Imágenes de páginas
PDF
EPUB

ment des femmes à journées, à qui on donne cinq à fix fols par jour. Pour le fciage du Bled, on donne depuis quarante fols jufqu'à trois livres l'arpent. Quand on paye en Bled, il ne faut payer que fur le pied de ces

prix.

Pour le fauchage des Avoines & autres Mars, on donne depuis quinze jufqu'à dix-huit fols l'arpent; & pour l'écochelage & liage des gerbes, depuis fix jufqu'à douze fols l'arpent. Quand on fait foyer les Avoines, on en donne ordinairement depuis trente jufqu'à quarante fols l'arpent.

On donne pour le battage du muid de Bled, cent fols & fix livres, & pour l'Avoine quatre livres ou quatre livres dix fols.

Pour cribler le Bled & l'Avoine, on donne dix-huit à vingt fols par muid, & on nourrit le Cribleur.

CHAPITRE VI.

Des Mars, & des Légumes & Racines de plains-Champs.

LES

ES Menus Grains qu'on appelle autrement les Mars, parce que, comme nous l'avons déja dit, on les féme vers le mois de Mars, s'appellent encore Petits Bleds, & en quelques endroits Trémois, parce qu'il ne leur faut que trois mois pour venir de femence à graine: on les appelle auffi dans certains Païs Marfois & Marfés, d'où vient le nom de Marfeche, q'on donne à l'orge en bien des endroits.

Les Mars viennent plus vîte, ne demandent pas tant d'aprêts ni de foins, courent moins de rifque, viennent plus abondamment, ne fatiguent pas tant la terre que les vrais Bleds, & ils font neceffaires pour la nourriture des Beftiaux & pour beaucoup d'autres chofes, comme nous le dirons ci-après; on en fait même du pain dans le befoin.

Je comprends dans le même Chapitre les Légumes qui viennent en plainsChamps, parce qu'ayant à parler de toutes les productions des terres aux Champs, les Légumes qui font d'un grand fecours & aux hommes & aux bêtes, font quafi de la même nature que les Mars; c'eft prefque la même culture, & il y a quelques-unes de ces productions, dont il ne feroit pas aifé, fuivant l'ufage, de déterminer l'efpece, & de les qualifier plûtôt Legumes. Je comprendrai parmi les Mars, l'Avoine, l'Orge, la Vefce; & parmi les Légumes, les pois, les Féves, les Lentilles, les Lupins, les Raves & les Naveaux. Le Chanvre & le Lin, que quelques-uns mettent au nombre des Mars, auront leur Chapitre à part; & quant au Sain-foin, Sennegré, Dragée & plufieurs autres fourages, il me paroît plus naturel de les regarder comme Herbage, & comme tels de les renvoyer au Chapitre des Prairies, puifque proprement les Mars ne font que les menus grains ou petits Bleds.

Tome 1.

CCCG

ARTICLE PREMIER.

Des Mars.

Il y a des gens qui ne donnent qu'un labour aux terres en Mars avant de les enfemencer; mais en condamnant leur pareffe, j'ai expliqué au Chapitre du Labourage, pourquoi il en faut donner deux; le premier avant l'Hyver, le fecond lors de la femaille.

Les Mars, & generalement tous les menus grains, fe plaifent dans les terres legéres, & il leur faut de temps en temps de la pluie, pour qu'ils

viennent en abondance.

Avoine.

I. L'Avoine eft celui des menus grains qui fe féme le premier; elle eft longue & menuë, & naît fur des tuyaux minces qui portent quelques feuilles étroites, à peu près femblables au Chiendent; ou pour mieux dire, elle reffemble au Froment par les feuilles & le chaume, & au haut du tuyau eft un épi où le grain eft fufpendu par de petits filets déliez, fort éloignez les uns des autres, qui panchent vers la terre en forme de petites fonnettes. II. Efpeces. Il y a deux fortes d'Avoine, une cultivée & une fauvage, La derniere croît parmi les Légumes & les Bleds, & c'eft affez fouvent du Bled dégéneré; elle est toute femblable à l'Avoine cultivée, excepté que fes grains font plus grands & plus noirs; mais la cultivée eft incomparable ment meileure, & c'eft d'elle feule dont nous prétendons ici parler.

On appelle Folle Avoine, celle qui eft fterile & fans grain.

Dans les terres de l'Amerique Septentrionale, vers le Canada & dans les petites Rivieres dont le fond eft de vaze, il croît une autre efpece d'Avoine, qui vient au haut de la tige d'une herbe qui s'éleve de deux pieds audeffus de l'eau; ce grain fe receüille en Juin, & eft gros comme le nôtre; mais il eft une fois plus long, & il rend plus de farine; elle eft auffi-bonne que le Ris.

III. Ufages. Pour revenir à nôtre Avoine cultivée, elle fert principalement en France à nourrir les Chevaux. On en fait auffi du pain dans les temps de difette; mais quoique l'Avoine foit plus nourriffante que l'orge dont on fait auffi du pain, & quoique l'un & l'autre de ces grains nous fervent d'aliment & de médicament en differentes manieres, l'ufage le plus defagréable & le moins fain eft d'en faire du pain.

Le Gruau n'eft autre chofe que de l'Avoine mondée, c'est-à-dire dont on a ôté la peau, & qu'on a fait fécher au four & enfuite réduite en farine groffiere dans certains Moulins faits exprès, dont on fépare le fon fans blutteau: on fait avec le Gruau des bouillons, des crêmes & des breuvages fort fains & fort ufitez, principalement en Carême; on les prépare comme nous l'allons dire des Orges mondez, & ces précautions peuvent même fuppléer dans bien des rencontres aux boüillons & aux gelées de viande, d'au

tant plus que l'Avoine nourrit encore plus que l'Orge; le meilleur Gruau nous vient de Tourraine & de Bretagne.

Les Mofcovites font diftiller l'Avoine pour en tirer une eau dont ils font leur boiffon au lieu de vin, & cette eau n'échauffe & n'enyvre pas moins que la liqueur Bachique.

Orge.

I. L'Orge eft pointu par les deux bouts, & affez gros vers le milieu; il naît fur une tige plus baffe & plus frêle que celle du Froment; elle a pourtant huit nœuds, quoique celle du Froment n'en ait que trois ou quatre: la feuille de l'Orge eft plus longue & plus rude, fa racine eft cheveluë, & l'épi, où il vient en fourreau, a une barbe longue & piquante.

II. Efpeces. Il y a de l'Orge blanc, de l'Orge rouge & de plufieurs autres fortes, fuivant les lieux; on en diftingue ordinairement deux especes, l'une qui vient fur des épis gros & courts, & l'autre fur des épis plus minces & plus longs; mais cette difference n'a rien d'effentiel pour la qualité du grain. En plufieurs lieux on appelle l'Orge Marseche, en d'autre on le nomme Paumelle, Orge de Galatie ou Orge à deux rangs, pour le diftinguer de l'Orge quarré, qui eft l'Escourgeon dont nous avons parle au Chapitre des Bleds.

III. Usages. Ce même grain fert, 1°. A nourrir des Beftiaux, comme Cochons ; & en Efpagne on donne de l'Orge aux Chevaux, comme on fait ici l'Avoine.

2o. A faire de la Bierre.

3°. A faire du pain qui eft rafraîchiffant, affez nourriffant, mais peu gracieux, dur à digerer & mauvais pour l'eftomac; on n'a pourtant jamais fi bien connu de quelle utilité eft l'Orge, qu'en 1709, quand tous les Bleds ayans été gelez, il fallut recaffer les terres pour y mettre de l'Orge, du Mahis & du Millet, qui furent, après Dieu, la feule reffource des Peuples: le pain d'Orge étoit fort commun anciennement, comme il paroît entr'autres par l'Hiftoire des cinq pains d'Orge multipliez.

4°. L'Orge mondé, dont on fait des bouillons, des crêmes, des tifanes, &c. L'Orge fe prépare en differentes manieres pour nous fervir d'aliment; mais de toutes ces préparations, la plus ufitée et l'orge mondé : on prend de l'orge dépouillé de fa peau, on le lave, on le nettoye bien, puis on le fait bouillir lentement avec de l'eau pendant environ cinq ou fix heures, jusqu'à ce qu'il tombe en crême comme une espece de bouillie; on y ajoûte au commencement un peu de beurre bien frais, & fur la fin un peu de fel; c'étoit la ptifanne des Anciens, & ils y mettoient quelquefois de l'anet, de l'huile & du vinaigre. Quand on veut rendre l'Orge mondé plus agréa ble, on y met quelques amandes avec un peu de fucre; & fi l'on veut qu'il rafraîchiffe plus qu'il ne fait naturellement, on y mêle des grains de Melon & de Citrouille. L'Orge mondé eft une très bonne nourriture, tant pour les perfonnes qui font en fanté, que pour les infirmes : il n'a rien de gluant, il paffe aifément, il humecte beaucoup, il appaifé la foif, il n'excite aucunes flatuofitez, il ne refferre point, il rafraîchit & il engraiffe. On paffe quelquefois l'Orge mondé, & alors il eft moins ncurriffant; c'eft ce que les

CCcc ij

Anciens appelloient le fac ou la crême de la ptifane, & on le donnoit dès lors dans les maladies où il ne falloit pas une forte nourriture: on appelle aujourd'hui cette préparation d'Orge, Orge paßé. On le fait quelquefois épaiffir en le laiffant davantage fur le feu, & alors il nourrit beaucoup plus. Les crêmes d'Orge préparées de la maniere qui vient d'être expofée, font meilleures pour les toux, les enrouëmens & les infomnies, que les boüillons à la viande, qui nourriffent à la verité davantage, mais qui ne font point si rafraichiffans ni fi adouciffans. On peut mêler du lait dans l'Orge mondé, & il n'en devient que plus agréable; mais alors il ne vaut rien dans la fiévre. L'Orge mondé doit être choifi nouveau, bien mondé de fa peau & de Les extrêmitez, bien nourri, blanc & fec.

5°. L'Orge fert encore à faire l'Orgeade ou Orjat, qui eft une eau d'Orge que les Limonadiers vendent vingt fols la pinte, & où il entre de la semeuce de Melon, du fucre & quelque eau de fenteur.

IV. Culture de l'Avoine. Les grandes rigueurs de l'Hyver étant paffées, pour peu que la terre paroiffe traitable, on commence à femer l'Avoine qui eft celui de tous les grains qui craint moins le froid; on le féme ordinairement vers la mi-Février, car Avoine de Février remplit le grenier. Si néanmoins la terre étoit trop humide lors de la femaille, il faudroit la différer; finon il se perdroit plus de la moitié de la femence: hors ce cas, plûtôt on fémera ce grain, moins il en faudra & plus la récolte en fera abondante, parce qu'il aura plus de temps à multiplier : il en faut huit boiffeaux & demi ou neuf pour femer un arpent.

L'Avoine aime affez les lieux maigres, fecs & bien airez; & quand elle a de l'eau après la femaille, elle en devient beaucoup plus belle & plus touffue. Il faut que les terres où on la féme ayent été recaffées, c'est-àdire qu'elles ayent eu un premier labour après la récolte des Bleds, avant l'Hyver, afin que le chaume ait le temps de s'y confommer; cette façon fait meurir la terre pendant l'Hyver, & la rend plus meuble pour le Printemps; on lui donne le second labour avant de femer l'Avoine.

Si c'eft en terre forte que vous la mettez, il ne faut jamais la femer deffous, c'est-à-dire que dans ces fortes de terres il ne faut point employer la charue pour recouvrir & enterrer l'Avoine qu'on y a fémé, le poids & les dents de la herse suffisent; mais dans les terres legeres, on a le choix d'enterrer le grain avec la charuë ou la herse.

Quand les Avoines font levées, ce qui eft ordinairement vers la mi-May, on les roule, c'eft-à-dire on les abat, on les adoucit, ou comme quelquesuns difent, on les douçoie avec un cylindre ou rouleau de bois qu'un cheval traîne fur toute la piece d'Avoine, pour caffer les mottes de terre & refouler le plant; on donne cette façon, parce qu'elle rechauffe le plant en terre, ce qui lui donne une nouvelle vigueur qui le fait multiplier plus vîte & rapporter davantage.

Il faut avoir le foin de faire auffi farcler & échardonner les Avoines, elles font fort fujettes aux chardons.

Le Froment n'eft pas le feul grain qui dégénere, la même chose arriva à l'Avoine dans les terres froides qui ont beaucoup de fels, tels que font ordinairement les Prez nouvellement défrichez; l'Avoine y vient forte &

nombreuse, parce que l'humidité & les fels qui abondent, font d'abord une belle plante; mais comme il n'y a point affez de chaleur pour la perfectionner, parce que la froideur du terrain domine, cette plante n'eft qu'une Avoine folle, qui donne beaucoup d'épis & de belle paille, mais point de grain, ou fi peu qu'on n'en peut pas tirer pour les Chevaux ni pour la Volaille: c'eft pourquoi il faut amander une pareille terre par des fumiers chauds, ou y mettre des grains qui y viennent mieux que l'Avoine.

Quand on bat de l'Avoine pour l'employer en femence, il faut prendre garde qu'elle n'ait point été échauffée dans le tas, parce qu'en ce cas elle ne vaudroit rien pour la multiplication.

V. Culture de l'Orge. L'Orge dégraiffe extrêmement le fond où on le feme; c'eft pourquoi les bons economes n'en mettent qu'environ la vingtiéme partie de leurs terres ; & on fixe affez fouvent par les Baux la quantité que le Fermier en pourra employer en Orge par chaque fole. Ce grain réüffit fort bien dans celles qui font legeres, & dans les fortes & fablonneuses; il est sujet à se changer en Avoine, ou en Ivraie, dans celles qui font humides.

Comme il craint le froid, on ne le feme que vers le quinze Avril, pour en achever la femaille à la faint George; car à la faint George (difent nos Anciens ) feme ton Orge, à la faint Marc il eft trop tard; il n'auroit pas affez de temps pour multiplier : le Champ doit en être bien amandé, bien labouré & bien meuble ; & il faut le femer par un temps fec & clair, & jamais par un temps mou, à la difference du Froment. Dans les Païs chauds, on le féme dès le treize Janvier; on met environ huit boiffeaux d'Orge pour enfemencer un arpent. On augmente ou on diminuë la quantité de la femence, fuivant la qualité de la terre & fuivant la faifon & le temps, comme nous l'avons dit pour la femaille des Bleds. Au furplus il y faut obferver la même chofe que pour l'Avoine.

VI. Récolte de l'Avoine & de l'Orge. Ordinairement, après que le Seigle eft moiffonné, on fauche l'Orge; il ne faut pas le laiffer meurir trop, parce qu'il féche aifément, & ayant le tuyau foible, il verfe ou s'égrene bien vite.

On ne dépouille l'Avoine qu'après l'Orge, même après les Bleds, affez fouvent fur la fin d'Août : il vaut mieux fcier que faucher les Avoines, parce que le fauchage en égrene beaucoup par la chaleur. Quand elles font foyées ou fauchées, on les laiffe quelque temps javeller fur le Champ, jufqu'à ce que, par la rofée ou par la pluie, le grain commence à noircir: alors on écochète l'Avoine, c'est-à-dire on la ramaffe par tas avec des fourches ou fauchets, & de ces tas on en fait les gerbes. Un bon arpent d'Avoine peut rapporter cent gerbes qui peuvent rendre trois feptiers mine: l'arpent d'Avoine le plus médiocre, peut rapporter trente gerbes qui peuvent

rendre trois mines.

Le meilleur moyen pour conferver l'Avoine & l'Orge, c'eft d'y mettre des feuilles de Laurier. Il faut bien cribler & épouffeter l'Avoine avant de la donner aux Chevaux, & fur-tout la bien flairer, pour fçavoir fi elle n'a point le goût des rats ou le relan, parce qu'il dégoûte fort les Chevaux.

CC.cc iij

« AnteriorContinuar »