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fi l'on n'a point de lieu affez obfcur pour les mettre, il faut leur crever les yeux,. & ne les point laiffer manquer de mangeaille ni de boiffon; ils fçavent bien, quoi qu'aveugles, la retrouver, dès qu'on les a une fois mis deffus.

Le lieu pour engraifler les Oyes doit être chaud, autrement leur nourriture fe convertiroit plutôt en chair qu'en graiffe: il y en a qui les mettent dans un cellier ou dans la cave; d'autres qui fe contentent de les meure fous des muës. pour les engraiffer.

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Les Oyes, quoique fort fales, veulent être toûjours tenues fort pro prement, fur tout quand on veut qu'elles engraiffent promptement: pour cet effet, leur nourriture dont on ne les laiffera jamais manquer fera du. millet, de l'avoine, des pois & des féves bouillies dans de l'eau, ou bien des choux hachez & boüillis avec un peu de fon, du gland concaffé, des raves cou+ pées par morceaux ou autres chofes femblables. La farine de froment ou d'orge détrempée dans de l'eau chaude, en forte qu'elle faffe une boüillie épaiffe, & toutes fortes de criblures de bled leur font excellentes, de même que le blea sarafın & l'eau sablée ; il y en a qui les engraiffent comme les Chapons, c'està dire, avec une pâte de farine d'orge ou de bled de Turquie. D'autres pour leur aiguifer l'appetit & les faire manger & engraiffer davantage, leur donnent du charbon broyé, outre les mangeailles ci-deffus qu'on leur donne fépa rées de ce charbon ; c'eft affez de quinze jours ou trois femaines pour engraif fer les jeunes Oyes; pour les vieilles il leur faut un mois..

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CHAPITRE V.

Des Cannes, tant commanes que d'Inde.

Es Cannes communes fympatisent affez avec les Oyes, à la difference néanmoins que les Cannes vivent & fe plaifent plus fur l'eau que fur terre, au lieu que les Oyes aiment mieux pâturer que barboter: c'eft pourquoi qu l'eau n'eft pas commune il eft prefque inutile d'y élever des Cannes.

Leur plume n'eft pas fi fine que celle des Oyes, avec laquelle on la mêle pour faire des lits: mais en récompenfe les œufs & la chair de Canne font. bien meilleures que celles d'Oyes, quoique les. Cannes fe plaifent à barboter dans la fange, & qu'elles fe nourriffent d'alimens fales, comme de poiffons morts & même pourris, de bourbe, d'araignées, vers & mouches, de cra paux & grenouilles & de tripailles.

Comme la couleur ne fait rien à la bonté des Cannes, il n'y a point d'autre choix à faire que de prendre toûjours les plus groffes. Un Canard aura huit ou dix Cannes,

Cette Volaille fera gouvernée comme les autres,tant à l'égard de la nourriture que de la maniere de les élever: il faut leur donner à manger comme aux Poules matin & foir, & toûjours aux mêmes lieux & heures, afin qu'elles s'y trouvent & ne s'égarent point.

On les garentira du Renard autant qu'on pourra, en lès obligeant par là nourriture qu'on leur jettera de temps en temps, de ne point trop s'écarter; on n'en fçait point d'autre moyens. Il faut au refte les enfermer le foir, & leur

ouvrir le matin la porte de leur toit, ou du poulailler, fi elles n'ont point de toit féparé.

Il ne faut pour engraiffer les Cannes, que les bien nourrir; encore eft - ce la Volaille de la Baffe- cour, pour la nourriture de laquelle on prend moins de précaution; il faut fur tout prendre garde qu'elles n'aillent dans les Etangs & Viviers poiffonneux, car elles mangeroient tous les petits Poiffons. Elles aiment fort le pain, l'orge & tout ce qui approche du carnage, car elles font très-carnaffieres & très-voraces.

De la Ponte & Couvée des Cannes.

Les œufs de Cannes font plus gros que ceux de Poules, & ils ont la coquille plus épaiffe. Ils font bons à manger; mais il vaut mieux les mettre couver & on ne fçauroit trop élever de Cannes, parce qu'elles font beaucoup de profit, & point de dégât. Elles commencent ordinairement leur ponte au mois de Mars, & la continuent de jour en jour jusqu'à la fin de May, fi elles font bien nourries & dans un lieu qui leur plaife. Pendant ce temps on ne doit point les laiffer fortir du toit qu'elles n'ayent rendus leurs œufs, étant fort en danger de les égarer fi l'on n'y prend garde.

Elles ont coûtume de couver fur la fin du mois de Mars, & celles qui viennent de ces premieres couvées font toûjours les meilleures à cause que les chaleurs de l'Eté contribuent beaucoup à les faire croître, au lieu que celles qui naiffent tard ne deviennent pas fi fortes, à caufe du froid qui furvient quand elles font encore toutes jeunes.

La maniere de faire couver les Cannes eft pareille à celle des Oyes dont on vient de parler: cependant on donne plûtôt les ceufs des Cannes à couver aux Poules communes qu'aux Cannes mêmes, parce que la Poule eft plus douce & couve avec plus d'attache, & qu'elle couve jufqu'à treize œufs, au lieu que la Canne n'en fçauroit couvrir que fix; on prétend même qu'à cause de fon naturel aquatique, les œufs qu'elle couveroit font plus expofez à être abandonnez ou morfondus, que quand ils font fous une Poule.

Telle Volaille que ce foit qui les couve, ils y refteront un mois entier, car il faut trente & un jours pour faire éclore les Cannetohs on les éleve & on les nourrit comme les Pouffins ; il y en a qui leur donnent de l'orge ou du panis boüilli, du gland & des herbages hachez menu, du marc de raifin, des miettes de pain & des menuïfailles d'Etang, c'est-à-dire des écreviffes, goujons & autres petits poiffons; ils obfervent de ne laiffer fortir les Cannetons, qu'au bout de huit ou dix jours pour qu'ils foient plus forts, encore ne les laiffe-t-on pas aller tout d'un coup avec les vieux Canards qui les battroient. Quand c'est une Poule commune qui a couvé les œufs de Canne, il ne faut pas être furpris de voir les Cannetons courir à l'eau auffi-tôt qu'ils font éclos, & la Poule furprise elle-même de la figure de fes petits, aller pourtant gémir & tourner autour de l'eau ; il n'y a rien à craindre pour la mere ni petits, il n'y a qu'à avoir foin de les nourrir.

pour les

La chair du Canard éft agréable au goût, nourriffante, mais de difficile digeftion; les éguillettes, la chair de l'eftomach & le foye font les parties les plus eftimées du Canard: le fauvage dont il ne s'agît pas ici, a la chair brune & rougeâtre, vit dans les bois, vole beaucoup, nage peu, & il eft bien plus eftimé, plus agréable & plus falutaire que le domestique..

Tome I.

Des Cannes d'Inde.

La Canne d'Inde eft un oifeau plus gros que les Cannes domeftiques; il n'en a ni le port, ni la figure, ni la couleur, il ne crie point: la femelle donne peu d'œufs, & leurs petits font fort difficiles à élever.

On donne fix femelles à chaque mâle : mais cette efpece ne produit guere la premiere année comme font les nôtres, quoiqu'elle se plaise à l'eau vive & à la fin s'apprivoife comme les dernieres.

Ce n'eft que quand elles font bien apprivoifées & accoûtumées avec les autres, qu'elles pondent & couvent; il eft pourtant plus fûr de donner leurs œufs à couver à une Poule commune: elle les fait éclore heureusement au bout du mois. Ces Cannetons qui font forts difficiles à élever, ne feront nourris d'abord que de miettes de pain blanc détrempé dans du lait caillé. Le millet & l'orge bouilli ne leur eft pas une fi bonne nourriture, ils auront toûjours beaucoup d'eau, dans laquelle on pourra jetter du fon pour qu'ils y pour qu'ils y barbotent; il ne les faut laiffer aller qu'au bout de quelque temps & à mesure qu'ils fe fortifient.

Nos Canards ne fe mêlent qu'avec les femelles de leur efpece: mais ceux d'Indes s'accommodent très-bien des Cannes communes; il en vient beaucoup d'œufs, & de ces œufs, des Cannes bâtardes qui s'élevent aifément & font des amphibies métifs gros & forts, qui ne reffemblent ni aux Cannes-d'Indes, ni aux nôtres, Ces Cannes- d'Indes & bâtardes font auffi bonnes & beaucoup plus rares que les nôtres, & il faut remarquer que le Canard domeftique ne fouffre guere l'Indien, c'est pourquoi on les fépare.

CHAPITRE VI.

Des Pigeons.

E Colombier étant bâti de la maniere qu'on a marqué ci-devant, il s'agit à préfent de le peupler, car c'eft la piece de la Baffe-cour qui doit rappor ter le plus pour la Cuifine & pour la bourse du Maître.

Les Pigeons communs font ou fuyards ou domeftiques; les derniers ne quit tent prefque point la maison, mais les autres vont chercher leur vie au loin: les uns ni les autres ne perchent point fur les arbres, a la difference du Pigeon ramier qui eft un Pigeon fauvage. On appelle Pigeons Cauchois, de gros Pigeons du Païs de Caux en Normandie, où ces Oifeaux font plus gros que les

autres.

De la maniere de peupler le Colombier.

Il faut d'abord fçavoir bien choisir les Pigeons; les blancs ne font pas tant eftimez que les autres, parce qu'on les croît moins féconds, & qu'ils font plus en danger que les autres, d'être pris par les Oifeaux de proie.

Les Curieux eftiment beaucoup ceux qui font de couleur de foupe de lait c'est-à-dire roux & blanc ; mais à l'égard du Colombier, le Pigeon paffe pour

bon & fecond quand il eft gris tirant fur le cendré & le noir, qu'il a les & les pieds rouges, & le coû d'un jaune couleur d'or.

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Les Pigeons privez font moins farouches, quittent moins le Colombier, ne s'écartent point tant, font beaucoup plus gros, rapportent bien davantage, & ont la chair bien plus délicate que les Pigeons communs dont on vient de parler: mais on achete ces avantages fouvent plus qu'ils ne valent; car les communs font à la verité plus petits, ne couvent pas fi fouvent, & ne font jamais fi dodus que les autres; mais ils fe nourriffent prefque toûjours euxmêmes, fans qu'il en coûte rien à leur maître; au lieu que les autres ne fortent jamais, confomment beaucoup de grains & demandent bien plus de foin. Quoiqu'il en foit, on n'a qu'à choisir de ces deux efpeces; on peut même les mêler dans les commencemens, afin que les petits qui en proviendront, tien nent de l'un & de l'autre : nous donnerons ci-après un article féparé pour les Pigeons privez..

Il n'y a que deux faifons pour peupler le Colombier; la premiere & la meilleure, eft le mois de May, parce que ces premiers Pigeons fe fortifians beaucoup durant l'Eté, fe trouvent en état d'apporter bientôt du profit: & la feconde, eft au mois d'Aoust, à cause du grain que les peres & meres apportent en abondance aux pigeonneaux.

Le nombre des Pigeons pour garnir le Colombier fera felon fa grandeur. Pour Fordinaire on y en met d'abord quarante ou cinquante paires, qui fuffiront, s'ils font bien nourris, pour le rendre bien-tôt peuplé; au lieu que fi on y en mettoit moins, on feroit trop long-temps à jouir du plaifir de manger des Pigeonneaux; car on fe donnera de garde d'en tirer aucuns du Colombier, qu'il ne foit prefque garni comme il faut.

Il y en a qui prennent vingt paires de Pigeons pour trois cens boulins. Les avis font partagez fur l'âge que doivent avoir ces Pigeons; les uns veulent qu'on les prene lorfqu'ils ont déja commencé à faire des petits, & difent pour raifon qu'alors ils demeurent attachez au nouveau Colombier; d'autres prétendent qu'il les faut choisir à l'âge de fix mois, & de ceux qui naiffent au mois de Mars ou de Juillet ; & d'autres font d'avis qu'on les prenne plus jeunes. Pour l'ordinaire on les enleve de deffous. leurs pere & mere lors qu'ils ont quinze jours ou trois femaines, afin qu'ils ne foient ni trop forts pour s'en retourner ni trop foibles pour ne pouvoir être élevez que par leurs pere & mere; on les enferme dans le Colombier pendant quinze autres jours. ou trois femaines; il faut avoir foin de tenir la fenêtre fermée, ou bien on les met fous des muës.

Comme on les a pris avant qu'ils fçachent manger seuls & qu'ils ne crient ni n'ouvrent le bec pour avoir leur nourriture, il faut le leur ouvrir & la leur donner foi-même avec les doigts ou avec un cornet, ou bien en la leur fouflant dans la gorge pour les obliger à la prendre, afin qu'ils ne meurent point de faim; & pour les accoûtumer plûtôt à manger feuls, on mêle parmi eux des petits Poulets, qui mangeant naturellement feuls les inftruisent par leur exemple.

On prendra la même peine pour leur donner à boire.

Ces jeunes Pigeons ainfi renfermez, feront nourris de millet, de chennevi, de vefce ou de farafin, de temps en temps on leur jettera quelques poi

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gnées de froment; & de temps en temps auffi on leur donnera du cumin comme un appas qui les attache pour toujours à leur premier Colombier. On fe donne le foin de les nourrir ainfi pendant quinze jours ou trois semaines, qu'on voit qu'ils fe repaiffent eux-mêmes; alors il eft temps de leur donner la liberté, en leur ouvrant le Colombier pour aller chercher à vivre.

Ce n'eft pas le tout que de le leur ouvrir & leur donner tout d'un coup Feffor; il eft un certain tenips & une certaine heure qu'il faut observer, pour faire que dès leur premiere fortie ils ne s'écartent point trop; car ne connoiffant encore que peu leur gîte, ils pourroient n'y pas revenir, & fe refugier ailleurs.

Pour éviter cet inconvénient, il faudra, lorsqu'on voudra les lâcher, choifir un jour obfcur & pluvieux, & ne leur ouvrir le Colombier que fur les quatre heures après midi, afin que craignant naturellement d'être moüillez, & fentant bien-tôt que l'heure du repos & la nuit approchent, ils ne s'éloignent pas & fe retirent bien vîte; l'experience nous fait voir tous les jours, que ménageant ainfi les premieres forties de ces oiseaux ils ne font que voltiger autour du Colombier, comme s'ils n'avoient deffein d'abord que de connoître l'air & le terrain ; ce qui dure jufqu'à la nuit, qu'ils fe renferment.

Il ne faut pourtant pas être furpris fi dans les commencemens il y a quelques-uns de ces Pigeons qui s'égarent; car au bout de deux ou trois jours ils ne manquent pas de revenir dans leur Colombier. Il y en a qui ne donnent la liberté à leur nouveaux Pigeons, que lorfqu'ils ont des petits, ou du moins lorfqu'ils couvent.

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D'autres pour empêcher qu'ils ne difparoiffent fans retour, leur arrachent les maîtrefles plumes des aîles, avant que de leur permettre de fortir que ne volant que foiblement, ils ne puiffent s'éloigner du Colombier, & que par conféquent ils s'y habituënt pour ne le plus quitter.

Le meilleur moyen pour les y bien accoûtumer eft de les y bien nourrir dans les commencemens.

Les anciens pour bien peupler leur Colombier, y retenir leurs Pigeons, & y en faire venir d'autres, effayoient beaucoup de prétendus fecrets, & employoient ingrédiens fur ingrediens, tous également inutiles: ce qu'il y a de plus fûr eft d'avoir beaucoup de Pigeons bien choifis, & les bien nourrir & foigner fuivant les faifons.

Pour bien laiffer garnir le Colombier, on ne doit point y prendre aucuns P geonneaux la premiere année, ni même aucuns de ceux de la volée du mois de Juillet de l'année fuivante: après ce temps on en pourra vendre, & manger autant qu'on le jugera à propos.

Des Pigeons communs ou Fuïards.

Ces Pigeonneaux ainfi élevez & accoûtumez au Colombier vont avec les autres chercher leur vie aux Champs; ils fe nourriffent tous de toutes fortes de grains & d'ivraïe; & mieux ils font nourris, plus ils font gras & rapportent de profit.

Il ne faut pas leur donner à manger à la maison lorfqu'ils trouvent leur vie en Campagne, mais auffi il feroit préjudiciable de ne leur en point donner quand ils n'y rencontrent plus rien. Il faut commencer à leur donner de la

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