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revenir. L'Empereur qui ne put continuer le fiége, fe retira Apr. J. C. à Rhyndace où il laiffa fon armée en quartier d'hyver. Au L'an 1136. printems prochain il revint prendre Caftamon, & enfuite Mafoud I. faire le fiége de Gangra. La garnison Turque avoit été informée que le Sulthan raffembloit une armée confidérable auprès de Rhyndace pour venir au fecours; dans cette espérance elle refufa de rendre la place, mais quelque tems après, ne voyant arriver aucune troupe, elle évacua Gangra, à condition que les Grecs rendroient tous les prifonniers qu'ils avoient faits autrefois fur le fils de Danifchmend. Les Grecs Nicet chons ne la garderent pas long-tems; elle fut reprise par l'armée Turque dans le tems qu'ils étoient occupés ailleurs.

Quelques années après le Sulthan Masoud, pendant que L'an 1138. l'Empereur Jean Comnène faifoit la guerre aux Francs qui Cinnamus. étoient en Syrie (a), alla ravager les terres de l'Empire. Nice chon.. Ifaac Sebaftocrator, frere de l'Empereur, s'étoit retiré à Iconium auprès du Sulthan, à l'occafion de quelques mécontentemens, mais il ne refta pas longtems dans cette Cour. Après le voyage de Syrie il fe réconcilia avec Jean Comnè- L'an 11320 ne, qui en traversant l'Afie mineure avoit envoyé un détachement pour combattre les Turcs; précaution de l'Empereur qui ne put empêcher que le Sulthan ne l'inquiétât pendant toute fa marche. Andronic Comnène & Théodore Dafiotes furent même faits prifonniers & conduits à Iconium, & les Turcs continuerent de ravager les campagnes qui font le long du fleuve Sangar.

L'Empereur Jean Comnène, quoique malade, fut obligé 'de venir au fecours de ces Provinces. 11 chaffa les Turcs & revint à Lopades, où il refta jufqu'au printems prochain. Il avoit réfolu d'aller faire la guerre aux Turcs qui avoient envahi l'Arménie, & à Conftantin Gabras qui depuis long-tems s'étoit rendu maître de Trébizonde. Son deflein étoit de fuivre les côtes maritimes, afin de pouvoir faire venir en tout tems des fecours & d'avoir une retraite affurée en cas de befoin. Le Roi de Cappadoce nommé Mohammed avoit fait alors la conquête d'une partie de l'Ibérie, & de plufieurs

(a) L'an 532 de l'Hegire

L'an 1140

L'an 1140.

places de la Méfopotamie. Ses troupes paffoient pour les Apr. J. C. plus braves de l'Afie. L'Empereur vint camper à Kinta, ville Mafoud I. du Pont, & de-là envoya plusieurs corps d'armée fur les terres de Mohammed; mais ce Prince ayant eu le malheur de perdre tous les chevaux qui devoient remonter fa cavalerie & porter les bagages, les vivres commencerent à lui manquer. Les Turcs ne ceffoient de le harceler, & fuyoient auffi-tôt ; Jean Comnène étoit obligé de leur oppofer fes meilleurs lanciers. Dans cet état il parvint jufqu'auprès de Néocéfarée, où il effuya de plus en plus les attaques des Turcs. Il fe feroit cependant rendu maître de cette place fans la révolte de fon neveu Jean Comnène, fils d'Ifaac Sebaftocrator, qui dans le tems qu'on alloit en venir aux mains, paffa du côté des Turcs, & peu après embraffa le Mahométifme, & épousa la fille du Sulthan Mafoud. Ce contre-tems obligea l'Emperereur de se retirer à la hâte, & de peur d'être inquiété dans fa retraite, de gagner le bord de la le bord de la mer, & enfuite Conftantinople, d'où quelque tems après il revint près de Rhyndace à la tête d'une nouvelle armée. Au printems fuivant il fe rendit à Attalie pour obferver les Turcs qui s'étoient emparés de plufieurs endroits voifins du marais Pufgufa. Les Chrétiens qui habitoient dans les Ifles que forme ce marais, s'étoient joints aux Turcs. L'Empereur qui voulut les attaquer, fut repouffé, perdit tout fon bagage dans les eaux, & ne put obliger les Turcs à lever le fiége de Sozopolis.

L'an 1142.

radge.

Le Sulthan Masoud n'étoit pas moins heureux du côté de Aboulfedha l'Orient; Mohammed Roi de Cappadoce venoit de mourir, Aboulfa- (a) & quoiqu'il laiffât plufieurs enfans, Mafoud s'empara d'une grande partie de fon pays. A peu près vers le même tems, l'Empereur Jean Comnène mourut auffi. Mafoud, penL'an 1143. dant que Manuel Comnène fe faifoit couronner à ConftantiNicet chon. nople, ravageoit les Provinces de l'Empire. Le nouvel Empereur qui étoit malade, fut obligé de paffer en Afie; il battit les Turcs aux Mélangines, & il paroît que les deux Nations firent la paix; mais les Turcs la rompirent auffi-tôt, vinrent affiéger Pitheca & piller Tracefium. Manuel Com

Cinnamus.

(a) L'an 537 de l'Hegire.

L'an 1143.

nène qui s'avança contre eux, traverfa la Lydie, les mit en fuite & délivra toutes les villes de la Phrygie jufqu'au Méan. Apr. J. C. dre. Il battit Mafoud près de Philomele, prit cette ville, & Mafoud L. remit en liberté plufieurs prifonniers Grecs qui étoient retenus depuis longtems. Le Sulthan avoit fui, Manuel Comnène lui écrivit pour lui reprocher fa lâcheté. Cette démarche ne fervit qu'à faire revenir Mafoud fur fes pas. Il fe campa dans un lieu nommé Andrachma, & l'Empereur alla fe pofter à Groeta. Dès le lendemain les deux armées fe livrerent une fanglante bataille, Mafoud fut vaincu & ne ceffa de fuir jufqu'à ce qu'il fut arrivé à Iconium. Il n'ofa même s'arrêter dans cette ville; content d'y jetter quelques troupes, il fe fauva dans les montagnes; là il divifa fon armée en deux corps, il en plaça un derriere Iconium, & avec l'autre il alla fe pofter entre cette ville & le château de Cabala. L'Empereur le fuivit jusques dans cette retraite, & l'obligea de décamper. Pendant que Manuel Comnène étoit occupé à la pourfuite de Mafoud, le refte de l'armée Grecque s'étoit engagé dans des défilés où la garnifon d'Iconium le vint furprendre, les Grecs alloient être enveloppés de toutes parts fans l'arrivée des fecours que l'Empereur envoya à propos. Les Turcs avoient toujours l'avantage, & l'Empereur pour fauver cette partie de fon armée, fut obligé d'y venir en perfonne. Malgré fa préfence les Grecs étoient prêts de fuccomber; Manuel Comnène fit répandre le bruit que le Sulthan avoit été tué. Cette nouvelle, quoique fauffe, jetta l'allarme parmi les Turcs, ranima le courage des Grecs qui firent de nouveaux efforts, & obligerent enfin les Turcs à fe retirer. L'Empereur alla fe préfenter devant Iconium pour en faire le fiége; mais fur le bruit qui courut alors que le Sulthan paroiffoit avec de nouveaux fecours, il décampa, en mettant par-tout le feu, Mafoud le fuivit, & furprit les Grecs dans un endroit où ils n'avoient pas la liberté de s'étendre; les Grecs s'y retrancherent, la témérité de l'Empereur penfa caufer leur perte. Ce Prince s'étoit approché des Turcs avec un fi petit nombre de perfonnes, que peu s'en fallut qu'il ne fût pris. L'armée Grecque continua enfuite fa route & revint à Conftantinople, après avoir été infultée pendant toute sa marche par les Turcs.

Manuel Comnène fe difpofoit à une nouvelle expédition, Apr. J. C. & il étoit déja arrivé à Rhyndace, fe propofant d'aller affiéger Mafoud I. Iconium, quand le Sulthan Mafoud lui envoya une AmbassaCinnamus. de à la tête de laquelle étoit un Emir appellé Soliman. Il de

L'an 1143.

mandoit la paix & offroit de rendre la ville de Pracana & plufieurs autres places. L'Empereur y confentit & la paix fut fignée. Depuis plufieurs années l'Afie mineure n'avoit pas été expofée au paffage de ces grandes armées Chrétiennes qui alloient dans l'Orient à la défense de la Terre Sainte; & Mafoud renfermé dans fes Etats n'avoit eu des guerres à foutenir L'an 1144. que contre les Empereurs de Conftantinople, ou contre les Princes Mufulmans voifins de l'Euphrate. Roha, autrement Edeffe, une des plus fortes places que les Francs poffédaffent en Orient, & qui étoit un territoire confidérable dont Jofcelin étoit maître fous le titre de Comte, lui fut enlevée (a) par Emadeddin Zenghi, Roi d'une branche de Turcs établie à Mouffoul. La perte de cette ville confterna tous les Francs de la Syrie, & ranima le zele des Chrétiens d'Occident; elle donna naiffance à une nouvelle Croifade, & le Sulthan Mafoud fut obligé de nouveau de combattre les armées des Francs, pour les empêcher de paffer à travers fes Etats. L'Empereur Conrad & Louis VII. dit le jeune, Roi de France, excités par les difcours de S. Bernard, Abbé de Clairse croiferent, & fe rendirent dans la Bithynie. L'armée Nicet chon. de l'Empereur Conrad étoit compofée de foixante-dix mille cuiCinnamus. raffiers, de beaucoup d'infanterie, de cavalerie légere & d'un L'an 1147. grand nombre de femmes & d'enfans. Celle du Roi de France avoit un pareil nombre de cuiraffiers & une infinité d'autres troupes. L'Empereur Manuel Comnène & le SulthanR Mafoud, également mécontens de l'arrivée de ces Chrétiens, fe réunirent pour les faire périr. Mafoud raffembla de tous côtés des fecours, fit réparer fes places, & s'empara de tous les défilés. Manuel Comnène, en qualité de Prince Chrétien, ne fe déclaroit pas ouvertement contre les Chrétiens, il laiffoit agir le Musulman, & s'entendoit avec lui. Conrad qui s'étoit mis le premier en marche arriva à Dorylée fans

Guillaume de Tyr.

vaux,

(a) L'an 539 de l'Hegire, dans le mois Dgioumadi elakher.

aucun

Apr. J. C.

aucun évenement fâcheux. Mais ce fut là que la fourberie de l'Empereur Grec commença à fe manifefter. Les guides que l'an 1147. Manuel Comnène avoit donnés à Conrad, le conduifirent par Mafoud i. les chemins les plus difficiles, & enfuite l'abandonnerent. Čes Grecs fe rendirent au camp des François, & affurerent à Louis le Jeune que Conrad ayant battu les Turcs & pris Iconium il n'avoit pas besoin de fecours. Ainfi les François ne fe hâterent pas de continuer leur marche, pendant que les Allemands avançoient toujours à travers des pays dont ils ignoroient les chemins & où ils manquoient de chevaux & de bagages. Dans le tems que ceux-ci étoient le plus accablés de fatigues, les Turcs parurent, ils étoient commandés par l'Emir Pamplan, que le Sulthan avoit envoyé. Ils livrerent plufieurs combats aux Allemands, & en tuerent un fi grand nombre, qu'à peine il en échappa la dixieme partie. Conrad avec quelques-uns de fes gens regagna l'armée Françoise.

Ce Prince & le Roi de France marcherent ensemble juf- L'an 1148, qu'à Philadelphie, d'où Conrad partit. pour Conftantinople, & le Roi gagna les bords du Méandre. Il y trouva les Turcs, qui après avoir mis en lieu de sûreté tout le butin qu'ils avoient fait fur les Allemands, étoient accourus pour disputer aux François le paffage du fleuve. Louis en fit un grand carnage, & parvint à Laodicée. Il étoit d'ufage dans ces fortes de marches de faire précéder & fuivre le gros de l'armée par deux corps de troupes, pour obferver les démarches de l'ennemi, & le repouffer en cas d'attaque. On décidoit ordinairement avant que de partir, en quel lieu on devoit camper. Le jour que Godefroy de Rancun commandoit l'avant-garde, on avoit choisi une haute montagne. Rancun s'y rendit de bonne heure, mais voyant qu'il y avoit encore affez de jour pour gagner un autre endroit affez éloigné & plus commode, il continua fon chemin, fans en donner avis à l'armée. Le Roi d'un autre côté qui fe voyoit affez près de la montagne ne se hâta pas de s'y rendre. Par-là les deux troupes fe trouverent dans une assez grande distance l'une de l'autre ; les Turcs s'en apperçurent, & vinrent fondre auffi-tôt fur le gros de l'armée. Il fe donna un combat très-fanglant, la plus grande partie des François y périt; le Roi ayant heureufement gagné l'avantTom. II. Part. II.

F

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