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Des Ortolans.

L'Ortolan eft gros comme une alloüette, la chair en eft tendre, délicate, fucculente & convient à toutes fortes d'âges & de tempéramment. Il a le bec longuet comme la Fauvette avec de petites barbes autour vers la tête, les plumes de fa tête, de fon coû & de fa gorge tirent fur le jaune, les groffes plumes de fes aîles & de fa queue tiennent du jaune & du noir, le refte de fon plumage eft gris, & il a le bec, les jambes & les pieds rouges. Il chante trèsagréablement & affez fort, même la nuit; il vît trois ou quatre ans & meurt fouvent de trop de graiffe; il eft très commun dans nos païs chauds en Gascogne, dans les Landes de Bourdeaux, en Provence, même dans le Lyonnois, d'où ils nous viennent à Paris.

& comme

On les prend ou aux filets ou au trébuchet, & dans des petites cages où il y a des Ortolans pour appeller: La premiere chaffe eft au mois d'Avril, & la feconde fe fait vers la mi-Aouft; elle vaut mieux que la premiere, parce que les Ortolans font alors en plus grand nombre; ils font tous à demi gras, & on en prend beaucoup de jeunes: chacune de ces deux chaffes dure un mois. On engraille les Ortolans dans de petites volieres qu'on a foin de couvrir d'une toile, afin qu'ils ne voïent pas le jour, & ne fe tourmentent pas. On ne leur donne pour les engraiffer que du millet, du pain où on mêle de l'avoine & de l'eau bien claire. Quand ils font tout-à-fait gras, ils femblent un petit peloton de graiffe, on ne leur voit qu'un peu de chair fur les cuiffes; mais les jeunes font bien plus délicats que les vieux.

De la Grive, du Pluvier, Vanneau, Guignard & du Merle.

La Grive eft un Oiseau de couleur plombée, fort docile qui chante & fiffle agréablement; il apprend même à parler, & c'eft un met ftomacal, nourriffant & de bon goût, quand elle eft jeune & graffe. On en fait auffi des pâtez & des ragoûts excellents. Il y en a de trois fortes; la petite, la commune qui eft un peu plus groffe qu'une Alloüette, & la groffe qui n'eft gueres moins groffe qu'un Geay.

Elles vivent de bayes, de myrthes, de geniévre, de fureau & de liérre; d'olives, de glands, de vers de moucherons & autres infectes; elles font trèsfriandes de guy de chéne.

Elles font graffes dans la faifon des Vendanges, & on les chaffe comme les Pluviers. Elles font jufqu'à dix petits, mais à la cime des arbres.

Le Pluvier eft un Oifeau de paffage, gros comme un Pigeon, il a le bec noir, rond & court & n'a que trois doigts aux pieds: il y en a de jaunes & de cendrez, & on prétend que ce font deux efpeces de Pluviers. Ils volent en bandes très-nombreuses, volent très-rapidement & font un affez grand bruit, arrivent en France vers la faint Michel & s'en retournent à la fin d'Avril; ils habitent les bords de la Mer ou des Rivieres & Etangs quand il fait froid, & les hauteurs quand il dégéle, & ils vont fouvent dans les terres enfemencées ; ils font prefque toûjours en mouvement, c'eft pourquoi leur chair eft fort légére & délicate; on les prend au filet, au leurre & de plufieurs autres manieres, fur tout aux mois d'Octobre & de Mars. Ils fe mêlent fouvent avec les Vanneaux & les Guignards.

Le Vanneau reffemble fi fort au Pluvier que bien des gens les ont confondu la chair du Vanneau eft pourtant bien moins bonne, & il a une espece de créte fur la tête longue & noire, le coû verd & le corps de differentes couleurs, verd, noir, bleu & blanc.

Le cri du Vanneau a quelque rapport avec celui d'une jeune Chévre; il n'est point d'Oiseau de paffage comme le Pluvier; au refte il habite les mêmes lieux, vole & fe nourrit de même que le Pluvier Ils font tous deux forts communs en France, on les prend aifément en temps de pluïe.

Le Guignard eft auffi un oifeau de paffage, mais petit & fort gras, fort délicat & approchant de celui de l'Ortolan: Ils viennent par bandes vers les Vendanges & fe nourriffent de raifins, ou dans les bois : ils font fort communs en Beauce, mais difficiles à tranfporter parce qu'ils fe corrompent aifément; en récompenfe quand on a tué un Guignard, tous les autres s'attroupent auprès, & donnent le temps au Chaffeur de recharger.

Le Merle a beaucoup de rapport avec la Grive, mais la chair eft moins délicate & plus lourde. Il eft ordinairement noirâtre, chante agréablement & apprend même aifément à parler. Le mâle a les jambes jaunes, & le bec d'un jaune qui tire fur le rouge, & la femelle eft de couleur de fuie & a l'eftomac femé de petites taches d'un blanc fale: Ils aiment les bayes de myrthe, de laurier, de houx & de fureau; quand ils n'en ont point ils vivent de vers de terre & de pomes; quand on les a en cage on les nourrit de viande pour leur rendre la voix nette & agréable. On les y nourrit auffi d'une pâte qu'on leur fait avec du chennevi écrasé, du perfil haché menu & de la mie de pain trempée dans de l'eau ; on leur donne de nouvelle pâte de deux jours en deux jours pour qu'elle ne s'aigriffe point.

Ils habitent les lieux où il y a beaucoup d'arbres & de lieux épineux; ils font leur nids dans les brouffailles; ils commencent à y pondre fur la fin de l'Hyver, & ne font que quatre ou cinq petits : c'eft fur la fin d'Avril qu'on les va dénicher.

On prend auffi le Merle au filet en toutes fortes de faifons, fur-tout quand il fait du brouillard, ou bien au répuce après les Vendanges.

Des Tourdes.

On appelle Tourde ou Tours une efpece de Grives; il efpece de Grives; il y en a de quatre fortes. La Tourde Calandre, le Tourd commun qui eft de la groffeur d'un Merle. Le Mauvais Tourd qui eft rougeâtre, & la Tourde le Toine ou Thrale qui est la plus petite de toute. C'eft de la Tourde commune qu'il s'agît ici.

Les Anciens engraiffoient beaucoup de ces Oifeaux, ce qui fe pratique encore dans les Païs chauds, comme en provence, & Languedoc.

Les Tourdes demandent beaucoup plus de foin & de dépenfe pour les engraiffer que les Cailles on les élevé bien par tout, mais bien mieux dans les contrées où ils ont été pris, car ce n'eft qu'avec rifque qu'on les transporte ailleurs. Si on les enferme dans des cages, ces Oifeaux meurent la plûpart, comme lorfqu'on les met en Voliere incontinent après qu'on les a pris dans

les filets.

Pour élever des Tourdes en vûë de les engraiffer, il faut en avoir de privez qu'on mêle parmi ceux qu'on prend; les premiers inftruits par les Qife

Gers apprivoifent les autres en voltigeant autour deux, & les accoûtument infenfiblement à manger, boire & faire comme eux.

Mais il faut choisir un lieu expofé au Levant, dans lequel il y aura des perches mifes de travers, & fcellées des deux bouts dans le mur pour repofer ces Diseaux, qui ne fe plaifent point à terre lorfqu'ils font raffafiez. Ces perches ne doivent être élevées de terre qu'à la hauteur d'un homme, afin de pouvoir y prendre les Tourds lorsqu'ils feront gras & qu'on en aura befoin.

Il faut leur donner à manger dans un endroit de leur voliere, fur lequel il n'y a point de perches, afin que leur mangeaille foit nette. Les figues féches pillées & bien broyées avec de la farine, eft la nourriture qu'on doit leur donner, & toûjours en fi grande quantité qu'ils en laiffent de refte.

Quelques-uns prennent la patience de mâcher ces figues & les donnent ainsi à manger à ces Oiseaux.; mais lorsqu'on en a un bon nombre, on fuit la miere méthode..

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Il y en a qui font d'avis qu'on les nourriffe de differentes chofes à la fois, parce qu'ils en mangent davantage & engraiffent plûtôt. C'est pourquoi avec les figues dont on vient de parler, on leur jette du Lentifque, des. Bayes de Myrthes, des Olives fauvages & des graines de Lierre & d'Arboufier , qui font la nourriture ordinaire qu'ils prennent dans les Champs. On a foin encore de leur donner du millet dans de petites auges faites exprès; c'est le grain qui les maintient le mieux. & dont on ne doit point les laiffer manquer. Il faut leur donner de l'eau nette pour boire, & la leur renouveller fouvent..

Des Etourneaux:

Les Etourneaux font des Oifeaux dont le plumage eft noir & tacheté de gris, qu'on trouve en Hyver par bandes, & qu'il eft aifé de prendre des differentes manieres expliquées dans les Amusemens de la Campagne. Ces Oifeaux font bons en Cuifine, mais il faut qu'ils foient gras: ils ne le deviennent gueres tant qu'ils ont les Champs libres; voici donc comme on les engraiffe.

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Ayez des Etourneaux pris au filet ou autrement, mettez-les dans une Voliere plus ou moins grande que vous y voudrez engraiffer de ces Oifeaux cette Voliere aura jour par une petite fenêtre treilliffée de fil de fer,.de lattes ou d'un réseau à grandes mailles feulement. Accommodez la Voliere fi-bien que les Rats & autres bêtes dangereufes n'y puiffent entrer: Mettez y de petites perches en travers pour jucher les Etourneaux. Donnez leur pour nourriture du millet ou du froment, & faites en forte qu'ils en ayent toûjours de refte. On leur donnera de l'eau nette dans de petits augets qui feront.net, toyez fouvent. Enfuite laiffez-là ces Oifeaux fe nourrir ainfi durant un mois; & lorsque vous verrez qu'ils feront gras, fervez vous-en pour vendre ou pour manger. Il y a des Païfans qui font ce commerce & qui s'en trouvent bien.

Menus Oiseaux.

Nous ne parlerons point ici de quantité d'autres petits Oifeaux, tels que font la Becquefigue on Pivoine, le plus tendre, le plus délicat & le plus eftimé de tous les petits oifeaux gras, & qui eft fi commun en Provence, Gafcogne Italie & autres païs abondans en raisins & en figues, d'où il a pris fon nom

Tome L

S

Les Muriers blancs qui fe nourriffent de Mûres, & ont les plumes de l'eftomac & du ventre & la chair blanches comme neige, & les tripes noires. Les Fauvettes tant à tête noire qu'à tête rouffe, qui approchent fort de la Becquefigue, & ne valent pas moins que l'Ortolan, quand elles ont à manger des figues, des raifins ou autres chofes meilleures que les grains de fureau. Les Alebattes ou Vergerons, tant les gris que les blancs & les noirâtres, qui font trois autres efpeces de Fauvettes qu'on trouve dans les Vergers, & qui battent des ailes en Eté quand elles s'engraiffent; le Roffignol, la Gorge-rouge qu'on appelle le Roffignol d'Automne, &c. Nous n'entrerons point dans tout ce détail, parce que nous ne voulons toucher que ce qui regarde l'Economie générale du ménage des Champs. Il fuffira d'obferver que la plupart de ces petits Oifeaux, outre leur beauté, leur rareté ou leur chant, font également bons & délicats à manger; les Gafcons, par exemple, engraiffent le Roffignol pour s'en faire un mets qu'ils préferent à tout, & la Gorge rouge qui fe réfugie en Hyver jufques dans les maifons des Villes, ou ceux qui en prennent pour les entendre chanter, ou leur apprendre à parler, les ncurriffent de mie de pain noix & de mouches; elle eft délicieufe quand elle eft graffe. Il en eft ainfi des Moineaux, Chardonnerets, Linottes, Pinçons & autres.

CAPITRE VIIL

Des Gelinotes.

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E mot de Gelinote, diminutif du vieux mot Geline, pour dire Poule, eft géLnérique, on le donne à la Poule engraiffée dans une Baffe-cour; on nomme auffi la femelle du Faifan Gelinote: Il y a des Gelinotes d'eau qui tiennent de la Poule & du Canard; il y en a de grandeur & plumages differens,

Mais on entend proprement par le mot de Gelinote, la Gelinote de Bois : C'est une Poule fauvage qui reflemble affez à la Perdrix; elle a le deffus du dos gris, les groffes plumes des aîles marquetées, le deffous de la gorge & du ventre blanc, le coût de la Faifande, le bec court, rond & noir, la queue comme la Perdrix & les jambes courtes & couvertes de plumes jufqu'à la moitié la chair en eft très- délicate & le goût exquis, elle eft bien meilleure que la Perdrix; il y en a beaucoup dans les Forêts d'Ardennes.

On les prend dans les bois affez facilement parce qu'elles ont le vol bas: Elles aiment les Cerfs, & elles fautent quelquefois fur leur dos; mais elles ont une averfion particuliere pour les Poules, les Poulets & les Cocqs.

On nourrit les Gelinotes de bois, de froment, d'orge ou autre grain ; & on les engraiffe comme les jeunes Faifans, quoiqu'elles foient bien plus fauvages & plus difficiles à apprivoifer.

Il feroit plus aifé d'aller prendre leurs œufs dans les bois lorfqu'elles pondent, & les donner à couver aux Poules ordinaires ; les petits qu'elles feroient éclore, auroient l'inclination moins fauvage; mais il faut toûjours s'en méfier & les tenir enfermez, car ils tiennent toujours de leur naturel.

Les Gelinotes de bois élevées ou nourries chez foi, font ordinairement plus graffes que les autres, mais elles n'ont pas le fumet fi excellent; au refte il

faut toûjours les tenir féparées des Poules à cause de l'antipathie qui eft entre ces differens Oiseaux.

CHAPITRE IX.

Des Faifands.

E Faisand eft un Oifeau fauvage qui reffemble affez au Cocq ordinaire,

Lila la chait fort délicate, le coû verd, le bec long d'un travers de pouce & crochu, la queue très-longue, & le plumage varié ; le mâle eft plus gros plus beau, & plus agréable au goût que la femelle..

Les naturaliftes font mention de deux autres efpeces de Faifands (en latin Vro-gallus) l'un eft gros comme un Cocq. d'Inde,& il a la tête noire, le bec court, le cou long & les plumes noires & rougeâtres; l'autre eft plus petit & s'appelle Faisand de Montagne : on ne les voit que dans le Nord fur les hautes Montagnes & dans les grands bois; c'eft pourquoi nous ne parlerons ici que de ceux que nous avons.

Il faut d'abord, que le Faifandier ou la Faisandiere ( on nomme ainfi celui ou celle qui en a foin) s'applique à les bien connoître, à les apprivoifer & à les bien nourrir; qu'il foit matineux & exact à leur donner à manger, patient & attentif à tous leurs befoins, fur.tout pour la multiplication de l'ef pece, quand il eft venu à bout de les rendre affez familiers & amoureux pour pondre & couver.

Comme ils n'aiment ni les autres Volailles ni le bruit, il faut dans un endroit écarté leur élever une Faifanderie fpacieuse à proportion de ce qu'on voudra avoir de Faifands, (fix toifes en tous fens en logent beaucoup les murs auront fept à huit pieds de haut, feront bâtis groffierement fans aucun enduit; on fe contente même de les faire de grandes pailles non battuës foutenuës par des pieux fichez en terre, traverfez par des perches attachées avec de gros ofiers, en forte que les chats, chiens, & autres bêtes nuifibles n'y puiffent entrer; on y laiffera feulement une porte d'entrée pour le Faifandier.

2

Tout le tour du bas de cette enceinte fera garni en dedans de petites loges chacune de pied & demi en tout fens, féparées les unes des autres par des cloisons, & fermées d'un treillis de fil d'archal ou de filet de Pêcheurs, ou. fimplement de bâtons gros d'un doigt, éloignez d'un pouce & demi; chaque loge aura fes deux augets pour la mangeaille, & l'eau de la Faifane qu'on y mettra pour pondre & couver.. Les loges doivent être à labri des injures de l'air par une bonne planche ou autre couverture; les nids doivent être garnis de bonne paille ou foin, les fenêtres bien fermées, la Faifanderie garnie d'au ges toûjours pleines de mangeaille & d'eau, & dans le milieu une espece de voliere en pied ou muë pour apprivoifer les Faisands, le tout entretenu bien proprement.

La Faisanderie en vaut mieux quand elle eft dans un bois, environné de quelques arbres ; la petite maison du Faifandier doit être tout proche ; à peu

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