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De la faim vorace.

Les Poules font quelquefois fi affamées, fur tout lorfqu'elles couvent, qu'elles caffent leurs œufs & les mangent; dès qu'on s'apperçoit de cette avidité extraordinaire, il faut prendre un œuf, en ôter le blanc, & mêler dans le jaune du plâtre détrempé, en forte que cela devienne dur comme une pierre; lorfque les Poules affamées voudront, comme à l'ordinaire, se jetter fur cet œuf pour l'avaller, trouvant beaucoup de refiftance, elles s'en ennuiront, & perdront ainfi leur mauvaise coûtume. Au furplus, pour leur faire paffer leur voracité, il faut mêler du raifin fauvage dans la mangeaille qu'on leur donnera à dofe raifonnable dans la mue où elles feront enfermées.

De la Vermine.

Les poux & les puces incommodent auffi les Poules : le remede eft de les oindre de beurre ou d'huile, & de les tenir fraîchement & proprement; ou bien de les laver dans de l'eau où l'on aura fait boüillir du cumin, fon amertume eft fi forte qu'elle fait mourir la vermine qui emmaigrit extrémement la Volaille. On fe fert encore pour cela d'eau dans laquelle on a fait bouil lir des lupins fauvages; quelquefois les Poules fe guériffent elles-mêmes, en fe vautrant dans la pouffiere.

D'autres pour faire mourir les poux des Chapons, Poules & Pigeons qui les empêchent d'engraiffer, prennent un peu de foulfre qu'ils font brûler pour parfumer l'endroit où les Volailles dorment, la fumée fera mourir leurs poux; les parties rameuses & pointuës du foulfre suffoquent & empêchent la refpiration de cette vermine.

De la galle.

On reconnoît que les Poules ont la galle, lorfque les plumes de la partie fur laquelle elle s'eft jettée, tombent : pour la guérir, il faut d'abord rafraîchir ces animaux, & pour cela on prend des bettes & des choux, qu'on hache bien menu & qu'on mêle avec du fon, le tout détrempé dans un peu d'eau; puis on prend du vin dans fa bouche, dont on les arrofe, & on les fait auffi-tôt fécher au Soleil ou au feu ; ce foin doit durer jufqu'à ce qu'ils foient guéris.

De la goutte.

Le froid la leur caufe fouvent le moyen de les en préferver, eft de faire en forte qu'elles ne couchent jamais dehors, & que leur Poulailler foit affez chaud, nettoyé bien fouvent, & parfumé de même; mais fi cette maladie les a pris, il faut leur graiffer les pattes & les jambes de beurre frais, ou de graiffe de Poule qui eft encore meilleure.

Cette incommodité fe connoît lorfque leurs jambes & leurs pieds devien nent roides & qu'elles ne peuvent fe tenir deffus.

Des abfies.

On ne foupçonne que les Poules ont ce mal, que quand elles paroiffent

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triftes & mélancoliques; pour lors il les faudra prendre & leur regarder au croupion, où le forme ordinairement cet abfcès; il leur vient d'être trop échauffées & d'une parefle de ventre, qui corrompant la maffe du fang, oblige la nature de fe décharger fur cette partie de ce qu'elle a de mauvais; le feul remede eft de fendre l'abfcès avec le cifeau, & de le preffer enfuite avec le doigt; puis rétablir les Poules en leur donnant des laituës ou des bettes bien hachées, mêlées avec du fon détrempé dans l'eau, dans laquelle y aura un peu de miel.

il

Du mal-caduc.

Les Poules qui l'ont font d'une maigreur terrible, demeurent toutes immobiles, fans manger; ou fi la nature les excite à quelque mouvement, c'est d'une maniere gourde & furprenante. Toute Volaille guérit difficilement de ce mal, qui n'étant caufé que par des vapeurs aufquelles leur tête ne peut pas refifter, les fait fouvent mourir ; & à cela on ne trouve autre remede que de leur rogner les ongles des pieds, & les arrofer fouvent avec du vin. Leur nourriture, pendant cinq ou fix jours, fera d'orge boüilli, puis on les purgera avec des bettes ou des choux, comme on a dit ci-deffus; enfuite, pendant quatre jours, on leur fera manger du froment pur, & jamais de chenevi; après quoi on les remettra dans la Baffe-Cour.

De la phrifie.

La Volaille, principalement celle qui eft d'une complexion chaude, devient fouvent hétique. Quand la phtifie eft formée, il n'y a plus de remede; mais pour la prévenir il faut bien nourrir la Volaille, & lui donner de l'orge bouilli avec de la poirée ; l'un nourrit & rafraîchit, & l'autre puri. fie; c'est pourquoi on met auffi dans leur boisson un quart de fuc de poirée, contre trois quarts d'eau.

De la Müë.

Les Poulets, lorfqu'ils font petits, y font tous fujets : il y en a qui en meurent, & cela arrive ordinairement à ceux qui naiffent trop tard, ce qui fait que cette maladie les attaque pendant les mois de Septembre ou d'Octobre, où les vents font déja froids; ceux qui mûent à la fin de Juillet, le font avec fuccez, parce que la chaleur les aide; ils ne perdent pas alors toutes leurs plumes, & celles qui ne tombent pas dans une année, tombent l'année fuivante.

Pendant la mûë ils mangent peu, font triftes & mélancoliques, hériffent leurs plumes, fecouënt fouvent celles du ventre de côté & d'autre, & les tirent avec leur bec en fe gratant la peau.

Le remede eft de ne les point lever du matin, ni les coucher trop tard: pendant le jour on les expofera le plus qu'on pourra au Soleil, puis on prendra du vin qu'on laiffera tiédir dans fa bouche, & qu'on jettera fur leurs plumes, on leur donnera enfuite un peu de fucre dans leur eau, avec du millet ou du chenevi pour leur nourriture: ce bon entretien les garantic entierement des perils de la mûë.

De la rupture de Fambe.

Lorfque cet accident eft arrivé à quelque Volaille, il faut la mettre fous la mue avec de bonne nourriture & de bonne eau, fans y laiffer aucun bâton fur lequel elle puiffe fe percher, crainte de fe bleffer davantage. Elle y fera jufqu'à ce qu'on voye que la jambe fe foit fortifiée & refaite entierement; ce qui ne manquera pas d'arriver par un effet de la nature seule, à caufe du peu de mouvement que fe donnera la Poule, fi elle est ainfi renfermée dans une chambre où on n'entrera que fort peu.

On fe donnera bien de garde, croyant aider la nature, de lier cette jambe, ni de l'empaqueter en aucune façon, parce que cela feroit venir quelque inflammation ou quelque apofthume au-deflus de la ligature; ce qui reculeroit la guérifon plûtôt que de l'avancer.

De la mélancolie.

Les Poules tombent quelquefois dans un état de langueur & de mélancolie, qui fe connoît quand elles fe hériffent, qu'elles ont le jabot plus gros que de coûtume, qu'il y paroît des veines rouges qui proviennent de la maigreur de l'eftomac, & qu'elles jettent leur nourriture en la becquetant. Cette mélancolie leur provient de quelque nourriture qui les a trop échauffées; c'est pourquoy, on leur ôtera d'abord l'avoine & le chenevi, on leur don nera de l'orge, & trois fois en fix jours, c'est-à-dire de jour à autre, des laitues & de la poirée bien hachée, avec du fon détrempé dans de l'eau, où on aura mis fondre un morceau de fucre.

Ou bien fi c'est dans le temps des melons, ou qu'on ait été foigneux d'en ferrer de la graine, on en prendra, qu'on pilera bien & qu'on mêlera avec un peu de millet pour leur faire manger.

De quelques autres infirmitez aufquelles les Poules font fujettes.

Les Poules tombent malades quelquefois à force de trop pondre, ce qui les met en langueur & les épuife; & d'autres au contraire languiffent pour être trop attachées à couver; d'autres enfin avortent, c'est-à-dire, donnent des œufs imparfaits, & avant le temps prefcrit par la nature; de maniere que ces trois fortes de maladies les mettent hors d'état de rendre aucun profit. Pour y remedier, on prend un blanc d'œuf qu'on fait cuire jufqu'à ce qu'il foit comme brûlé; on y mêle le même poids de raifins fecs qu'on fait brûler, & on le leur donne à manger avant toute autre nourriture.

Au refte, nous avons déja dit que le froid eft l'ennemi mortel des Poules & leur caufe quantité de maladies; c'est pourquoi on fe fouviendra de les en preferver en leur donnant un bon Poulailler, bien fermé & bien chaud, & de bonne nourriture.

CHAPITRE

CHAPITRE III.

Des Cocqs & Roules-d'Inde..

LA Lente de celle de nos A race de ces Oyfeaux qui nous eft venue des Indes, & qui eft differen rente de celle de nos Poules communes, eft d'un grand profit, parce qu'elle multiplie beaucoup, aifément & fouvent; & la chair de ces Oyfeaux, fur tout quand ils font jeunes & gras, eft fort nourriffante, de bon fuc & facile à digerer; mais auffi cette race de Volaille eft vorace, piaillarde & difficile à élever & à nourrir tant qu'elle eft jeune:

Les Latins l'appellent Paon- d'Inde, parce que les Cocqs-d'Inde & les Paons ent cela de commun, que les uns & les autres font fiers, mal-veillans, co léres, fe plaifent à fe mirer, & à être vûs.

Les Cocqs & Poules-d'Inde logent commodément par-tout dès qu'ils font un peu grands; quant aux jeunes, il fuffit qu'on les mette dans un endroit exprès fans plancher, couvert feulement & garni de groffes perches pour les y faire jucher.

Il n'y a pas tant de particularitez à choisir un Cocq-d'Inde qu'un commun; car il fuffit qu'un Cocq-d'Inde foit d'un naturel éveillé, fort & hardi; il n'importe pour la couleur, à moins que la curiofité ne nous faffe chercher ceux dont les plumes font toutes blanches ou toutes rouges, ils n'en font pas

meilleurs.

On donne cinq Poules-d'Inde à chaque Cocq. Il n'y a pourtant pas de profit à en élever peu; car quand on en a affez pour en faire un efpece de troupeau que l'on fait garder par un Dindonnier qui les mene paître aux Champs, ils s'y nourriffent de racines, de vers, d'herbes, fur tout d'orties & de fruits, au lieu que quand on n'en a qu'un petit nombre, il faut les nourrir entiere ment dans la Baffe-Cour; & comme ils font fort gourmands, ils y confomment beaucoup plus de grains, & font plus de dégât dans les jardins, vignes & bleds, qu'un troupeau entier bien gardé.

On a fouvent un verger exprès qu'on laiffe toûjours en herbes pour nourrir les Dindes; c'est un ménage, parce qu'elles confomment moins de grains & ne font point tant de dégât; cela les diffipe, les engraiffe & les rend plus

délicates.

Comme les Poules-d'Inde couvent les œufs de toutes fortes de Volailles, & qu'elles couvent deux fois l'an, il eft aifé de multiplier bien-vîte toute la Volaille de la Baffe- Cour, en ayant bien des Poules-d'Inde qu'on fera couver; car elles couvent à la fois vingt-cinq à trente œufs de Poules communes.

De la ponte & couvée des Poules-d'Inde...

On appelle ponte d'un Oiseau, un certain nombre d'œufs qu'ils donnent pendant l'année avant que de couver : les Poules-d'Inde en font deux tous les ans ; l'une commence vers la mi- Février, quelquefois un peu plus tard,. felon que le froid eft plus ou moins rude; & l'autre dans le mois d'Août chaque ponte eft d'environ quinze œufs.

Tome I.

P

Lorfqu'on s'apperçoit que les Poules. d'Inde veulent pondre, il faut remarquer où elles vont pondre, & y aller prendre les œufs de jour à autre : quant à la couvée, le choix des œufs & la préparation des nids eft de même qu'aux Poules communes ; ainfi quand la ponte de la Poule-d'Inde, qui va à douze ou quinze œufs, eft achevée, & qu'on voit qu'elle s'attache au nid, marque qu'elle veut couver, alors on lui donne tout à la fois autant d'œufs qu'on veut qu'elle en couve; on ne doit pourtant lui donner que quinze œufs de Poule-d'Inde à la couvée de Février, parce qu'il fait encore froid; au lieu qu'on leur en donne jufqu'à vingt pour celle du mois d'Août: on leur donne vingt-cinq œufs quand on y mêle autant d'œufs de Poule commune ou de Canne, qu'il y en a de Poule-d'Inde, & trente de Poule commune ou de Canne, quand il n'y en a point de Poule-d'Inde : mais il faut remarquer que ceux des Dindes & de Cannes font un mois à éclore; c'eft pourquoi les œufs de Poules ordinaires qui ne font que vingt-un jours à éclore, doivent être mis fous la Poule-d'Inde neuf jours plus tard que les autres, afin qu'ils puiffent tous éclore en même-temps.

Il ne faut point laiffer manquer les couveufes de nourriture; il faut même les lever toûjours fort doucement de deffus leurs œufs pour les faire manger & boire; car elles font fi attachées à leur ouvrage, qu'elles fe laifferoient fouvent mourir de faim fi on ne les obligeoit de manger.

Le tems venu que les Dindons doivent éclore, on leur aide, comme on a enfeigné pour les Pouffins.

Quoique les Poules- d'Inde de la même année foient très-bonnes à couver, cependant celles de deux ans valent toûjours mieux; elles font leur ponte de meilleure heure, couvent plûtôt, & conduifent mieux leurs petits.

Pour agir ici avec économie, lorfqu'on a plufieurs Poules-d'Inde qu'on a mis couver, & que leurs petits font éclos, il faut prendre les Dindons de trois meres, & les donner à une feule à conduire; elle le peut, puis jetter au Cocq les deux autres Poules-d'Inde pour faire une feconde ponte, & couyer une feconde fois.

Il y en a même qui, fi-tôt que les petits d'une Poule-d'Inde font tous hors de la coque, les portent fous une autre Dinde qui aura des petits de même temps, puis prennent dans le moment d'autres œufs, foit de Dindes ou de Poules communes, les gliffent doucement fous cette couveuse, qui dans la chaleur où elle eft, conduit encore ces œufs à une bonne fin: on lui donne alors de temps en temps de la rôtie au vin avec de l'orge ou de l'avoi dont on fait à la fin fa nourriture ordinaire.

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De la maniere d'élever & nourrir les Dindonneaux.

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Il n'eft guere d'Oyfeaux qu'il faille élever plus délicatement que les Dindons, ni qui demandent plus de foins ; le froid eft leur ennemi mortel ; c'est pourquoi, dès qu'ils font éclos, on les met dans un lieu chaud pour y élever, jufqu'à ce qu'ils foient devenus un peu forts; on ne les en laiffera fortir avec la mere que quand il fera du Soleil, & jamais quand on fera menacé de la pluie; car fi la chaleur les fortifie, le moindre froid les morfond, & la pluie les fait mourir.

La moindre faim leur eft auffi fatale: & de plus il faut les manier fort doucement, lorfqu'on eft obligé de les ôter de deficus leur mere, ou de les

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