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fera long; au contraire le Printemps recommence quand on fent 1 zephir fouffler doux, quand on voit les Hirondelles revenir, & la gorge des Canards blanchir fur la fin de l'Hyver.

Sçavoir fi l'Année fera hâtive ou tardive.

On croit communément que l'année fera hâtive, quand il pleut après la Vendange, dans le commencement d'O&obre; qu'elle fera moyenne, quand il pleut à la fin de ce mois; & tardive, quand les pluies ne viennent qu'au commencement de Novembre: ce qu'il y a de certain, c'est que quand l'année a été féche & qu'il y a apparence de beaucoup de pluies fur la fin de l'année, il faut femer le Bled plus dru, parce qu'il y a lieu de craindre que les pluies n'en faffent beaucoup gâter en terre.

Préfages de Fertilité & de Sterilité.

Nos Anciens ouvroient en Automne un certain Fruit de Chéne qu'on appelle Noix de Gale; & ils comptoient que l'année fuivante feroit bonne, quand ils trouvoient une mouche dans la Noix ; au contraire ils ne s'attendoient qu'à la fterilité, quand ils y trouvoient une araignée : à present on efpére affez quand on a vû un Automne ferain, de la neige dans la faifon, un Printemps médiocrement chaud, point trop de fruits ni de poiffons, le genêt bien fleuri, & plus de fleurs au Noyer que de feuilles : au lieu qu'on craint que les grains ne manquent, quand les gelées & les rofées viennent hors de, faifon, quand le Printemps ou l'Eté font trop humides l'air & la terre abondans en araignées, en vers, fauterelles & autres infectes, & quand il y a extraordinairement de féves, de fruits & de poiffons. On eft revenu de la frayeur que caufoient les Eclipfes; celles de Soleil, qui fe font quand les Bleds font en fleurs, nuifent pourtant à la force des épys qui reftent peu garnis de grains, parce que les fleurs n'ont point eu toutes les influences ordinaires du Soleil.

Bien des gens croyent encore que l'année fera mal-faine, quand la fin du Printemps & l'Eté font extraordinairement pluvieux ou chauds, ou quand le vent du Midi y regne fans pluie; ou encore quand l'Automne & l'Hyver font très bruineux & fort peu pluvieux, & qu'il y a quelque grande mortalité de Brebis, beaucoup d'Oiseaux qu'on trouve morts, & un grand nombre de Grenouilles, de Cloportes, de Vers, Taupes, Lezards & Serpens.

Aux Curieux.

L'on a perfectionné de nos jours une maniere de connoître les temps, bien plus aifée & bien plus fûre; & il eft peu de perfonne de gout qui n'ait à prefent chez foi un Thermométre, un Barométre & un Hygrométre : ces trois Inftrumens de Mécanique, qui ne coûtent pas une piftole chaque, font les Oracles du beau & du mauvais temps : le premier marque les degrez du chaud & du froid; le deuxième fait voir la pefanteur & la legereté de lair; & le troifiéme en fait connoître la féchereffe ou l'humidité. Par-là, fans le moindre foin, on connoît chez foi au doigt & à l'œil l'état & les variations

du temps, & il n'y a rien de plus curieux, de plus commode & de plus utile pour les operations de l'Agriculture & du Jardinage, & même pour

la fanté.

A

CHAPITRE III.

Des Amandemens.

MANDER une Terre, c'eft la rendre meilleure par le fecours des corps étrangers qu'on y mêle : & on l'amande, ou pour en corriger les défauts, comme quand elle eft trop humide ou trop chaude, trop forte ou trop legere; ou pour rétablir celle qui eft ufée ou qui s'ufe.

On peut rendre un fond de Terre meilleur qu'il n'eft, en le laiffant repofer, ou en l'employant à une autre forte de production. C'est ainsi qu'on laiffe repofer les Terres à grains ordinairement de trois années une, ou feulement la cinquième année, ou alternativement d'année en année, fuivant que le fond eft plus ou moins gras : c'eft dans le même efprit de ménager les Terres, qu'on leur fait porter des fruits plus aifez à nourrir, ou pour lefquels la Terre eft abfolument neuve, quoiqu'elle foit ufée pour d'autres productions, comme une Terre à Bled qui commence à fe rétablir quand elle n'a que de la Vefce à produire, ou un Bois qui fera merveille fi on le met en grains, quoiqu'il n'ait plus affez de fubftance pour toutes les Plantes dont il étoit couvert. Mais quoique le repos ou le changement d'ufage d'une Terre, la rende meilleure, l'un ni l'autre ne font pourtant pas compris dans ce qu'on appelle Amandemens; car pour amander une Terre, il faut, comme je l'ai dit ci-deffus, y mêler quelque matiere étrangere, qui engraiffe, ameublisse, échauffe, rafraîchifle ou vivifie le fond avec lequel on l'incorpore.

Celui qui connoît la qualité de fa Terre, jugera aisément de quel amandement elle a befoin. Car comme les défauts ne fe peuvent corriger que par leurs contraires, il doit conclure qu'il faut à fa Terre des amandemens humectans fi elle eft trop féche, qu'il la faut rafraîchir fi elle est trop chaude, ou l'échauffer & deffécher fi elle eft trop foible & trop humide.

Il y a deux défauts generaux dans les Terres; le premier eft d'avoir trop d'humidité, & elle eft ordinairement accompagnée de froid & d'une grande pefanteur; le fecond eft d'avoir trop de féchereffe qui ne va point fans une exceffive legereté & fans beaucoup de difpofition à être biûlante. Il faut donc oppofer deux remedes differens à ces deux inconveniens tout oppofez. Nous voyons Pareillement que les amandemens qu'on employe dns les Terres, font les uns gras & rafraîchiffans, comme les fumiers de œufs, de Vaches & de Pourceaux, les curures des Mares, &c. les autres font chauds & legers, comme les fumiers de Pigeon, de Mouton, de Cheval, de Mulet & de Poule, la Marne &c. c'eft pourquoi il faut des amandemens chauds aux Terres humides, froides & pefantes, pour les rendre plus legeres & plus meubies; & il en faut de gras & rafraîchiffans dans les Terres maigres, féches

& legéres, pour les rendre plus graffes & plus fubftancielles, & pour empêcher que les hâles du Printemps & les chaleurs de l'Eté ne les alterent. Il y a quelquefois de la peine & du coût à avoir de bons amandemens, furtout en certains Païs; mais c'eft pourtant à quoi on doit s'appliquer principalement, car il faut bien reparer les fels que la Terre perd dans les vegetations: on verra par le détail qui va fuivre, qu'il n'y a point d'endroits, où, avec un peu de foin, on ne puiffe avoir beaucoup & de bons amandemens.. Des Fumiers..

Le Fumier eft le plus ordinaire des amandemens.

Le Fumier de Vache qui est le plus commun de tous, eft auffi le meilleur quand il est bien pourri, parce que comme il eft le plus gras & rafraîchif fant, il corrige davantage le défaut le plus ordinaite des Terres, qui eft d'être féches & maigres. Il fe conferve long temps dans la Terre ; & comme il n'a pas trop de chaleur, il le faut porter & l'enterrer avant l'Hyver, qui eft la meilleure faifon pour fumer, comme nous le dirons ci-après. Le Fumier de Vache s'employe principalement pour les Terres feches & fablonneufes : & il eft bon de ne l'y mêler que par un temps fombre & humide, pour que les fels du Fumier & le peu d'humidité de la Terre fur laquelle on le répand, se diffipent moins.

Le Fumier de Mouton eft auffi très- gras; mais étant plus chaud que celui de Vache, il eft plus propre pour les Terres froides ou maigres: il faut s'en fervir & l'enterrer au mois de Novembre avant le fort de l'Hyver. Celui de Chval eft moins gras que les précédens, mais il eft fort chaud; auffi n'eft-il pas propre aux Arbres, qui ont toûjours plus befoin de graiffe & de nourriture que de chaleur ; c'eft pourquoi on l'employe plus ordinairement dans les Potagers, pour échauffer la Terre & y élever des Herbes de bonne heure. Par cette même raifon, il eft très-bon dans les Terres fortes, froides ou humides, parce qu'il les defféche, les échauffe & les ameublit. On peut néanmoins s'en fervir par-tout lorfqu'il eft bien confommé, ou qu'il eft mêlé avec d'autres Fumiers, & enfin lorsqu'il a perdu sa chaleur. On doit le répandre de bonne heure, & l'enterrer avant la fin de l'Hyver, afin que toute fa chaleur foit diffipée avant le Printemps: fi l'on attendoit à l'employer après l'Hyver, il pourroit trop échauffer & même brûler les racines des Arbres ou les Grains.

Les Fumiers de Mulet & d'Ane ont, dans un degré un peu inferieur, les mêmes qualitez que celui de Cheval, c'eft pourquoi il faut en user

de même.

Celui de Chévre eft à peu près comme celui de Mouton.

Le Fumier de Porc eft le plus froid de tous & n'a prefque point de fubftance ni de fels; c'eft pourquoi, à moins qu'on ne le mêle avec d'autres, il n'eft bon tout feul qu'a bien peu de chofes. Il eft pourtant le meilleur pour les Terres brûlantes ; & comme les Arbres ne jauniffent ordinairement que par trop de féchereffe, il eft très-propre pour les faire reverdir; il faut l'enterrer auffi tôt qu'on le répand fur la Terre. Plufieurs perfonnes ont pourtant que la fiente de Cochon eft très-chaude, & que fi on ne s'en fert pas ordinairement en Fumier, c'eft parce qu'elle eft trop brûlante & trop puan

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te; mais il n'y a qu'à la laiffer long temps évaporer au grand air & à ́la pluie, & la mêler avec d'autres Fumiers pour l'employer avec fuccès.

Le Fumier de Pigeon eft le plus chaud de tous: fi on l'employoit tout frais, il brûleroit les femences & les Arbres. C'est pourquoi on le mêle avec d'autres moins brûlans, ou on attend qu'il ait jetté tout fon feu. Quand fa chaleur eft éteinte, il fait merveille dans les Chenevieres, dans les Prez & Terres humides; il détruit le Chiendent, & il eft fouverain pour donner une nouvelle vigueur aux Arbres. 11 perd fa force & fe confomme dans terre en deux années. On doit l'étendre au commencement de l'Hyver, & ne l'enterrer qu'au Printemps, à caufe de fa grande chaleur : on peut pourtant en faire porter de tout frais au fortir du Colombier, au pied des vieux Aibres pour les renouveller, mais il l'y faut répandre dès le mois de Novembre, de deux pouces d'épaiffeur feulement, prendre garde de ne l'approcher qu'à un pied près de la tige, & ne l'enterrer qu'au Printemps, afin qu'il' reçoive toutes les pluies & fes neiges de l'Hyver. Il y a des Païs où fans tant de façons on le feme pêle-mêle avec le Bled, après néanmoins qu'on. lui a laiffé jetter tout fon feu, & le Bled y fait des merveilles.

Le Fumier de Poules & autres Volailles, approche du précédent; mais il ne faut ni l'employer feul, ni en mettre beaucoup, parce qu'il engendre ordinairement quantité de Pufferons & autres Moucherons qui perdent les grains quand ils commencent à pouffer.

Les excrémens des Animaux Aquatiques ne font bons à rien; la froideur de leur conftitution donne à leur fiente une fterilité qu'elle porte par-tout: où on la met.‚

Il en eft de même des excrémens de Lapins, qu'on pourroit tirer des Ga-rennes & Clapiers.

Fumage.

On ne doit point employer de Fumier qu'il ne foit affez fait, c'est-à di re que la paille ne foit corrompue par la fiente & l'urine des Beftiaux, pour qu'elle foit bien impregnée des fels qui font fa fecondité: car la paille feule, fut-elle à demie pourrie, ne fait pas de bon Fumier; & les excrémens des Animaux tous feuls ne font pas fi bons, & ne fourniroient pas affez.

Quand on tire le Fumier des Ecuries & Etables, il ne faut pas le mettre indifferemment dans le premier endroit qui fe trouve, tantôt haut, tantôt bas; les pluies qui furviennent font couler hors du tas une certaine teinture qui eft la faumure du Fumier, enforte qu'elles entraînent avec elles la meilleure partie de fa fubftance & de fes fels: il ne faut donc le mettre quedans quelque foffe creufe au milieu, dont le fond fera pavé ou de terre glaife, pour que les eaux n'y faffent point de tort, & que tout le tas conferve fes fels, & fe perfectionne dans la foffe.. Car ce n'eft pas la groffefubftance du Fumier qui fertilife, de même que ce n'eft point la groffe fubftance de la cendre qui décraffe le linge de la leffive; c'eft le fel invisible: qui eft dans le Fumier & dans la Cendre; ce fel fe mariant avec les eaux qui le moüillent, defcend avec elles par-tout où leur pefanteur les porte :: c'eft auffi pourquoi il ne faut jamais, comme nous le dirons ci-après, enterrer le Fumier bien avant en terre. Par la même raifon, il y a bien dess Tame

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gens qui ne veulent pas qu'on laiffe le Fumier expofé aux pluies dans la Basse cour, parce que felon eux, quelque ferme & concave que foit la foffe à Fumier, celui qui eft au-deffus eft tellement diffous par les pluies, que ce n'eft plus qu'une apparence de Fumier fans fubftance: pour le conferver tout entier dans une force égale, on le met à couvert fous des efpeces de hangards ou toits qu'on dresse dans la Baffe cour fur des piliers avec quelques claies ou quelques perches qu'on couvre de chaume, & de là on le traníporte fur le champ quand il eft temps de l'enfemencer.

Quand on n'a point differentes natures de Terres à faire valoir à la fois, comme des Bois, des Prez, des Vignes & des Terres à grains, il eft assez ordinaire de confondre & mêler dans la Baffe-cour tous les Fumiers qu'on y peut raffembler; mais il eft bon d'en féparer les efpeces, quand on a differentes natures de Terres, pour donner à chacune le Fumier qui lui con

viendra.

Il faut auffi laiffer repofer quelque temps le Fumier dans la Baffe-cour, pour qu'il fe confomme & que les pluies en adouciffent les fels; mais il perd de fa force, quand il paffe un an: encore cela n'eft-il bon que pour les fumiers de gros beftiaux ; car ceux de Pigeons & de volailles même celui de Mouton, quoiqu'ils foient tous fort chauds, & qu'il faille par conféquent les laiffer repofer & éventer avant de les employer, ne pourroient cependant pas conferver leur force fi long temps.

Il ne faut pas non plus aller répandre fur les terres, du fumier tout chaud fortant de l'Ecurie ou de l'Etable, parce qu'outre le feu qu'il eft à craindre qu'il ne mette aux femences, il eft toûjours mêlé de beaucoup de grains qui tombent des auges ou qui restent parmi les fourages, & ces grains croissans tout d'un coup, ils offufquent la femence & le champ. Cela n'empêche pourtant pas que dans une terre maigre on ne mette plûtôt du fumier tout chaud, que du vieux, pour l'animer plus puiflamment.

Le temps propre pour fumer les terres, font les cinq mois de l'année les plus humides, c'est-à dire depuis le commencement de Novembre jufqu'à la fin de Mars, parce que les fumiers ayans befoin d'être confommez dans le fein de la terre, afin que les fels qu'ils contiennent fe diffolvent & la pénétrent, il n'y a que a que les pluies abondantes de l'Automne & de l'Hyver qui achévent de pourir le fumier, & qui en répandent la fubftance & le fel dans les endroits d'où les plantes tirent leur nourriture.

Si. tôt que la Moiflon eft faite, on fe met à charier le fumier fur les terres en commençant par celles qui doivent être les premieres enfemencées : on l'y décharge de diftance en diftance par petits tas qu'on appelle Fumereaux, pour avoir plus de facilité à le répandre; & on le répand fur la terre avant de lui donner le dernier labour qui doit être suivi immédiatement de la semaille, pour que le fumier nouvellement répandu agiffe avec plus de force: En forte qu'on fume en Automne les terres qui doivent être chargées en bled; & au mois de Mars celles qui ne doivent être enfemencées qu'alors.

Il y a pourtant des gens qui fument, dès avant le deuxième, ou même dès avant le premier labour, les Jacheres qu'ils deftinent à porter du bled ; & cela difent ils, pour que le fumier étant confommé lorfqu'on femera, la terre foit en état de mieux rapporter : mais j'eftime que le fumier ainfi répandu long

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