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avoit

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plufieurs crimes, fe font impofé filence, n'efperant prefque plus la correction des abus. Il avertit enfuite le Pape de l'élection d'Etienne de Garlande, repetant les mêmes reproches qu'il. dans fa lettre aux legats. Qu'il n'eft pas foudiacre; qu'il eft fans lettres, joueur, adonné aux femmes, & qu'il a été excommunié pour adultere. Le plus grand merite d'Etienne étoit fa nobleffe. Il étoit fils de Guillaume de Garlande Senechal de France, qui étoit alors la premiere charge de la couronne; & lui-même fut depuis Chancelier. Il devoit être jeune, puifqu'il vécut encore quarante ans.

Etienne alla trouver le Pape pour faire conepift. 94. firmer fon élection; & Ives de Chartres ne put lui refufer une lettre de recommandation, où fans rien dire directement contre la verité, il fe joint à l'Eglife de Beauvais fa mere pour prier le Pape de lui accorder ce qu'elle demande, autant que la juftice & l'honneur du faint Siege le permettent. Etienne fut refufé, & le Pape fit des reproches à Ives de fa recommanepift. 95. dation. A quoi il répondit: J'ai reçu une extrême joye & du refus qu'a reçu Etienne qui briguoit l'Eglife de Beauvais, & de la reprimande paternelle que vous me faites à fon fujet; quoique dans ma derniere lettre je n'aye rien écrit de contraire à la premiere. Il a extorqué de moi cette lettre par fon importunité, mais j'ai crû qu'étant bien entendue, elle lui nuiroit plûtôt que de lui fervir. Lá vôtre m'a fait voir clairement combien vous êtes ferme dans l'amour de la justice, & le zele de la maison de Dieu; & je l'ai fait connoître presque à toutes les Eglifes du royaume.

Entre les Evêques aufquels Ives de Chartres envoya cette lettre du Pape, étoient deux des epif. 97. plus vertueux de la province de Reims, Lam

bert

pour

AN.I101.

bert d'Arras & Jean de Terouane, qu'il exhorta à faire par obéiffance le Pape, ce qu'ils avoient fait jufques alors par le feul amour de la juftice. Avertiffez, ajoûte-t-il, vôtre metropolitain d'affembler le clergé de Beauvais pour faire une élection canonique, afin que fon autorité gueriffe les foibles & affermiffe les forts: qu'il honore fon miniftere, & ne s'expose pas à voir executer par d'autres ce qui le regarde. Ives écrivit auffi au clergé de Beauvais, pour epist. 98. les encourager à élire un bon fujet à la place d'Etienne comme le Pape leur ordonnoit : mais il ne leur recommande, dit-il, personne en particulier.

foûtient le

En Angleterre le délai qui avoit été pris juf- XIII. ques à Pâques 1101. fut prorogé jufques au S.Anfelme retour des deputez envoyez à Rome touchant Roi Henri. l'affaire des inveftitures. Cependant à Pentecôte Eadmer. 3. la cour fut extremement troublée par la nou- Novor, velle de l'arrivée en Angleterre de Robert Duc de Normandie. Le Roi Henri & les Seigneurs étoient dans des défiances mutuelles : le Roi craignoit qu'ils ne l'abandonnaffent pour se joindre à fon frere, les Seigneurs craignoient que fi le Roi étoit une fois paifible, il n'exerçât fur eux une autorité trop abfolue. Ils n'avoient confiance de part & d'autre qu'en l'Archevêque Anfelme; & il reçut au nom de la nobleffe & du peuple, la promeffe du Roi de les gouverner fuivant de juftes & faintes loix.

Mais quand le Duc Robert fut effectivement entré en Angleterre, les Seigneurs oubliant leur ferment, fongeoient à paffer de fon côté; & le Roi Henri craignoit non feulement pour fon royaume, mais pour fa vie. Alors il eut recours à Anfelme, & promit de lui laiffer un pouvoir abfolu, pour exercer tous les droits de l'Eglife en Angleterre; & d'obéir toûjours aux Tome XIV.

B

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ordres du Pape. Anfelme affembla les Seigneurs, AN.1101.& leur parla en presence de toute l'armée, avec laquelle le Roi marchoit au devant de fon frere. Il leur reprefenta fi fortement combien étoient deteftables devant Dieu & devant tous les gens de bien, ceux qui manquoient à la foi jurée folemnellement à leur Prince : que tous protefterent qu'ils demeureroient fidéles au Roi, dûtil leur en couter la vie. Le Duc Robert de fon côté perdit l'efperance qu'il avoit dans la defe̱Єtion des Seigneurs, & fut touché de l'excommunication qu'Anfelme avoit publiée contre lui comme ufurpateur : ainfi il fit la paix avec fon frere, & fe retira.

XIV.

Pape con

Tout le monde attendoit que le Roi Henri Lettre du donnât à Anfelme quelque marque de recontre les In- noiffance, quand il lui manda de venir à la veftitures. cour pour s'expliquer fur l'affaire des investituPafch.epift. res. Car les deputez étoient revenus de Rome, concil. ex & avoient aporté une lettre du Pape Pascal

96. tom. X.

Eadmer.

au Roi où il difoit : Vous demandez que l'Eglife Romaine vous accorde le droit d'établir les Evêques & les Abbez par l'investiture, & qu'elle attribue à la puiffance royale ce que le Tout-puiffant témoigne n'apartenir qu'à lui Joan. x. 7. feul. Car le Seigneur dit: Je fuis la porte; & par confequent fi les Rois s'attribuent d'être la porte de l'Eglife, ceux qui entrent par eux ne font pas des Pasteurs, mais des larrons. Cette pretention eft fi indigne, que l'Eglife catholique ne peut l'admettre en aucune maniere. Saint Ambroife auroit plûtôt fouffert les dernieres extremitez, que de permettre à l'Empereur de difpofer de l'Eglife. Car il répondit : Ambr.epift. Ne vous faites pas ce tort de croire que com20 ad foror, me Empereur, vous ayez quelque droit fur les chofes divines. Les palais apartiennent à l'Empereur; les Eglifes à l'Evêque. Qu'avez-vous de

8.19

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commun avec une adultere? car celle-là eft une adultere qui n'eft pas unie à JESUS-CHRIST par un mariage legitime. Après ces paroles de faint Ambroife, le Pape Pafcal continue: Entendez-vous Prince, l'époux de l'Eglife eft l'Evêque, & par confequent quelle honte eft-ce que la mere foit expofée à l'adultere par fes propres enfans? Si vous êtes enfant de l'Eglife, permettez-lui de contracter un mariage legitime, dont Dieu foit l'auteur, & non pas l'homme. Car c'est Dieu qui choifit les Evêques élûs canoniquement. Il raporte enfuite une loi de Juftinien, pour montrer que l'Evêque doit être élû du confentement de tout le peuple, & non par la feule volonté du Prince : puis il ajoûte : Ne croyez pas Seigneur, que nous voulions rien diminuer de vôtre puissance, où nous at tribuer rien de nouveau dans la promotion des Evêques. Vous ne pouvez felon Dieu exercer ce droit, & nous ne pouvons vous l'accorder qu'au préjudice de vôtre falut & du nôtre.

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AN.1101,

34.

Le Pape avoit raison de vouloir maintenir la liberté des élections; mais prefque tous les raifonnemens de cette lettre portent à faux, roulant fur des équivoques. Les Princes en donnant l'inveftiture, fuppofoient toûjours une élection canonique nous en avons vû cent exemples, Sup. liv. particulierement de l'Empereur faint Henri. LV, n. Par cette ceremonie ils ne prétendoient pas donner à l'Evêque la puiffance fpirituelle qu'il ne devoit recevoir qu'à fon facre: mais feulement Sup. liv. le mettre en poffeffion des fiefs & des autres xviii. n. biens temporels relevant de leur couronne. 41. 42, Quant à faint Ambroife, il est évident circonftances du fait, que l'adultere dont il le eft l'Eglife des Ariens ; & qu'il ne s'agiffoit pas de donner des évêchez, mais de livrer à ces heretiques les lieux deftinez aux affemblées des fidéles.

B 2

par

les

par

Le

Νουστο

Le Roi d'Angleterre ayant donc reçu cette AN.I101. lettre, fit venir Anfelme à la cour, où étoit le X V. Duc de Normandie fon frere, furieufement S.Anfelme animé contre ce Prélat, comme lui ayant fait refifte au Roi. perdre le roiaume. Par le conseil du Duc & de admer. 3 les amis, le Roi voulut obliger Anfelme à lui faire hommage, & à facrer comme avoient fait les Archevêques fes predeceffeurs, ceux à qui il donneroit des évêchez & des abbayes; finon à fortir promptement du roiaume. Anfelme répondit: Je vous ai déja dit comme j'ai assisté au concile de Rome, & ce que j'y ai appris du faint Siege. Si donc je me foûmets moi-même à l'excommunication que j'ai rapportée en ce roiaume, avec qui pourrai-je communiquer ? Les députez qui étoient allez demander la revocation de ce decret font revenus fans rien faire. Le Roi repliqua Que m'importe ? Je ne veux pas perdre les droits de mes prédecesseurs, ni fouffrir perfonne dans mon roiaume, qui ne foit à moi. J'entends, dit Anfelme, à quoi cela tend, cependant je ne fortirai pas du roiaume j'irai à mon diocese faire mon devoir, & je verrai qui entreprendra de me faire violence.

Il n'avoit pas été long-tems chez lui, quand le Roi lui manda de le venir trouver, & qu'il vouloit apporter quelque temperament à fa premiere refolution. Il vint donc à Vincheftre 2 où dans l'affemblée des Evêques & des Seigneurs on refolut de prendre un autre délai, & d'envoier à Rome des perfonnes plus confiderables: pour declarer au Pape qu'il falloit qu'il fe relâchât, autrement qu'Anfelme feroit chaffé d'Angleterre avec les fiens, & que le Pape perdroit l'obéiffance de ce roiaume & le revenu qu'il en tiroit tous les ans. Anfelme envoia de fa part deux moines, Baudoüin du Bec & Alexandre

de

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