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AN.1100.

Can. 1.

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fteroit dans fon opiniâtreté. Il n'obéit point; & garda l'étole & l'anneau mais les chanoines fe mirent en poffeffion des biens de l'évêché, malgré l'Archevêque de Lion, qui defaprouvoit le jugement des legats, comme rendu au préjudice de fon autorité contre les canons.

En ce concile de Poitiers on fit feize canons, qui portent. Qu'il n'y aura que les Evêques qui donnent la tonfure aux clercs & les Abbez aux moines; & qu'on n'exigera pour cette fonction ni cifeaux ni ferviettes. On défend de même d'exi7. ger aucun repas pour la collation des prebendes ni des chapes, des tapis, des bacins ou des fervittes pour le facre des Evêques ou la benediction des Abbez. L'Evêque feul benira les ornemens facerdotaux ou les vafes facrez. Les moines ne porteront point de manipule s'ils ne font foudiacres. Les Abbez ne porteront ni gans, ni fandales, ni anneaux, finon par privilege du 8. faint Siege. Défenfe d'accorder l'inveftiture d'une prébende ou d'une Eglife du vivant du poffeffeur. Défense aux clercs de rendre hommage à aucun laïque, ou de recevoir de lui aucun benefice ecclefiaftique. Il eft permis aux chanoines reguliers de baptifer, prêcher donner la penitence ou la fepulture par ordre de leur 11. Evêque; mais ces fonctions font défendues aux moines. On n'admettra point à la prédication 12. ceux qui portent des reliques pour quêter. Défenfe aux avoüez ou à qui que ce foit, de s'attribuer les biens de l'Evêque, foit pendant fa vie, foit après fa mort, fous peine d'anathême. L'affaire la plus importante qui fût traitée au concile de Poitiers, fut celle du Roi Philippe. Chr. Vird. Après le concile de Valence, les deux legats Jean p. 160, & Benoît l'allerent trouver, & firent tous leurs efforts pour lui perfuader de fe corriger mais n'en ayant plus aucune efperance, ils pronon

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100. ep. 95.

100.

cerent

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cerent l'excommunication contre lui à la fin du concile. Le Duc d'Aquitaine y étoit préfent. C'étoit Guillaume IX. Comte de Poitiers, de Gascogne & de Touloufe: qui s'oppofa tant qu'il pût à cetre censure, tant pour l'honneur du Roi fon Seigneur que pour fon propre interêt car fa vie étoit encore plus fcandaleufe. Il pria donc les legats de n'en pas venir à cette extremité, & plufieurs Evêques les en prierent avec lui. Ne pouvant l'obtenir il fortit du concile avec fes gens, faifant de grandes menaces : quelques Evêques fortirent auffi avec plufieurs clercs & encore plus de laïques, ce qui caufa un grand tumulte. Alors, les legats & les Prélats qui restoient, prononcerent l'excommunication contre le Roi Philippe & contre Bertrade. Enfuite on fit les acclamations ordinaires pour la conclufion du concile : pendant lefquelles le tumulte augmentant toûjours, un homme du peuple, qui étoit aux galeries hautes de l'Eglife, jetta une pierre voulant fraper les legats. Mais elle donna fur un clerc qui eut la tête caffée & tomba fur le pavé, où l'on vit couler fon fang. Il s'éleva de grands cris dans l'Eglife, & le bruit étoit encore plus grand au dehors. Toutefois les legats demeurerent fermes; & ôterent même leurs mitres, pour montrer combien ils craignoient peu les pierres qui voloient. Leur fermeté arrêta la fureur des feditieux : les Comtes même & les autres qui avoient infulté les legats leur firent fatisfaction. On remarqua en cette vita Bern. occafion le courage de deux faints Abbez Ber-6. Boll. 14. nard Abbé de faint Cyprien de Poitiers & Ro- Apr. to. 10. bert d'Arbriffelles dont j'ay déja parlé. Cette p 133. excommunication du Roi fit une telle impref- Sup. liv. fion fur les efprits, qu'étant venu quelque tems après à Sens avec la Reine Bertrade, pendant quinze jours qu'ils y féjournerent, on tint fer

mées

LXIV.N.34.
Chr. Vird

P. 260.

IX.

mées toutes les Eglifes de la ville, & ils ne fu-
rent admis à aucun acte de religion. De quoi
Bertrade irritée, envoya rompre la porte d'une
Eglife &
y fit dire la meffe par un de fes cha-
pelains.

Bernard qui avoit été élu la même année Commen- Abbé de faint Cyprien de Poitiers, nâquit dans cemens de le Pontieu près d'Abbeville de parens vertueux, Bernard de qui le firent étudier dès la jeuneffe; & deflors Tiron. il montroit tant de modeftie & de pieté, que Gaufr a. les autres écoliers le nommoient le moine. Après Boll. to to. la grammaire & la dialectique, il étudia l'Ecrip. 222.6.1, ture fainte, dont il avoit déja une affez grande connoiffance à l'âge de vingt ans : quand le de

Vita per

fir d'une plus grande perfection lui fit quitter

fon païs & paffer en Aquitaine avec trois comSup. liv. pagnons. Ils s'arrêterent au monaftere de faint LIX. 7. 78. Cyprien près de Poitiers, attirez par la reputation de l'Abbé Rainaud difciple de faint Robert fondateur de la Chefe-Dieu; & qui avoit lui-même dans fa communauté plufieurs grands perfonages, entre autres Hildebert ou Aldebert depuis Archevêque de Bourges. Bernard ayant embraffé la vie monaftique à faint Cyprien, & y ayant paffé dix ans ou plus avec grande édification: Gervais moine de la même communauté, fut envoyé à faint Savin monaftere voifin, pour le reformer en qualité d'Abbé: mais il ne voulut point s'en charger s'il n'avoit Bernard pour Prieur.

6.2.

Gervais étant allé à la croifade en 1096. & y étant mort, Bernard fçut que les moines de 6. 3. faint Savin vouloient l'élire Abbé; & se retira fecretement, pour executer ce qu'il defiroit depuis long-tems, de mener la vie eremitique & vivre du travail de fes mains. Il communiqua fon deffein à un faint Ermite nommé Pierre des Eftoiles, fondateur du monaftere de FontGom

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Gombaud, qui le mena dans un defert aux confins du Maine & de la Bretagne, où vivoient plufieurs Ermites fous la conduite de Robert d'Arbriffelles, de Vital de Mortain, & de Raoul de la Fustaye. Pierre des Eftoiles recommanda fon ami à Vital, mais fans lui dire qui il étoit; & le nommant Guillaume au lieu de Bernard. On lui donna à choifir entre les cellules des Ermites, & il choifit celle d'un nommé Pierre; parce qu'elle étoit la plus pauvre, n'étant bâtie que d'écorces d'arbres dans les ruines d'une Eglife. Pierre y enfeigna à fon nouveau difciple l'art de tourner : ils ne mangeoient que le foir, & leur nourriture étoit un potage d'herbes fauvages, où ils ne mettoient du fel que les fêtes.

Bernard avoit ainfi vécu trois ans fous le nom de Guillaume: quand les moines de faint Savin à force de le chercher le découvrirent; car ils le vouloient toûjours pour Abbé; & il fut averti qu'ils viendroient l'enlever avec des ordres de fon Abbé & de fon Evêque. Pour .4. éviter ce péril Bernard refolut de fe cacher dans une ifle, & fe retira dans celle de Chauffey entre Jerfé & faint Malo, où il vécut dans une parfaite folitude & dans une extrême pauvreté jufqu'à fe nourrir de racines cruës. Cependant . 5. les moines de faint Savin defefperant de le trouver élurent un autre Abbé. Alors Pierre des Eftoiles vint trouver faint Vital, lui demanda où étoit celui qu'il lui avoit recommandé, dont il lui découvrit le vrai nom & le merite, en prefence des Ermites qui étoient fous fa conduite; & leur confeilla de le retirer de fon ifle, pour profiter de fa doctrine & de fon exemple. Il fe chargea lui-même de l'ambaffade, il alla trouver Bernard, & lui ayant appris que les moines de faint Savin avoient un Abbé, il lui

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perfuada de revenir au defert du Maine près de Vital. Là il affembla quelques difciples autour de fa cellule & commença à prêcher avec tant de fuccès, que fa reputation s'étendit au loin, & vint jufqu'à Rainaud Abbé de faint Cyprien de Poitiers fon premier maître.

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Cet Abbé fe fentant chargé d'années, & prévoiant fa fin prochaine, fouhaittoit depuis longtems d'avoir Bernard pour fucceffeur, & craignoit qu'on ne l'enlevât pour gouverner quelque autre Eglife. Ayant donc appris fa demeure il l'alla trouver & fous un autre prétexte, il l'engagea à revenir avec lui & à rentrer fous fon obéiffance dans le monaftere. Il y fut reçu avec une extrême joye, mais les moines furent furpris de lui voir une grande barbe, un habit heriffé de poil & rapiecé, fuivant l'ufage des Ermites: ils en avoient horreur & fe prefferent de lui faire reprendre leur habit. Ils le firent d'abord prévôt, puis Abbé après la mort de Rainaud qui arriva l'an 1100. quatre mois depuis fon retour. Mais Bernard ne demeura pas long-tems paifible dans fon abbaye. Car les moines de Clugni prétendant qu'elle étoit de leur dépendance, obtinrent une bulle du Pape Pafcal, par laquelle il ordonnoit à Bernard de fe foumettre à eux fous peine d'interdiction des fonctions d'Abbé. Bernard aima mieux fubir la peine, & fuivant fon inclination il retourna avec fes amis Robert d'Arbriffelles & Vital de Mortain. Ils alloient tous trois nuds pieds par les villes & les villages, invitant les pecheurs à penitence; & prêchoient avec un grand zele contre le concubinage des Prêtres, qui avoit paffé en coûtume dans toute la Normandie: enforte qu'ils se marioient publiquement, & juroient en prefence des parens de ne jamais quitter leurs fem

mes:

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