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monde, & ont toûjours eu la préfeance fur eux.

Clovis le cinquième de nos Rois, fut honoré du titre de RoiTrés-Chrétien,aprés fon batême fi l'on peut s'en rapporter au Teftament de S. Remi,qui lui donna cette qualité. Les Peres du premier Concile d'Orleans,tenu en 511.le nommerent auffi Fils de l'Eglife. Ses fucceffeurs conferverent ces deux précieufes qualitez: mais quand les autres Princes de l'Europe fe furent convertis à la Foi, & eurent ab. juré l'Arianifme, dont plufieurs d'entr'eux s'étoient laiffez infecter, alors les Rois de France, qui avoient la gloire d'avoir confervé la pureté de la Religion Chrétienne, embraffée par Clovis, furent honorez par les Papes du titre de Fils aîné de l'Eglife; titre qui, joint à. celui de Roy Trés-Chrétien, leur fait plus d'honneur que toutes les autres qualitez illuftres qu'on pourroit leur donner. Dès le temps de Childebert I. fils de Clovis, le Royaume de France fut appellé trés-Catholique, ainfi qu'il eft marqué dans la Vie de faint Cefaire, Evêque d'Arles mort en 544. & le Pape laint Gregoire le Grand, écrivant en Septembre 595. à Childebert I I. petit-neveu de Childebert I. lui dit, qu'autant

que la dignité Royale eft an deffus des autres conditions, autant la dignité de fon Royaume l'élevoit-elle à raison de fa foi, an deffus des autres Rois. (a)

Le Pape Gregoire III. (b) écrivant à Charles- Martel, qui n'étoit point Roy, le traite de Trés Chrétien : & Pepin fon fils, Chef de la feconde Race, reçut les mêmes titres du Pape Zacharie. (c) Etienne III. le qualifia (d) d'Excellence trésChrétienne; ce qui eft rapporté par Anaftafe le Bibliothecaire, qui dans le IX.. Giecle a écrit les Vies des Papes. Paul I. mort en 767. aprés avoir appellé dans une de fes Lettres (e) le même Pepin Ray orthodoxe Défenfeur de la Foi Chrétienne, & demandé à Dieu dans une autre (f) de conferver le Trés-Chrétien Roy Pepin, exaltoit dans une derniere (g) la Trés-Chrétienne bonté de ce Prince. Il eft encore nommé Roy Catholique à la fin d'un ancien Manufcrit de l'an 767. qui contenoit l'Ouvrage de Gregoire de

(a) Lettres de S. Gregoire, livre V. lettre

VI. Indiction XIV.

(b) Lettre V.

(c) Lettre V.
(d) Lettre VI.
(e) Lettre XXXV.
(f) Lettre XXXVII.
(g) Lettre XXXIX,

Tours, qui a pour titre De la Gloire des Confeffeurs. Il paroît par la Lettre V: du Code Carolin, que Pepin eft intitulé Roy par la grace de Dieu: (a) CharlesMagne fon fils conferva cette expreffion, qui eft restée à fes fucceffeurs & le même Monarque eut auffi des Papes Etienne IV. (b) & Adrien I. (c) là qualité de Roy Trés-Chrétien. Elle paffa à quelques-uns de fes fucceffeurs ; de maniere que Pie II. (d) écrivant au Roy Charles VII. lui difoit, qu'il tenoit ce titfe glorieux, comme par fucceffion de fes prédeceffeurs, qui l'avoient merité par leur zele pour le foûtien & la défense de la Religion Chrétienne...)

Nos Rois Lembloient en être en poffelfion dans le XII. fiecle, puifqu'alors Jean de Sarifberi, Auteur Anglois, écrivant à l'Evêque de Cantorberi, pour lui rendre compte d'un voyage qu'il avoit fait en France, lui parloit de certaines chofes qu'il avoit vûës à la Cour du Roy Trés-Chrétien. Cependant ce titre ne paroft avoir été attaché pour toûjours à la lạ

(a) Mabillon, Diplomatique, liv. 2. ch, 3. art. V. VI.

(b) Lettre 47.
(c Lettre 55.
(d) Lettre 385.

A L'ETAT DE LA FRANCE.

perfonne du Roy de France, que depuis le 1.Decembre 1469. jour auquel Guillau me de Montreuil Ambaffadeur de Louis XI. vers le Fape Paul II. eut fa premiere Audiance, en laquelle ce Souverain Pontife, aprés avoir beaucoup loüé les fervices rendus au S. Siege par les Rois de France, confirma fpecialement à ce Prince & à fes fucceffeurs, le titre de Roy Trés-Chrétien: ce que ce Pape & fes fucceffeurs ont toûjours obfervé depuis, en parlant de nos Rois, ou en leur écrivant. Le Concile de Bafle dès l'an 1439. avoit donné ce titre au Roy Charles VII. comme le tenant de les ancêtres ; & depuis le Pape Pie II. écrivant au même Roy, avoit reconnu en fa perfonne ce titre hereditaire.

Dom Mabillon rapportant (a) les differens titres que nos Rois prenoient dans leurs differentes Chartes, fait remarquer qu'ils s'y font toûjours intitulez Rois des François, jufqu'à Philippe- Augufte qui le premier fe qualifia Roy de France. Loüis VIII. & faint Louis IX. du nom, reprirent pourtant dans quelques Actes l'ancien titre de prédeceffeurs de Phi

(4) Mabillon, Diplomatique, liv. 2. ch. 3. & liv♫5. notes fur la table 22. & article 210.

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lippe. Augufte mais depuis eux prefque tous leurs fucceffeurs s'en font tenus au titre de Roy de France.

Il faut auffi remarquer, qu'il n'y a que les Etrangers qui traitent nos Monarques de Roy Trés-Chretien & de Majefté trés-Chrétienne. Quant à leurs Sujets, ils ne doivent jamais dire ni écrire que le Roy. Il y en a une nouvelle preuve dans un Arreft rendu par le Parle ment de Paris, fur les conclufions du Procureur General le 27. May 1699, au fujet des Habitans du Duché de Bar qui, comme Sujets du Duc de Lorraine, affectoient dans leurs Sentences, & dans leurs Tribunaux de traiter le Roy de Trés-Chrétien. Il leur fut défendu d'en ufer ainfi, parce qu'étant Vaffaux & ref fortiffans de la Couronne, il y avoit à craindre que cette affectation ne tirât à confequence dans la fuite, & ne fift par fucceffion de temps, regarder le Barrois en France, comme un Etat étranger.

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Que fi l'on veut des preuves étrange res de l'élevation de nos Rois au deffus des autres Rois de la terre, on n'a qu'à lire Suidas, Auteur d'un Lexicon Grec, vers la fin du X. fiecle, & l'on y verra, que de fon temps, lorfque l'on prononçoit le nom de Roy, fans autre défigna

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