Imágenes de páginas
PDF
EPUB

FORME'ES

BERNAR- tife les exemta de la jurisdiction de l'Abbé de Cîteaux & DINES RE- des autres Peres de l'Ordre, & les foûmit immédiatement D'ESPAGNE à celle des Feuillans. Quant à leur habillement il est auffi semblable à celui des Religieux.

Memoires Communiqués par le R. P. Dom Mouchy,Religieux de cet ordre.

CHAPITRE XL.

Des Religieufes Reformées de l'Ordre de Citeaux en Espa gne, dites de la Recollection on Recollettes.

L

A Réforme des Religieufes de l'Ordre de Cîteaux en Espagne appellées Recollettes, doit fon commencement & fon progrès au zele & à la pieté des Abbeffes du celebre Monaftere de las Huelgas près Burgos, dont nous avons parlé dans le Chapitre trente cinquiéme. Agnés Henriquez, qui avoit été la premiere Abbeffe triennale de ce Monaftere en 1587. aïant été élûë pour la feconde fois en 1596. apporta d'abord tous fes foins pour réformer celui de Perales qui étoit de fa dépendance & d'où l'Obfervance Réguliere avoit été entierement bannie. Elle difperfa les Religieufes en d'autres Monasteres, & en fit venir de plus zélées en leur place pour y rétablir la régularité. Elle conçut enfuite le deffein d'une nouvelle réforme, & obtint pour cet effet au mois de Septembre 1599. une Bulle de Camille Cajetan, Legat en Efpagne du Pape Clement VIII. Jeanne de Ayala, qui lui fucceda quelques jours après dans la qualité d'Abbeffe de las Huelgas, pourfuivit l'execution de cette Réforme, & fit venir pour ce fujet à Valladolid des Religieufes, qu'elle tira des Monasteres de fa dépendance. Elle choifit pour cet effet celles qu'elle jugea les plus propres pour en fupporter les aufterités, & elle leur fit bâtir un Monaftere fous le titre de fainte Anne. Elle voulut qu'elles vêcuffent felon l'esprit primitif de Cîteaux, & elle chargea les Peres Gafpard de Weda & Auguftin Lopez Religieux de la Réguliere Obfer. vance d'Espagne de travailler à leurs Conftitutions; mais la mort l'aïant prevenuë,elle ne put les faire accepter. Marie de Navarre, qui fut élûe Abbeffe l'an 1601. transfera le Monaftere de Perales à Valladolid dans celui de fainte Anne,

FORME ES

en aïant obtenu la permission du Pape Clement VIII. la BERNAR même année ; & elle fit approuver l'an 1604. par Domini- DINERSque Gymnafius Archevêque de Syponte, Legat en Espagne D'ESPAGNE. du même Clement VIII. les Conftitutions qui avoient été dreffées pour ces Religieufes réformées. La même année celles du Monaftere de Malaca, quoique foûmises à l'Evêque, voulurent vivre fous les mêmes Obfervances, aïant demandé feulement ces Conftitutions, fans qu'on y envoïât des Religieufes de Valladolid pour y introduire la Réforme.

L'Abbeffe de las Huelgas, Francoise de Villa Mizaria, qui fucceda à Marie de Navarre, fit approuver ces mêmes Conftitutions par le Pape Paul V. l'an 1606. & obtint du même Pontife la permiffion de fonder d'autres Monasteres de cette Réforme. Ce fut en vertu de cette permiffion que cette Abbeffe en fonda un à Tolede, y aïant envoïé pour faire cet établissement des Religieufes de Valladolid.

Les autres Abbeffes de las Huelgas firent dans la fuite d'autres fondations. Jeanne de Leyna fonda un Monastere à Talavera. Anne d'Autriche fille du Roi Philippe II. fit trois autres fondations : la premiere l'an 1615. à Briguera, la feconde à Madrid l'an 1616. dont le Monaftere fut bâti par les liberalités du Duc Duzeda, & la troifiéme à Confuegra l'an 1617. fous le gouvernement d'Anne Marie Manriquia. Cette Réforme paffa dans les Indes, Dom Christophle de la Camara Evêque des Canaries y aïant bâti un Monastere pour ces Religieufes. Catherine de Arellano & Zuniga fille du Comte d'Aguillar, fit un nouvel établissement à Cafarubios l'an 1634. yaïant envoïé des Religieufes de Valladolid. Cette Réforme a fait dans la fuite de plus grands progrès.

Conformement à leurs Constitutions ces Religieufes fe levent à deux heures après minuit pour aller à Matines : à cinq heures,elles font l'Oraifon mentale jufqu'à fix,qu'elles chantent Prime. Après Vêpres elles ont encore une heure d'Oraifon Mentale. Elles prennent la difcipline tous les Mercredis & Vendredis de l'année, & encore le Lundi pendant l'Avent & le Carême. Elles obfervent une exacte pauvreté, n'étant permis à aucune Religieufe d'avoir des penfions, & tout doit être en commun. Leur habit doit être d'une étoffe groffiere. Il leur eft permis d'avoir des fandales au lieu de fouliers. Elles obfervent l'abstinence perpetuelle de la vianGgg iij

BERNAR- de, & l'ufage du beure & du laitage leur eft interdit, elles FOR ME's peuvent feulement manger des œufs les jours qui ne font DE FRANCE. point jeûnes. Les infirmes peuvent manger de la viande;

DINS RI

mais à la derniere table au Réfectoire, afin qu'elles puiffent
entendre la lecture. Elles jeûnent depuis la Fête de l'Exalta-
tion de la fainte Croix jufqu'à Pâques, excepté les trois Fê-
tes de Noël, & celles de la Circoncifion & de l'Epiphanie. Le
reste de l'année, elles jeûnent les Mercredis, les Vendre-
dis, & les Samedis : les jours qui ne font point jeûnes elles
ne doivent ni boire ni manger hors les heures du repas, l'u-
fage du vin leur eft auffi interdit, à moins que ce ne foit dans
une très grande neceffité. On leur donne à la collation les
jours de jeûnes de regle une falade ou quelques fruits avec
du pain ; mais les jeûnes d'Eglife elles n'ont que du pain.El-
les gardent un étroit filence depuis Complies jufqu'à Prime
du jour fuivant & depuis Midi jufqu'à None. Elles gardent
auffi un filence exact pendant le travail : & afin de n'avoir
pas
occafion de le rompre pendant ce tems-là, elles doivent
travailler en particulier dans leur chambre, elles font feule-
ment la leffive en commun,& fi elles rompent le filence, elles
prennent la difcipline au Réfectoire, & y mangent à terre
au pain & à l'eau. Aucune Religieufe ne peut entrer dans la
chambre d'une autre, & les jours de Communion elles n'ont
aucune récréation. Nonobftant ces Obfervances austeres,
il ne laiffe pas d'y avoir parmi elles des filles diftinguées par
leur naiffance & qui font des premieres maifons d'Espagne.
Le nombre des Religieufes de chaque Monaftere eft fixé à
vingt pour celles du Chœur, & trois Converses.

Ang. Manriq. Annal. Ord.Cifter. Tom. 4. in ferie Abbatiss.
Abb. S. M. Regalis & Chrifoftom. Henriq. Lilia Cifter.

CHAPITRE XLI.

Des Religieux Reformés de l'Ordre de Citeaux en France appellés de l'Etroite Observance.

L

A Reforme dont nous allons parler a caufé de fi grands troubles & de fi grandes divifions dans l'Ordre de Cîteaux,qu'il n'a pas fallu moins de cinquante années pour les pacifier: nous avons vu dans le Chapitre XXXIII.comme le

DINS R:

FORMES DE

relâchement s'étoit introduit dans cet Ordre, & que le défor- BERNAR dre y étoit arrivé jufqu'à un tel excès que plufieurs Princes PRM voïant quetous les moïens qu'on avoit apportés pour y réta- FRANCE. blir la régularité avoient été inutiles, en avoient demandé la fuppreffion, ce qui donna lieu aux réformes dont nous avons parlé. Dom Denis l'Argentier Abbé de Clairvaux en voulut auffi introduire une en France. Il étoit déja fort âgé lorsque Dieu lui infpira cette fainte resolution ; mais le zele fuppléant à l'âge, il commença par fon Abbaïe l'an 1615. & aprés en avoir banni les abus & les fcandales, il y rétablit les anciennes austerités de l'Ordre;c'est-à dire l'abstinence perpetuelle de la viande, le jeûne continuel depuis la Fête de l'Exaltation de la fainte Croix, les paillaffes pour lits, la fimplicité des habits, les chemises de ferge, le travail des mains, le filence exact, les veilles & autres femblables exercices de pénitence.

Plufieurs Maisons de fa filiation, & d'autres même qui n'étoient pas de fa dépendance, réfolurent de fuivre fon exemple, & d'observer les mêmes pratiques qu'il avoit rétablies à Clairvaux, enforte qu'en moins de deux ou trois ans, les mêmes Obfervances fe trouverent introduites dans fept ou huit Monasteresde la dépendance,qui étoient les Abbaïes de Longpont, de Cheminon, de Châtillon de Vaucler, de la Charmoie, de Prieres, de la Blanche & des Vaux de Cernai: ce qui fut appuïé de l'autorité de Dom Nicolas Boucherat Abbé Général de Cîteaux. Le Chapitre Général de cet Ordre de l'an 1618. feignit d'approuver cet étroite Obfervance; mais bien loin quelle lui plût, il chercha tous les moïens de la fupprimer dès le commencement de fon origine, & pour Y réüflir avec plus de facilité, il cacha fon veritable deffein fous les apparences du zele pour la pieté & le bon ordre. C'est pourquoi aprés avoir loüé ceux qui avoient embraffé cette Obfervance, il propofa un temperament qui pût contenter les zelés pour la Réforme, fans épouvanter ceux qui n'étoient pas portés à une fi grande aufterité, & cela fous pretexte d'établir une uniformité dans tout l'Ordre; il exhorta tous les Abbés, les Abbeffes, les Prieurs, les Prieures, les Superieurs, & généralement tous les Religieux & Religieufes de l'Ordre, d'obferver dans la fuite l'abftinence continuelle de la viande, depuis le premier Septembre jufqu'à

BERNAR- Pâques, tant au dedans qu'au dehors des Monafteres, & FORMES DE tous les jeûnes de l'Ordre, pendant ce tems & pendant tout FRANCE. le cours de l'année, à l'exception feulement des Dimanches

DINS RE

& des Fêtes folemnelles & de Sermon, & ils en firent une ordonnance, fouhaitant que ceux qui avoient eu permiffion de garder l'abftinence perpetuelle, s'y foumiffent & fe conformaffent en cela à tous les Monafteres de l'Ordre.

Mais comme il y avoit long-tems que les Chapitres Généraux de cet Ordre fe contentoient de faire de belles Ordonnances fans les faire éxecuter,il en fut de même de celle ci, qui ne fut pas même publiée. L'Ordre de Cîteaux n'étoit pas le feul qui fe trouvât avoir befoin de Réforme, tous les anciens Ordres vivoient à peu prés dans le même relâ– chement,&avoient tous abandonné laRegle & l'efprit de leur premiere inftitution. Le Roi Louis XIII. qui foûhaitoit la Réforme de ces Ordres, s'adreffa au Pape Gregoire XV. & en obtint un Bref le 8. Avril 1622. par lequel fa Sainteté donnoit au Cardinal de la Rochefoucaut, les pouvoirs néceffaires pour cet effet. Ce Bref fut autorisé par Lettres patentes de ce Prince qui en recommanda l'éxecution à ce Prélat. Il fut auffi-tôt fignifié à l'Abbé de Câteaux & aux quatre premiers Abbés de l'Ordre, aufquels le Commiffaire Apoftolique donna ordre de le venir trouver. L'allarme fut grande dans tout l'Ordre. Les Abbés & les Religieux s'étoient fait une douce habitude de la vie qu'ils avoient menée jusqu'alors, fi oppofée à leur Regle & à l'aufterité de leurs anciennes pratiques, pour lefquelles ils avoient beaucoup d'éloignement & dont ils regardoient le rétablissement comme un joug infupportable. Le Général & les quatre premiers Abbés réfolurent de fe foûmettre en apparence; mais d'éluder en effet par toutes les voies poffibles l'éxecution du Bref de fa Sainteté.

Il n'y avoit que ceux qui avoient embraffé l'Etroite Obfervance, qui regardoient au contraire l'éxecution de ce Bref, comme là feule chofe qui les pouvoit autorifer, mettre à couvert des entreprifes de la commune Obfervance, & leur donner moïen de s'établir & de s'étendre. Ils prirent donc la réfolution de feconder de tout leur pouvoir les intentions du Pape & du Roi, & de fe faire un Protecteur du Cardinal de la Rochefoucaut. Le Général & les premiers

Abbés

« AnteriorContinuar »