Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Apr. J. C.
Sollman.

dad, ordonna à Soliman, fils de Coutoulmifch (a) fon parent, de fe rendre à la tête d'une armée dans les pays qui s'étendent depuis la Syrie jufqu'au Bofphore. Toutes ces Provinces dont il alloit faire la conquête devoient appartenir à Soliman, & former un nouvel Empire des Seljoucides, relevant de celui des Sulthans de Perfe. Cette partie de l'Empire Grec déja ruinée par les fréquentes incurfions des troupes des Khalifs, & enfuite par celles que plufieurs bandes de Turcs venoient d'y faire, ne résista pas long-tems aux efforts de cette nouvelle armée. Soliman parvint fans beaucoup de peine jufqu'à Nicée dont il s'empara. Cette ville autrefois fi célèbre par les Conciles que les Chrétiens y ont tenus, & qui étoit la capitale de la Bithynie, devint la capitale de l'EmAnne Com pire Turc (6), & vit fes Eglifes changées en Mofquées. Elle fervit alors de retraite aux partis Turcs, qui fe répandirent delà dans toutes les provinces voifines, & qui oferent s'avancer jusques sur le bord de la mer, vis-à-vis de Conftantinople. Alexis Comnène qui y régnoit, allarmé de l'approche de ces L'an 1081. Etrangers, envoya contre eux une armée ; les Grecs victorieux obligèrent les Turcs de quitter la Bithynie, & Soliman fut contraint de demander la paix, que l'Empereur Grec, qui étoit menacé d'une nouvelle guerre du côté de l'Occident, défiroit également. Elle fut fignée fans aucun délai de part & d'autre; mais les Turcs qui ne cherchoient qu'à faire de nouveaux éta◄ bliffemens, & à qui par conféquent la paix n'étoit point avantageufe, ne garderent les Traités qu'autant qu'il leur falloit de tems pour réparer leurs forces, & recommencerent auffi-tôt guerre (c). C'eft depuis ce tems-là que tous les pays dont ces peuples ont fait la conquête ont porté le nom de Turquie M. Paulo. chez les Hiftoriens.

nene.

Haiton.

la

(a) C'eft lui que nos Hiftoriens nomment Cotloumofes, Coutloumous, & Coutloumé. Il étoit fils d'Ifrail, qu'Aboulfedha nomme Arflan, fils de Seldgicuk. Voyez fa mort dans l'Histoire des Seljoucides de Perfe, à l'an 455 de P'Hegire.

(b) Les Hiftoriens Grecs & ceux des Croisades, donnent le nom de Perfans à tous ces Turcs, parce que ces peuples étoient venus du côté de la Perfe. On

les a appellés dans la fuite Sulthans d'Iconium, parce que cette ville devint leur capitale. Joinville les nomme Sulthans de Comue, pour Conie ou Iconium.

(c) Tangri-bardi, Hiftorien Arabe, dit que l'an 475 de l'Hegire, de J. C. 1082, Soliman enleva aux Grecs le château d'Antharfous, & qu'il y établit un Cadhy. Cet Auteur oublie qu'il avoit attribué cette conquête à Toutoufch, Roi de Damas, à l'année antérieure.

L'an 1081.

Un Auteur contemporain qui en fait la defcription, nous apprend que ce Royaume étoit fort grand ; qu'il abondoit en Apr. J. C. mines d'argent, de fer, de cuivre & d'alun ; en fruits, en vin, Soliman. en toute forte d'animaux, & particulierement en bons che- Haiton vaux. Du côté de l'Orient il étoit alors borné par la grande Arménie & par une partie du Royaume de Georgie. Il s'étendoit du côté de l'Occident jusqu'à la ville d'Attalie qui est fituée fur le bord de la mer. Il n'avoit d'autres limites du coté du Septentrion que la mer noire, & au Midi il étoit borné par la petite Arménie par une partie de la Cilicie, jusqu'à la mer de Grèce, vis-à-vis l'Ifle de Chypre. Tout ce pays foumis auparavant aux Grecs, & depuis aux Turcs, étoit divifé en plufieurs provinces, dans lesquelles on trouvoit de très-grandes villes. La premiere province étoit celle de Lycaonie (a), où étoit la ville de Coni capitale du Royaume. La feconde étoit la Cappadoce où étoit Céfarée de Grèce. La troifiéme étoit l'Ifaurie (b), où l'on trouvoit la ville de Séleucie. La quatrième étoit la Phrygie (c), dans laquelle étoit Zichia de Grèce. La cinquiéme portoit le nom de Quifitan (d), & avoit Ephèse pour capitale. La fixiéme étoit la Bithynie, où étoit Nicée. La feptiéme étoit la Paphlagonie, qui avoit pour capitale la ville de Gynapolis; enfin la huitiéme étoit appellée Genech; c'eft-là qu'étoit Trébizonde, ville que les Turcs ne purent foumettre à caufe des places fortes qui étoient dans fes environs.

nène.

Depuis la défaite de l'Empereur Romain Diogène par le L'an 1084. Sulthan Alp-Arflan, Philarete (e) Gouverneur d'Antioche (f), Anne Com que les conquêtes de Soliman dans l'Afie mineure féparoient Aboulfedha du refte de l'Empire, avoit eu affez de confiance dans fes for- Benfchouces pour fe révolter contre l'Empereur, espérant pouvoir se nah. maintenir dans l'indépendance au milieu des Infidéles. Son Soyouthi. ambition le porta plus loin, il fit un nouveau crime pour conferver fon petit Etat, mais il le perdit avec la vie. Les Turcs ne ceffoient de ravager fon territoire, il crut qu'en em

[blocks in formation]

(e) Benelathir le nomme Phardrous, & Aboulfedha lui donne le titre de Hakem.

(f) Appellée Antakia par les Arabes.

Benelathir

L'an 1084.

braffant le Mahométifme, non-feulement il arrêteroit leurs Apr. J. C. courfes, mais encore qu'il trouveroit en eux des défenfeurs. Soliman. Le fils eut horreur du crime que le pere projettoit, & pour en empêcher l'exécution, il eut recours à Soliman auprès duquel il fe renditjà Nicée,& il engagea ce Sulthan à marcher dans la Syrie. Soliman confia la garde de fa capitale à Aboulcafem, & pour mieux cacher fes deffeins, il ne marcha que la nuit. Antioche furprise de le voir à fes portes, fe rendit auffi-tôt (a). Mais elle fut la derniere conquête de ce Prince; cette nouvelle acquifition devint la fource d'une guerre dans laquelle il eut le malheur de perdre la vie.

Scharfeddoulet Mouflim (b) étoit alors maître des villes de Mouffoul & d'Alep. Antioche trop voifine des terres dépendantes de cet Emir, dans le tems qu'elle étoit encore fous la domination de Philarete, avoit été obligée de payer tous les ans un certain tribut, qui affûroit à ce Gouverneur Chrétien la tranquillité du côté du Mufulman. Soliman devenu maître d'Antioche ne fe crut point obligé à la même fervitude, & fes prétentions étoient juftes. Déja poffeffeur d'un grand Empire, parent du Sulthan de Perfe, il eût été honteux pour lui de devenir le Tributaire d'un simple Emir. Celui-ci cependant l'exigeoit. Les deux Princes fe mirent en campagne; Soliman entra le premier fur les terres de Scharfeddoulet, ravagea tout fon pays, & ne fut arrêté que par les plaintes que les habitans lui firent de ces défordres. Comme ils imploroient fa clémence, il crut qu'il étoit du devoir d'un Mufulman de ne point répandre le fang de fes freres; il fit reftituer tout ce qui avoit été pris, accufant Scharfeddoulet d'être l'auteur de cette guerre. Cet acte de générofité ne toucha point l'Emir, qui s'approcha d'Antioche à la L'an 1085. tête des Arabes & des Turcomans pour en faire le fiége. Les Aboulma- deux armées s'étant rencontrées fur les frontieres du territoire hafen. Aboulfedha d'Alep (c), fe livrerent un fanglant combat que les Arabes Tangri- perdirent, & Scharfeddoulet fut trouvé parmi les morts. Soliman se rendit auffi-tôt vers Alep, & fomma Ben-el

bardi.

(a) L'an 477 de l'Hegire.

(b) Il étoit fils de Coraifch, fils de Badrand, fils de Moclab, fils de MouLaib. H poffédoit Mouffoul, Alep, &

autres pays voifins. Il avoit épousé la foeur du Sulthan Alp arflan.

(c) Elles en vinrent aux mains le 24 de Sepher de l'an 478 de 1 Hegire.

Apr. J. C.
L'an 1085.

khatini (a) qui y commandoit pour Scharfeddoulet, de lui remettre cette place. L'ambition avoit alors rendu tous les Princes Seljoucides Soliman. jaloux les uns des autres. Les Sulthans de Perfe qui formoient la principale branche, prétendoient conferver la fuferaineté fur les autres Princes qui ne tenoient leurs Royaumes que de leur générosité; mais ceux-ci étoient devenus affez puiffans pour être ingrats, & pour chercher à fecouer le joug. Ils étoient venus plufieurs fois aux prifes les uns avec les autres; ainfi il ne fut pas difficile à Ben-el-khatini de trouver du fecours chez les autres Princes Seljoucides. Il s'adressa au Sultan Malek schah qu'il regardoit comme fon Souverain légitime, & à (b) Toutoufch autre Prince Seljoucide établi dans la Syrie. Ce dernier qui étoit le plus voisin, & qui brûloit d'envie de prendre Alep, accourut promptement, fuivi de l'Emir Ortoc, & livra auffi-tôt bataille à l'armée de Soliman qu'il rencontra. Envain le Sulthan de Nicée s'efforça de rallier fes troupes qui prenoient la fuite de toutes parts; obligé de céder & de fuir lui-même, il fe fauva dans un lieu écarté, où quelques Emirs de l'armée ennemie le découvrirent. Ils effayerent de l'engager à les fuivre & à venir fe rendre entre les mains de Toutoufch, lui promettant qu'il n'y avoit aucun danger pour fa perfonne; Soliman ne voulut point y confentir, & lorfqu'il vit qu'on fe préparoit à le forcer, 1 tira fon poignard & fe donna la mort (c). Tel eft le récit l'Anne Comnène; quelques autres Hiftoriens prétendent Anne Com qu'il fut tué dans le combat. Après cette victoire, Alep paoiffoit devoir ouvrir fes portes au Vainqueur; mais Ben-elhatini qui avoit amusé Soliman en fit autant à Toutousch; elui-ci venoit de faire tranfporter le corps de Soliman à Alep dans l'espérance que les habitans fe rendroient à lui. Le Gouverneur gagna du tems, & donna beaucoup de promeffes Aboulfedha n attendant les ordres du Sulthan Malek schah, qui arriverent.

(a) Selon d'autres Manufcrits, Ben hakiki. Il eft furnommé Al abbaff. (b) Fils d'Alp arflan, & frere de Makfchah.

D'Herbelot met fa mort à l'an de l'Hegire, & dit qu'il s'établit ns l'Afie mineure dans l'an 480. Tou

tes ces époques font fauffes, puifque, de
l'aveu de tous les Hiftoriens Arabes,
ce Prince mourut en 478. Ces époques
conviendroient mieux à fon fils Kilid-

ge arflan. Aboulmahafen dit qu'il tom-
ba de cheval, & fut tué.

nène.

Alors Toutoufch n'ofa porter plus loin fes prétentions, & fe Apr. J. C. retira (a).

L'an 1086.

Anne Comnene.

Le bruit de la mort de Soliman répandu dans l'Asie mineure y caufa de grands défordres. Les différens Emirs, qui fous l'autorité de ce Prince gouvernoient les provinces de fon Empire, s'en rendirent les maîtres. Nicée fut envahie par Aboulcafem (b), la Cappadoce par Pulchas, frere de cet Emir; les autres Emirs fuivirent cet exemple, & devinrent autant de petits tyrans, pendant que les enfans de Soliman étoient obligés de fe retirer en Perfe auprès du Sulthan.

Pendant cette efpéce d'Anarchie, Aboulcafem, le plus puiffant de tous ces Emirs, qui fe flattoit de pouvoir bientôt prendre le titre de Sulthan, ne tarda pas à venir faire des courfes fur les terres des Grecs, il s'avança jufqu'à la Propontide. Le fuccès ne répondit point à fes projets ambitieux, Alexis Comnène l'obligea d'écouter des propositions, de paix, que le Turc qui mettoit fon efpérance dans fes rufes, différoit de jour en jour d'accepter; il fallut que l'Empereur de Conftantinople envoyât le Général Taticius faire. le fiége de Nicée. Les Grecs s'approcherent des murailles fans obftacles, & fe difpoferent à en faire l'efcalade, lorfque les Turcs qui avoient gardé jufqu'alors un profond filence firent une fortie. Les Francs qui étoient dans l'armée Grecque les reçurent avec leurs longues lances, & les obligérent à rentrer dans la ville. Pendant cette action Taticius fe tenoit en ordre de bataille; mais après la retraite des Turcs il fe retira vers Basilée, environ à douze ftades en-deçà de Nicée.

Le Général des Grecs étoit encore campé auprès de cette ville, lorfqu'il apprit que le Sulthan Malek schah (c) venoit d'envoyer (d) dans l'Afie mineure Akfancar (e), furnommé Bourski, à la tête de cinquante mille hommes; ne croyant pas alors devoir attendre cette armée qui étoit fupérieure à la sienne, (a) L'an 479 de l'Hegire.

(b) Anne Comnène, qui rapporte cet événement & les fuivans, le nomme Apelchafem. Les noms de tous ces Emirs font corrompus, & je n'ai aucun Hiftorien Oriental pour les rectifier.

(c) Il y a dans Anne Comnène Ber

kiarok, mais il faut y fubftituer Malek fchah.

(d) L'an 479 de l'Hegire.

(e) Il ne faut pas le confondre avec un autre Acfancar, furnommé Cafim eddoulet, pere d'Emadeddin zenghi.

« AnteriorContinuar »