le défendroient.

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On ne doit pas être furpris, après cela, que l'Agriculture ait été autrefois fi fort en honneur chez les anciens il doit paroitre plutôt bien étonnant qu'elle ait ceffé de l'être, & que celle de toutes les profeffions qui eft la plus néceffaire & la plus indifpenfable, foit tombée dans un fi grand mépris. Nous avons vû, dans tout le cours de notre histoire, qu'une

Rom. lib. 2.

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des principales attentions des Princes les plus fages & des Miniftres les plus habiles, étoit de foutenir & d'encourager l'Agriculture.

Chez les Affyriens & chez les Perses, on récompenfoit les Satrapes dans le Gouvernement defquels on trouvoit les terres bien cultivées, & l'on puniffoit ceux qui négligeoient ce foin. Dionyf. Ha- Numa Pompilius, l'un des plus fages bic. Antiq. Rois dont il foit parlé dans l'antiquité, & qui a le mieux compris & le plus fidélement rempli les devoirs de la roiauté, avoit partagé tout le territoire de Rome en différens cantons. On lui rendoit compte exactement de la manière dont ils étoient cultivés ; & il faifoit venir les laboureurs, pour louer & encourager ceux dont les terres étoient bien tenues, & pour faire des reproches aux autres. Les biens de la terre, dit l'Hiftorien, étoient regardés alors comme les plus juftes & les plus légitimes de toutes les richeffes, & préférés de beaucoup aux avantages que procure la guerre, qui ne font pas de longue durée. 14. lib. 3. Ancus Marcius, quatriéme roi des Romains, qui fe piquoit de marcher fur les traces de Numa, après le culte

pag. 177.

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