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& de la perfection, & les occafions où ils pourroient fe gâter. La feconde à leur procurer tous les fecours quí peuvent les affermir dans le bien & les faire avancer dans la vertu. La troifiéme à les conduire de telle forte qu'ils vivent contens & que la paix regne dans sa communauté. Dès qu'il voit quelque divifion ou quelque trouble, il ne doit point fe donner de repos qu'il ne l'ait appaifé.

Enfin il faut qu'un Superieur imite la conduite de la fageffe divine qui difpofe tout avec douceur & avec force. Il doit avoir de la douceur à l'égard de fes inferieurs pour les gagner à Dieu, & les engager à porter fon joug avec amour. Mais cette douceur ne doit point exclure la fermeté dans les occafions où il s'agit de maintenir la vi. gueur de l'obfervance & les interêts de Dieu. La plupart des Superieurs excedent dans l'une de ces deux chofes; les uns font trop doux, & leur douceur leur fair fouffrir des chofes qui affoibliffent la vigueur de la difcipline: les autres font trop durs, & par leur dureté ils aigritlent les efprits, qui quelquefois fecouent le joug ou le portent à contre cœur. Il faut donc garder un jufte milieu; mêler la douceur avec la force, & la force avec la douceur ; montrer à fes inferieurs l'affection d'un pere, & prendre quand il le faut l'air severe d'un maitre.

Des Vierges qui ne demeurent pas dans les Monafteres.

Dfaire profeffion de la vie religieufe, ont édifié l'Egli

Ans tous les fiécles, il y a eu des Vierges, qui fans

fe par la pratique des vertus chrétiennes ; & il y a encore à prefent de bonnes ames qui en demeurant dans le monde ne prennent point de part à la corruption.

Les inftructions les plus ordinaires que les faints Peres ont donné aux Vierges chrétiennes tendent à les éloigner du monde & à leur aprendre à vivre dans le recueillement d'une fainte & paifible retraite. Ils les avertiffent que la chafteté est un degré pour arriver à la perfection, mais .qu'elle n'eft pas la perfection, & que fi la chafteté eft feule, elle ne merite pas d'être couronnée. Ils les exhortent donc à mettre la plus grande gloire de la virginité à retrancher les foins fuperflus & les inutilités de la vie ; à fe priver non feulement des plaisirs défendus, mais encore de ceux qui leur auroient été permis dans une autre

condition; à se nourrir de la lecture des livres faints & à paroitre rarement en public; à joindre l'obéillance, P'humilité & le travail des mains à la penitence, à garder les regles de la plus exacte modeftie, dans la maniere de s'habiller, a ne chercher qu'à plaire à Jesus-Chrift & à ne rien faire paroitre dans leurs perfonnes ni dans leur conduite qui ne foit grave, ferieux & digne de la fainte virginité dont elles font profeflion.

Les Saints ont auffi confeillé aux Vierges,qui ne vivent point en cloture, la pratique des bonnes œuvres envers le prochain, & tous les offices de la charité chrétienne envers les pauvres & les malades: mais en même tems ils les ont exhorté à le précautionner contre tant d'occafions de diffipations, d'oftentation & d'orgueil où l'on s'expofe par les exercices d'une devotion plus apparente, & par certaines actions dont l'éclat dédommage de la peine qu'on y trouve.

Combien font-elles frequentes ces occafions qui ou vrent le cœur aux paffions, quand on ne fe tient pas s fur fes gardes pour ne point s'y laifler furprendre? C'eft une complaifance humaine de voir réuffir des projets de pieté fans effuyer ni oppofition ni contradiction. C'eft de contribuer de fon bien & de fon credit à quelque établissement & de s'y rendre neceffaire. C'est une émulation des bonnes œuvres, dont il femble qu'on difpute le merite à celles qui fourniffent la même carriere de perfection. C'eft une ferveur de fentiment qui fait qu'on s'éleve au deffus des autres, & qu'on oublie qu'on n'a rien qu'on n'ait reçu & qu'à tout moment on ne puiffe perdre. C'eft un rafinement de fpiritualité qui fe plait moins dans l'uniformité d'une vie commune, que dans une fingularité qui n'eft point exemte de fafte. C'est une attache à fon fens jufqu'à ne vouloir rien ceder & à fe donner voix décifive, fur tout dans les affemblées de charité, comme si on avoit droit d'exercer un empire abfolu fur l'opinion des plus lages. C'eft quelque fois l'aprobation d'un Con. feffeur, qui fans s'en appercevoir confpire avec les paffions à entretenir une paix fauffe & dangereufe.

On ne fauroit exprimer toutes les féductions de l'amour propre mais ce qu'il y a de plus certain,c'eft qu'il

a foin de s'attribuer la meilleure partie des exercices de pieté, où les devotes prennent le plus fur leur temperamment, fur leurs repugnances & fur leurs delica‹ teffes. La vifite d'un malade pauvre & abandonné fait fouvent fur elles les mêmes impreffions que fait une vifite toute feculiere fur une perfonne du monde. Sou. vent elles fe voyent dans les hopitaux, dans les prifons & dans les maifons des pauvres avec autant de complaifance que les filles du fiécle dans les affemblées mondaines. Enfin fouvent elles fe donnent en spectacle fous un habit fim. ple & modefte avec autant de vanité que les filles mon. daines aiment à fe montrer fous l'or & les pierreries.

Nous voyons que les dix Vierges, dont il eft parlé dans l'Evangile, font toutes dix apellées Vierges par notre Seigneur, & que cependant elles ne font pas toutes reçues dans le bonheur éternel: parce que parmi ces Vierges, il y en avoit qui fe glorifiant de la virginité qu'elles avoient gardée,n'avoient point d'huile dans leurs lampes, c'eft-à dire, n'avoient point d'humilité, fans laquelle ce qui paroit bon & louable devant les hommes,eft abomi. nable devant Dieu. Que fert d'avoir le corps chafte, fi on a l'ame corrompue par l'orgueil, dit faint Auguftin; donnez-moi, difoit ce faint Docteur, une Vierge qui foir exemte de tout défaut exterieur, & dont les mœurs foient parfaitement pures: c'eft pour celle là que je crains le venin fecret de l'orgueil. Plus je vois en elle de bonnes qualités capables de lui donner fujet de fe complaire ellemême, plus je crains que par une complaifance fecrette, elle ne déplaife à celui qui refifte aux fuperbes & donne fa grace aux humbles.

Du Sacrement de Mariage.

I que celui du Mariage, a gueres

L n'y a gueres de Sacremens qu'on reçoive avec moins

d'action qu'on faffe moins chrétiennement, & fur laquelle le peuple ait plus befoin d'être inftruit, à caufe des grands abus que la plupart y commettent, & des fuites funeftes dont Dieu punit ces abus. C'eft pourquoi pour ne pas manquer d'inftruire les fideles fur une matiere fi importante, on leur aprendra ici ce que c'eft que le Sacrement de Mariage, quelles font les difpofitions neceffaires pour

le recevoir dignement,comment on doit y affifter & comment on doit paffer le jour des noces.

Le Mariage eft un Sacrement inftitué de Jesus-Chrift pour benir l'alliance de l'homme & de la femme, pour leur donner la grace de s'aimer chrétiennement, de vivre ensemble paifiblement, de s'entr'aider mutuellement tant en fanté qu'en maladie, & d'élever leurs enfans dans la crainte & dans l'amour de Dieu. Voilà les grands effets de la grace de ce Sacrement, dont on a tant befoin pour paffer la vie en paix dans fa famille. Mais Dieu ne donne cette grace qu'à ceux qui reçoivent le Sacrement de Mariage avec les difpofitions requifes pour le recevoir dignement.

LA

pour

pour

Des difpofitions neceffaires pour fe marier chrétiennement. A premiere difpofition neceffaire pour le marier chré tiennement, c'eft de ne fe marier que pour la fin Jaquelle Dieu a inftitué le Mariage. Il l'a inftitué trois fins. 1. Afin que les perfonnes qui fe marient s'entr'aident mutuellement dans les befoins de cette vie, & trouvent leur confolation dans l'amour & les fervices qu'ils ferendront l'un à l'autre 2. Afin que du Mariage il naiffe des enfans qui foient élevés dans la crainte & l'amour du Seigneur. 3. Afin que le Mariage ferve de re mede & de frein à la concupifcence. Quiconque a d'au tres motifs en fe mariant, ne fe marie point en chrétien & peche, parce qu'il ufe d'une chofe établie de Dieu pour d'autres fins que celles pour lefquelles Dieu l'a inftitué.

C'est pourquoi ceux qui étant furmontés par les paffions de la chair, loin de regarder le Mariage comme un remede à leur incontinence,ne le regardent que comme un moyen de la fatisfaire avec plus de liberté & d'emportement, qui n'y cherchent que le plaifir en craignant la ge-> neration des enfans: ceux-là, dis-je, fe marient non en chrétiens ni en hommes, mais en bêtes ; & ils font fous la domination du démon. C'eft ce que Dieu a fait voir vifiblement par l'exemple des fept jeunes hommes, qui ayant l'un après l'autre épousé la vertueufe Sara, fans autre vue que de contenter leur fenfualité, furent étranglés par le démon la nuit même de leurs noces, & avant que de fatisfaire leurs défirs dereglés. Si le démon ne tue pas

les corps de tous ceux qui fe marient de la forte, il ne manque pas de tuer leur ame, & toute la fuite de leur vie fait aflez voir que c'eft lui qui eft le maitre de leur cœur.

Il faut faire un choix fage & chrétien de la perfonne qu'on veut époufer. Il ne faut pas chercher à s'élever ouà s'enrichir par un Mariage, mais à fe fauver & par confe quent il faut fe contenter d'époufer une perfonne proportionnée à fon bien & à fa qualité, pourvu qu'elle foit tel le par fa fagefle, fa douceur, fa modeftie, fa pieté, en un mot par fa vertu, qu'il y ait lieu d'efperer qu'ils fe feront l'un à l'autre un puiffant fecours pour fer vir Dieu & gagner le Ciel.

Le faint Efprit dit par la bouche du Sage, que les richef fes viennent des parens, mais que c'est proprement le Seigneur qui donne une femme fage. Ceux donc qui veulent entrer dans le Mariage, doivent s'adrefler à Dieu & le beaucoup prier: & les riches doivent joindre à la priere de grandes aumônes, afin qu'ils puiffent recevoir de sa main une perfonne avec qui ils puiflènt fe fauver.

Si l'on traite d'un mariage avec Dieu même par les prieres, aumônes & autres bonnes œuvres, il en faut traiter avec les hommes en prenant confeil des perfonnes les plus fages & les plus vertueuses.

Les enfans de famille & fur tout les filles doivent déferer en ceci aux fentimens de leurs parens, & principalement lorsqu'ils ont de la pieté & la crainte de Dieu. Car on peut croire que c'eft par eux qu'on aprendra sa volonté & qu'en fuivant leur choix on fuivra le choix de Dieu

même.

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Après avoir confulté Dieu pour connoitre fa volonté, & pour ne tenir que de fa main la perfonne qu'on doit époufer, il faut confulter l'Eglife en aprenant de fes Miniftres les regles qu'elle a établies pour l'adminiftration de ce Sacrement, Car les vrais chrétiens qui ne veulent fe marier que felon Dieu, n'ont garde de violer dans leur mariage les regles que Dieu même a infpiré à fon Eglife.

Cet avis eft d'autant plus neceffaire en ce tems, qu'il femble que c'eft le rabaiffer de ne pas fe marier avec quel que difpenfe. On laifle au peuple à obferver les loix Ecdefiaftiques: mais les perfonnes de qualité ou qui ont du

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