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voifins,
enforte que les moines étoient réduits
à la mendicité. Il fe plaignoit entre autres de
Pierre Evêque de Pavie qui pilloit les biens
de l'Abbaye de Bobio, en même-tems qu'il di-
foit du bien de l'Abbé à l'Empereur dont il
étoit Chancelier. Néanmoins cet Evêque étant
devenu Pape fous le nom de Jean XIV, Ger-
bert lui porta auffi fes plaintes.

Après la mort d'Otton III, Gerbert voyant que l'Italie étoit fans maître, & qu'il falloit ou fe foumettre à plufieurs petits tyrans, ou lever des troupes, fortifier des places & faire la guerre, quitta le pays, fans renoncer à fon Abbaye, & vint en France auprès de l'Archevêque de Reims. Il fe mêla beaucoup des affaires de l'Etat, ce qui ne l'empêchoit pas de cultiver les fciences. Il gouvernoit l'Ecole de Reims ; & le jeune Robert depuis Roi, fils de Hugues Capet, y fut envoyé par fa mere, pour y étudier fous un fi habile maître. Il amaffoit des livres de tous côtés, & travailloit à former une bibliothéque. A Rome, & dans le refte de l'Italie, en Allemagne, & par-tout où il fe trouvoit, il employoit beaucoup d'argent à payer des écrivains, & à acheter des exemplaires des bons auteurs. Ceux qu'il nomme en diverfes lettres font, Pline, Jules-Céfar, Suétone, Claudien, Boece. Il avoit lui-même compofé un livre de rhétorique, & faifoit des fpheres, ce qu'il marque comme un ouvrage confidérable. Il étudioit auffi la médecine. Parmi les lettres de Gerbert, on en trouve une écrite au nom de l'Archevêque de Reims à l'Impératrice, où il lui demande un Evêché pour Gerbert. Cette lettre fait juger que cet Abbé n'étoit pas fans ambition. C'eft lui qui a écrit l'hiftoire du Concile tenu près de Reims pour juger l'Archevê

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VII.

Germanie. Le Légat s'affit au milieu d'eux, & l'Archevêque Gerbert vis-à-vis, comme accufé. Il y avoit plufieurs Abbés, & Godefroi Duc de Lorraine y afliftoit avec quelques autres laïques. L'Evêque de Verdun nommé Aimon, fe leva & parla le premier. Il dit en Gaulois, c'est-à-dire, comme l'on croit, en Roman ou Latin vulgaire, d'où notre langue eft. venue que le Pape ayant inutilement invité les Evêques des Gaules à tenir un Concile à Aix-laChapelle, & enfuite à venir à Rome, avoit enfin indiqué le Concile dans la Province de Reims, afin d'apprendre par fon Légat, ce que l'on difoit de part & d'autre touchant la dépofition d'Arnoul & la promotion de Gerbert. Alors Gerbert fe leva, & défendit fa caufe par un difcours où il paroiffoit plus d'éloquence que de fincérité. Il foutint que les Evêques des Gaules l'avoient chargé malgré lui de l'Archevêché de Reims ; & que fi dans toute cette affaire les regles n'avoient pas été observées, on devoit l'attribuer au malheur du temps, & aux hoftilités publiques, dont les Evêques mêmes n'étoient pas à couvert. Quand il eut achevé de prononcer fon difcours, il le donna par écrit au Légat. Alors les Evêques fortirent du Concile, & tinrent confeil avec le Duc Godefroi. Ils appellerent enfuite Gerbert, & le prierent de faire conduire avec honneur aux Rois de France Jean moine de l'Abbé Leon. Gerbert le promit, & ils convinrent de tenir un Concile à Reims un mois après. Mais il ne fe tint pas fi-tôt.

Celui de Moufon fembloit fini, lorsque les Gerbert chaf- Evêques vinrent dire à Gerbert de la part du fé du Siége de Légat Leon, qu'il eût à s'abstenir de célébrer Reims devient T'Office divin jufqu'au Concile de Reims. Ger

beit s'en défendit, & alla repréfenter au Lé-Archevêque gat, qu'aucun Evêque ou Patriarche ni le Pa- de Ravenne pe lui-même, n'avoit le pouvoir d'excommu- & enfuite Pape. Sa fin. nier perfonne, s'il n'étoit convaincu d'un crime qui méritât cette peine, ou s'il ne refufoit de comparoître ; qu'on ne pouvoit pas lui faire. ce reproche, puifqu'il étoit le feul des Evêques de France qui fût venu au Concile; que ne fe fentant pas coupable, il ne pouvoit fe réfoudre à fe condamner lui-même. Il céda néanmoins aux remontrances de Lindolfe Archevêque de Treves, dont il connoiffoit la probité & la modération, & s'abstint de célébrer la Meffe pour le bien de la paix. Pendant dixhuit mois que le Roi Hugues Capet vécut encore, Gerbert demeura Archevêque de Reims, & Arnoul prifonnier à Orléans. Mais après la mort de Hugues, fon fils Robert qui avoit époufé Berthe fa parente, & qui vouloit obtenir du Légat Leon la confirmation de fon mariage, promit de rétablir Arnoul fur le Siége de Reims, & pria Abbon d'aller à Rome pour cette affaire. Abbon obtint du Pape tout ce qu'il défiroit; & à fon retour il rétablit Arnoul que le Roi avoit délivré de prison lui donna le Pallium qu'il avoit reçû pour lui de la main du Pape. Gerbert ainfi dépouillé de fa dignité, fe retira à Ravenne auprès de l'Empereur Otton dont il étoit aimé. Gerbert fit à ce Prince une horloge, dont il régla la pofition fur l'étoile polaire. Enfuite l'Empereur le fit Archevêque de Ravenne, & en cette qualité le Pape Grégoire V lui envoya le Pallium avec une lettre, par laquelle il confirmoit à cette églife tous les anciens priviléges. Gerbert tint un Concile où l'on condamna la fimonie & d'autres abus, & l'on défendit de rien exiger

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&

IX.

EGLISE D'AL

LEMAGNE.

de quelques Evêques de France pour faire ce mariage, le Pape Grégoire V le déclara nul dans un Concile, & impofa à Robert & à Berthe une pénitence de sept ans.

V.

L'Empereur Arnoul, fils de Carloman & petit-fils de Louis le Germanique, mourut à la Louis fils fin du neuviéme fiécle; & quelques mois après d'Arnoul Em- au commencement de l'an 900, les Seigneurs reur. Ravages élurent fon fils Louis âgé feulement de fept des Hongrois. Jugemens de ans. Sous fon régne les Hongrois ravagerent Dieu fur les l'Allemagne, d'où ils pafferent en France &

Chretiens.

pa

en Italie. Ces barbares prirent la place des Normans, & devinrent, comme les autres l'avoient été auparavant, les miniftres de la colére de Dieu, qui châtioit fon peuple & le rappelloit à fon devoir, par des calamités temporelles de toute efpéce. Les Hongrois étoient venus du fond de la Scythie, & avoient commencé à roître dans l'Empire François vers l'an 890. Ils entrerent d'abord dans la Pannonie & le pays des Avares, vivant de chaffe & de pêche. Enfuite ils firent des courfes fréquentes en Carinthie, en Moravie & en Bulgarie. Ils ne tuoient guéres qu'à coup de fléches, qu'ils tiroient avec une adreffe merveilleufe. Ils étoient toujours à cheval, en marchant, en s'arrêtant en tenant confeil. Ils mangeoient de la chair cruë, buvoient du fang, coupoient en petits morceaux les cœurs des hommes qu'ils avoient pris, & les mangeoient comme un reméde. Ils étoient incapables de tout fentiment de compaffion, ne parloient prefque point, mais agiffoient avec une promptitude étonnante. Ils pafferent de Baviére en Italie. Les Chrétiens leur donnerent bataille près de Padoue. Il y eut plufeurs milliers de chrétiens tués & noyés, en

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tre lefquels étoient plufieurs Seigneurs & plufieurs Evêques. Luitard Evêque de Verceil, qui avoit été favori de l'Empereur Charles le Gros, s'enfuyant avec fon tréfor, tomba entre les mains des Hongrois, qui le tuerent & pillerent fes richeffes immenfes. Etant venus à Nonantule dans le Modenois, ils tuérent une partie des moines, & brûlerent le monaftére avec les livres qui y étoient.

Les ravages des Hongrois & leur extrême barbarie, avoient donné occafion au peuple, de s'imaginer qu'ils étoient le Gog & Magog prédits dans le Prophête Ezéchiel & dans l'Apocalypfe. Il y eut fur cette conjecture frivole diverfes confultations, qui prouvent du moins que l'on croyoit très-permis d'examiner, fi les maux dont on étoit témoin, n'avoient point été annoncés par les Prophêtes. Quoique les Hongrois portaffent dans prefque tous les Royaumes Chrétiens la terreur & la défolation, c'étoit néanmoins la Germanie ou l'Allemagne, qui étoit la plus expofée à leurs ravages. L'an 912 ils pillerent fans réfistance la Franconie & la Turinge. L'année fuivante, ils ravagerent le haut Rhin. En 915 ils défolerent toutes les provinces d'Allemagne par le fer & par le feu. Ils allerent jufqu'au monaftére de Fulde, & pénétrerent jufqu'en Alface & en Lorraine. A Brême ils brûlerent les églifes maffacrerent les Prêtres au pied des autels, & firent une multitude de Chrétiens captifs, fans diftinction d'âge, ni de fexe, ni de condition. Ils brifoient les croix, & en faifoient la matiére de leurs railleries.

X.

L'an 924 une fainte vierge réclufe nommée Sainte ViboViborade, qui vivoit dans la haute Allema- rade, martygne près de l'Abbaye de faint Gal, apprit par tilée par les

Hongrois,

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