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Quelques-uns prétendent qu'il ne faut guere donner d'avoine aux Chevaux les premieres journées qu'on fe met en chemin, & difent que c'eft affez de quatre ou cinq picotins; quand ils font une fois en haleine, on peut leur en donner huit fans craindre qu'ils en prennent du dégoût.

La premiere & la feconde journée qu'on eft en voyage, quelquefois les Chevaux ne font que tâtonner leur avoine; il faut la leur ôter pour cette fois, & leur donner du fon moiiillé ; fi le Cheval eft veritablement dégouté il eft bon de lui donner une once de theriaque ou d'orvietan délayé dans du vin, & enfuite le tenir bridé pendant une heure.

A mesure qu'on approche du gîte, on a foin de faire marcher le Cheval à petit pas, afin qu'il ne foit pas échauffé en arrivant à l'écurie; fi on veut cependant fe preffer d'arriver, fi-tôt qu'il fera au gîte, il faudra le promener en main au petit pas & lui laiffer prendre haleine jufqu'à ce que fon fang foit ralenti, & il n'y aura rien à craindre. Au contraire, fi c'eft en Hyver qu'on voyage & qu'il faffe bien froid, il faudra couvrir le Cheval d'une bonne couverture & le promener à l'abri du vent puis le mettre à l'écu

rie.

Si le Cheval n'a guere chaud, lorsqu'il eft arrivé au gîte, il faut tout d'un coup l'attacher au ratelier fans le débrider qu'il n'ait repris haleine & ne foit prefque fec. Pendant ce temps-là on le deffangle, on lui ôte la croupiere, on lui lâche le poitrail, & on met de la paille fous les panneaux entre le Cheval & la felle; cela le rafraîchit & lui fait plaifir.

En même temps on lui fait bonne litiere de paille fraîche pour l'obliger à uriner; il faut dans la traite, laiffer uriner un Cheval quand il marque en avoir befoin; il eft bon même de l'y folliciter. On obferve le contraire à l'égard des Jumens; car 'lorfqu'elles urinent en route, cela diminue leurs forces.

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La premiere chofe qu'on doit faire lorsqu'on eft arrivé à l'écurie, eft d'ôter le vieux foin du ratelier & de nettoyer la mangeoire.

S'il fe trouve en chemin un beau gué, & qu'il ne foit qu'à un quart-d'heure du gîte, il eft bon d'y faire paffer & repafler le Cheval deux ou trois fois fans l'y laiffer tremper le ventre.

Lorfque les Chevaux font arrivez à l'écurie, on doit leur laver & leur baffiner les jambes avec de l'eau de puits ; & quand ils font attachez au ratelier & que leur fueur eft prefque paffée, quoique bridez, s'ils commencent à tirer du foin, c'eft une bonne marque, principalement quand ils ne battent pas du flanc. Alors on leur ôte la bride, & on leur laiffe manger leur foin à leur aife: c'eft pour faire venir l'appetit aux Chevaux qu'on les tient bridez dans l'écurie quelque temps après qu'ils y font arrivez.

Quand leur chaleur eft ralentié, on leur donne à chacun un demi-boiffeau de fon de froment moüillé qu'on met dans la mangeoire; on les débride enfuite pour les laiffer manger: cet aliment ainfi préparé les rafraîchit, les délaffe & leur ouvre l'appetit.

On leur donne l'avoine après qu'on les a abreuvé; quelques-uns la leur donnent auparavant.

Il y a des Chevaux qui ont les pieds caffants & la corne féche & fujette à s'éclater; il faut leur frotter ces parties avec du beurre, de l'huile &

du fain-doux dont on fait un onguent qu'on employe à froid. On fe fert encore de vinaigre & de fel, ou d'eau-de-vie, ou de vin chaud mêlé de vieux oing, ou bien on fe contente de leur frotter la jambe à froid avec de la lie de vin.

Voici un autre remede experimenté pour defenfler les jambes d'un Cheval au retour d'un voyage, & les lui délaffer. Faites bouillir de l'eau dans un chaudron, mettez-y des cendres de feu toutes rouges; il faut qu'elies foient de farment, de noyer ou de chêne; laiffez boüillir le tout jusqu'à ce qu'il ne refte que le tiers de l'eau ; ôtez-là enfuite de deffus le feu, écumezen les charbons, & la laiffez refroidir jufqu'à ce qu'elle foit un peu plus que tiéde. Cela fait, frottez-en fortement avec la main les jambes du Cheval, enfuite chargez-lui ces parties de la cendre que vous y laifferez jufqu'au lendemain fans mener le Cheval à l'eau, ni le fortir de fa place.

Autrement, on prend deux pintes de vinaigre, on les met chauffer dans un poëlon ; & fi-tôt qu'il commence à fumer, ou y jette quatre petits tas de cendres rouges de bois neuf; on laiffe bouillir le tout un demi-quart d'heure, puis on l'ôte de deffus le feu, étant tiéde on en lave les jambes des Chevaux; c'eft affez d'une pinte de vinaigre pour un Cheval.

Les Chevaux étant donc à l'écurie & deffellez, on en met les felles au Soleil pour en faire fécher les panneaux, puis on les bat avec une gaule pour les empêcher de durcir; en Hyver, on les fait fecher au feu.

Il est encore très-important pour la fanté d'un Cheval, lorfqu'il eft deffellé, de le manier par tout où la felle a pofé, pour voir s'il n'y a point quelque foulure qui provienne de la felle, afin de la faire rembourrer à l'endroit où elle

bleffe le Cheval.

Lorsqu'un Cheval a été une¡heure ou deux deffellé, on connoît mieux les endroits qui ont été foulez, d'autant qu'ils enflent à mesure qu'ils refroidiffent. S'il y a enflure fans ouverture, il faut prendre quatre ou cinq blancs d'œufs, les mettre dans un plat, y ajoûter un gros morceau d'alun, & battre le tout jufqu'à ce qu'il devienne en écume, dont on frotte l'enflure.

Autre remede. Vous aurez de l'eau-de-vie ou de l'efprit de vin, vous en frotterez l'enflure & mettrez le feu à l'eau-de-vie qui eft reftée fur le poil avec un papier allumé; l'enflure fe diffipera à mesure que la flamme dimi

nuëra.

Quélques-uns n'employent pour ces accidens, que du Savon noir mêlé d'eaude-vie, le tout battu ensemble jufqu'à ce qu'il s'y forme de l'écume dont ils frottent l'enflure qui fe diffipe auffi-tôt par la vertu de ce remede topi

que.

Lorsqu'on a donné l'avoine au Cheval, il faut fe retirer & le laiffer manger à fon aife.

Un Cheval qui a fué toute une journée & qui eft fec, n'en vaut que mieux d'être étrillé un quart-d'heure après qu'il a mangé fon avoine.

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Si le Cheval jette en route des excrémens trop clairs, c'eft une marque qu'il a bû trop frais: fi fa fiente eft de grains d'avoine tout entiere, c'eft figne qu'il a l'eftomac chargé de cruditez; fi elle eft noire, il eft échauffé: alors, & felon ce qu'on remarquera, on apportera à tout cela les remedes convenables, fuivant ce qui fera dit ci-après à l'Article des Maladies.

Peu de temps après que les Chevaux, seront arrivez à l'écurie, on fe fouviendra de leur lever les quatre pieds pour voir s'il ne manque rien aux fers & s'ils ne les bleffent point, & pour ôter avec un coûteau le gravier & la terre qui y tiennent, & y appliquer de la fiente de vache.

Si l'on eft en route dans un temps chaud & fec, il eft bon de graiffer les pieds des Chevaux avec du vieux-oing, pour empêcher qu'ils ne s'alterent.

Les Mellagers & autres gens qui conduifent des Chevaux de fomme, les laiflent coucher fans les débâter, crainte, difent-ils, que la partie foulée n'enfle la nuit à mesure qu'elle fe refroidiroit; mais la methode en est dangereufe, & s'il y a de l'enflure, il vaut mieux prendre un fac plein de crotin de Cheval tout chaud & le lier fur l'enflure qui fe diffipe par l'effet de ce remede facile à pratiquer.

Le lendemain qu'il faut partir de l'Hôtellerie, on a les mêmes attentions que lorfque l'on veut commencer le voyage; car dans toute une route, il faut bien foigner les Chevaux, afin qu'ils puiffent achever le voyage fains & gaillards.

Le voyage fini, on ôte deux clouds du talon de chaque pied de devant du Cheval, fi c'eft un grand fer, on en ôte quatre : & deux ou trois jours après être arrivé, il eft bon de faigner le Cheval du coû, ne le nourrir que de fon mouillé pendant fept ou huit jours fans lui donner d'avoine, lorfque c'eft un Cheval de felle qui peut prendre du repos; mais lorfque c'est un Cheval de carroffe ou de tirage, il fuffit de deux ou trois jours, parce qu'il faut qu'il travaille, & qu'il ne le peut pas faire fans avoine.

Le Cheval ayant été faigné & gouverné comme on a dit, on prend de la fiente de vache pour lui charger les jambes, ou de la cendre de bois bouillie comme on a dit ci-devant. Le Cheval étant un peu délaffé, on lui fait parer les pieds, on le ferre de nouveau & on le mene tous les jours à l'eau courante, une demie-heure le matin, & autant le foir fi c'eft en Eté ; & fi c'eft en Hyver, on ne l'y laiffe que le temps qu'il lui faut pour boire.

Si le Cheval n'eft que très peu haraffé, on fe contente de le faigner, de prendre fon fang dans une terrine, de l'y remuer crainte qu'il ne fe coagule; & enfuite fur trois livres de fang qui eft le poids qu'on doit lui en tirer, on y mêle une chopine d'efprit de vin, & on lui charge les jambes de cette mixtion.

On a experimenté que pour bien délaffer un Cheval, il falloit d'abord le faire faigner, puis prendre une livre de fel commun, le fricaffer dans une poële de fer jufqu'à ce qu'il foit fec & ne petille plus, y ajoûter deux livres de miel, bien mêler le tout dans un mortier & en charger les jambes du Cheval,

Ou bien on prend deux tiers d'eau-de-vie & un tiers d'huile de noix, on les bat bien enfemble, & on en frotte les jambes du Cheval.

Au refte, fi vôtre Cheval eft emmaigri de fatigue ou autrement, recourez à l'Article des Maladies, au mot Maigreur.

Du Cheval hongre, & la maniere de le hongrer.

Les Chevaux dont on fe fert font hongres ou entiers: ceux-ci font propres pour le harnois, parce qu'ils ont plus de force & de vivacité que les

autres : les hongres valent mieux pour la felle; il y en a pourtant qui font trèsbons au tirage.

C'est au Printemps ou en Automne qu'on hongre les Chevaux, & jamais en Eté ni en Hyver, parce que ces deux faifons font contraires à l'operation; l'une par les chaleurs qui mettroient la gangraine à la partie inciTée; & l'autre par le froid qui y cauferoit beaucoup de defordre: le Cheval doit avoir deux ou trois ans avant que d'être hongré.

Pour faire cette opération, on prend une corde groffe comme le doigt, au bout de laquelle on fait un noeud coulant; on la paffe dans les deux jambes de devant du Cheval, on en fait autant à celles de derriere; ces deux cordes fervent pour le terraffer plus facilement: mais avant que d'en venir là, prenez deux bonnes bottes de paille, étendez-les autour de lui, de maniere qu'il y ait un lit fuffifant pour le contenir; enfuite on prend les cordes, on les tire de côté toutes deux en même temps, de forte que les nœuds coulants venant à fe ferrer, ferrent auffi les jambes du Cheval qui tombe par terre; ceux qui tiennent les cordes de derriere paffent du côté de la tête, & ceux qui tiennent celles de devant vont du côté de la queuë; les uns & les autres tirent fortement les cordes pour faire en forte que le Cheval ne puiffe fe remuer & empêcher l'operation.

Pendant qu'on le tient ainfi, celui qui doit le hongrer prend un biftouri ou un rasoir avec lequel il fait adroitement un incifion aux bourfes du Cheval & en tire les teftitules; & comme en les tirant il fuit des filamens, il faut les tourner & les renfermer.

Enfuite on defentrave le Cheval qui fe leve auffi-tôt, on le mene baigner à la riviere ou dans un abrevoir, ce qui doit fe faire deux fois par jour durant quinze jours: s'il n'y avoit point d'endroits pour le baigner, on prendroit fept ou huit fceaux d'eau qu'on lui jetteroit fur la partie malade foir & matin pendant les quinze jours; il faut avoir foin de bien nourrir le Cheval hongré avec du fon moüillé pour le rafraîchir, & y mêler deux onces de foye d'antimoine au cas qu'il foit dégoûté.

ARTICLE III.

Des Maladies des Chevaux.

Avant que de venir au détail de ces maladies ou indifpofitions, il faut parler des fymptomes qui les annoncent.

Des Symptomes des Maladies des Chevaux.

On connoît qu'un Cheval est malade, ou qu'il le fera inceffamment. 1°. Quand il a du dégoût pour tout ce qu'on lui donne, & qu'il ne fait que letâtonner.

2o. Quand il a la tête pefante & lourde, ou panchée, l'œil trifte & égaré ou baigné de larmes. Sur ces indices, pour mieux s'en affurer, on lui tâte les oreilles; s'il les a froides, c'eft mauvais figne; fi fa bouche paroît livide & échauffée, cela ne vaut encore rien, de même que quand il a le poil hérissé aux flancs, & déteint aux extrémitez plus que de coûtume.

Outre cela, on obferve fa fiente; fi elle eft dure noire ou verdâtre, c'est

marque d'une nourriture mal digerée: fon urine, lorfqu'elle eft crue, eft encore un fymptome de maladie, de même lorfque le Cheval n'eft pas ferme fur fes jambes quand il marche, ou lorsqu'il eft lent au travail, ou qu'il fe couche & fe releve fouvent.

Quelques-uns mettent la main fur le cœur du Cheval; s'ils fentent que les flancs font agitez, & qu'il refte fur fes jambes comme immobile, quoiqu'on lui faffe pour l'animer, ils en augurent des fuites fâcheufes.

Lorfqu'un Cheval qui veut piffer, le fait fans fe camper à l'ordinaire, & que l'urine qu'il rend tombe d'elle-même goute à goute fans être pouflée, c'est une marque de maladie mortelle. Il en eft de même fi en arrachant le crin de la queue ou d'autres parties, il fe détache fort aifément.

Un Cheval malade qui ne fe couche point, eft en danger; s'il fe plaint & qu'il montre le blanc des yeux, c'eft figne qu'il fouffre; mais comme ces fimptomes s'étendent trop generalement fur bien des maladies, & que chacune a les fiens particuliers, on doit s'étudier à les démêler, afin de ne s'y point tromper.

Avant de paffer au détail des maladies, comme la faignée des Chevaux y eft fort en ufage, il eft bon d'expliquer les differentes caufes de la faignée, & les veines aufquelles elle fe fait; les chiffres qui les marquent dans la Figure ci à côté, répondent à ceux des Articles où on va lés expliquer.

Des Veines où on seigne le Cheval, & pourquoi.

1

On le feigne, 1. De la Veine du fommet de la tête, contre les affoupiffemens, letargies, & difficultez de l'oüye: cette faignée appaise auffi la douleur des yeux, en détournant le cours des humeurs.

2. De la veine qui eft à quatre doigts au-deffous des grands coins des yeux, nommée le Larmier, pour décharger les humeurs tombées fur les yeux.

3. Du cartilage qui fépare les nazeaux, dont on tire du fang en le perçant de part en part avec la lancette, pour divertir les humeurs qui caufent les

avives.

4. De la pointe du nez, pour toutes les maladies du Cheval, après qu'on a purgé la partie éloignée; elle eft très-utile quand la vûë eft troublée & chargée d'humeurs.

5. De la Veine du troifiéme fillon du palais, au milieu des deux dernieres dents de devant, pour guérir le lampas, la palatine, les échauffûres de la bouche; pour faire revenir l'appétit, & generalement pour tous les maux de tête: & quoiqu'on ne doive pas tirer du fang aux Chevaux châtrez & aux Poulins fans une grande neceffité, on peut leur en tirer de cette Veine pour décharger la tête & les yeux.

la

6. De la Veine de deffous la langue, pour tous les maux de bouche, de gorge, des avives, & pour la fquinancie.

7. De la Veine de la partie antérieure de la lévre baffe, pour foulager le pouffif, l'avant-cœur, l'êtranguillon & les échauffûres de la bouche, & pour guérir les puftules & cirons qui viennent fur la lévre.

8. De la Veine des deux côtez du poitrail, fituée à l'endroit où l'épaule fe joint avec le fous-bras appellé Incontri, ou les airs de devant; contre les

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