Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[ocr errors]

"

"

» la nature a communiqué une fécon » dité perpétuelle, fe trouve expofée à la ftérilité comme à une espéce » de maladie. Et après qu'elle a reçu » de fon Maître une jeuneffe divine » & éternelle, ce qui l'a fait appeller la mere commune de tous, parce qu'elle a toujours enfanté de fon » fein & en enfantera toujours tout » ce qui fubfifte, il n'eft pas à crain» dre qu'elle tombe dans la caducité » & la vieilleffe comme l'homme. Ce » n'eft point à l'intempérie de l'air ni » aux années qu'on doit attribuer la » ftérilité de nos terres, mais uni» quement à notre faute & à notre » négligence: n'en accufons que nous›› mêmes, qui abandonnons à nos ef» claves des campagnes, qui du tems » de nos ancêtres étoient cultivées » par les plus gens de bien.

Cette réflexion de Columelle paroit fort folide, & eft confirmée par l'expérience. La terre de Chanaan (& il en faut dire autant des autres) étoit déja très fertile quand le peuple de Dieu en prit poffeffion; & il y avoit plus de fept cens ans que les Chananéens l'habitoient. Il s'en passa près de mille jufqu'à la captivité de

Babylone.

Babylone. On ne voit point dans les derniéres années aucune marque ni d'épuisement, ni de vieillesse, fans parler des âges fuivans. Si donc depuis plufieurs fiécles elle eft prefque entiérement ftérile, comme on le dit, on doit conclure avec Columelle

a

que ce n'eft point qu'elle foit épuifée ou vieillie, mais c'eft qu'elle eft déferte & négligée. Et l'on doit conclure auffi que la fertilité de certains pays dont il eft tant parlé dans l'hiftoire, venoit du foin particulier que l'on donnoit au labour de la terre, à la culture des vignes, à la nourriture des troupeaux. Il eft tems d'en dire un mot.

. ARTICLE SECOND.

Du labour de la terre. Pays célébres che les Anciens pour l'abondance du blé.

JE ME BORNE, en parlant du labour de la terre, à ce qui regarde le froment, comme en faisant la partie la plus importante.

[ocr errors]

a Non igitur fatiga- | inertia minùs benignè nocione quemadmodum bis arva refpondent. Co plurimi crediderunt, nec lum. lib. 2. cap. 2. Tenio, fed noftra fcilicet

- Tome X.

erat. contr.

Lept. p. 546.

Les pays les plus renommés pour l'abondance du blé, étoient la Thrace, la Sardaigne, la Sicile, l'Egypte, l'Afrique.

ATHENES tiroit tous les ans de Byzance feul, ville de Thrace, quatre cens mille médimnes de blé : c'eft Demofth. in Démosthène qui nous l'apprend. Le médimne contenoit fix boilleaux, & Id in Phorm. de fon tems n'étoit vendu que cinq dragmes, c'est-à-dire cinquante fols de notre monnoie. A combien d'autres villes & d'autres contrées la Thrace fourniffoit-elle du blé, & combien par conféquent devoit-elle être fertile?

pag. 945.

CE N'EST POINT fans raifon que Caton le Cenfeur, à qui la gravité de fes mœurs fit donner le furnom de Sage, appelloit la Sicile le grenier & la mere nourrice du peuple Romain. En effet c'eft de là que Rome d'abord tiroit prefque tous fes blés, foit pour la nourriture de fes citoiens, l'entretien de ses armées.

foit

pour

alle M. Cato Sapiens cellam penariam reip. noAræ, nutricem plebis Romanæ Siciliam nominavit... Itaque ad omnes Les Sicilia provincia fem- [

per ufi fumus; ut, quic. quid ex fe poffet efferre, id non apud eos nafci, fed domi noftræ conditum putaremus. Cic.Verr. 3. no fo

On voit dans Tite-Live que la Sardaigne fourniffoit auffi beaucoup de blé aux Romains.

TOUT LE MONDE fait combien le terroir d'Egypte, humecté & engraillé par le Nil, qui a lui tenoit lieu de laboureur étoit fertile en blé.

[ocr errors]

par

[ocr errors]
[ocr errors]

Quand Augufte l'eut réduite en pro- Sext. Aurel. vince Romaine, il prit un foin ticulier du lit & des canaux de ce fleuve bienfaifant, qui s'étoient peu à peu remplis de limon par la négligence des Rois d'Egypte, & les fit nettoier par les troupes Romaines qu'il y avoit laiffées. Il en venoit réguliérement à Rome tous les ans vingt millions de boiffeaux de blé. Sans ce fecours, la capitale du monde étoit expofée à périr de faim. Elle fe vit dans ce danger fous Augufte. Il ne reftoit plus de blé dans la ville que pour trois jours. Ce Prince, qui étoit plein de tendreffe pour le peuple, avoit réfolu de fe faire mourir par le poifon, fi les flotes qu'on attendoit n'arrivoient avant l'expiration de ce tems. Elles arrivérent à propos, & l'on attribua le falut du peuple au bonheur du Prince. Nous verrons

a Nilus ibi coloni vise fungitur. Plin.

cap. 8.

qu'on prit depuis de fages précautions pour éviter un pareil danger. L'AFRIQUE, pour la fertilité,

Plin. lib. 18. ne le cédoit pas à l'Egypte. On marque une de fes contrées, où un boisfeau de blé femé en terre en raportoit cent cinquante. D'un feul grain venoient quelquefois près de quatre cens épis, comme on le voit dans les lettres écrites fur ce fujet à Augufte & à Néron par ceux qui gouvernoient l'Afrique en leur nom. Cela étoit apparemment fort rare. Mais le même Pline, qui raporte ces faits, affure que c'étoit une chose affez ordinaire en Béotie & en Egypte, qu'un grain rendît cent épis: & il fait remarquer à cette occafion l'attention de la Providence, qui a voulu que de toutes les plantes, celle qui est destinée la nourriture de l'hompour me, & par conféquent la plus néceffaire, fût auffi la plus féconde.

J'ai dit que d'abord Rome tiroit prefque tous fes blés de la Sicile & de la Sardaigne, Dans la fuite, quand elle fe fut rendue maitreffe de Carthage & d'Alexandrie, l'Afrique & l'Egypte devinrent fes plus abondans greniers. Chaque année elles faifoient

« AnteriorContinuar »