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§. II.

De la Minorité des Rois de France & des Regences.

A France fe trouvant aujourd'huf fous un Roy mineur, l'on a crû fatisfaire à la curiofité du public, en don nant ici un précis hiftorique des Minoritez précedentes, & de la maniere dont le Royaume a été adminiftré durant ces temps là.

Tant que les meres des Rois mineurs ont été en état de gouverner, la Regen ce leur a été déferée, foit par le Tefta ment du Roy leur époux, foit par PAI femblée des Grands du Royaume, ou par les Arrests du Parlement de Paris, Cour des Pairs.

Lorfque la mere du Roy Mineur n'a point furvêcu à fon mari, la Regence du Pupille & de l'Etat a été adjugée au plus proche Prince du Sang. Il y a peu d'exem ples contraires.

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Ces Regens dans les premiers temps étolent nommez Gardes, Tuteurs, ou Protecteurs du Roy; quelquefois on les appelloit Gouverneurs du Royaume, ou

Lieutenans & Vicaires du Roy: ou enfin Défenfeurs & Gardes du Royaume. Ces derniers titres étoient pris par ceux aufquels le Roy confioit l'adminiftration de fes Etats durant les voyages d'Outremer. Le premier qui fe foit qualifié Regent, c'eft Philippe, Comte de Poitiers, durant la groffeffe de la veuve de Louis V. fon frere dit Hutin, en 1316.

Je retranche ici ce qui peut concerner les Regences dans les deux premieres Ra ces, pour venir à celles arrivées fous la troifiéme. Mais auparavant, il eft bon de dire quelque chofe de l'âge auquel nos Rois font reconnus Majeurs.

Hugues Capet, Fondateur de la III. Race, crût devoir fuivre l'exemple de ceux de la feconde, qui depuis Pepin lequel certainement fut le premier de nos Rois qui fe fit facrer & couronner, avoient fait pratiquer la même ceremonie à leurs fils aînez, eux encore vivans. Ainfi il fit facrer fon fils Robert; & Henri 1. en ufa de même envers fon fils Philippe I,

Jufques ici cette ceremonie s'étoit faite tantôt dans un lieu, tantôt dans un autre, felon qu'il avoit plû à nos Rois; plus fouvent pourtant dans la Ville de Reims. Mais au Sacre de Philippe I. en

1059. l'Archevêque de Reims prétendit que lui feul avoit ce droit, comme fucceffeur de S. Remy, à qui, difoit-il, le Pape l'avoit donné ; comme fi c'étoit au Pape, & non au Roy, à accorder un pareil privilege dans fon Royaume.' Quelques-uns ont foupçonné que ce fut pour détruire cette prétention, que Louis le Gros fils de Philippe, fe fit couronner dans Orleans, par l'Archevêque de Sens. Mais la véritable raifon, c'eft le fchifme qu'il y avoit alors dans l'Eglife de Reims. Ce ne fut que Louis VII. fils de Louis le Gros, qui en faifant facrer fon fils Philippe Augufte, voulut bien, en confideration de fa femme, fœur de Guillaume Archevêque de Reims, accorder à ce Prélat, pour lui & fes fuc ceffeurs, l'honneur de facrer nos Rois. Ils ne joüiffent pourtant de cet honneur qu'autant que le Roy le juge à propos.

Louis VIII. n'ayant pas eu le temps de faire facrer fon fils Louis IX. & fe trouvant au lit de la mort à Montpellier, exigea le 6. Novembre 1226. le ferment des Prélats & des Barons du Royaume qui fe trouvoient à fa fuite, de reconnoître après fon décès fon fils aîné pour leur Roy,lui prêter la foi & hommage, & de le faire couronner au plûtôt : ce qu'ils

promirent & executerent ponctuelle ment, le jeune Roy ayant été facré & couronné à Reims le 29. du même mois & an, vingt-un jours aprés la mort de fon pere.

C'est donc fur ces précautions prifes par quelques Rois de la feconde & troifiéme Rice, pour faire facrer leurs fils, eux vivans, que s'établit l'ancienne, mais trés-fauffe opinion, qu'il falloit qu'un Prince, pour être Roy en France, & reconnu tel, eût été couronné & facré ; & qu'il n'étoit Roy que du jour de fon Sacre, & non pas du jour que la Couronne lui étoit échûë: en confequence dequoi les Seigneurs s'imaginoient n'être obligez à lui rendre hommage, que du jour de cette ceremonie.

Jufqu'à Charles V. il n'y a jamais eur rien de bien fixé pour le temps auquel les Rois devoient être cenfez Majeurs, Ies uns l'ayant été plûtôt, les autres plus tard; de maniere que les Auteurs des derniers fiecles ont varié là-deffus. Du Tillar a crû que la Majorité de nos Rois commençoit à quinze ans, Mezeray à vingt, du Puy à vingt-un, & Cardin le Bret à vingt- trois accomplis. La fageffe de Charles V. lui faifant donc prévoir les malheurs qui pourroient arriver de

eette incertitude fur l'âge auquel fon fils & fes fucceffeurs pourroient être reconnus comme Majeurs, l'obligea de rendre un Edit perpetuel & irrevocable, par lequel il déclara qu'à l'avenir les Rois de France ayant atteint l'âge de quatorze ans, prendroient en main le gouverne ment de leur Etat, recevroient la foi & hommage de leurs Sujets, & des Arche vêques & Evêques ; en un mot, qu'ils feroient reputez Majeurs, comme s'ils avoient vingt-cinq ans, & qu'aprés cela Ils pourroient fe faire facrer quand ils le jugeroient à propos.

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Cet Edit daté de Vincennes au mois d'Août 1374. regiftré en Parlement, le même Roy tenant fon Lit de Juftice le 20. May fuivant, avança la Majorité des Rois, mais ce fut Charles VI. fon fils qui la fixa toûjours. L'on s'étoit preffe de faire facrer ce Prince immediatement aprés la mort de fon pere, quoiqu'il n'eût encore que douze ans ; & cela à cau fe des grandes conteftations qui s'étoient émûës entre les Princes du Sang pour le gouvernement de l'Etat.

Douze ans aprés, c'est-à-dire, au mois de Janvier 1392. il rendit une Déclara tion, dans laquelle aprés avoir ordonné de la Regence, fa mort avenant, pour

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