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Cothbed

Dans le même tems (a) le Roi de Mouffoul perdit Zéïn Apr. J. C. eddin. Cet Emir gouvernoit depuis long-tems le Royaume L'an 1167. de Mouffoul avec la réputation d'un homme fage, éclairé, Noureddin généreux, & qui n'étoit occupé que du bien public. Lorf- din. que fon âge & fes infirmités ne lui permirent plus de va- Aboulfedha quer aux affaires du gouvernement (il étoit devenu aveugle & Benelathir. fourd) il se retira dans la ville d'Arbel qui lui avoit été donnée

par

Emadeddin zenghi, & remit entre les mains de Cothbeddin celles de Sandgiar, de Harran & autres. Ce Prince nomma à fa place Phakhreddin abdolmefih,qui par fa conduite opposée à celle de Zeïneddin, encourut l'indignation de tout le peuple & du Roi fon maître qui le dépofa trois ans après (6).

D'un autre côté Noureddin (c) fit une conquête à la- L'an 1168. quelle il ne s'attendoit pas; le château de Dgiaber fitué près de l'Euphrate, appartenoit depuis le regne du Sulthan Malek schah à la famille des Ocaïlites. Celui qui le poffédoit alors étoit nommé Schehabeddin Malek; un jour qu'il fortit de ce château pour aller à la chaffe, il fut arrêté par les Kelabites, & conduit à Noureddin qui le renferma dans Alep. C'eft alors qu'il conçut le deffein de s'emparer du château, il effaya inutilement d'engager Schehabeddin à le lui remettre. Noureddin ne donna point ici des preuves de cette juftice dont il faifoit profeffion; mais il s'agiffoit d'étendre fes Etats. Il envoya des troupes qui firent le fiége du château, la réfiftance de la garnifon l'obligea d'y en envoyer de nouvelles, fans qu'il put s'en rendre maître de force, & il ne l'eut que parce que Schehabeddin confentit enfuite à le lui céder en échange de Sandgiar & de quelques autres villes. Il donna le gouvernement de ce château à Madgededdin fils de Daieh.

Ce Prince étoit toujours attentif à toutes les démarches des Francs qui ne cherchoient que l'occafion de pouvoir s'emparer de l'Egypte. Mais en s'efforçant de les chaffer de ce pays, il n'avoit point envie de le conferver aux Phathiinites. Les Francs de leur côté, bien inftruits de fes deffeins, craignoient de voir l'Egypte réduite en province du Royau

(a) L'an 563 de l'Hegire.

(b) L'an 566 de l'Hegire, & de J.C. Tom. II. Part. II.

1170.

(c) L'an 564 de l'Hegire.

Cc

Apr. J. C.

me d'Alep, & cette crainte ainfi que l'envie de s'en emL'an 1168. parer, leur faifoient négliger l'obfervation des traités. Ils Noureddin avoient une garnifon dans le Caire où ils étoient très-puisdin. fans. Les Chefs écrivirent à Amaury, & lui firent envisager Benelathir. Cette conquête comme très-facile. Ce Prince, au rapport

Cothbed

de Tyr.

des Historiens Arabes, ne voulut point y confentir, sous, prétexte qu'en violant ainsi les traités, c'étoit fe rendre tous les habitans ennemis, les engager à fe tourner du côté Guillaume de Noureddin, & à lui remettre leur pays. Un des plus. ardens à porter Amaury à entreprendre cette guerre étoit: Gerbert Affalit, grand maître de l'Hôpital. Il efpéroit qu'a-près cette conquête, Pélufe feroit pour fon Ordre; mais les autres Chevaliers n'étoient point de fon avis, & vouloient qu'on obfervât le traité. Plufieurs autres Princes Francs fe: joignirent à lui, & affurerent au Roi qu'il feroit maître deÍ'Egypte, avant que Noureddin en fût inftruit; Amaury ne confentit que malgré lui à faire la guerre. Il leva une armée,feignant de vouloir aller prendre Hemeffe en Syrie; mais il tourna (a) tout à coup du côté de l'Egypte, traverfa le défert, & fe rendit en dix jours devant Pélufe. Elle fut prife (b) après trois jours de fiége, mife au pillage, & on n'épargna perfonne.

que

Auffi-tôt Schaour eut été inftruit de cette rupture, il refta quelque tems incertain fur le parti qu'il avoit à prendre. Il fe détermina enfin à envoyer demander du fecours à Noured-din. Ce Prince auroit bien voulu fe rendre en Egypte; mais il craignoit que pendant fon abfence, les Francs n'entraffent dans fes Etats de Syrie. D'ailleurs il fongeoit à s'em-Behaeddin. parer de plufieurs villes à l'occafion de la mort (c) de Zeïn

Guillaume

de Tyr.

eddin aly qui avoit été premier Miniftre du Roi de Moussoul. Ces villes venoient d'être cédées par Zeïneddin au Roi de Mouffoul frere de Noureddin, mais cette confidération n'é-toit pas capable de l'arrêter: en conféquence, il ne partit point pour l'Egypte, & il fe contenta d'y envoyer Schirkouh.. Pendant que cet Emir s'avançoit du côté de l'Egypte, le

(a) Dans le mois d'O&obre.

(b) Le trois de Novembre, felon Guillaume de Tyr; dans le mois Se

pher, felon Benelathir.

(c) Arrivée dans le mois Dzoulhed, gé de l'an 563, de J. C. 1167.

Cothbed

Roi Amaury avoit quitté Pélufe, & étoit venu camper devant le Caire (a). Ce Prince n'avoit pas deffein de le pren- L'an 1168. Apr. J. C. dre, il vouloit feulement lui éviter le fort que Pélufe avoit Noureddin eu; & il avoit employé dix jours à faire un chemin d'une jour- din, née, efpérant que Schaour lui donneroit une fomme d'argent pour l'engager à fe retirer. Mais la conduite que les Francs avoient tenue à Péluse fut cause que les habitans du Caire fe préparerent à fe défendre. Déja Schaour avoit fait mettre le feu à la ville de Mefr le jour (b) qui précéda leur arrivée. Cet incendie dura cinquante-quatre jours. Amaury avoit mandé ses vaiffeaux qui entrerent par la bouche du Nil, qui eft proche de Taphnis, mais les Egyptiens étoient venus au-devant pour leur fermer les paffages, & l'approche de Schirkouh ne permettoit pas que les Francs entrepriffent de les forcer. Le Khalif lui-même avoit imploré la protection de Noureddin; & pour l'engager davantage à venir prendre la défenfe des Mufulmans, il lui avoit envoyé dans les lettres qu'il lui écrivit, des cheveux des femmes de fon férail, pour lui faire voir que toutes ces femmes imploroient fa miféricorde. En même tems Schaour ne Benelathir. pouvant repouffer par la force les Francs, chercha les moyens de les tromper. Il écrivit à Amaury pour lui protefter qu'il fouhaitoit être son ami, mais que tous les Egyptiens étoient irrités contre lui, qu'ainfi il jugeoit plus à propos de faire la paix, & de lui donner une fomme confidérable, de peur que Noureddin ne vînt s'emparer du pays. Milon de Planci homme fort dangereux, qui connoiffoit l'avarice outrée du Roi Amaury, engageoit ce Prince à recevoir cet argent. Les troupes ne fongeoient qu'au pillage du Caire, & murmuroient des confeils de Milon; Amaury qui voyoit bien qu'il ne pouvoit prendre cette ville, & que les habitans étoient réfolus de fe rendre à Noureddin, confentit de fe retirer, moyennant un million de piéces d'or, dont une partie feroit payée fur le champ & le refte dans un tems fixé. Schaour en donna d'abord cent mille aux Francs & ils décamperent, mais dans le deffein d'aller lever de plus grandes forces pour revenir auffi-tôt.

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din.

Pendant que Schaour traitoit avec les Francs, le Khalif Apr. J. C. faifoit offrir à Noureddin le tiers des revenus de l'Egypte, & L'an 1168. Noureddin demandoit que Schirkouh y demeurât.Noureddin avoit donné à Cothbed- ce Général une grande quantité de provifions, avec deux cens mille piéces d'or. Son armée étoit compofée de deux mille Cavaliers, & de fix mille Turkomans à cheval; il l'avoit conduit lui-même jufqu'à Ras el ma où il avoit donné de nouveau à chaque Cavalier vingt piéces d'or. Parmi les Emirs qui accompagnoient Schirkouh étoient Azzeddin Dgiawardik, Azzeddin Kilidge, Scherfeddin Bargoufch, Ain eddoulet el Yarouki, Cothbeddin Inal, & enfin le fameux Saladin ; celui-ci ne s'y rendoit que malgré lui. Il ne fçavoit pas alors que lui feul devoit recueillir tout le fruit de cette expédition, & devenir le Souverain de l'Egypte. Les Francs ayant été inftruits de la marche de Schirkouh, fe retirerent auffitôt à Péluse. Le Roi Amaury y laiffa quelques troupes pour la garder & marcha à la rencontre de l'ennemi (a); mais ne l'ayant pas trouvé & ne pouvant plus refter dans ce pays, il reprit le chemin de Pélufe (b), & enfuite celui de la L'an 1169. Syrie. Ce départ caufa beaucoup de joye à tous les MufulBenelathir. mans. Schirkouh entra dans le Caire () & alla faluer le Khalif Adhed, qui le revêtit de la robe d'honneur, & fit beaucoup de préfens à lui & à toute fon armée.

Schaour ne fut pas content de la maniere dont Schirkouh fut reçu par le Khalif, mais la préfence d'une armée l'obligeoit à cacher fon reffentiment, il affectoit même d'aller rendre vifite à Schirkouh, projettant fecretement d'attirer chez lui ce Général avec fes principaux Emirs, & de les arrêter tous; projet qui probablement eut réuffi fans fon fils Kamel qui s'y oppofa, & protefta d'en informer Schirkouh. Envain Schaour lui repréfenta que Schirkouh avoit deffein de les faire périr tous, Kamel lui répondit qu'il valoit mieux périr que de fouffrir que l'Egypte paffât entre les mains des Francs; alors Schaour parut fe défifter d'affaffiner Schirkouh. Pendant que Schaour étoit occupé de ce projet, il s'en formoit un pareil dans le champ de Schirkouh contre le

(a) Le 8 des kalendes de Janvier.
(4) Après les kalendes de Janvier,

(c) Le 7 de Rabi elakher de l'an 564.

Noureddin

Miniftre Egyptien. Les principaux chefs de cette confpira- Apr. J. C. tion étoient Saladin, l'Emir Azzedin Dgiawardik & quel- L'an 1169. ques autres. Schirkouh ne voulut point en être, & s'oppofa Cothbedmême à ce qu'ils l'exécutaffent; mais les Emirs ne lui obéi- din. rent point dans cette occafion, perfuadés qu'il ne les défapprouveroit pas après l'exécution. Ils convinrent que lorf que Schirkouh feroit allé vifiter le tombeau de l'Imam Schafei, & que Schaour se rendroit au camp, ils faifiroient cette occafion pour le faire périr. En effet, un jour que Schirkouh vifitoit ce tombeau, Schaour arriva, les Emirs lui propoferent d'y aller, & comme il étoit peu accompagné, Saladin fut le premier qui l'arrêta, & le tira de deffus fon che→ val; mais perfonne n'ofa le tuer, & on fe contenta de le renfermer fous une tente. Ses domeftiques avoient déja pris la fuite. On informa Schirkouh de tout ce qui venoit d'arriver, il accourut auffi-tôt, & défendit qu'on le tuât; mais le Khalif qui avoit déja appris que Schaour étoit arrêté, envoya fur le champ demander fa tête, & elle lui fut portée auffi-tôt (a). Schirkouh entra alors dans le Caire. Il fut étonné de fe voir invefti par la populace; il craignoit qu'elle n'attentât fur lui. Pour s'en débarrasser il ordonna de la part du Khalif d'aller piller le Palais de Schaour, ce qui fut exécuté. Il continua fa route en liberté, & arriva auprès d'Adhed qui le fit fon grand Vizir, Commandant de ses troupes, & lui donna le titre de Malek el manfor, c'est-à-dire, de Roi victorieux.

Schirkouh prit poffeffion de ces grandes charges, & ne rencontra aucun compétiteur. Il alla loger dans le palais des Vizirs. Enfuite il fit des largeffes aux troupes qui l'avoient accompagné; mais il fut à peine élevé aux plus hautes dignités, qu'il tomba malade & mourut (b). Il n'avoit gouverné l'Egypte en qualité de Grand-Vizir, que pendant deux mois & cinq jours. En paffant dans ce pays, & en s'y établiffant, il n'avoit pas ceffé de fe regarder comme fujet de Noureddin & fon Lieutenant dans l'Egypte. Après la mort la plupart des Emirs briguerent fa place auprès du Khalif,

(a) Le 27 de Rabi elakher. l'an 564 (6) Le 22 de Dgioumadi elakher de

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