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d'Henri III. quoiqu'en effet ils n'ayent été tenus que quatre ans après. Un Hiftorien eût raconté ce qui fe paffa pendant cet intervale, le Poëte n'auroit pû le faire fans s'écarter de l'unité de fon fu jet. De même dans le dixiéme chant il décrit comme des événemens liés immédiatement le blocus & la famine de Paris, la Converfion d'Henri IV. & la Reddition de cette place qui font néanmoins trois Epoques différentes, le premier s'étant paffé en 1590. le fecond en 1693. & le troifiéme en 1594. l'ordonnance de fon Poëme exigeoit qu'il ne laiflât point de vuide, & le difpenfoit de l'exactitude Chronologique qui ne convient qu'à un Annaliste. Au reste ce n'eft qu'aux grands Maîtres, & dans des fujets importans qu'il appartient de difpofer à leur gré des événemens Hiftoriques, le fuccès de leurs ouvrages & la célébrité de leur nom autorisent & juftifient ces hardieffes. Les négligences de Raphaël feroient des défauts monftru

Du Son

net.

eux dans les Tableaux d'un jeune Peintre. Nous aurons encore occafion de parler de cette matiere à l'ar ticle du genre Dramatique, dans lequel on plie les événemens aux régles du Théâtre,

On dit à ce propos qu'un jour ce Dieu bi
farre,

Voulant pouffer à bout tous les Rimeurs
François,

Inventa du fonnet les rigoureufes loix.

Je foupçonnerois volontiers M, Defpréaux d'exagération dans ce qu'il dit içi du Sonnet: il fembleroit à l'entendre que ce petit ouvrage est auffi difficile qu'un Poëme Epique: cependant le méchanifie en eft fimple, & ce n'eft pas un effet prodigieux pour l'efprit humain, que de fe foutenir dans une production de quatorze Vers. Je fçais qu'on y eft indifpenfablement obligé par la raison même que le Sonnet n'eft pas d'une grane étendue, les Vers foibles & négligez en doivent être bannis,

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Quant à la répétition du même mot, je ne la crois point également défectueuse, pourvû qu'elle ne foit pas trop fréquente. C'eft pourquoi je ne crains pas de citer en exemples un Sonnet, dans lequel cette régle n'est point obfervée.

Vous qui pour expier nos ingrates ma- M. Go

lices,

deau

Evêque

Immolez au Seigneur des agneaux inno- deVence.

cens,

Et qui fur les Autels faites fumer l'encens, Prêtres de l'éternel, quittez ces faints Of fices.

Venez voir votre Dieu dans de honteux

fupplices,

Qui pouffe vers le ciel d'adorables accens
Et par un facrifice au deffus de nos sens,
Met une heureuse fin à tous vos facrifices.
Célebrez, ô pécheurs, en ce merveilleux

jour,

L'excés de fes bontés, l'ardeur de fon a

mour;

Connoiffez en fes maux le grandeur de vos crimes :

Mais la croix où Jefus meurt pour votre

péché,

Au lieu de vos difcours, vous veut pour fes victimes,

Et l'art de la loüer, c'eft d'y vivre attaché.

Un Sonnet dont les rimes font difpofées dans les deux derniers tercets, comme elles le font dans celui qu'on vient de lire,fe nomme Sonnet régulier, pour le diftinguer du Sonnet irrégulier où l'onzième Vers rime avec le quatorziéme, au lieu que dans l'autre le quatorziéme & le douziéme riment enfemble. Il eft encore à remarquer que le Sonnet doit toujours finir par une rime différente de celle par laquelle il a commencé, en forte que fi le premier Vers eft mafculin, le dernier doit être féminin; & celui-ci masculin, lorsque l'autre eft féminin. On fait encore des Sonnets fur des bouts rimés, c'eft-à-dire, fur des rimes données à remplir; cette forte d'ouvrage étoit fort à la mode du tems de Sarrazin & de Voiture; le premier s'en eft agréablement mocqué dans un petit poëme burlesque

intitulé la défaite des bouts rimés. En effet, on peut fans injuftice les ranger dans la Claffe de ces fortes d'amufemens d'efprit, dont le plus grand fuccès ne fçauroit jamais réparer la moindre partie du tems qu'on a perdu à les compofer, telles que font les Enigmes, les Logogrifes, & leur appliquer ce beau mot d'un ancien: Turpe eft difficiles habere nugas. L'efprit gêné par la bifarrerie de la rime,néglige la jufteffe de la pensée pour s'occuper uniquement de la Verification: qu'en réfulte-t-il?un affez mauvais compofé, mais nullement un Sonnet, puisqu'il n'est pas permis d'être médiocre en ce genre, dont le vrai caractere eft un mélange de force & de délicateffe, qui demande moins de génie que imagination, de la grandeur dans l'expreffion, & fur-tout un tour heureux & naturel dans les penfées; ce qui fait que la plûpart péchent par trop de rafinement & de fubtilité au refte,notre fiécle n'eft plus dans le goût de ces petites piéces déterminées qui faifoient tant

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