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fe

L'an 1170.

din.

hafen.

Alep, fon frere Cothbeddin Maudoud Roi de Mouffoul mourut (a) de la fiévre dont il avoit été attaqué. Il étoit âgé Apr. J. C. d'environ quarante ans, & avoit régné vingt-un & cinq mois. Noureddin Il fut regretté de tous ses sujets, il ne ceffoit de leur faire Cothbeddu bien, & quand on lui représentoit fa trop grande facilité Benelathir. à cet égard, il répondoit que perfonne n'y étoit plus obligé Behaddin. qu'un Roi. Il aimoit également les grands & les petits, par- Aboulfedha donnoit facilement, traitoit fes Officiers avec douceur, Aboulmaplaifoit à les enrichir, dans la crainte qu'ils ne le fiffent euxmêmes, prévenoit ceux qui avoient befoin de lui, les fecouroit promptement dans leurs befoins, & faifoit rendre la juftice à tout le monde. Il avoit toujours vécu en bonne intelligence avec fon frere, l'avoit fouvent fecouru d'hommes & d'argent, & avoit permis par amitié pour lui qu'on fit la priére publique en fon nom, dans fes Etats. Il l'avoit accompagné au fiége de Harem & de Paneas. Avant que de mourir il ordonna que fon fils aîné Emadeddin zenghi, qui avoit épousé la fille de Noureddin, lui fuccédât. Mais le premier Miniftre du Royaume, nommé Phakhreddin abdolmefih, qui craignoit de perdre fon autorité fous un Prince trop attaché à Noureddin, fon ennemi déclaré, convint avec la Khatoun ou la Reine, fille d'Houfameddin Timourtafch, que le lendemain ils affembleroient tous les Emirs & feroient prêter ferment de fidélité pour fon fils Seifeddin.

Aufli-tôt que cela eût été exécuté, Emadeddin vint im- Seïfeddin. plorer le fecours de Noureddin. Ce Prince irrité de cette conduite du Miniftre, partit fur le champ de Tell-bascher, passa l'Euphrate au château de Dgiaber, & alla à Racca qu'il prit (6) après une légere réfiftance de la part du Gouverneur. Il s'empara enfuite de Khabour & de Nefibin (c). Il attendit dans cette derniere ville le refte de fes troupes qui venoit le joindre, car il n'avoit pris avec lui qu'un camp volant, mais il avoit eu l'attention d'en laiffer une partie confidérable dans la Syrie, pour réfifter aux Francs. Ñoureddin (d) Mohammed, Roi du Diarbekr, le joignit en cet en

(a) Le 22 de Dzoulhedgé de l'an 565. (b) Au commencement de Mouharram de l'an 566.

(c) Sur la fin du même mois.
(d) Fils de Cara arflan.

L'an 1170.

droit avec fon armée, alors Noureddin alla faire le fiége Apr. J. C. de Sandgiar où il y avoit une nombreuse garnifon. Dans le Noureddin tems qu'il étoit campé devant cette ville, il reçut des lettres, Seifeddin. de quelques Emirs de Mouffoul, par lefquelles ils le pref

Benelathir.

Bohaeddin.

foient de fe rendre vers cette capitale qu'ils offroient de lui remettre; mais il ne voulut point abandonner le fiége de Sandgiar qu'il prit peu de tems après (a), & qu'il remit à fon neveu Emadeddin Zenghi. Ensuite il marcha vers Mouffoul, & vint camper à l'Orient de cette ville, proche la fortereffe de Ninive. Il n'étoit féparé de Mouffoul que par le Tigre. Phakhreddin avoit envoyé demander du fecours à Ildighiz Roi du Dgebal, de l'Adherbidgiane & de Arran. Celui-ci avoit voulu ufer d'autorité envers Noureddin, en lui. faifant défendre de fe rendre à Mouffoul, fous prétexte, difoit-il, que cette ville appartenoit au Sulthan, & qu'il ne devoit par conféquent y avoir aucune autorité. Noureddin reçut ces lettres à Sandgiar où il étoit encore, & n'y fit aucune réponse. Il fe contenta de dire à l'Envoyé que les affaires de fes neveux l'intéreffoient plus qu'elles ne devoient intéreffer Ildighiz: Votre Prince, ajoûta-t-il, feroit mieux pour le bien des Musulmans, d'empêcher les incurfions des Géor giens, comme j'arrête celles des Francs en Syrie..

Noureddin commença le fiége de Mouffoul, mais comAboulfedha me il avoit pour lui la plupart des Emirs, la milice & les habitans, il ne fe donna aucun combat, & Phakhreddin qui connut qu'on avoit deffein de rendre la ville malgré lui, demanda la paix. Noureddin lui fit fçavoir que fon deffein étoit de l'emmener en Syrie, & qu'il n'étoit point venu pour prendre les Etats de fes neveux, mais pour les leur conferver. La paix fut fignée, & Noureddin entra dans Mouffoul (b). Il demeura pendant quelque tems dans le château, confirma Seif eddin ghazi dans la poffeffion de cette ville & du Dgeziret ben omar, donna le gouvernement. du château à Saadeddin kamfchteghin un de fes Officiers, partagea les autres villes du Royaume de Mouffoul entre fes neveux. Seifeddin fut reconnu par le Khalif Mostadhi, (b) Le 13 de Dgioumadi elaoual de: l'an 566.

(a) Dans le mois Rabi elakher de l'an 3660

Apr, J. C.

& en reçut une robe d'honneur avant même qu'il fût entré dans Mouffoul. Noureddin y fit bâtir une belle mosquée L'an 1170. qu'il appella de fon nom Nouri. Il refta pendant vingt Noureddin. jours dans cette ville, & s'en retourna enfuite dans fes Seifeddin. Etats, accompagné de Phakhreddin auquel il donna des terres. A fon départ de Mouffoul quelqu'un lui dit qu'il paroiffoit aimer cette ville & avoir envie d'y demeurer; il répondit que cela étoit vrai, mais qu'il ne pouvoit le faire fans injuftice; que d'ailleurs il étoit néceffaire qu'il reftât fur fes frontieres, afin de contenir les Francs.

Saladin fon Lieutenant dans l'Egypte n'étoit pas moins Guillaumo ardent que lui à porter la guerre dans la Syrie. Il venoit de Tyre de raffembler (a) les troupes de l'Egypte & de Damas dans le deffein d'entrer dans la Palestine. Le Roi Amaury se rendit auffi-tôt à Ascalon où il apprit que Saladin avoit affiégé le château de Daroun, & qu'il étoit prêt de s'en emparer. En effet, Anfel de Paff qui en étoit le Gouverneur, étoit déja convenu de fe rendre s'il ne recevoit pas le jour même du fecours. Amaury partit de Gaza, qui n'étoit éloignée que de quatre milles de Daroun. Saladin s'étoit déja avancé, vint à fa rencontre, le défit & entra dans la ville de Gaza ; mais n'ayant pu prendre la citadelle, il retourna vers Daroun, où il refufa le combat que les Francs lui préfenterent, & reprit le chemin de l'Egypte. Le château de Daroun dont il s'agit ici étoit la derniere place que les Francs poffédoient du côté de l'Egypte. C'étoit anciennement un Monaftere des Grecs, d'où lui vient le nom de Dar-roum, & ensuite Daroun; Amaury l'avoit fait fortifier, & y avoit mis quelques troupes..

Noureddin de fon côté entra auffi (b) dans le pays des L'an 1171 Francs. Ceux-ci malgré la paix qu'ils avoient faite avec lui, Benelashire· s'étoient emparés de quelques vaiffeaux qui alloient d'Egypte en Syrie; Noureddin les avoit fait redemander, ainsi que toutes les marchandises dont ils étoient chargés. Mais n'ayant reçu d'eux que des réponses peu fatisfaifantes, il envoya différens partis, les uns vers Antioche, les atres

(a) Au mois de Décembre, la feptieme année d'Amaury.

(6) Dans le mois Mouharram de l'ar 567.

l'an 171.

Seifeddin.

Tripoli pendant qu'il alla attaquer le château d'Arca. II Apr. J. C. ruina fes fauxbourgs, & détacha de-là quelques troupes qui Noureddin allerent prendre Saphia & Arima; il fit enfuite le ravage dans les environs de Tripoli, alors les Francs lui firent fçavoir qu'ils étoient prêts de renouveller la trêve & de rendre ce qu'ils avoient pris; Noureddin y confentit, mais ils ne remirent pas tout, & les Musulmans perdirent confidérablement.

Benelathir.

Aboulma

hafen,

Saladin étoit alors de retour en Egypte où il étoit le maître abfolu. Noureddin crut qu'il étoit tems (a) d'enlever au Khalif la seule marque d'autorité qui lui reftoit dans ce pays, c'est-à-dire, de faire retrancher fon nom de la priere publique, & d'y fubftituer celui de Moftadhi Khalif de Bagdad. Lorfque Saladin recur cet ordre, il s'excusa d'abord de l'exécuter, dans la crainte que les Egyptiens qui étoient attachés au parti d'Aly dont les Phathimites fuivoient la doctrine, ne fe révoltaffent. Mais Noureddin lui ayant envoyé de nouveaux ordres de le faire, il affembla les Emirs, & leur demanda conseil fur une affaire fi importante. Quelques-uns jugerent que cette entreprise étoit trop hardie, d'autres promirent de la foutenir; un Perfan nommé Emir Alam fe préfenta, & dit qu'il la commenceroit. En effet, le premier Vendredi de Mouharram, il monta fur la tribune avant le Khatib, & fit la priere au nom du Khalif de Bagdad. Perfonne ne parut s'y oppofer; alors Saladin ordonna à tous les Khatibs de Mefr & du Caire de s'y conformer le Vendredi fuivant; toute l'Egypte obéit enfuite, & rentra par ce moyen fous la jurifdiction du Khalif de Bagdad dont elle avoit été féparée depuis long-tems. Le Khalif Adhed (b) étoit malade. Perfonne ne jugea à propos de l'inftruire de ce qui venoit d'arriver, parce qu'on ne vouloit pas troubler le peu de jours qui lui restoient à vivre suivant les apparences. Il mourut comme on l'avoit prévû peu de tems après. Si Saladin lui conferva la vie, il ne fut pas affez généreux pour le laiffer en paix. Il étoit d'une avidité fi infatiable, que ce Khalif n'ayant plus qu'un feul cheval avec lequel il fe

(a) L'an 567 de l'Hegire.

(b) Guillaume de Tyr accuse fauffe

ment Saladin de l'avoir tué.

L'an 1171.

promenoit dans fes jardins, Saladin l'obligea de le donner. Tel étoit Saladin, avare, ambitieux, fourbe & hardi, dans Apr. J. C. le tems qu'il n'étoit que fimple Emir, & grand Prince quand Noureddin il fut Roi.

Saladin fe faifit auffi-tôt du Palais; avant même la mort du Khalif il avoit chargé un Eunuque nommé Bohaeddin cara-cousch de veiller fur toutes les richeffes qui y étoient. Les enfans & les parens du Khalif Adhed furent arrêtés & renfermés dans un endroit du palais; fes domeftiques furent vendus ou donnés. Il y avoit dans ce Palais des richeffes immenfes, en perles, en pierreries & en autres chofes femblables. Saladin y trouva une bibliothéque qui montoit à cent mille volumes choifis & bien écrits. Avec Adhed finit la puiffance des Khalifs Phathimites, qui avoient régné pendant 266 ans, & poffédé l'Egypte pendant 208 ans. Noureddin fit informer (a) le Khalif Moftadhi de ce grand évenement, & ce Khalif pour le remercier envoya un des premiers de fa

Cour nommé Emadeddin Sandal avec une robe d'honneur & deux épées pour Noureddin, l'une défignoit fon pouvoir fur la Syrie, & l'autre fur l'Egypte. Saladin eut auffi une robe, & fut nommé par le Khalif Lieutenant de Noureddin en Egypte. On ajouta une pièce d'étoffe noire pour mettre fur la tribune du Caire. Le noir étoit la couleur des Khalifs Abbaffides.

Saladin n'ayant plus de Prince en Egypte capable de lui porter ombrage commença de fe laffer du fimple titre de Lieutenant de Noureddin, il auroit voulu devenir indépendant, & n'obéiffoit qu'avec peine. Il craignoit encore plus d'être obligé de quitter l'Egypte pour fe rendre auprès de Noureddin. Ce Prince venoit de lui ordonner de raffembler toutes les troupes de ce pays, & de le joindre pour aller faire le fiége de Krak ou la Pierre du défert, capitale de la feconde Arabie. Saladin parut disposé à obéir & fortit du Caire (b), Noureddin inftruit de fon départ fortit de Damas, & fe rendit à Krak où il attendit inutilement les troupes Egyptiennes ; Saladin lui fit fçavoir par un courier

(a) L'Envoyé étoit appellé Schehab fils d'Abou afroun. eddin el mathhar, fils de Scharfeddin,

(d) Le zo de Mouharram de l'an 567

Seifedding

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